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Chapitre I : Synthèse bibliographique

4. Oxydation des composites (Hf/Zr)B 2 -SiC

4.3. Comportement sous air des composites (Hf/Zr)B 2 -SiC

4.3.2. Formation des différentes couches

D’après les résultats présentés dans les Tableau I - 3 et Tableau I - 4, l’oxydation des

composites (Hf/Zr)B

2

-SiC entraîne la formation de plusieurs couches oxydées, notamment

une phase vitreuse en surface et une zone déplétée en SiC en profondeur. Leur formation sera

détaillée dans cette partie.

4.3.2.1. Formation et évolution du verre en surface

L’équation (Eq. I - 2) et le diagramme de la Figure I - 6 montrent que, dans certaines

conditions, la réaction entre le carbure de silicium et l’oxygène moléculaire entraîne la

formation de silice vitreuse. L’oxydation des diborures conduit, quant à elle, à la croissance

de MeO

2(s)

et de B

2

O

3(l,g)

. La Figure I - 10 montre que les deux oxydes liquides, SiO

2(l)

et

B

2

O

3(l)

coexistent entre 1143 K et 1973 K. Comme il a été vu précédemment, certains auteurs

[21], [46] affirment que ce mélange forme un verre borosilicaté. Ce verre possède de meilleures

caractéristiques que le sesquioxyde de bore liquide, à savoir une température de fusion et une

viscosité supérieures associées à une pression de vapeur et une diffusion de l’oxygène plus

faibles [45]. Ceci montre que le verre borosilicaté est plus protecteur vis-à-vis de l’oxygène

que le B

2

O

3(l)

seul. Zhang et al. [74] affirment que la couche externe, constituée de silice, est

alimentée par le transport de B

2

O

3(l)

issu de l’oxydation de ZrB

2

dans la sous-couche.

Celui-ci remonterait en surface grâce à un gradient de température ou de potentiel chimique.

D’autres auteurs [32] certifient que les verres à base de bore et de silicium et contenant des

oxydes provenant de métaux de transition des groupes IV-VI, présentent une forte tendance à

la séparation de phase, c’est-à-dire à l’immiscibilité. Ces systèmes seraient caractérisés par

une forte élévation de la température du liquidus et de la viscosité. Une augmentation de la

viscosité limiterait la diffusion de l’oxygène à travers la couche d’oxyde en surface et

freinerait la volatilisation de B

2

O

3(g)

. La séparation de phase serait donc un facteur clé dans la

protection contre l’oxydation de céramiques non-oxydes.

La concentration en sesquioxyde de bore liquide dans le verre borosilicaté entre

1573 K et 1773 K ainsi que le gradient de composition formé pendant la volatilisation de

B

2

O

3(g)

ont été déterminés par Shugart et al. [81]. Une forte quantité de B

2

O

3

piégée dans le

verre borosilicaté (27–43 %mol.) et une diminution de cette valeur avec l’élévation de

température ont été mises en évidence dès 1573 K. Le coefficient de diffusion du bore dans le

verre borosilicaté a été estimé à 10

-10

cm².s

-1

et 10

-13

cm².s

-1

pour les compositions riches en

B

2

O

3

et en SiO

2

, respectivement. Quelle que soit sa composition chimique, le verre est localisé

en surface des matériaux oxydés. Plusieurs études montrent que des cristaux d’oxydes MeO

2(s)

(Me = Hf ou Zr) alimentent ce verre et augmentent sa viscosité [82].

Comme il a été vu précédemment, plusieurs auteurs [20], [53], [83], [84] recensent la

présence de traces de bulles éclatées en surface. D’après Gangireddy et al. [83], la formation

de bulles en surface des composites ZrB

2

+ 15 %vol. SiC est associée à une température de

1723 K, dès 1 min d’exposition. Ils expliquent que, thermodynamiquement, la présence d’une

source gazeuse est nécessaire pour la formation de bulles, à savoir majoritairement CO

(g)

dans

ces conditions de températures. La pression du gaz doit être suffisamment élevée pour que les

bulles se développent et lorsque cette dernière est supérieure à la pression atmosphérique,

l’éclatement des bulles se produit. Il est à noter que la formation de bulles est facilitée par la

faible viscosité du verre borosilicaté présent en surface.

Par ailleurs, Williams et al. [28] affirment que la structure globale de l’oxyde est régie

par les mécanismes gouvernant la formation de la couche externe et de la couche déplétée en

carbure de silicium. En effet, ils ont montré que la croissance de ces deux couches distinctes

est corrélée et qu’elles sont responsables du caractère passivant du matériau.

4.3.2.2. Formation de la couche déplétée

C’est en 1975 que la couche déplétée en SiC est, pour la première fois, identifiée dans

les composites HfB

2

-SiC et ZrB

2

-SiC [31]. L’étude des travaux présentés dans la littérature,

depuis les années 1970s, montre que la formation de la couche déplétée en SiC dépend à la

fois de la pression et de la température. En effet, alors que certains auteurs [31] notent la

présence de cette zone à 1673 K sous des pressions partielles d’oxygène réduites

(𝑃

𝑂2

= 3,6.10

-4

Pa), d’autres [85] affirment qu’elle n’apparaît qu’à partir de 1873 K, à pression

atmosphérique (𝑃

𝑂2

= 2.10

4

Pa). Shugart et al. [85] précisent, qu’en-dessous de 1873 K, des

temps de maintien prolongés de la température ne favorisent pas la formation de cette couche.

En revanche, dès 1873 K, les auteurs [85] affirment que ce facteur peut agir sur son épaisseur.

De plus, le rôle de la température sur la croissance de la zone déplétée a été mis en évidence

par Gasch et al. [38]. Ils observent une augmentation nette de son épaisseur lors du chauffage

(2 µm à 1963 K contre 740 µm à 2633 K).

Le rôle de la pression sur la formation de la couche déplétée est présenté par

Fahrenholtz [77] en 2007, suite à une étude portant sur sa justification thermodynamique lors

de l’oxydation de ZrB

2

-SiC. L’auteur s’est notamment appuyé sur l’analyse des diagrammes

de volatilité de ZrB

2

et de α-SiC. Ceux-ci permettent de mieux comprendre les interactions

gaz-solide et, dans le cas de l’oxydation, de connaître la stabilité des couches d’oxydes à très

haute température. Le diagramme de volatilité du système Si-C-O à 1773 K prédit notamment

la formation de SiO

2(l)

en surface. L’auteur ajoute qu’un gradient de pression partielle

d’oxygène existe dans la couche d’oxyde et qu’il est responsable de la formation d’une couche

déplétée en SiC. Comme dans plusieurs autres travaux [46], [85], il explique que celle-ci est

due à l’oxydation active du SiC en profondeur, provoquant, comme le prédit l’équation (Eq. I

- 6), une volatilisation de SiO

(g)

. Expérimentalement [46], cette hypothèse a été vérifiée par

analogie entre la morphologie des pores présents dans cette zone et celle des grains de SiC de

départ. Le modèle établi par Fahrenholtz précise que la 𝑃

𝑂2

à l’interface couche

déplétée/matériau sain doit être inférieure à 1,8.10

-11

Pa pour permettre le transport de SiO

(g)

.

Dans le cas où elle est supérieure à la 𝑃

𝑂2

de l’équilibre SiC-SiO

2(l)

(8,7.10

-13

Pa), une couche

de SiO

2(l)

devrait se former au-dessus du matériau non-oxydé.

La formation et la croissance de la couche déplétée en SiC dans les composites ZrB

2

-SiC dépendraient non seulement des conditions de pressions et de températures [77], [85],

mais également de la distribution du SiC dans la matrice MeB

2

. Hu et al. [86] expliquent que

cette couche n’existe que si les grains de SiC s’organisent selon un réseau tridimensionnel

interconnecté. L’oxydation active décrite par Fahrenholtz [77] entraîne la formation et la

volatilisation de SiO

(g)

et modifie significativement les mécanismes d’oxydation des

composites MeB

2

-SiC. Plus précisément, l’oxydation active du SiC devient prépondérante

devant celle de MeB

2

[86]. Ainsi, la vitesse de formation d’hafnie poreuse et de silice diminue

au profit de la formation d’oxyde de silicium gazeux. Ce phénomène induit donc l’apparition

de pores. Or, l’oxydation active de SiC organisé selon une matrice interconnectée, génère une

porosité elle-même interconnectée, favorisant la diffusion des espèces volatiles (O

2(g)

, CO

(g)

et SiO

(g)

). Finalement, la formation, en profondeur, de cette porosité structurée ainsi que le

ralentissement de l’oxydation de MeB

2

favorisent la croissance de la couche déplétée en SiC.

Plusieurs résultats expérimentaux [20], [37], [75] confirment cette hypothèse en affirmant que

celle-ci ne se forme que dans le cas où la quantité initiale de SiC est élevée (20 et 50 %vol.),

favorisant ainsi la formation d’un réseau tridimensionnel interconnecté de grains de carbure

de silicium. Zhang et al. [74] ont d’ailleurs montré que l’épaisseur de la couche déplétée

augmente avec le pourcentage volumique de SiC.

Des mécanismes de formation de cette zone ont été proposés par Li et al [79]. Ils

précisent qu’à l’interface entre la couche d’oxyde et le matériau non-oxydé, l’oxygène est

d’abord transporté à travers les joints de grains, puis réagit avec les grains de SiC.

Progressivement, les grains du carbure de silicium disparaissent à cause de leur oxydation

active, laissant une couche constituée uniquement de borure de zirconium et de pores. Les

canaux générés par cette porosité facilitent le transport de l’oxygène et donc la consommation

du matériau.

En résumé, la formation de la couche déplétée reposerait sur l’oxydation active du

carbure de silicium, uniquement si celui-ci est organisé selon un réseau tridimensionnel

interconnecté [86]. Cette structure particulière n’est possible que si la quantité initiale de SiC

est élevée (20 et 50 %vol.) [20], [37], [75]. La présence de cette zone appauvrie au sein de la

couche d’oxyde dépend donc de la pression partielle d’oxygène [31], [77], [85]. Sa croissance,

quant à elle, serait influencée par la température [38] et le temps de maintien à partir de 1873 K

[85]. D’un point de vue structural, la couche déplétée est constituée de MeO

2(s)

[28], [46], [74],

[75] ou MeB

2(s)

[20], [22], [79], ainsi que de pores [46], suite à la formation de SiO

(g)

. Cette

porosité générée perturbe la couche et peut causer une destruction partielle ou totale du

matériau. Sa présence peut donc contraindre la protection contre l’oxydation de la couche

d’oxyde en surface des matériaux MeB

2

-SiC.