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4. Discussion

4.5. Forces et limites

Cette étude fait partie d’un projet d’envergure et sa première force réside dans la collaboration entre le centre de recherches et les directions jeunesse et de la protection de la jeunesse du CIUSSS-CSIM où se déploie le programme. Ces dernières suivent, en effet, attentivement, le processus de réalisation de l’étude, supportent l’implantation du programme et souhaitent mettre à profit les réflexions et connaissances qui en ressortiront pour bâtir de nouvelles modalités d’intervention. Elles en facilitent la réalisation avec la mise à disposition de personnel qui aide à l’organisation des différentes phases de la recherche et permet l’accès aux lieux et aux usagers Ainsi, un grand nombre d’intervenants a pu être rejoint et ce, dans de nombreuses unités. Le devis utilisé permet, par ailleurs, de limiter des biais comme celui d’autosélection et l’informatisation des questionnaires facilite leur réalisation. L’efficacité de l’application des plans établis avec le participant est suivie et l’ensemble des acteurs est inclus grâce au déploiement des deux programmes Stress et compagnie© et Déstresse et progresse©.

La première limite réside dans le fait, comme cela a déjà été mentionné, que le taux d’abandon fait perdre de la puissance statistique et de la représentativité. Il atteint jusqu’à 37% à T1 et 53% à T2. Bien que ces taux soient similaires à l’abandon constaté à T1 dans l’étude de Zetterqvist et al. (2003) avec un taux de 37% pour un programme de 8 à 10 semaines et dans l’étude de Lange et al. (2003) avec un taux de 36% pour un programme de 5 semaines, ils restent, toutefois, un biais qui affecte la portée des résultats. En effet, ce biais lié aux caractéristiques des participants ayant abandonné est bien présent et nos participants ayant abandonné montrent à la mesure initiale T0, des niveaux de stress, d’épuisement émotionnel et de déshumanisation plus élevés que ceux ayant poursuivis. Après la passation du programme, les données sur lesquelles se basent nos résultats sont donc limitées à des intervenants vivant moins de difficultés. Pour diminuer ce taux d’abandon, des interactions plus poussées entre le terrain et les équipes de recherche pourraient avoir lieu avec un rappel plus grand des temps de mesure, une rétroaction personnalisée plus poussée et du temps alloué pour la passation par la direction. Le nombre de mesures pourrait être diminué également. La durée pour compléter chaque temps de mesure, estimée à 70 minutes, peut, en effet, avoir favorisé l’abandon, la charge pouvant paraitre trop importante en plus des tâches habituelles à effectuer et sans contrepartie matérielle. D’ailleurs dans une phase de déploiement ultérieure, les gestionnaires dégagent du temps à même les activités professionnelles pour réaliser les étapes de l’étude.

Une deuxième limite pourrait concerner les outils de mesure et les propriétés psychométriques propres à chacun. Les périodes de référence indiquées pour répondre ne sont pas similaires, faisant référence aux derniers mois, au mois précédent ou à la période actuelle, ce qui peut entrainer de la confusion et avoir un impact sur la véracité de la référence aux temps de mesure recueillis. Il n’y a, par ailleurs, pas de seuil critique officiel, il est donc difficile de déterminer, à la vue des résultats aux questionnaires si les scores indiquent des niveaux critiques pour la santé mentale des intervenants. De manière spécifique pour la PI, il existe plusieurs autres outils créés et validés pour sa mesure comme le DANVA (Diagnostic analysis of nonverbal accuracy) de Nowicki et Duke (1994) ou le GERT (Geneva emotion recognition test) de Schlegel, Grandjean et Scherer (2014). Or, suivant l’outil utilisé, les scores obtenus peuvent varier sensiblement. Il a pu être constaté, par exemple, qu’il n’y avait pas de corrélation significative entre les scores totaux du Mini PONS et du DANVA (Bänziger, 2011). Ainsi, dans l’étude d’une même notion, le choix d’un outil ou d’un autre peut donner des résultats différents et peut ne pas mesurer tout à fait la même chose. Le mini-PONS a l’avantage d’être un outil qui tente d’intégrer différents canaux de communication permettant ainsi l’étude globale et différenciée de l’habileté à identifier le comportement non verbal d’autrui. Cependant, des auteurs comme Svidén (1990), se référant au PONS, questionnent la pertinence de cet outil quand il s’agit de mesurer cette habileté dans un contexte naturel et l’absence de lien retrouvée avec des mesures d’empathie.

Des temps de mesure supplémentaires pour suivre l’évolution à plus long terme pourraient être intégrés, même si dans la réalité des milieux à l’étude, cela semble difficile. Concernant le stress, il aurait été intéressant d’inclure la mesure physiologique du stress (cortisol basal salivaire) effectuée dans Iso-Stress car elle ne présente pas les mêmes biais que les questionnaires. Cela n’a pu être fait pour des raisons d’ampleur du travail et de délai d’analyses. La mesure du cortisol est utile pour connaitre la réponse physiologique à des stresseurs et offrir plus de support aux personnes les plus à risque de développer des problèmes. C’est le cas notamment chez les enfants qui entrent en garderie ou dans une nouvelle école, à un âge où ils peuvent difficilement exprimer clairement leur ressenti (Quas, Murowchick, Bensadoun, & Boyce, 2002; Bruce, David, & Gunnar, 2002). L’axe HHS est reconnu également comme étant perturbé dans plusieurs affections somatiques ou la dépression (Goodyer, Park, & Herbert, 2001). Il faut néanmoins être prudent dans l’utilisation de cette mesure et ne pas en faire un outil de décision clinique car la production de cortisol peut être influencée par de nombreuses variables (Jessop & Turner- Cobb, 2008; Adam, Sutton, Doane & Mineka, 2008).

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