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PARTIE 3 Etudes ancillaires

4.1.2 Forces et limites

Les principales forces de l’essai PRALIMAP sont le design expérimental, le nombre élevé d’adolescents inclus et ayant complété le suivi de 2 ans (plus de 3 500) et la complétion du suivi de 2 ans par les 24 lycées initialement sélectionnés.

PRALIMAP a deux principales limites : le biais de sélection et le choix des critères de jugement.

 Biais de sélection

La comparaison des caractéristiques sociodémographiques des participants et des non-participants à T0 a permis de mettre en évidence certains biais de sélection, notamment l’âge de l’adolescent, le type et le département du lycée et la profession et catégorie socioprofessionnelle du responsable de famille (PCS). Ces caractéristiques ont été comparées par la suite entre les adolescents retenus pour l’analyse en ITT (les completers) et les adolescents non retenus afin de s’assurer de la pertinence de ces critères en tant que facteurs d’ajustement potentiels dans les modèles hiérarchiques qui estimeront l’effet des stratégies sur les critères de jugement. En plus de ces caractéristiques, d’autres caractéristiques initiales, bien connues dans la littérature comme pouvant influencer certains critères de jugement, ont également été comparées (sexe et scores élevés de trouble de comportement alimentaire, d’anxiété ou de dépression).

Les adolescents retenus pour l’analyse en ITT étaient initialement plus souvent : plus jeunes, des filles, des enfants dont le responsable de famille était de haut niveau social (Agriculteur, cadres ou de professions intermédiaires), avec un score faible de troubles du comportement alimentaire et un score faible de dépression.

Les critères socio-économiques (tel que la PCS du responsable de famille) sont d’autant plus importants à prendre en compte dans la recherche sur les stratégies efficaces de prévention

nutritionnelle qu’ils permettent d’apprécier les inégalités sociales qui ont un impact négatif sur la prévalence du surpoids et de l’obésité. Une analyse spécifique des critères de jugement en fonction de la PCS du responsable de famille a été réalisée dans PRALIMAP pour évaluer ces inégalités sociales chez les adolescents et a fait l’objet d’une communication dans la Lettre n°1 « Santé Publique à Nancy » en 2010 (Annexe 1.6):

Bonsergent E, Briançon S, avec la collaboration du comité de coordination PRALIMAP. Evolution de la

santé nutritionnelle des adolescents en Lorraine. Lettre n°1 "Santé Publique à Nancy". 2010 Dec;8p.

Cette analyse spécifique a permis de démontrer que, chez les adolescents, les inégalités sociales en santé nutritionnelle sont nettes mais ne se creusent pas pendant les années lycée sauf chez les adolescents dont le responsable de famille ne travaille pas. Les adolescents dont le responsable de famille est de faible niveau social (employé, ouvrier, retraité ou autre sans activité professionnelle) sont plus fréquemment en surpoids ou obèses à l’entrée au lycée avec une diminution, de même niveau que chez les adolescents dont le responsable de famille est de PCS favorisée, à l’entrée en terminale (passant de 21% à 19,6%), ils ont également de moins bonnes connaissances des recommandations nutritionnelles du PNNS et ils les suivent moins souvent. Ce facteur de variation n’était donc pas à négliger par la suite dans l’analyse des effets des stratégies sur les critères de jugement.

Finalement, le processus de sélection pour l’analyse en ITT est peu important et porte surtout sur des caractéristiques sociodémographiques et sur des caractéristiques psychologiques qui sont de façon traditionnelle liées au changement de filière à l’issue de la classe de seconde. La sélection n’est pas liée à la corpulence à l’entrée en seconde. La principale conséquence de cette sélection est la perte de puissance. En effet, le nombre de sujets calculé initialement était 5 475, mais les mouvements des adolescents scolarisés au lycée sont très importants surtout entre la classe de seconde et la classe de première, et ce, indépendamment de l’essai PRALIMAP, et pour des raisons logistiques, il était difficile de suivre les adolescents changeant de filières et/ou de lycées voire même d’académie. Les résultats ont donc été analysés sur un échantillon plus petit qu’initialement prévu pouvant entrainer une réduction de la puissance de l’essai. Cette réduction de puissance pourrait expliquer en partie la non-significativité de l’effet des stratégies Education et Environnement sur les critères de jugement principaux, néanmoins, étant donné le design de l’essai et le résultat significatif observé pour la stratégie Dépistage, cette explication n’est pas vraiment valide. Par contre, le manque de puissance

peut expliquer la non-significativité de l’interaction entre les stratégies du fait du nombre trop faible d’adolescents par bras de randomisation. De ce fait, l’effet de l’association entre les stratégies est difficilement interprétable.

 Critères de jugement

Les résultats observés de l’effet des stratégies sur l’évolution des mesures anthropométriques confirment quelques aspects méthodologiques discutés auparavant (partie 1, paragraphe 1.1.1), notamment pour le z-score de l’IMC et la prévalence du surpoids et de l’obésité. En effet, étant donné qu’il s’agit de deux critères de corpulence estimés à partir de la même mesure, l’IMC, des résultats sensiblement similaires sont attendus. Or, dans l’essai PRALIMAP, des résultats différents ont été observés pour ces deux critères de jugement. En effet, alors que l’évolution sur les 2 années du z-score de l’IMC était significative indépendamment de la stratégie attribuée, l’évolution de la prévalence du surpoids et de l’obésité n’était significative que dans les 12 lycées ayant bénéficié de la stratégie Dépistage. Cette différence de résultats pour le z-score de l’IMC et la prévalence du surpoids et de l’obésité peut s’expliquer par les populations de référence utilisées pour estimer ces critères donnant des valeurs de références différentes. Une des solutions pour remédier à ce problème serait de ne retenir que l’évolution de l’IMC moyen, indépendant de références et donc d’erreur de classement mais qui est parfois considéré comme non adapté pour évaluer la corpulence chez les enfants et les adolescents [18,25,26,135,136], comme il augmente naturellement avec l’âge. L’objectif dans un essai comme PRALIMAP est donc de mettre en évidence une augmentation moindre de cet indicateur entre le groupe intervention et le groupe contrôle. D’autre part, le périmètre abdominal est un critère important à prendre en compte dans les recherches interventionnelles en prévention du surpoids et de l’obésité car il est un bon indicateur de la masse grasse intra-abdominale qui est associée au risque de maladie cardiovasculaire et de maladies chroniques [137]. Cependant, dans PRALIMAP, le périmètre abdominal n’a pas pu être retenu comme critère de jugement du fait de la trop forte ressemblance des mesures de ce critère dans un même lycée. Cette trop forte ressemblance s’explique principalement par la méthode de recueil retenue pour la mesure du périmètre abdominal. En effet, dans PRALIMAP, il y avait un observateur par lycée, en l’occurrence l’infirmière de l’Education Nationale de chaque lycée. Etant donné le fort effet-observateur mis en évidence dans la littérature [120] pour la mesure de ce critère de jugement, autrement une mesure dépendante de l’observateur lui-même et non uniquement de l’individu mesuré, la mesure de ce critère est très liée au cluster d'où la forte ressemblance intra-cluster. Un moyen de limiter cette ressemblance serait que plusieurs observateurs extérieurs aux lycées réalisent les mesures du périmètre abdominal en s’intervertissant dans les lycées d’un temps de mesure à l’autre, ceci entrainant une variabilité équivalente intra et inter-lycées.

Concernant l’évolution des comportements nutritionnels, très peu d’effets ont été mis en évidence. Cela peut principalement s’expliquer par l’outil utilisé pour mesurer ces comportements. En effet, les comportements nutritionnels et plus particulièrement la détermination du suivi ou non des recommandations nutritionnelles du PNNS ont été estimés à partir d’un questionnaire ad-hoc : le questionnaire Boire-Manger-Bouger. Ce questionnaire présentait l’avantage principal d’être ergonomique et rapide à remplir pour un public aussi particulier que représentent les adolescents. L’inconvénient de cet outil est qu’il permet seulement d’estimer une fréquence de consommation moyenne par jour des différents type d’aliments proposés (fruits, légumes, viandes, produits laitiers…) et donc aucune information sur la quantité (grammes) et la qualité (banane, pomme, fraise…) des aliments ne peut être obtenu. Ceci pourrait expliquer pourquoi par exemple nous obtenons un résultat favorable de la stratégie Dépistage sur la prévalence du surpoids et de l’obésité sans évolution positive des comportements nutritionnels en parallèle, les adolescents ayant changé positivement de corpulence mangeant peut-être des aliments de meilleure qualité nutritive sans pour autant changer leur fréquence de consommation.

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