• Aucun résultat trouvé

7. Discussion

7.3. Forces et limites de l‘étude

Comparativement aux autres études, les deux bases de données utilisées comprenaient un important nombre de participants autant hommes que femmes et représentent une opportunité exceptionnelle qui nous a permis d‘étudier la relation entre taille et cancer du poumon exclusivement dans un seul groupe ethnique. Nous avons également l‘avantage indéniable de considérer l‘existence de ce risque pour des différentes cohortes de générations différentes chez les hommes québécois soit pour ceux âgés de 35-70 ans entre 1979-1986 et 35-75 ans entre 1996-2002. Ce qui nous permet de valider nos propres résultats au sein de la même population.

Aussi dans ces populations, nous avons pu observer la tendance d‘augmentation de la taille entre les générations. Les hommes participants de l‘étude I étaient moins grands comparés à ceux de l‘étude II. Ceci serait dû aux modifications des conditions socioéconomiques, particulièrement la nutrition et à la maturation avancée des jeunes dans la société.72,136 Par ailleurs, il nous faut aussi noter qu‘en plus de l‘important nombre de cas et témoins dans les deux études, la couverture de la presque quasi-totalité des cas (98%) survenus dans les 18 grands hôpitaux sur le territoire montréalais est très appréciable. Des analyses stratifiées selon l‘intensité du tabagisme ont permis de confirmer les résultats des études antérieures qui montraient que les femmes non- fumeuses et fumeuses légères ont un risque plus élevé de cancer et les analyses selon le sous-type histologique de la tumeur semblent suggérer une association inverse chez les hommes de 170-177 cm versus < 170 cm pour le carcinome à petites cellules. Ce dernier résultat est un nouvel élément apporté par notre étude dans la littérature sur l‘étiologie du cancer de poumon. Notre étude est en effet la première à examiner l‘association entre

98 taille à l'âge adulte et sous-types histologiques. Le fait qu‘elle suggère une association inverse pour les hommes pour un sous-type en particulier informe sur une nouvelle dimension qui appelle à d‘autres investigations plus poussées pour valider ce résultat et élucider les mécanismes qui seraient impliqués.

Par ailleurs les analyses de sensibilité qu‘on a effectuées, ont aussi permis de confirmer que l‘utilisation de la taille auto-rapportée en incluant les répondants substituts dans les analyses n‘affecte pas de façon importante les risques relatifs estimés.

Lorsqu‘il s‘agit des informations manquantes sur des variables aussi importantes dans cette étude comme la taille ou le tabagisme, les observations ont simplement été exclues des analyses. Pour d‘autres variables comme le poids, nécessaire pour la construction de la variable IMC, le pourcentage des données manquantes étant inférieur à 6%, une imputation basée sur la valeur moyenne associée au sexe, au groupe d‘âge et au statut de cas ou de témoin du répondant leur a été assignée.

7.3.1. Précision

S'agissant de la précision des analyses, malgré la restriction des données uniquement aux répondants d‘origine ethnique canadienne française, les risques relatifs estimés sont demeurés précis pour les analyses principales. Par contre, dans la stratification selon l‘intensité du tabagisme, nous avions dû catégoriser les non-fumeurs avec les fumeurs légers (situés sur le premier quintile de l‘index de tabac CSI) d‘une part et les fumeurs modérés avec les grands fumeurs (situés sur les 4 quintiles les plus élevés de l‘index de tabac) d‘autre part. Or, la proportion des non-fumeurs, particulièrement chez les cas dans les deux bases de données est au départ très faible. Lorsque le risque du cancer de poumon est estimé selon les catégories de la taille, la précision des risques relatifs pour le groupe des non-fumeurs/fumeurs légers a été affectée. Ceci est également observable dans la stratification selon les sous-types histologiques. Malgré le nombre important des cas et témoins dans l‘étude, la restriction selon l‘ethnicité aux canadiens français a réduit les effectifs des cas de façon importante dans les analyses plus fines. Ceci s‘observe au niveau des effectifs des cas et témoins et à l‘étendue des intervalles de confiance.

99 7.3.2. Biais d’information

Dans cette étude, les données relatives à la taille sont rapportées par le répondant lui-même (dans la plupart des cas) ou par son répondant substitut. Même si plusieurs études ont observé une forte corrélation entre la taille mesurée et celle auto-rapportée, ces études soutiennent que l‘auto-rapport mène à une surestimation de la taille moyenne des participants.121-123,126 Ceci plus particulièrement lorsque le répondant substitut ne connait pas avec exactitude la taille du cas ou du témoin qu‘il représente. Toutefois, lors de la collecte des données, aucune emphase n‘a été mise sur la taille et les participants n‘avaient pas nécessairement un souci de complaisance sociale qui les aurait menés à surestimer leur taille. Ainsi, la littérature soutient que les données anthropométriques auto-rapportées demeurent valides et utilisables.125,126,128 D‘ailleurs, l‘analyse de sensibilité portant exclusivement sur les personnes ayant répondu par elles-mêmes a indiqué que les données des répondants substitut n‘affectent pas les estimés obtenus entre taille à l‘âge adulte et risque de cancer de poumon.

7.3.3. Biais de sélection

Le souci de limiter le biais de sélection a été pris en compte dès la conception des deux études. Il est en effet important de rappeler que la sélection des cas s‘est fait avec les registres des hôpitaux en assurant la couverture de la quasi-totalité des diagnostics survenus dans les 18 grands hôpitaux situés sur l‘ile de Montréal. Ceci a permis de couvrir plus de 98% de la zone d‘étude. Plus important, les témoins sélectionnés et appariés aux cas, proviennent également de la même base populationnelle. Ce type de sélection minimise le biais de sélection.173

Cependant, l‘observation des taux de réponse différents chez les cas et les témoins dans les deux études peut mener à penser que les cas et témoins éligibles mais qui ont refusé de participer sont peut-être différents des participants. Même si c‘est le cas, la variable d‘exposition étudiée qui est la taille, comporte une prévalence quasi globale et on ne peut avancer que les non-participants sont forcément des personnes susceptibles d‘avoir une taille physique plus grande ou plus petite. De plus, la distribution de la taille basée sur les témoins de l‘étude est similaire à la distribution de la taille de la population

100 québécoise publiée dans la littérature pour les mêmes générations.130 Ceci suggère que les échantillons des témoins ayant participé dans cette étude ne sont pas biaisés.

7.3.4. Biais de confusion

La possibilité de pouvoir contrôler pour le tabagisme en utilisant un index validé (CSI) dans la littérature et prouvé comme meilleure variable à utiliser dans nos études est une plus-value pour le contrôle la principale variable de confusion qu‘est le tabagisme pour le cancer du poumon. D‘ailleurs, considérant le fait que notre hypothèse explore le rôle de la taille physique dans l‘occurrence du cancer du poumon à travers les conditions de vie durant l‘enfance, on a aussi été capable d‘inclure spécifiquement l‘intensité du tabagisme durant l‘adolescence dans un des modèles au lieu du CSI qui représente le tabagisme total au cours de la vie du répondant. Dans nos analyses, la variable CSI offrait le meilleur ajustement selon le critère d‘Akaike comparativement au tabagisme durant l‘adolescence et à l‘inclusion des variables individuelles du tabagisme telles que le statut de fumeur, le nombre de paquets fumés, la durée et le temps passé depuis la cessation.Aussi, l‘utilisation d‘un cadre conceptuel qui considère tous les facteurs de confusion potentiels qu‘on retrouve dans la littérature notamment ceux liés à la taille comme les conditions de vie dans l‘enfance et l‘ethnicité ou ceux liés au cancer du poumon comme le tabagisme et l‘exposition aux carcinogènes chimiques professionnels, constitue une force pour cette étude. D'ailleurs notre capacité de pouvoir restreindre nos analyses aux québécois d'origine canadienne française, éliminant de ce fait un potentiel biais de confusion résiduelle est à mentionner; particulièrement dans un contexte nord-américain où le multiculturalisme prévaut grandement. En effet, près de 70% des participants hommes et femmes dans les deux bases d‘études sont d‘origine ethnique canadienne française. La subdivision de la variable en deux ou trois catégories n‘est pas réaliste puisqu‘on ne peut fondamentalement pas combiner les autres groupes ethniques dans une seule catégorie à cause de la variation de leur taille moyenne.6