• Aucun résultat trouvé

Chapitre  I   : Les infections respiratoires

B.   Infection respiratoire d’origine bactérienne : Exemple de l’infection par Streptococcus

V. Fonctions endocrines du tissu adipeux blanc 63

Ainsi que nous l’avons évoqué en introduction à ce Chapitre, depuis la découverte de la leptine (Zhang et al., 1994), de nombreux autres facteurs sécrétés par le tissu adipeux ont été décrits, permettant de considérer le tissu adipeux blanc comme un véritable organe endocrine interagissant avec les autres organes/tissus comme les muscles, le foie, les intestins, le pancréas ou le cerveau, régulant ainsi de nombreuses fonctions physiologiques (Lago et al., 2009) (Figure 17).

Les sécrétions majeures du tissu adipeux sont la leptine et l’adiponectine ; toutes deux produites par les adipocytes (Ahima et Flier, 2000). La sécrétion des cytokines pro- ou anti-inflammatoires est également assurée par des cellules non-adipocytaires telles que les cellules immunes et les préadipocytes (Fain et al., 2004).

La leptine, sécrétée majoritairement par le tissu adipeux, est une protéine de 16kDa et 167 acides aminés. Le gène codant pour la leptine (Ob) a été découvert en 1994 (Zhang et al., 1994) et ses récepteurs (Leprdb, Leprfa) en 1995 et 1996 (Tartaglia et al., 1995). La leptine présente une structure homologue à celle des cytokines et est sécrétée en quantités proportionnelles à la masse du tissu adipeux (Wajchenberg, 2000). Le tissu adipeux sous-cutané sécrète des quantités plus importantes que le dépôt viscéral (Von Harmelen et al., 1998). L’expression et la sécrétion de la leptine sont modulées par divers facteurs. Par exemple, la sécrétion de la leptine est augmentée par l’insuline, les glucocorticoïdes, le TNF-

α

, ou les estrogènes et, à l’inverse, diminuée par la signalisation induite par les acides gras non -estérifiés (Margetic et al., 2002 ; Fried et al., 2000). La leptine agit sur le cerveau comme un adipostat. Transportée à travers la barrière hémato- encéphalique, la leptine se fixe à ses récepteurs, présents essentiellement au niveau des neurones anorexigènes du noyau arqué de l’hypothalamus, permettant ainsi d’inhiber l’appétit via la sécrétion du neuropeptide Y (NPY) et de l’agouti-related protein (AgRP) (Schwartz et al. 1996 ; Sahu, 2003 ; Zhang et al., 1994 ; Van Swieten et al., 2014). De fait, les souris déficientes pour la leptine (ob/ob) ou son récepteur (db/db) sont obèses et hyperphagiques (Drel et al., 2006). Les taux de leptine décroissent très rapidement à la suite d’une restriction calorique ou d’une perte de poids, ce qui permet de stimuler l’appétit et de réduire les dépenses énergétiques (Bjorbaek et Kahn, 2004). Cependant, ni des taux élevés de leptine ni des traitements par de la leptine exogène ne permettent d’améliorer l’état d’obésité, ce qui s’explique par le développement d’une résistance à la leptine (Myers et al., 2010), dont le mécanisme reste mal connu, même si certains travaux l’associent à un défaut de transport de la leptine à travers la barrière hémato-encéphalique (Banks

  64  

En plus de son rôle métabolique, la leptine présente également d’autres fonctions essentielles. En effet, elle stimule la prolifération, la différenciation et la fonction des cellules immunes, stimule la croissance des cellules endothéliales, induit l’angiogenèse et accélère la réparation tissulaire (Margetic, 2002). Le rôle crucial de la leptine dans le maintien de l’homéostasie du système immunitaire est conforté par la description d’une atrophie thymique, d’une réduction de la diversité des lymphocytes T et de l’immunodéficience chez les souris déficientes (Hick et al., 2006).

L’adiponectine est une protéine de 30 kDa sécrétée par les adipocytes qui appartient structurellement à la famille du complément 1q (Sowers, 2008). Elle présente des propriétés anti- inflammatoires, insulinosensibilisatrices et cardio-protectrices (Lihn et al., 2005). Les taux d’adiponectine dans le sang sont très élevés chez un individu normopondéral, représentant 0,01% des protéines plasmatiques totales (Pajvani et al., 2013). Contrairement aux autres adipokines, les niveaux de l’expression de l’ARN messager et la sécrétion de l’adiponectine sont réduits chez un sujet obèse ou diabétique (Nigro et al., 2014). Les souris déficientes en adiponectine sont insulinorésistantes, et celles qui la surexpriment, montrent une amélioration de la sensibilité à l’insuline et de la tolérance au glucose (Maeda et al., 2002). Les cibles de l’adiponectine sont le foie (qui exprime le récepteur AdipoR2) et le muscle squelettique (qui exprime le récepteur AdipoR1), deux tissus insulinosensibles (Kadowaki et Yamauchi, 2005). L’adiponectine active la voie de la protéine kinase AMPK et réduit l’expression des enzymes de la néoglucogenèse comme la carboxylase phosphoénolpyruvate et la glucose-6-phosphatase, aboutissant à la suppression de la néoglucogenèse (Sowers, 2008).

La résistine est une protéine de 12 kDa sécrétée par le tissu adipeux impliquée dans la résistance à l’insuline (Beltowski, 2003). La déficience en résistine protège les souris de l’hyperglycémie induite par la consommation d’un régime riche en graisses. La résistine inhibe les voies impliquées dans la signalisation de l’insuline en augmentant l’expression de SOCS-3 (Suppressor of Cytokine Signaling-3) in vitro et in vivo (Steppan et al., 2005). La résistine a été longuement considérée comme un facteur exclusivement sécrété par le tissu adipeux et qui a un lien direct avec l’obésité et la résistance à l’insuline. Les taux de résistine plasmatique augmentent chez les souris obèses et sont associés à la résistance à l’insuline et au développement du diabète de type 2 (Benomar et al., 2016). Cependant, certains travaux montrent l’expression de cette protéine modérément par les cellules mononuclées, chez l’homme (Jamaluddin et al., 2012) et d’autres n’associent pas l’insulinorésistance développée au cours de l’obésité à une augmentation importante de l’expression de la résistine. En effet, des analyses statistiques et corrélatives ne

montrent pas un lien direct entre les taux de résistine et l’insulinorésistance, ce qui pourrait s’expliquer par la nature des dépôts de tissus adipeux analysés dans ces études (Way et al., 2001, Degawa-Yamauchi et al., 2003). La molécule FGF21 (fibroblast growth factor 21) est essentiellement considérée comme une hépatokine (produite par le foie) et une myokine (produite par le muscle) mais elle peut également être produite par le tissu adipeux dans certaines conditions, telles que l’exposition au froid (Hondares et al., 2011).

L’expression et la sécrétion des cytokines pro-inflammatoires telles que le TNF-α, l’IL-6 et ou le MCP-1 sont augmentées lors de l’obésité (Minihane, 2015 ; Schmidt et al., 2015). L’augmentation de l’expression du TNF-α dans l’obésité est associée à la résistance à l’insuline résultant de l’altération de la signalisation de l’insuline. Le TNF-

α

active le facteur nucléaire NF- κb induisant une série de changements inflammatoires au niveau du tissu adipeux viscéral (Tzanavari et al., 2010). La sécrétion de l’IL-6, qui est une cytokine pléiotrope circulante, participe à la mise en place de l’inflammation, l’altération de la défense immune de l’hôte et l’altération tissulaire (Eder et al., 2009). L’augmentation de la concentration de l’IL-6 localement au niveau du tissu adipeux (sous-cutané et viscéral) est capable d’augmenter l’expression et la production de la leptine en particulier en combinaison avec un glucocorticocoïde (la dexaméthasone) chez l’Homme (Trujillo et al., 2004). Le tissu adipeux est également caractérisé par la sécrétion de la chimiokine MCP-1 (Macrophage Chemoattractant Protein) qui favorise la migration et l’infiltration des monocytes/macrophages au sein du tissu adipeux obèse ; participant ainsi à la mise en place de l’inflammation chronique à bas bruit qui accompagne le développement de l’obésité. En effet, les taux de MCP-1 corrèlent avec l’adiposité, et la surexpression de MCP-1 dans le tissu adipeux augmente le recrutement des macrophages et aggrave les altérations métaboliques (Kanda et al., 2006). La source de MCP-1 a longtemps été associée aux macrophages infiltrés dans le tissu adipeux. Cependant, l’analyse des préadipocytes a permis de montrer que ces derniers sont la source majeure de MCP-1 dans un contexte d’obésité (Kaplan et

al., 2015). Cependant, il existe d’autres chimiokines (CCL-2, CCL-5, CXCL-5 et CXCL-14) qui

sont impliquées dans le recrutement de macrophages dans le tissu adipeux amplifiant l’inflammation (WesterBacka et al., 2006).

  66  

Figure 17. Les fonctions physiologiques des adipokines (Luo et al., 2016).

ASP, acylating simulation protein; FGF21, fibroblast growth factor 21; IL6, interleukin 6; MCP1, monocyte chemoattractant protein 1; PAI1, plasminogen activator inhibitor 1; TNFα, tumour necrosis factor alpha.