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La valeur des abords d’infrastructures est un thème souvent débattu. Ces zones peuvent constituer des habitats importants pour certaines espèces animales et végétales, mais elles peuvent aussi conduire les animaux vers des endroits où la mortalité est accrue, ou favoriser la prolifération d’espèces exotiques. Elles peuvent créer des liens dans le réseau écologique et servir de corridors de circulation, en particulier dans les paysages agricoles. Leurs fonctions dépendent de leur emplacement géographique, de la végétation, de l’habitat adjacent, de la gestion et du type d’infrastructure. Leurs effets positifs sont plus fréquents en Europe du Nord et leurs effets négatifs sont plus souvent associés à l’Europe du Sud.

Fonction d’habitat : de nombreux recensements effectués dans les pays fortement urbanisés ont montré l’intérêt des accotements en tant qu’habitats pour divers animaux et végétaux. Grâce à une gestion appropriée, les abords des infrastructures peuvent compléter et enrichir des paysages où la végétation naturelle a presque disparu.

Ces zones ne peuvent cependant pas remplacer totalement l’habitat naturel en raison des nuisances et de la pollution. La composition des espèces animales des bords de routes est donc souvent modifiée et enregistre une plus grande proportion d’espèces allogènes et rudérales.

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Figure 3.9 - Fonction de corridor des accotements dans différents paysages.

A. Dans les paysages ouverts et agricoles, les bords de routes couverts de végétation peuvent constituer d’importants corridors de déplacement et de zones d’habitat pour les animaux.

B. Dans les paysages naturels, les accotements ouverts et herbeux créent de nouveaux obstacles qui peuvent accentuer l’effet de barrière pour les espèces forestières, mais qui peuvent accroître l’effet de corridor et offrir un nouvel habitat pour d’autres espèces.

C. Les accotements peuvent servir de sources pour les espèces se développant sur de nouveaux habitats ou recolonisant des habitats vacants, mais ils favorisent aussi l’invasion des habitats naturels par des espèces allogènes ou la prolifération des prédateurs.

Dans les pays les plus urbanisés, les accotements peuvent constituer des habitats importants pour la faune et la flore. Aux Pays-Bas, 796 espèces végétales (plus de 50 % des espèces nationales) habitent ces zones. Ce chiffre inclut non seulement les espèces très répandues, mais aussi les espèces moins communes ou assez rares. Ainsi, 160 espèces rares (représentant 10 % du total national) vivent essentiellement sur les bords de routes.

Les prairies faiblement à modérément fertilisées sont rares aux Pays-Bas en raison de l’agriculture intensive ; les accotements représentent donc d’importants refuges pour les espèces qui ont besoin de ce type d’habitat.

Leur gestion ne consiste plus à entretenir une prairie basse comme dans les années 50 et 60, mais à réaliser simplement une ou deux opérations de fauchage par an. Les accotements sont donc plus variés et servent d’habitat à 50 % des espèces de papillons néerlandais (soit 80). On estime que 22 de ces espèces peuvent survivre sur le réseau des bords de routes. Même certaines espèces menacées (telles le collier-de-corail et le procris) peuvent survivre dans ces zones.

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Figure 3.10 - Les pestes végétales envahissantes peuvent se développer le long des axes de circulation.

C’est le cas, en Espagne, du séneçon du Cap, une mauvaise herbe toxique pour le bétail qui s’est répandue au bord des routes (photographie de E.

Bassols).

L’entretien des accotements a un impact important sur la valeur de ces zones en tant qu’habitat. Les opérations de gestion qui influent sur la biodiversité sont les suivantes : coupe des arbres et des arbustes, fauchage de la végétation, curage des fossés et entretien des caniveaux, tunnels, clôtures, passages à faune et autres mesures. Les principes d’un entretien écologique des accotements sont les suivants : planification du fauchage comme dans les prairies de fauche, plantation d’arbustes et d’arbres indigènes, diminution des perturbations pendant la saison de la reproduction et réduction de l’utilisation des herbicides et insecticides chimiques. Cet entretien permet d’améliorer localement la biodiversité. Mais sans une planification appropriée, le nombre d’accidents peut augmenter et on peut créer des pièges écologiques pour certaines espèces. La planification doit donc prendre en compte le contexte local.

Fonction de corridor : les bords de routes et de voies ferrées peuvent servir de corridors pour la faune, favorisant ainsi la circulation des espèces le long des infrastructures. Cette fonction de corridor a des effets positifs et négatifs.

Les effets positifs ont été constatés essentiellement pour les petits mammifères et les insectes. Mais les corridors conduisent aussi les animaux vers les agglomérations, en particulier les chevreuils, les renards, les blaireaux et les reptiles.

La construction d’accotements larges à végétation basse, isolés de la forêt, permet de réduire le nombre d’accidents entre véhicules et grands mammifères sur les routes et les voies ferrées en améliorant la visibilité des conducteurs et des animaux. Les accotements sont considérés comme des éléments importants des réseaux écologiques en Europe du Nord.

Les effets négatifs sont la propagation des espèces spécifiques ou de mauvaises herbes le long des axes de circulation par les turbulences de l’air dues au trafic ou du transport de graines et de propagules par les véhicules. Les exemples du rhododendron au Royaume-Uni et du séneçon du Cap en Espagne (mauvaise herbe toxique pour le bétail) montrent comment les espèces allogènes peuvent se répandre rapidement sur de vastes zones géographiques par l’intermédiaire des infrastructures de transport. Les accotements peuvent aussi constituer un facteur important d’incendies de forêts dans les pays méditerranéens. Ainsi, en Espagne, plus de 24 % des incendies de forêt en 2000 ont été attribués à des départs de feu au bord des routes (mégots de cigarettes, en particulier) et, dans une moindre mesure, au bord des voies ferrées.

Les routes et les voies ferrées peuvent aussi servir de corridors pour la faune, augmentant ainsi la circulation d’espèces indésirables. La liaison des îles côtières au continent par la construction de ponts peut aussi provoquer la prolifération de prédateurs tels que le vison d'Amérique, les martres et les renards dans des colonies d’oiseaux autrefois isolées. Les résultats sont l’accroissement de la mortalité aviaire en raison des prédateurs et des effets de perturbation.

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Les accotements ont rarement la même valeur que les corridors naturels, car les conditions d’habitat sont rarement constantes sur de longues distances et peuvent varier considérablement en qualité. Les routes croisent souvent d’autres infrastructures et peuvent conduire les animaux vers des intersections où le risque d’accident est élevé.

Les accotements larges dont la végétation contraste avec celle du paysage environnant (bandes d’herbes longeant une forêt) peuvent aussi accroître l’effet de barrière et l’isolement des habitats.

3.4 Effets écologiques secondaires

Les changements dans, l’aménagement du territoire, les modes d’implantation humaine ou le développement industriel induits par la construction d’infrastructures de transport sont des effets secondaires. L’aménagement de nouvelles routes régionales peut entraîner la création de nouveaux lotissements et zones d’habitation, qui provoqueront à leur tour la construction de routes de desserte locales. Ces effets secondaires ne sont habituellement pas de la responsabilité du secteur des transports, mais doivent être pris en compte dans les évaluations environnementales (EES) et les études d’impact sur l’environnement (EIE) (voir chapitre 5). Dans les régions où un aménagement linéaire secondaire le long des réseaux routiers existants peut compromettre gravement les stratégies de protection de la nature, il peut être nécessaire d’adopter des mesures de modération du trafic ou de déclassement des routes (voir chapitre 7).

Une des principales menaces secondaires associées au développement des infrastructures est l’augmentation de l’accessibilité et des perturbations humaines.

Les réseaux de petites routes forestières permettent aux chasseurs et aux touristes d’accéder à des habitats autrefois préservés.

Certaines spécifications de conception ne prévoient pas d’aires de stationnement ni de points d’arrêt, précisément pour réduire les perturbations dans les habitats sensibles tels que les marais littoraux importants pour les oiseaux aquatiques.

Cependant, une fois l’aménagement des infrastructures effectué, il est très difficile de limiter l’accès aux terres adjacentes, même si elles ont une grande valeur sur le plan écologique. Les programmes de gestion des accès doivent donc être établis pendant la phase de planification et mis en œuvre parallèlement à l’aménagement de l’infrastructure.

3.5 Perspectives en matière d’écologie du paysage

Les recherches sur les effets des réseaux routiers au niveau du paysage ou de la région sont encore à l’état embryonnaire. L’étude des processus écologiques à grande échelle s’appelle l’écologie du paysage, mais c’est une science appliquée encore jeune dont les méthodes, les techniques et les applications sont nouvelles et en cours de développement. Il est très important de prendre en compte le contexte général des schémas d’infrastructures, car ces processus plus vastes risquent d’avoir des effets importants sur la nature. Toutefois, le recueil de données empiriques sur les effets de la fragmentation dus aux infrastructures de transport, à grande échelle et à long terme, est difficile et exige de nombreuses ressources.

Pour étudier les conflits éventuels entre protection de la nature et aménagement d’infrastructures, on utilise de plus en plus souvent de nouveaux outils tels que les simulations par ordinateur et la modélisation spatiale. Ceux-ci seront utiles à l’avenir pour établir des critères de conception applicables à l’aménagement des infrastructures. Les données paysagères de télédétection, associées à l’analyse des systèmes d’information géographique (SIG), offrent des ressources prometteuses pour intégrer les routes dans le paysage en réduisant au minimum les effets de la fragmentation des habitats. Le but des études écologiques est de prédire les effets des infrastructures de transport sur les individus et les populations, au niveau du site, du paysage et de la région.

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4 Conception de solutions intégrées

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