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4.3-Fonction immunitaire :

Dans le document PSYCHOBIOTIQUES : FUTURS PSYCHOTROPES (Page 56-60)

La population du tube digestif avec une flore bactérienne saine joue un rôle crucial dans la maturation appropriée du système immunitaire.

Le tube digestif constitue une véritable porte d’entrée aux micro-organismes extérieurs. Le système immunitaire périphérique comporte des tissus lymphoïdes associés aux muqueuses appelés MALT (Mucosa-Associated Lymphoid Tissue), dans le cas de la muqueuse intestinale ces tissus sont dénommés GALT (Gut-Associated Lymphoid Tissue). Ce dernier constitue le principal support du système immunitaire au niveau du tube digestif et sa fonction première est de protéger l’organisme contre l'invasion par des microbes ou des parasites ingérés. Plusieurs structures composent le GALT, des structures organisées, telles que les plaques de Payer ou les ganglions mésentériques, mais également des structures diffuses, comme les follicules lymphoïdes isolés [26].

Ce dernier peut être séparé en deux composantes. D’une part une composante innée qui peut donner une réponse immédiate mais non spécifique, comme l’élimination d’agents infectieux par des macrophages. Celle-ci fait appel aux cellules présentatrices de l’antigène de la lamina propria ainsi qu’aux peptides antimicrobiens sécrétés par les cellules de Paneth, et résulte de l’interaction entre les récepteurs PRR (Pattern Recognition Receptor) exposés par les macrophages, les cellules dendritiques, les cellules épithéliales, et des structures moléculaires microbiennes appelées motifs associées aux pathogènes (Pathogen Associated Molecular Pattern, PAMP). Parmi ces PAMP, véritables signatures moléculaires de micro-organismes, on retrouve le lipopolysaccharide (LPS) présent chez les bactéries à gram négatif ou la flagelline pour les bactéries flagellées, ils sont donc d'origine et de nature très variée. Les récepteurs de

l’immunité innée (PRP) renferment des récepteurs transmembranires : Toll-like receptors (TLR) regroupant une grande variété de PAMPs bactériens, fongiques, parasitaires et viraux, des récepteurs cytoplasmiques NOD-like receptors (NLR), les RIG-I-like receptors (RLR) pour la détection des ARN viraux. Enfin, les C-type lectin-like receptors (CLR) reconnaissant les motifs hydrocarbonés (sucres) contenus principalement dans les parois fongiques [14].

L'activation de ces PRR induit une cascade de signalisation cellulaire selon différentes voies, dont NFΚB, qui active ou module la réponse immune. Des peptides anti-microbiens peuvent être produits par les cellules épithéliales, des cytokines pro-inflammatoires sont sécrétées par les cellules lymphoides innées et s'en suit souvent le recrutement de polynucléaires neutrophiles et macrophages [14].

Par contre, si les récepteurs jugent que le LPS décelé n’oblige pas le déclanchement d’une réponse immunitaire, la bactérie libératrice de LPS n'est pas rejetée. Cette tolérance envers nos bactéries intestinales est donc un équilibre fragile ; tout bouleversement du microbiote peut engendrer une dérégulation et mener à une activation anormale du système immunitaire [27] . Les Bactéries Filamenteuses Segmentées (SFB), installées dans l’iléon et appartenant à la famille de Clostridium, sont de puissants inducteurs de cellules effectrices TH17, produisant de faible quantité d’interleukine 17 (IL-17) et d’interféron gamma(IFN-γ) donc une inflammation à bas bruit, suffisante pour éliminer des germes compétiteurs potentiellement pathogènes et créer leur propre microniche au sein des muqueuses, mais trop faible pour induire des dommages intestinaux [28]. Ils sont nécessaires à la maturation de la barrière immune intestinale et pulmonaire et induisent la production d’IgA et l’activation de lymphocytes T (LT) pro-inflammatoires et régulateurs, ils favorisent également l’activation et l’engagement des lymphocytes intra-épithéliaux, impliqués dans les défenses anti-virales des cellules épithéliales muqueuses [29]. En outre, il s’est avéré que ces bactéries sont impliquées dans le processus de croissance et maturation squelettiques normales en stimulant l’immunité hépatique à produire des facteurs influençant le métabolisme osseux comme la lipocaline-2. De ce fait, la modulation des taux de SFBpourrait limiter les risques de fractures et d’ostéoporose liés au vieillissement [30].

Figure 3: Principaux récepteurs de l’immunité innée (PRR) [16]

D’autre part la réponse adaptative, est plus lente, car elle nécessite une reconnaissance spécifique de l’agent infectieux, mais qui apporte une protection spécifique et durable, notamment par la production d’anticorps. Cette dernière est dirigée par les lymphocytes qui seront alors mises en fonction et prendront d’après l’environnement inflammatoire soit un phénotype pro-inflammatoire ( LT effecteurs Th1 Th2 et Th17) soit un phénotype anti-inflammatoire (lymphocytes régulateurs Treg) [29].Les lymphocytes effecteurs Th 17, secrètent les interleukines IL-22. Ces interleukines contribuent alors à la stimulation de la production de peptides anti-bactériens par les entérocytes et les cellules de Paneth [31].

L’activation des lymphocytes T nécessite la présentation d’antigène par l’intermédiaire des cellules présentatrices d’Ag (CPA) selon trois voies [14] :

o Par les cellules M localisées au niveau des plaques de Peyer et des nodules lymphoïdes, présentant de nombreuses microvésicules et une forme particulière leur permettant un contact étroit avec les CPA.

o Par les cellules dendritiques de la lamina propria qui ont des prolongements étendus dans la lumière intestinale, elles migrent ensuite vers les ganglions mésentériques, et induisant ainsi si nécessaire la production d’IgA par les plasmocytes [32].

o Par les cellules épithéliales : voie minoritaire, présentent ensuite les antigènes directement aux lymphocytes par une molécule du complexe majeur d'histocompatibilité de classe II (CMH II) : lymphocytes B producteurs d’IgA.

Toute cette organisation permet d’un coté de booster des réponses non inflammatoires et tolérogènes vis-à-vis de la quasi-totalité des antigènes environnementaux et de notre flore commensale et, d’un autre coté, de concevoir des réponses adéquates et très régulées contre des antigènes pathogènes, pour sauvegarder l’homéostasie de nos muqueuses [26].

Le rôle du microbiote intestinal dans l’immunité de l’hôte a été appréhendé grâce à une comparaison entre des modèles de souris axéniques (caractérisés par une absence totale de bactéries) et leurs homologues élevés classiquement en animalerie. Dans ces études, les souris exempts de germes présentaient de nombreuses anomalies au niveau de leur système immunitaire intestinal, mais aussi au niveau de la rate et des ganglions lymphatiques qui n’étaient pas structurés et présentaient des zones lymphocytaires atrophiées.

Au niveau intestinal, on a remarqué un taux faible de plaques de Peyer avec un développement incomplet : elles contiennent moins de centres germinatifs nécessaires à la maturation et différenciation des lymphocytes B, moins de cellules Met de lymphocytes T. Aussi, on remarque la présence d’une lamina propriamoins riche en lymphocytes intra-épithéliaux LT CD4+ et en plasmocytesproducteurs d’IgA, une production d’immunoglobulines sériques (IgG) et de cytokines limitées[33].

Le microbiote intestinal module également l'abondance des cellules Type Natural killer (NK) invariantes, un sous-ensemble unique de cellules T qui exprime une chaîne α du récepteur des cellules T invariantes. Ces cellules favorisent l'inflammation, car après l'activation, elles sécrètent des chimiokines et cytokines pro-inflammatoires T helper 1 (TH1) et TH2, y compris l'interféron-γ, IL-2, IL-4, IL-13, IL-17A, IL -21 et facteur de nécrose tumorale. On détecte qu’il y a plus de cellules iNKT dans le côlon de souris exemptes de germes que dans le côlon de souris classiquement élevées, ce qui suggère que le microbiote intestinal favorise l'homéostasie en réduisant le nombre de ces cellules pro-inflammatoires [34].

Figure 4 : Rôle du microbiote dans la maturation du système intestinal [35]

Parmi les immunomodulateurs renforçant et stimulant le système immunitaire, une substance appelée Muramil Dipeptide est retrouvée dans la paroi cellulaire des bifidobactéries (les bonnes bactéries qui peuplent en grande partie le côlon humain), celle-ci active la synthèse de l’un des groupes les plus importants de cellules du système immunitaire, les lymphocytes responsable de sécrétion des IgA qui protégera la muqueuse intestinale en détruisant et inactivant les bactéries envahissantes [18].

Dans le document PSYCHOBIOTIQUES : FUTURS PSYCHOTROPES (Page 56-60)