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8.4 Excitation optique et effets de la pompe

8.4.1 Fluence de la pompe

Lorsque nous nous sommes intéressés aux effets stationnaires (partie II, chapitre 5), nous avons déjà mis en évidence qu’augmenter la fluence de la pompe revenait à augmenter la tempéra-ture stationnaire de notre système magnétique. En dynamique, l’augmentation de la puissance de la pompe entraînera également une évolution des ∆2,4k, ainsi que des ∆T et δMs/Ms plus important.

Nous avons étudié principalement la dynamique en fonction de la fluence sur Mn7P4.3 avec une polarisation de la sonde alignée suivant l’aimantation à basse température. Nous avons porté dans la Fig. 8.14 l’ensemble des courbes qui seront discutées par la suite.

Détermination de la température de base de la dynamique

Précédemment nous avons évalué la température stationnaire de notre système grâce aux am-plitudes et champs coercitifs des cycles Voigt (méthode "statique"). Ici, nous allons utiliser une méthode "dynamique" plus répandue dans la littérature consistant à mesurer les fréquences de précession à basse fluence de pompe, en fonction de la température (Fig. 8.15a), et à tempéra-ture fixe en fonction de la fluence de la pompe (Fig. 8.15b). Nous comparerons directement chacune de ces variations afin d’en déduire une température effective. Cette expérience a été

Figure 8.14: Dynamique en fonction de la fluence de la pompe sur Mn7P4.3. T= 12 K ; polarisation pompe k [110] ; polarisation sonde k [100].

réalisée à λ=700 nm et λ=770 nm. L’intérêt de cette méthode est de savoir si en sondant une température effective nous pouvons être sensibles aux effets de température transitoire. Le deuxième intérêt est de pouvoir comparer les résultats des deux méthodes.

Sauf à forte fluence aux temps courts (0-200 ps), la fréquence de précession n’évolue pas avec le temps sur 4 ns ce qui indique une température qui ne change pas dans cette fenêtre. A λ=700 nm (Fig. 8.15a et b), on peut constater que les fréquences diminuent en fonction de la fluence comme en fonction de la température, ce qui rejoint nos observations par la méthode statique.

De ces deux courbes on peut déduire une température effective en fonction de la flu-ence(Fig. 8.15c et d). La Fig. 8.15d montre également la variation de température en fonction de la fluence pour la pompe à λ=770 nm. Les fréquences de précession étant une propriété magnétique, indépendante des effets optiques, nous avons utilisé la variation des fréquences en fonction de la température à λ= 700 nm pour obtenir cette courbe.

Sur la Fig. 8.15c, on peut noter que l’augmentation en température est fortement sous-linéaire comme ce que nous avions déjà observé pour la calibration température-fluence à l’aide des cycles Voigt (voir chapitre 5). Les élévations de températures sont comparables entre les ex-périences "statique" et "dynamique" ce qui signifie que nous n’observons qu’un effet d’élévation stationnaire de la température.

Quantitativement, on peut observer de légères différences entre les courbes par méthode statique et dynamique à 700 nm. Tout d’abord, la pente à l’origine est moins forte en

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Figure 8.15: a : fréquence de précession en fonction de la fluence de la pompe à λ=700 nm. La fluence de la sonde a été diminuée pour les points à très faible fluence afin d’avoir Fpompe > Fsonde. b : fréquence de précession en fonction de la température à basse fluence pompe et sonde. c : comparaison entre les températures effectives de l’échantillon en fonction de la fluence de la pompe à 700 nm déduite par méthode "stationnaire" (courbe en pointillé) et "dynamique". Les carrés réprésentent les données, le trait plein l’ajustement par une fonction allométrique. d : comparaison entre les élévations de température déduites par méthode dynamique pour un faisceau pompe à λ=700 nm et λ=770 nm. Echantillon : Mn7P4.3 ; Température de consigne : T=12 K

λ a1 a2 Méthode statique 700 nm 4.08 0.38 Méthode dynamique 700 nm 1.25 0.64 770 nm 0.96 0.66

Figure 8.16: Paramètres pour les ajustements des températures effectives en fonction de la fluence de la pompe. L’ajustement a été réalisé sur une fonction allométrique de type Teff(F ) = T0+ a1Fa2.

namique qu’en statique. Ensuite, l’effet de saturation de l’augmentation de température est plus faible dans les courbes issues de la dynamique. De plus, si les courbes statiques ressem-blaient à une première augmentation linéaire suivie d’une saturation, les courbes dynamiques quant à elles présentent une variation en forme de loi de puissance. En fait, on peut ajuster

Figure 8.17: Fréquences en fonction de la fluence de la pompe et de la température. Ref a Tesarova et al. [182],b : Qi et al. [138]. a: I0=7µJ cm−2, λ=756 nm ; b I0=0.75 µJ cm−2 (b et a:T=10 K, λ=770 nm ; 838 nm et 898 nm)

.

chacune de ces courbes par une fonction empirique allométrique, Teff(F ) = T0+ a1Fa2 en forme de loi de puissance de manière satisfaisante. Les paramètres pour chaque type d’ajustement sont résumés dans la table 8.16. Les différences entre les paramètres sont probablement dus à une thermalisation différente de l’échantillon dans les deux expériences.

De la même manière que précédemment (voir chapitre 5), en augmentant la longueur d’onde (λ= 770 nm) pour se rapprocher de l’énergie correspondant à la largeur de la bande interdite

(Eg ≈ 1.51 eV), on continue de voir des augmentations non négligeables de température alors

qu’on s’attendrait à réduire de manière importante ces effets par diminution de l’absorption. Cette observation va à l’encontre des justifications données par le groupe de Zahn et al. [214], où ces derniers assuraient réduire grandement les effets thermiques en travaillant à grande longueur d’onde (λ =800 nm).

Qualitativement la calibration température-fluence par la méthode stationnaire confirme celle de la méthode dynamique.

Discussion

Dans la littérature, les élévations en température sont obtenues de façon similaire à la méthode "dynamique", la méthode "stationnaire" n’ayant jamais été utilisé dans (Ga,Mn)As à notre connaissance. On peut comparer les élévations en température obtenues avec celles de Nemec et al. [182] et Qi et al. [138].

Dans le cas de Qi et al. [138] (Fig. 8.17b), les auteurs travaillent à très faible fluence de pompe (maximum 3.75 µJ cm−2). Une variation linéaire en température est visible avec une pente de 2.6 K/µJ cm−2 ce qui à leur fluence donne une élévation de 10 K à 770 nm. Lorsque l’énergie de l’excitation devient inférieure à la largeur de la bande interdite (Eg = 1.51 eV), les élévations deviennent plus faibles avec une pente de 1.3 K/µJ cm−2 ce qui à leurs fluences correspond à une élévation de 5 K au maximum. Ces mesures sont compatibles avec nos

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Figure 8.18: Amplitude à un temps fixe correspondant au premier pics des courbes (flèche sur les graphiques en encart), en fonction de la puissance. Les symboles représentent les points expérimen-taux, les traits plein les ajustement par une loi puissance.

a : Echantillon Mn7P4.3 ;b : Echantillon Mn7P2.6. Polarisation sonde k [100] et Fsonde=0.7 µJ cm−2 dans les deux cas

tions lorsque l’on fait varier la longueur d’onde. Lorsque l’on se rapproche de la bande interdite, l’absorption diminue ainsi que les effets de relaxation en énergie responsables de l’émission de phonons incohérents. Ainsi l’élévation de température est moins importante. Notons qu’aucun phénomène de saturation de ∆T avec F n’a été observé ici, leurs Fmax=3.75 µ J cm−2 étant bien inférieure à la nôtre.

Tesarova et al. [182] (Fig. 8.17a) ont travaillé avec des fluences de pompe deux fois plus élevées que celles que nous utilisons, à λ=756 nm. Leurs courbes ressemblent plus à ce que nous avons obtenus par la méthode stationnaire, avec deux régimes clairement distinguables. Le premier régime a une pente de 0.28 K/µJ cm−2 soit plus faible que les résultats de la Fig. 8.15. Le deuxième régime commence à 50 µJ cm−2, la hausse de température reste constante avec une élévation de 11.7 K par rapport à la valeur sans pompe, soit un peu plus faible que ce que nous avons trouvé.

Ces différentes mesures sont plutôt en accord avec ce que nous mesurons avec des élévations en température du même ordre de grandeur. Les différences peuvent être principalement dues à des paramètres thermiques quelque peu différents (collage de l’échantillon, travail dans un gaz d’He).