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1.4 Apports et limites de la contribution de GRACE ` a l’hydrologie globale

1.4.2 Filtrage des solutions libres du CSR

Un filtrage dans le domaine spectral revient `a multiplier chaque terme coefficient de degr´e n et d’ordre m de la d´ecomposition en harmoniques sph´eriques d’un champ par un coefficient Wnm. Nous envisageons ici le cas d’un filtrage isotrope: Wnm ne d´epend alors plus de n: Wnm = Wn. Si l’on applique un tel filtrage `a la charge hydrologique, on aura appliqu´e aux coefficients de Stokes au total deux filtrages, via les fonctions de transfert Nn−1 et Wn. L’expression de la charge filtr´ee est alors: ∆σ(θ, λ) = nmax X n=2 WnNn−1a n X m=0 [∆CnmYnm, c(θ, λ) + ∆SnmYnm, s(θ, λ)] (1.13)

Ceci revient `a convoluer dans le domaine spatial le champ ∆σ(θ, λ) avec la fonction W (θ, λ) = P

nWnP

m[Ynm, c(θ, λ) + Ynm, s(θ, λ)].

Nous allons maintenant examiner deux types de filtre isotrope tr`es diff´erents: la fenˆetre avec apodisation dans le domaine spectral et le filtre gaussien. Ce dernier est fr´equemment utilis´e dans la litt´erature pour lisser les solutions GRACE non contraintes. Nous comparerons les effets de ces deux types de filtre sur les solutions du CSR dans le domaine spectral pour les variations mensuelles, puis dans le domaine spatial pour les variations annuelles (section 1.4.3).

Filtrage spectral avec fenˆetre d’apodisation

Nous avons vu lors de l’´etude des spectres des solutions du GRGS et du CSR et des erreurs formelles calibr´ees (figures 1.5 et 1.12) que les erreurs commencent `a augmenter `a partir du degr´e 15 et ont la mˆeme amplitude que le signal `a partir du degr´e 25. Les degr´es sup´erieurs `a 25 semblent domin´es par du bruit. On pourrait envisager de tronquer le d´eveloppement harmonique au degr´e 25: cela aurait l’avantage d’´eliminer une grande partie du bruit mais le d´esavantage de cr´eer des oscillations secondaires dans le domaine spatial, ph´enom`ene bien connu sous le nom d’effet de Gibbs. On adoucit donc la troncature en att´enuant progressivement les plus hauts degr´es que l’on souhaite conserver, tout en pr´eservant les plus bas degr´es et l’information qu’ils contiennent. Le bruit affectant ces degr´es ne sera cependant pas ˆot´e. Nous avons cr´e´e une fenˆetre d’apodisation avec une fonction cosinusentre deux degr´es n1 et n2 (figure 1.13, en haut `a droite). Les coefficients Wn de ce filtre sont donn´es par:

Wn=    1 si n < n1, 1 2 (1+cos (πn −n1 n2−n1)) si n1 ≤ n ≤ n2, 0 si n > n2. (1.14)

Ce filtre est un vrai filtre passe-bas qui supprime les degr´es sup´erieurs `a n2 et laisse intact les degr´es inf´erieurs `a n1. L’att´enuation `a -3dB est atteinte au degr´e 37 (resp. 27) pour (n1, n2) = (30, 50) (resp. (n1, n2) = (20, 40)).

En comparaison `a une simple troncature, l’apodisation avec une fonction cosinus permet de r´eduire le nombre et l’amplitude des lobes secondaires dans le domaine spatial (figure 1.13, en haut ` a gauche). 0 500 1000 1500 2000 2500 3000 0 0.25 0.5 0.75 1 distance (km)

Fenêtres d’apodisation: domaine spatial porte + cosinus porte 0 20 40 60 80 100 120 0 0.25 0.5 0.75 1 degré

Fenêtres d’apodisation: domaine spectral porte + cosinus porte 0 500 1000 1500 2000 2500 3000 0 0.25 0.5 0.75 1 distance (km) Filtres gaussiens: domaine spatial

500 km 350 km 200 km 0 20 40 60 80 100 120 0 0.25 0.5 0.75 1 degré

Filtres gaussiens: domaine spectral

500 km 350 km 200 km

Fig. 1.13 – Comparaison entre diff´erents filtrages dans les domaines spatial (`a gauche) et spectral (`a droite): troncature `a n = 40 (courbe en pointill´es, en haut), fenˆetre d’apodisation avec une fonction cosinus entre n1= 30 et n2= 50 (courbe pleine, en haut), filtres gaussiens (Jekeli, 1981) de rayon 200, 350 et 500 km (en bas).

Filtrage spatial avec filtre gaussien

Le filtre gaussien isotrope a ´et´e initialement propos´e par Jekeli (1981) qui en a donn´e les formules analytiques. Ce filtre a pour effet de lisser spatialement un champ: chaque point du champ filtr´e est corr´el´e aux points voisins, la sensibilit´e d´ecroissant lorsque la distance qui les s´epare augmente. L’expression de W (γ) dans le domaine spatial en fonction de la distance angulaire γ entre deux points est:

W (γ) = b

e−b(1−cos γ)

1 − e−2b , (1.15)

o`u b = ln (2)/(1 − cos (r1/2/a)). r1/2 est le rayon du filtre, c’est-`a-dire la distance sur la sph`ere pour laquelle la valeur de W est ´egale `a la moiti´e de sa valeur au centre. Cette grandeur est utilis´ee pour caract´eriser la longueur de corr´elation du filtre. La figure 1.13 (en bas, `a gauche) donne l’´evolution de W en fonction de la distance sur la sph`ere γ a pour diff´erentes valeurs du rayon. On peut consid´erer approximativement qu’il y a d´ecorr´elation totale lorsque la distance est sup´erieure `

a deux fois le rayon du filtre.

Les coefficients dans le domaine spectral sont calcul´es it´erativement d’apr`es les relations sui-vantes: W0 = 1, W1 = 1 2π  1 + e−2b 1 − e−2b1 b  , Wn+1= −2n + 1 b Wn+ Wn−1. (1.16)

La figure 1.13 (en bas, `a droite) montre l’´evolution de Wn en fonction de n pour diff´erentes valeurs du rayon. L’att´enuation commence d`es les plus bas degr´es et augmente progressivement avec n. Plus le rayon du filtre est grand, plus l’att´enuation est rapide. L’att´enuation `a -3 dB est atteinte aux les degr´es 12, 18 et 31 pour des rayons de 500, 350 et 200 km, respectivement Approximativement, l’att´enuation est presque totale pour des degr´es sup´erieurs ou ´egaux au triple des valeurs ci-dessus. Ce type de filtrage pr´esente donc le gros d´esavantage d’att´enuer les bas degr´es en mˆeme temps que de filtrer les hauts degr´es. Ce n’est pas un filtre passe-bas: tout le spectre est affect´e.

Effet du filtrage dans le domaine spectral

Nous appliquons successivement ces deux filtres aux variations de hauteur d’eau estim´ees par les solutions GRACE du CSR (dont les spectres d’amplitude sont montr´es figure 1.12, `a droite). Pour l’apodisation spectrale, nous testons successivement les couples de valeurs (30, 50) et (20, 40) pour (n1, n2). Le premier couple de valeurs a ´et´e choisi afin de comparer les solutions du GRGS aux solutions du CSR filtr´ees: en effet, nous avons constat´e dans la section 1.3.2 que la contrainte appliqu´ee aux solutions du GRGS agit surtout `a partir du degr´e 30 et jusqu’au degr´e 50, degr´e maximal auquel sont estim´ees ces solutions. Une apodisation spectrale entre les degr´es 30 et 50 permettra de simuler l’effet d’une contrainte progressive appliqu´ee entre ces mˆemes degr´es. Comme le montre la figure 1.14 (en haut `a gauche), une telle apodisation permet de stabiliser le bruit au-del`a du degr´e 30. Cependant il reste encore trop d’´energie au-del`a du degr´e 25 car le bruit augmente plus rapidement que l’att´enuation due au filtrage. Nous avons donc appliqu´e le deuxi`eme couple de valeurs (figure 1.14, en haut `a droite), permettant une stabilisation du bruit d`es le degr´e 25. Le spectre d’amplitude apr`es un tel filtrage est similaire `a celui obtenu pour les solutions contraintes du GRGS (figure 1.12, `a gauche), c’est-`a-dire relativement plat jusqu’au degr´e 30 puis diminuant brutalement.

Concernant le filtrage gaussien, nous testons les deux valeurs suivantes pour le rayon: 350 et 500 km. En effet, les solutions du CSR ´etant estim´ees jusqu’au degr´e 60, aucune ´energie n’est

0 10 20 30 40 50 60 100

101 102

degré

hauteur d’eau équivalente (mm)

CSR−RL04 (écart à la moyenne sur 04/2002 − 03/2007) après apodisation entre n=30 et n=50

0 10 20 30 40 50 60

100 101 102

degré

hauteur d’eau équivalente (mm)

CSR−RL04 (écart à la moyenne sur 04/2002 − 03/2007) après apodisation entre n=20 et n=40

0 10 20 30 40 50 60 10−1 100 101 102 degré

hauteur d’eau équivalente (mm)

CSR−RL04 (écart à la moyenne sur Avril 2002 − Mars 2007) après filtrage gaussien de rayon 350 km

0 10 20 30 40 50 60 10−1 100 101 102 degré

hauteur d’eau équivalente (mm)

CSR−RL04 (écart à la moyenne sur Avril 2002 − Mars 2007) après filtrage gaussien de rayon 500 km

Fig. 1.14 – Effet du filtrage des solutions GRACE du CSR: spectres d’amplitude des variations de la charge hydrologique filtr´ee exprim´ee en hauteur d’eau ´equivalente. En haut: filtrage spectral par apodisation entre n1= 30 et n2= 50 (`a gauche) et entre n1= 20 et n2= 40 (`a droite). En bas: filtrage spatial gaussien de rayon 350 km (`a gauche) et 500 km (`a droite).

pr´esente `a des demi-longueurs d’onde inf´erieures `a 333 km: il est donc inutile d’utiliser un rayon trop petit, comme par exemple un rayon de 200 km pour lequel l’att´enuation devient totale `a partir du degr´e 100 (figure 1.13, en bas `a droite). Il est plus raisonnable d’utiliser des rayons ´egaux au moins `a 350 km, pour lesquels l’att´enuation est quasiment totale au degr´e 60. Le filtrage gaussien de rayon 350 km (figure 1.14, en bas `a gauche) donne des spectres stabilis´es en amplitude et qui d´ecroissent faiblement avec le degr´e, sans rupture de pente comme dans les cas vus pr´ec´edemment. Si on utilise un filtre de rayon 500 km (figure 1.14, en bas `a droite), la quasi totalit´e du spectre est att´enu´ee, y compris aux degr´es inf´erieurs `a 30. Le signal est att´enu´e autant que le bruit.

Autrement dit, apr`es un filtrage gaussien, on ne peut retrouver aucune caract´eristique du champ initial contrairement au filtrage passe-bas avec fenˆetre d’apodisation qui permet de retrouver toutes les composantes `a grande longueur d’onde du champ, non filtr´ees. En effet, avec le filtrage gaus-sien, on a perdu tout l’int´erˆet de l’orthogonalit´e entre les fonctions de Legendre. Le champ filtr´e n’explique alors plus les donn´ees GRACE utilis´ees pour l’inversion par moindres carr´es.

Des deux types de filtre passe-bas que nous avons ´etudi´es pour filtrer les solutions non contraintes du CSR, nous privil´egions la fenˆetre d’apodisation dans le domaine spectral qui a l’int´erˆet de pr´eserver les bas degr´es et d’´eliminer les hauts degr´es principalement domin´es par le bruit.

L’effet des deux types de filtre dans le domaine spatial sera ´etudi´e sur la variation annuelle dans la section 1.4.3.

1.4.3 Comparaison avec des mod`eles hydrologiques globaux