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PARTIE 1 : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

II. 3 : La filière de prétraitement biologique avant enfouissement

Le prétraitement biologique est né du constat que les principaux désagréments techniques et écologiques (biogaz, lixiviats, tassement) liés à la mise en décharge provenaient de la présence de matière organique biodégradable dans les déchets. Un des moyens de les atténuer est de procéder à la stabilisation biologique du déchet en amont de la décharge afin de mieux pouvoir en contrôler l’évolution. L’idée qu’il est possible de récupérer une fraction des ordures ménagères pour une valorisation soit matière (par exemple les métaux), soit énergétique (fraction à haut pouvoir calorifique) afin de limiter les volumes de déchets à enfouir, en plus du besoin de préparer les déchets à la phase biologique qui suit, a conduit les acteurs du métier du déchet à concevoir un traitement mécanique poussé en amont de la stabilisation biologique du déchet (Komilis et al., 1999).

La filière de prétraitement biologique avant enfouissement (PTB ou MBT en anglais) a fait son apparition en Allemagne et en Autriche en s’intégrant dans un système global de gestion multi-filière des déchets comme le montre la Figure 6. Dans ces deux pays, le PTB est encadré par une réglementation très contraignante qui a donné naissance à une filière de haute technologie qui inclut des procédés de traitements mécaniques et biologiques très sophistiqués (Lornage et al., 2006). La particularité imposée par la réglementation est le criblage obligatoire du déchet avant le traitement biologique qui implique la séparation d’une fraction à haut pouvoir calorifique et l’entrée dans le traitement biologique de la seule fraction fine.

En France, le concept connaît un récent succès car il s’intègre parfaitement dans une logique de développement durable qui prône la réduction de la durée et de l’intensité des impacts liés à la mise en décharge des DMA. Le PTB est cependant dans bien des cas une manière de mieux faire accepter le centre de stockage qui est accolé aux bâtiments de prétraitement.

Figure 6 : Concept du PTB intégré dans un système global de traitement de déchets (Adib, 2005)

Un des axes moteurs pour les professionnels du déchet semble être le gain de vide de fouille apporté par le PTB qui permet d’étendre la durée de vie des CSD. Aujourd’hui, seules trois installations de PTB avant enfouissement sont recensées en France (Carpentras, Lorient, Mende), mais de nombreux projets, encore à l’état de pré étude, devraient voir le jour.

Les principaux prétraitements mécaniques des déchets traditionnellement utilisés pour concentrer et préparer les matières recyclables pour leur récupération ou préparer la fraction biodégradable pour un traitement biologique sont la réduction granulométrique, la séparation granulométrique et le tri des composants du déchet (Komilis, 1999). Le broyage a été identifié comme un facteur important affectant la biodégradabilité de la matière organique (Buivid et al., 1981 ; Bookter et al., 1982 ; Barlaz et al., 1990). L’utilisation de trommels (tamis rotatifs), courante dans les installations industrielles, permet de séparer les déchets en différentes fractions selon leur taille. Si ceux-ci sont équipés de griffes, ils permettent aussi l’ouverture des sacs contenant les déchets. La taille de maille du trommel utilisé permet une séparation plus ou moins efficace de la matière organique (Rousseaux et al., 1992) et permet, inversement, à une quantité plus ou moins importante du flux d’être déviée du traitement biologique. Les outils d’homogénéisation et de déferraillage (magnétique, par courant de Foucault, etc) peuvent également trouver leur place dans une chaîne de traitement mécanique. La qualité du traitement mécanique influe beaucoup sur la qualité des fractions valorisables (degré de contamination) ou sur la possibilité de dommages causés aux traitements avals.

Il existe différentes options pour le traitement biologique : soit en aérobie, soit en anaérobie, soit une combinaison des deux (Komilis et al., 1999). Les procédés aérobies ont été davantage étudiés que les procédés anaérobies ; ils représentent d’ailleurs une part importante des procédés industriels aujourd’hui en fonctionnement. En effet, l’intégralité

des unités installées en Autriche et 80 % des unités allemandes fonctionnent avec des procédés aérobies (Adib, 2005).

Les objectifs de la stabilisation biologique avant enfouissement (réduction du potentiel méthanogène, de la quantité et de la qualité des émissions liquides, de la masse de déchet à enfouir) sont différents de ceux du compostage ou de la méthanisation des déchets organiques qui visent à produire un compost stable biologiquement et valorisable en agriculture. Malgré tout, la confusion entre compostage d’ordures ménagères et PTB avant enfouissement est courante. Sans doute parce que les industriels se sont largement inspirés des procédés de compostage existants.

Il est possible de distinguer 3 types de procédés aérobies : les procédés statiques (en andain ou en containeur sans retournement), les procédés semi-dynamiques (en andain, en containeur ou en hall avec retournement automatique) et les procédés dynamiques (en tunnel rotatif fermé ou en phase liquide) (IFAS, 2006). Les procédés anaérobies peuvent quant à eux être classés selon s’ils sont destinés à traiter l’intégralité ou une partie du flux de déchet, par voie humide ou par voie sèche ou suivant le nombre d’étapes du procédé. Dans tous les cas, la fermentation anaérobie des déchets est suivie d’un traitement aérobie.

Nombreuses sont les études qui ont montré la réduction de la charge organique des lixiviats et de la production de biogaz des déchets prétraités une fois enfouis (Leikam et al., 1995 ; Rieger et al., 1995 ; Höring et al., 1999 ; Raninger et al., 1999 ; Zach et al., 1999 ; Soyez et al., 2002 ; Robinson et al., 2005 ). La perte de masse humide durant le traitement biologique, déterminante quant à la réduction des tonnages destinés à la décharge, peut atteindre 20 à 47 % selon le procédé, le type de déchet et la durée de traitement (Leikam et al., 1997 ; Von Felde et al., 1997 ; Scheelhaase, 2001 ; Adani et al., 2004). Suivant le degré de traitement mécanique et notamment la granulométrie du produit stabilisé, des densités de placement allant jusqu’à 1,43 t.m-3 ont pu être obtenues (Schulte et al., 2006), permettant ainsi d’augmenter encore le gain de place (vide de fouille) en décharge.

Il est cependant important de noter la particularité de la filière de prétraitement biologique de type allemand (ou autrichien). En France, à défaut d’une réglementation qui impose des critères très stricts d’acceptabilité en décharge, une alternative de PTB moins poussé, effectué sur l’ensemble du flux de déchet est possible (à l’image de l’unité de Lorient, mise en service en 2005 pour le traitement de 57000 tonnes de déchets ménagers résiduels). Les résultats des très nombreuses études allemandes sont donc à interpréter en tenant compte de ces particularités qui modifient la qualité du déchet stabilisé en sortie (composition, stabilité biologique et caractéristiques mécaniques), les bilans matière de la filière, les performances des traitements, etc.

Les études disponibles, en particulier dans la littérature allemande, définissent parfaitement le concept tel qu’il a été imaginé dans le contexte allemand, mais ne permettent pas de répondre à toutes les incertitudes relatives aux performances techniques et environnementales qui peuvent exister, en particulier, dans le contexte français. L’impact d’un traitement biologique moins poussé sur le comportement du déchet en conditions de stockage ou l’influence du traitement de l’intégralité du flux de déchet sur les performances du prétraitement, sur les émissions associées et sur la mise en

décharge des déchets prétraités sont des questions auxquelles il est nécessaire de répondre. De plus, les études au sujet des impacts environnementaux de la filière PTB manquent afin de pouvoir comparer sur des bases communes (même gisement de déchet) et dans leur intégralité (de la réception du déchet à la phase de stockage) le PTB avant enfouissement aux autres filières de stockage.

Chapitre III : Les composés organiques volatils