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La sudation est le seul mécanisme actif de thermolyse. Il peut être débordé dans des circonstances extrêmes et d’abord chez les sujets les plus fragiles. Cela peut aboutir à deux tableaux symétriques mais également dramatiques : la déshydratation par excès de pertes, et le coup de chaleur par effondrement de la sudation. Ils peuvent devenir mortels sans une compensation efficace, qu’il faut commencer le plus tôt possible pour qu’elle soit efficace.

A. La déshydratation par excès de sueur

La sudation peut consommer jusqu’à 1l/heure de sérum jusqu’à atteindre 10 l/jour. Ceci ne peut se faire sans renouvellement, permanent, des réserves, avant même qu’elles ne baissent.

La première fragilisation du processus est marquée par le ruissèlement de la sueur sur la peau. Cela est dû à la constitution d’une « gangue » de vapeur d’eau autour du corps, favorisée par une atmosphère humide et l’absence de vent. La sueur qui ruissèle ne refroidit plus le corps, malgré une consommation maintenue d’eau et d’énergie. L’eau consommée est gaspillée, et surtout la chaleur centrale n’est plus maintenue fixe. Il faut considérer le ruissèlement de la sueur comme une alerte. Pour permettre à son évaporation de reprendre, il faut chasser la vapeur d’eau par un courant d’air (lequel permet en même temps une reprise de la perte thermique par convection).

Cette alerte, très souvent négligée, survient très en amont de la déshydratation grave. Le rapprochement de deux chiffres traduit le danger : un homme adulte dispose de 5 litres de liquide circulant, et la sueur peut consommer 10 litres de sérum par jour ! Il lui faut donc un renouvellement rapide et suffisant en volume pour ne pas retentir sur la circulation.

Une perte de 5 % du liquide circulant entraine une diminution de 20 % des capacités physiques. La déshydratation survient, s’il n’y a pas renouvellement des pertes adapté en temps et en volume, chez ceux qui n’ont pas conscience de l’importance des pertes (par exemple quand deux litres d’eau sont à tort jugés suffisants, alors que la perte est de 8 litres !). Chez les travailleurs en extérieur (BTP) mais aussi en intérieur, près de sources de chaleur intenses (chaudronnerie, pressing, boulangerie, fonderie…), ou sportifs amateurs moins éclairés sur ce risque que les professionnels. Mais aussi chez ceux qui ne peuvent pas se plaindre (tout petits, handicapés mentaux, personnes privées de liberté, SDF). Ceux enfin qui cumulent les pertes hydriques : sujets infectés et fébriles, ou qui présentent diarrhée ou vomissements (lesquels interdisent en outre une réhydratation per os), alcooliques enfin.

S’il n’y a pas de compensation rapide, devant un tableau qui associe : soif intense, sécheresse de la peau et des muqueuses, fatigue extrême, vertiges, propos incohérents, démarche ébrieuse, perte de connaissance, la mort peut survenir rapidement, par désamorçage circulatoire.

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B. Le coup de chaleur par disparition de la sudation

C’est le risque majeur chez les personnes âgées exposées à une chaleur persistante. Le système sudoripare réagit bien lors de la première agression. Certes, vieilli, il répond moins vite, moins fort et moins longtemps que chez un adulte, mais le principal est fait. Par contre si la température reste élevée, le tableau se dégrade assez vite. Le lendemain la réponse sera plus lente, plus faible et plus brève que le premier jour. Et si la température reste élevée pendant la nuit, ne permettant pas de repos du système, la réponse va s’effondrer et la température centrale grimper.

Peau chaude, rouge, sèche (contrastant avec une muqueuse jugale normale), maux de tête, confusion, perte de connaissance, parfois convulsions. La mort, fréquente, survient en quelques heures.

Le même tableau peut survenir dès les premières heures si l’information n’atteint pas les centres nerveux et/ou ne redescend pas vers l’effecteur. C’est le cas de patients atteints de lésion du SNC, de maladie psychiatrique ou consommant des produits psychotropes, médicaments ou consommation extra médicamenteuse.

Il peut aussi survenir chez l’insuffisant cardiaque majeur, qui ne peut faire face à la demande énergétique supplémentaire. Une défaillance multiviscérale survient très vite. La mort est alors inéluctable.

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C. Principes de prise en charge

Ces deux tableaux sont redoutables. Une prise en charge immédiate et efficace n’évite pas toujours une issue fatale. C’est dire l’importance d’une prévention énergique, très en amont d’un tableau qu’on ne doit pas laisser se constituer.

L’accueil d’un malade défaillant dans des conditions caniculaires impose une prise en charge en extrême urgence Mais choisir les modalités sur le seul critère de l’âge est insuffisant pour lancer une thérapeutique adaptée. Un jeune adulte, travailleur du BTP, en pleine déshydratation aura laissé sa chaleur centrale augmenter, quand il ruisselait de sueur.

Surtout, le vieillard en plein coup de chaleur a commencé par transpirer, avant qu’on ne le laisse évoluer.

Pour tous les deux il faut évaluer immédiatement le degré de déshydratation en explorant l’humidité de la muqueuse jugale (intérieur des joues) et la tonicité des globes oculaires.

Cela permet de refroidir le patient dans les deux cas, mais de ne réhydrater que ceux qui en ont besoin.

D. Facteurs de risque (décrits dans la littérature et études InVS)

- Chaleur humide, absence de vent et de courant d’air réduisent les possibilités de transpiration

Une pollution atmosphérique (ozone) associée peut aggraver le risque lié à la chaleur.

- Un habitat absent ou vétuste, sans isolement thermique, étage élevé (dernier étage, mansarde), grande baie vitrée, protection thermique impossible, centre-ville éloigné de toute végétation, absence d’endroit frais ou climatisé accessible

- Isolement, désocialisation

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- Profession à risque : boulangerie, pressing, fonderie, BTP - Pratique sportive intensive : jogging, bicyclette…

- Maladies chroniques déséquilibrées

- Rescapés fragilisés d’une vague de chaleur antérieure

- Grand âge, perte d’autonomie, mobilité réduite ou absente, incapacité à adapter son comportement à la chaleur (augmenter la fréquence des douches, habillement plus léger, rafraîchissement, se rendre dans un endroit frais)

- Antécédents de pathologies cardiovasculaires, neurologiques, troubles mentaux ou pression sanguine élevée

- Consommation de psychotropes (médicaments nécessaires ou détournés de leur usage) - Dénutrition et obésité.

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