• Aucun résultat trouvé

Entre la faim et le rêve

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 129-138)

Comme le titre l’indique, História do Brasil vise à synthétiser toute l’histoire du pays depuis la conquête portugaise, en deux heures et trente-sept minutes. C’est à la voix off que sera attribuée cette fonction narrative. Il est important de rappeler que História do Brasil est un film inachevé, et que par conséquent, ses différentes séquences présentent des écarts quant au degré de développement. Alors que certaines d’entre elles semblent être de simples ébauches d’idées encore en cours d’élaboration, ou bien exposent un montage apparemment aléatoire, d’autres sont complexes et riches en détails. Dans un carton exposé au commencement du film et daté de 1985 (après la mort de Glauber Rocha), Marcos Medeiros nous informe qu’ils avaient l’intention d’inclure dans le film des matériaux d’archives provenant de la Cinémathèque Brésilienne, et qu’il manque au film « la musique, le son du Brésil », ce qui atténuerait le rythme monotone de la narration. Les matériaux de la Cinémathèque Brésilienne enrichiraient probablement le montage et remplaceraient les extraits de films brésiliens qui, dans História do Brasil, sont sous-titrées en espagnol, parce que les copies utilisées appartenaient à l’ICAIC (Instituto Cubano del Arte e Industria Cinematográficos). Dans son bref texte d’introduction, ajouté dans la dernière version du montage du film, Medeiros conclut : « Incomplet mais intense, [le film est] offert au public brésilien ».

História do Brasil est formellement divisé en trois parties, structurellement distinctes. La principale partie, qui est aussi la plus grande, est composée sur la bande sonore de la narration impersonnelle et objective en off de faits historiques (allant de la fin du XVe siècle jusqu’au début des années 1970) et sur la bande visuelle d’images réemployées, provenant de divers supports et temporalités. Il s’agit de la partie que Bertrand Ficamos qualifie de cours magistral380 et qui occupe les deux premières heures du film. Cette partie est exempte de composition sonore autre que la narration, se limitant aux combinaisons entre cette dernière, les images et le silence. Suite à la chronologie historique, s’amorce une sorte d’épilogue qui commence et se termine par des séquences d’environ dix minutes chacune, que Rocha nomme

« commentaires musicaux ». Ceux-ci sont composés d’un pot-pourri de chansons brésiliennes du XXe siècle et d’images filmées diverses, pour la plupart contemporaines. Après les commentaires musicaux, une conversation d’environ dix-sept minutes prend place, entre Rocha, Medeiros et un troisième homme non identifié. Il s’agit d’une conversation fragmentée, également en voix off, qui aborde des questions liées au contexte politique brésilien de l’époque,

380 Bertrand Ficamos, « L’histoire du Brésil selon Glauber Rocha », dans Jean-Pierrre Bertin-Maghit (org.), Lorsque Clio s’empare du documentaire, Paris: Ed INA/ L’Harmattan, Les médias en actes, Vol. I, 2011. p. 121.

128 à la fois à partir de la révision d’événements historiques mentionnés précédemment dans le film, mais aussi considérant les alternatives possibles pour l’avenir du pays, en particulier dans une optique de renforcement de la gauche et des perspectives progressistes et révolutionnaires en général. Glauber, qui joue d’abord le rôle de questionneur – ou d’intervieweur – tandis que les deux autres hommes – en particulier Medeiros – élaborent les réponses, recentre progressivement les commentaires sur la politique nationale. De brèves incursions de la voix de la narration, effectuées à la troisième personne, ponctuent l’entretien informel entre les auteurs, apportant de nouvelles informations sur la progression des événements historiques du pays. Dans cette partie, la bande-image redevient extrêmement diverse, réunissant différents thèmes, supports et périodes historiques.

Bertrand Ficamos associe les différentes parties du montage d’História do Brasil aux différentes époques abordées par le film. Selon l’auteur, le cours magistral représente le passé,

« l’histoire telle qu’elle s’impose à nous dans le discours objectivé de l’historien mais dont on a cessé de penser qu’il pouvait saisir l’expérience humaine dans sa totalité381 ». Quant au dialogue entre les auteurs discutant du présent, il expose « l’actualité, le temps de la spéculation sur le futur, le bouillonnement de la conversation, l’audace, la naïveté ou même la vacuité des hypothèses qui peuvent être avancées, l’absence de conceptualisation382 ». Enfin, la partie des commentaires musicaux incarne « le futur et c’est aussi la foi retrouvée dans le cinéma, dans le sens où Rocha ne s’y exprime plus [dans ces séquences] que par des images et des sons, abandonnant totalement le verbe383 ». Ceux-ci sont sans doute les intérêts dominants de chacune des parties du film, mais il est important de souligner que le temps présent est central dans chacune d’elles : le passé abordé dans la première partie est constamment associé au présent au moyen de la combinaison de la narration et des images, de même que la projection vers le futur effectuée par commentaire musical se réalise exclusivement à partir d’images du temps présent (des années 60 et 70).

Avant d’entrer dans l’analyse du film proprement dite, il est intéressant de s’attarder un peu sur l’organisation temporelle de la division historique de História do Brasil. Bien que la chronologie commence au XVe siècle, plus de la moitié du « cours magistral » est dédiée au XXe siècle ou, dans une division qui peut sembler plus appropriée, à la période de la République du Brésil (de 1889 à 1973), avec une durée de soixante-dix minutes. Malgré le poids accordé aux expériences de la colonisation et de l’empire dans la formation nationale ainsi que dans une grande partie de ses problèmes les plus profonds, ce sont les faits du XXe siècle qui sont

381 Ibid., p. 123.

382 Ibid., p. 123.

383 Ibid., p. 123.

129 élaborés avec le plus de calme et de détails. Cette domination révèle l’importance du XXe siècle dans la lecture proposée par les cinéastes. Dans un certain sens, c’est l’objectif qu’ils souhaitent atteindre : une meilleure compréhension du temps présent et des forces qui agissent au moment de la dictature militaire vécue par le pays.

Ce que les cinéastes décident d’inclure, de mettre en évidence, de réduire ou d’exclure dans leur discours sur l’histoire du Brésil nous révèle ce qu’ils considèrent légitime de prendre en compte dans la réinterprétation critique qu’ils proposent. La récurrence du thème de la violence – par le biais des images et des faits choisis par la narration – attire l’attention dès le premier visionnage du film. C’est une histoire de soulèvements, d’émeutes, de guerres et de répressions que nous écoutons et voyons dans la séquence historique montée. Il suffit d’un bref aperçu de la série des faits violents décrits pour s’en apercevoir : conquête coloniale, guerre contre les français, Révolte de Palmares, résistance indigène des Indiens Janduim, invasion hollandaise, Bataille de Guararapes, Guerre des Mascates, Conspiration de Minas Gerais, Insurrection Pernambucainne, luttes latino-américaines commandées par José Artigas, José de San Martín ou Simón Bolívar, Guerre Cisplatine, Guerre des Farrapos, Cabanada, Sabinada, Guerre du Paraguay, Guerre de Canudos, lutte pour l’état d’Acre, Révolte de Chibata, Révolte Tenentistas, Résistance de Lampião et des cangaceiros384, Colonne Prestes, révolte communiste de 1935, Deuxième Guerre Mondiale, Révolution Cubaine, Suicide de Gétulio Vargas, Coup d’État militaire, résistance révolutionnaire suite au coup d’État par l’action armée et la séquestration d’ambassadeurs, torture et répression du gouvernement militaire. L’histoire que raconte História do Brasil est surtout celle des pouvoirs – de ceux qui commandent et de ceux qui sont soumis – et des luttes politiques. D’un côté, on observe la persistance d’une violente domination (des portugais, des élites rurales et urbaines, des pays impérialistes), et de l’autre, une histoire de foyers de résistance et rébellions, qui agissent aussi par la violence. Ainsi, le récit du film renforce le conflit entre violence oppressive des forces conservatrices et violence libératrice des minorités et forces révolutionnaires, marquant presque toujours clairement sa position, qui légitime et valorise les rébellions contre les puissances dominantes et cherche à mettre en évidence une tradition de violence contestataire dans l’histoire brésilienne.

Pareillement au discours, les images compilent aussi des situations de violence fictionnelles et documentaires, principalement à partir de films liés au Cinema Novo, y compris ceux de

384 « Cangaço » est le nom donné à une forme de banditisme dans la région du Nordeste au Brésil, de la moitié du XIXe siècle au début du XXe siècle. Dans cette région aride et très difficile à cultiver (le Sertão), les rapports sociaux sont particulièrement durs et les inégalités plus criantes qu’ailleurs. Dans une forme de révolte contre la domination des propriétaires terriens et le gouvernement, beaucoup d’hommes et de femmes décident de devenir des bandits nomades (les « cangaçeiros »), errant dans les grandes étendues de l’arrière-pays, cherchant de l’argent, de la nourriture, dans un esprit de vengeance.

130 Glauber Rocha lui-même. Au sujet du mouvement, Rocha déclare dans Esthétique de la faim (1965) : « Ce n’est pas un film, mais un ensemble des films en évolution qui donnera, finalement, au public, la conscience de sa propre existence385 ». D’une certaine manière, História do Brasil cherche à mettre cette thèse en pratique, en réunissant les efforts de construction de l’histoire réalisés par différents cinéastes identifiés au Cinema Novo et en élevant cet ensemble de films à la place de lecteurs et d’agents importants de l’histoire. Les représentations de l’inégalité sociale brésilienne, de la faim, ainsi que des actions violentes souffertes ou exercées par les opprimés, parcourent l’ensemble des scènes choisies au montage, unissant ainsi les divers films. Les fragments de la production historique du Cinema Novo compilés dans História do Brasil semblent donc chercher à provoquer chez le spectateur la prise de conscience de l’existence du pays et de son histoire (« sa propre existence », selon les mots de Rocha).

La dichotomie entre récits révolutionnaires et conservateurs est également présente sur la bande-image. On y observe d’une part des films du Cinema Novo (et du Novo Cinema Latino Americano) et d’autre part, à petite échelle, des films traditionnels tels que Independência ou Morte ! (Carlos Coimbra, 1972) et Sinhá Moça (Tom Payne, 1953). Dans Alegorias do Subdesenvolvimento, Ismail Xavier indique précisément ces deux films comme exemples de récits de fondation dans le cinéma brésilien. Comme le définit l’auteur, le récit de fondation, souvent fruit du cinéma industriel et de caractère mélodramatique, « met en jeu le processus de formation nationale – ou se focalise sur un moment décisif de cette formation –, à partir d’un schéma où se mêlent drames privés et grandes affaires publiques, où Eros et Polis s’unissent, et la passion amoureuse, le désir hétérosexuel d’un couple protagoniste fusionne avec un réseau d’événements historiques pour que leur destin condense, comme une figure solide, le destin national386 ».

C’est donc le cas des films de Payne et Coimbra, bien qu’ils furent réalisés dans des contextes différents387. Dans Sinhá Moça (1953) « le moment de l’abolition se profile comme passage civilisateur dans lequel la trame de l’émancipation des esclaves se concentre sur le travail secret du héros, qui obtient sa récompense finale aux côtés de la généreuse sinhá388 »– les deux protagonistes sont blancs. Pour sa part, Independência ou Morte (1972) décrit la prise

385 Glauber Rocha, « Esthétique de la faim », dans Sylvie Pierre, Glauber Rocha, Paris, Éd. Cahiers du cinéma, 1987, p. 125.

386 Ismail Xavier, Alegorias do subdesenvolvimento: cinema novo, tropicalismo e cinema marginal, São Paulo, Cosac Naify, 2012, p. 17.

387 Sinhá Moça est l'un des films produits par la Companhia Cinematográfica Vera Cruz, une tentative de créer un modèle de production industrielle dans le cinéma brésilien au début des années 1950. Independência ou Morte, avec un grand succès de public, a été réalisée pendant la dictature militaire et distribué par la Embrafilmes. Pour savoir plus sur le commentaire d'Ismail Xavier sur les films en tant que récits fondateurs, voir Ismail Xavier, Alegorias do Subdesenvolvimento,op. cit., p.20-21.

388 Ismail Xavier, Alegorias do subdesenvolvimento, op. cit. p. 20.

131 d’indépendance du pays à partir de la construction de l’héroïsme du prince Pedro I. Il s’agit ici

« d’un cas rare d’harmonie avec l’esprit d’un régime qui n’a pas trouvé le cinéma qu’il souhaitait et a assumé la télévision (et les télénovelas de fondation) comme véhicule de pénétration populaire concordant de sa politique d’intégration nationale389 ». Les films de fiction historique d’auteurs du Cinema Novo s’opposent à ces récits, en termes de perspective historico-politique et de traitement esthétique, pouvant être alors considérés comme des contres-récits de fondaction. História do Brasil, en assimilant ces récits et contres-récits, présente un conflit de points de vue sur l’histoire existant dans la sphère du cinéma brésilien.

Comme nous le verrons à partir d’analyses de séquences, le film expose ainsi une dispute de récits plus ample, présente au sein de la société brésilienne, et assume sa position aux côtés du Cinema Novo, réaffirmant l’esthétique de la faim.

Anita Leandro écrit au sujet de História do Brasil que « toute l’histoire du pays est revue à partir d’une réflexion sur deux questions qui la traversent : la faim et la violence 390 ». Ces deux questions sont profondément liées dans la pensée glauberienne, comme l’auteur l’explique clairement dans Esthétique de la faim, dont le titre, non par hasard, est aussi traduit en français comme Esthétique de la violence. « La plus noble manifestation culturelle de la faim, c’est la violence391 »dit une des phrases du manifeste de Rocha, qui plus loin continue : « Tant qu’il ne lève pas les armes, le colonisé est un esclave : il aura fallu un premier policier mort pour que le Français perçoive un Algérien 392 ». La violence est donc considérée comme la plus légitime et courageuse réponse à la faim ressentie, et c’est elle qui possède un réel pouvoir d’action et de transformation. Selon Rocha, cette violence transformatrice doit être incorporée à l’art, à une esthétique qui se prétend réellement révolutionnaire, non simplement en tant que thématique mais aussi en tant que forme audiovisuelle. Il s’agit d’une esthétique de rupture, de conflit, qui, idéalement, aurait la capacité de conduire les spectateurs à la révolte et à l’action effective.

Selon Anita Leandro :

Avec História do Brasil l’esthétique de la faim se radicalise [...]. Nous nous trouvons face à un film sans concessions, qui, au-delà de constater que le Brésil reste colonial et esclavocrate, une évidence historique mise en relief par la violence des images, propose aussi, grâce au cinéma, une méthode de rupture avec toutes les formes de colonialisme et de servitude. Cette méthode consiste à mettre la faim au premier plan : notre histoire, c’est l’histoire de la faim, de la grande faim brésilienne, sa plus grande richesse. Et le cinéma, selon le manifeste, serait l’espace de représentation de cette faim, lieu de confluence de tout le potentiel de violence qu’elle est capable d’engendrer, à la recherche d’une sortie révolutionnaire et transformatrice pour la société brésilienne393.

389 Ibid., p. 21.

390 Anita Leandro, História do Brasil, op. cit., p. 5.

391 Glauber Rocha, « Esthétique de la faim », dans Sylvie Pierre, Glauber Rocha, op. cit., p. 124.

392 Ibid., p. 124.

393 Anita Leandro, História do Brasil, op. cit., p. 6.

132 Grâce à des moyens distincts de ceux employés par Glauber Rocha dans ses films antérieurs, et en collaboration avec le militant politique Marcos Medeiros, História do Brasil actualise les possibilités d’entrelacement entre faim et violence dans l’esthétique glauberienne. Il est intéressant d’ouvrir ici une brève parenthèse afin d’observer la relation conflictuelle existante entre esthétique de la faim et esthétique anthropophagique. Pour aborder et montrer cette faim essentielle, cette faim de l’autre qui mène à l’impotence et néanmoins à la nécessité de création (et d’imagination), les cinéastes choisissent l’esthétique anthropophagique qui dévore tout, qui mélange les temps, les matériaux et les perspectives, et cherchent ainsi, par l’excès, à rassasier un manque inaccessible.

Comme le souligne Cardoso, la violence assume simultanément dans le film le rôle « de style du récit filmique, puisqu’elle est un critère essentiel dans le choix des images et au montage, mais aussi de représentation de la dynamique de transformation de l’histoire, dans la mesure où la violence est liée aux changements sociaux et économiques du pays394 ». Transformant la célèbre phrase d’Eisenstein, pour qui « montage est conflit395 », nous pouvons dire que dans História do Brasil, l’histoire est conflit, et le montage audiovisuel, en la reflétant, en est aussi un. L’histoire s’écrit à travers les guerres et insurrections, tandis que le montage s’effectue à travers la tension entre éléments hétérogènes et le conflit entre image et son. Cette compréhension, aussi bien de l’histoire que du montage, se fait particulièrement présente chez Rocha dans sa correspondance, dans laquelle le cinéaste se sert fréquemment de l’idée de

« dialectique » pour l’expliquer.

Dans ses différents textes et cartes, Glauber parle de « dialectique » ou de « montage dialectique » lorsqu’il se réfère à presque tous se films. Il déclare même que le montage de História do Brasil est bon du fait de sa structure dialectique. L’utilisation de l’idée de dialectique est chez lui tellement vaste et fréquente qu’il est possible de penser que pour Rocha, comme pour Eisenstein lui-même selon l’interprétation de Jacques Aumont, « tout conflit, toute contradiction […] relève de la dialectique396 ». Dans le cas de Rocha, l’idée évoque directement la théorie et la pratique du montage eisensteinien. En tant que méthode de montage, la dialectique s’effectue à partir du conflit entre éléments : confrontation entre couleurs, textures, plans, mouvements, ou – comme cela est particulièrement exploré dans História do Brasil – entre image et son. Mais la notion de dialectique dans la réflexion de Glauber présente aussi un engagement politique révolutionnaire. La dialectique est la méthode nécessaire à la révolution

394 Maurício Cardoso, O Cinema Tricontinental de Glauber Rocha, op. cit., p. 238.

395 Serguei Eisenstein, Le Film, sa forme, son sens, op. cit., p. 40.

396 Jacques Aumont, Montage Eisenstein. op. cit., p. 92.

133 esthétique, qui est associée à la révolution politique. En ce sens, son idée de la dialectique – et du « matérialisme dialectique » – s’établit à partir d’une perspective marxiste déclarée.

Cette perspective est frappante dans la manière qu’a História do Brasil d’aborder les sujets traités, et on la remarque notamment par la prédominance dans le discours historique d’un raisonnement économique de posture anti-impérialiste, allant de pair avec la question de la lutte des classes397. On peut souligner également le vocabulaire d’inspiration marxiste utilisé par la narration, typique des divers groupes de la gauche brésilienne de l’époque, et qui comprend des termes tels que « matérialisation dialectique », « impérialisme international », « bourgeoisie industrielle », « prolétariat », « masses », « lutte des classes », etc. Avant l’exil, Marcos Medeiros était un leader étudiant qui opérait au PCBR (Parti Communiste Brésilien Révolutionnaire), une des dissidences du PCB formées après 1967. Suivant une tendance marxiste-léniniste, le parti est particulièrement influencé par l’exemple de la révolution cubaine et projette la formation d’une armée révolutionnaire qui se concentrerait à la campagne, comme l’explique Ridenti398. Glauber Rocha quant à lui, ne s’associe directement à aucune organisation, mais il montre dans sa trajectoire une admiration pour la lutte armée, et plus particulièrement pour la figure de Carlos Marighela, fondacteur de l’ALN (Alliance Nationale Libératrice), « possiblement l’organisation de guérilla la plus romantique399 », celle-ci mettant l’action au premier plan avant la théorie. Mais comme le fait remarquer Marcelo Ridenti au sujet du cinéaste : « S’il y a un fil conducteur dans le chaos apparent de sa pensée et de son œuvre, il n’est ni dans son marxisme ni dans ses avant-gardismes, mais dans sa proposition de

Cette perspective est frappante dans la manière qu’a História do Brasil d’aborder les sujets traités, et on la remarque notamment par la prédominance dans le discours historique d’un raisonnement économique de posture anti-impérialiste, allant de pair avec la question de la lutte des classes397. On peut souligner également le vocabulaire d’inspiration marxiste utilisé par la narration, typique des divers groupes de la gauche brésilienne de l’époque, et qui comprend des termes tels que « matérialisation dialectique », « impérialisme international », « bourgeoisie industrielle », « prolétariat », « masses », « lutte des classes », etc. Avant l’exil, Marcos Medeiros était un leader étudiant qui opérait au PCBR (Parti Communiste Brésilien Révolutionnaire), une des dissidences du PCB formées après 1967. Suivant une tendance marxiste-léniniste, le parti est particulièrement influencé par l’exemple de la révolution cubaine et projette la formation d’une armée révolutionnaire qui se concentrerait à la campagne, comme l’explique Ridenti398. Glauber Rocha quant à lui, ne s’associe directement à aucune organisation, mais il montre dans sa trajectoire une admiration pour la lutte armée, et plus particulièrement pour la figure de Carlos Marighela, fondacteur de l’ALN (Alliance Nationale Libératrice), « possiblement l’organisation de guérilla la plus romantique399 », celle-ci mettant l’action au premier plan avant la théorie. Mais comme le fait remarquer Marcelo Ridenti au sujet du cinéaste : « S’il y a un fil conducteur dans le chaos apparent de sa pensée et de son œuvre, il n’est ni dans son marxisme ni dans ses avant-gardismes, mais dans sa proposition de

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 129-138)