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3.4.1 Sexe et genre

a. Définitions

Selon les Instituts de recherche en Santé du Canada, le sexe est déterminé par les attributs biologiques retrouvés chez les humains (2015). Il est ainsi associé à des caractéristiques physiques ou physiologiques, par exemple l’expression des gènes ou la fonction hormonale. La notion de genre est plus complexe, celui-ci

étant déterminé par les rôles, comportements, expressions et identités associés aux hommes et aux femmes selon des normes sociétales (Instituts de recherche en santé du Canada, 2015). Les termes « homme » et « femme » peuvent ainsi définir deux catégories de sexe, alors que les qualificatifs « masculin » et « féminin » seraient plutôt représentatifs du genre (Organisation mondiale de la santé, 2015b). Le sexe et le genre sont intimement reliés et la frontière entre les deux concepts peut parfois être difficile à déterminer. Par exemple, une différence comportementale, donc liée au genre, peut influencer une réponse biologique liée au sexe. Dans le cadre de ce mémoire, les différences biologiques seront abordées par rapport au sexe et les différences comportementales seront discutées selon le genre. Par ailleurs, il est intéressant de noter que la littérature réfère souvent simplement aux hommes et aux femmes, sans nécessairement faire la distinction quant au sexe et au genre. L’influence de ces deux concepts sur les sensations d’appétit et le comportement alimentaire sera discutée dans les paragraphes suivants.

b. Influence du sexe

Les caractéristiques sexuelles peuvent influencer différemment les sensations d’appétit chez les hommes et les femmes. Tout d’abord, les besoins énergétiques des hommes étant généralement plus élevés que ceux des femmes (Santé Canada, 2011), il est normal que l’appétit de ces derniers soit plus élevé afin de leur permettre d’ingérer la quantité de nourriture nécessaire pour combler leurs besoins. Cet aspect devrait d’ailleurs être pris en considération dans l’analyse statistique comparative des données relatives aux sensations d’appétit chez les hommes et les femmes (Blundell et al., 2010). Des différences importantes existent également entre les deux sexes sur le plan hormonal. Par exemple, les taux d’estradiol et de testostérone, deux hormones stéroïdiennes qui sont principalement produites respectivement par les ovaires chez la femme et les testicules chez l’homme, diffèrent entre les deux sexes (Collaer et Hines, 1995). La femme est aussi sujette à une variation importante du taux de ses hormones sexuelles pendant les différentes phases du cycle menstruel, ce qui peut avoir un impact sur les sensations d’appétit et sur l’apport alimentaire. Plus précisément, l’apport alimentaire serait augmenté durant la phase lutéale, soit au moment où le taux de progestérone est le plus élevé, et reviendrait à la normale durant la phase folliculaire, au moment où le taux d’oestrogène est le plus élevé (Dye et Blundell, 1997; Hirschberg, 2012). La phase du cycle menstruel est donc une variable importante à considérer pour l’étude des sensations d’appétit et de l’apport alimentaire chez la femme (Buffenstein, Poppitt, McDevitt, et Prentice, 1995). Plusieurs études intègrent d’ailleurs cet aspect dans leur méthodologie en prenant soin d’évaluer les femmes pendant la phase folliculaire de leur cycle menstruel (Bedard, Riverin, Dodin, Corneau, et Lemieux, 2012; Gravel et al., 2012; Kozimor, Chang, et Cooper, 2013).

La sécrétion d’hormones reliées au contrôle de l’appétit pourrait également différer selon le sexe. À titre d’exemple, une étude a observé des niveaux de ghréline plus élevés chez les femmes avant et après la

consommation d’une solution liquide de glucides ou de lipides (Greenman et al., 2004). Cette étude comportait toutefois un nombre restreint de participants (13 hommes et 11 femmes), et les résultats ne sont pas appuyés par d’autres auteurs (Kim et al., 2005; Purnell, Weigle, Breen, et Cummings, 2003). La différence de sécrétion au niveau de la leptine semble mieux reconnue. En effet, les niveaux de leptine sont généralement plus élevés chez les femmes que chez les hommes, cette différence semblant indépendante de la distribution corporelle du tissu adipeux (Andreasson, Unden, Elofsson, et Brismar, 2012; Casabiell et al., 2001; Kim et al., 2005). L’étude de Kim et collaborateurs (2005) a également observé des niveaux de PYY plus élevés chez les femmes après un test oral de tolérance au glucose. Quelques études utilisant la résonance magnétique ont également démontré une réponse neuronale différente entre les hommes et les femmes suite à la vue ou à la dégustation de nourriture. L’étude de Cornier et collaborateurs (2010) a démontré que certaines régions du cerveau étaient plus activées chez les femmes que chez les hommes suite à la vue d’aliments hédoniques, suggérant que les femmes réagiraient plus à la stimulation alimentaire que les hommes. L’étude de Smeets et collaborateurs (2006) a aussi démontré que les régions du cerveau activées suite à une dégustation de chocolat différaient entre les hommes et les femmes, suggérant que le processus de rassasiement pourrait varier selon le sexe. Bien que la littérature sur le sujet soit pour le moment peu développée, il y a ainsi lieu de croire que le sexe peut influencer les réponses neuronale ou hormonale reliées au contrôle de l’appétit.

c. Influence du genre

Les comportements alimentaires et les sensations d’appétit peuvent également différer selon le genre. Tout d’abord, plusieurs études ont démontré que les femmes ont plus tendance à consulter l’information nutritionnelle que les hommes, ont de meilleures connaissances en nutrition et sont plus susceptibles d’effectuer leurs choix alimentaires en fonction de l’étiquetage nutritionnel et de leur condition de santé (Campos, Doxey, et Hammond, 2011; Canadian Foundation for Dietetic Research, 2013; Cooke et Papadaki, 2014; Decima Research, 2006; Storcksdieck et Wills, 2012). Par ailleurs, une meilleure qualité de l’alimentation a été observée chez les femmes (Garriguet, 2009; Leblanc, Begin, Corneau, Dodin, et Lemieux, 2014). Celles-ci auraient également un niveau d’auto-détermination plus élevé que les hommes par rapport à la régulation de l’apport alimentaire (Leblanc et al., 2014), ainsi que des niveaux de restriction et de désinhibition plus élevés (Conner, Johnson, et Grogan, 2004; Keller et van der Horst, 2013; Provencher, Drapeau, Tremblay, Despres, et Lemieux, 2003). Une étude a également démontré que les hommes homosexuels présentaient des niveaux de restriction plus élevés que les hommes hétérosexuels (Conner et al., 2004), soulignant la préséance du genre sur le sexe en ce qui a trait aux préoccupations cognitives reliées à l’alimentation. En ce sens, un niveau de préoccupation plus élevé pourrait s’expliquer par une insatisfaction plus grande par rapport à l’image corporelle (Conner et al., 2004; Rolls, Fedoroff, et Guthrie, 1991).

Dans un contexte de programme de perte de poids, les femmes seraient plus susceptibles de surconsommer en réponse à leurs émotions, par rapport aux hommes chez qui la surconsommation surviendrait plutôt lors d’événements sociaux (Forster et Jeffery, 1986). Dans un même ordre d’idées, une étude récente a démontré que les femmes seraient plus aptes à ajuster leurs apports alimentaires à leurs besoins dans un contexte ad

libitum, comparativement aux hommes qui surpasseraient leurs besoins d’environ 300 kcal (Cornier et al.,

2010). Cette même étude a démontré que les femmes seraient plus facilement rassasiées que les hommes dans un contexte d’apport énergétique contrôlé (Cornier et al., 2010). Ceci pourrait suggérer que les femmes sont plus sensibles à leurs sensations internes de satiété que les hommes, ou au contraire qu’elles se fient à une quantité fixe connue de nourriture pour combler leurs besoins. Effectivement, une étude récente portant sur l’alimentation intuitive est arrivée à la conclusion que les femmes font moins confiance à leurs signaux internes que les hommes pour leur indiquer quelle quantité de nourriture consommer (Denny, Loth, Eisenberg, et Neumark-Sztainer, 2012). L’alimentation intuitive réfère à la propension d’un individu à se fier à ses sensations physiques de faim et de satiété pour déterminer quand, quoi et quelle quantité manger, et peut se mesurer à l’aide de l’Intuitive Eating Scale (Tylka et Van Diest, 2013). Finalement, une revue de littérature effectuée en 1991 a soulevé que le fait de manger lentement en prenant de petites bouchées était associé à un comportement plus féminin, certaines études ayant même démontré que les femmes consommant de plus petits repas étaient perçues comme ayant une plus belle apparence physique et possédant plus de traits de personnalité typiquement féminins (Bock et Kanarek, 1995; Rolls et al., 1991). Cet aspect rappelle la pression sociale qui pèse sur les femmes pour les inciter à être minces, un sondage canadien révélant d’ailleurs que 80% des femmes échantillonnées désirent perdre du poids alors que plus de la moitié d’entre elles présentent pourtant un poids normal (Kalergis, Leung Yinko, Savoie, Dagenais, et Simpson, 2011).

En résumé, la littérature scientifique démontre que les comportements alimentaires peuvent varier grandement selon le genre. Comme plusieurs de ces comportements sont en lien avec les sensations de faim et de satiété et la quantité ou le type de nourriture consommée, il y a lieu de croire que le genre peut avoir une influence significative sur les sensations d’appétit.

3.4.2 Restriction cognitive

a. Définition

La restriction cognitive se définit comme étant l’effort cognitif effectué par un individu pour restreindre ses apports alimentaires dans le but de contrôler son poids (Yeomans, Tovey, Tinley, et Haynes, 2004). Cet effort est toutefois souvent infructueux à long terme et peut être associé à une réponse émotionnelle accrue face à l’appétence envers certains aliments ainsi qu’à une relation conflictuelle avec la nourriture (Herman et Polivy, 1980; Keller et van der Horst, 2013).

b. Mesure

La restriction peut se mesurer à l’aide de différents questionnaires. La Restraint Scale (échelle de la restriction) a d’abord été proposée en 1975 sous la forme d’un questionnaire comportant cinq questions (Herman et Mack, 1975), puis développée dans les années suivantes jusqu’à sa forme finale proposant un total de dix questions liées aux fluctuations du poids et aux préoccupations par rapport au contrôle des apports alimentaires (Herman et Polivy, 1980). Le score de restriction est calculé en additionnant les valeurs associées à chaque question (variant de 0 à 4 points) et peut se situer entre 0 et 40 points inclusivement. Des seuils ont déjà été proposés pour pouvoir qualifier le niveau de restriction des individus. Ainsi, un homme peut être considéré comme étant restreint s’il obtient un score de 12 ou plus, alors qu’une femme devra obtenir un score de 15 ou plus pour être considérée comme restreinte (Polivy, Herman, et Howard, 1988). Ces seuils ont été déterminés à partir des scores médians obtenus dans un certain nombre d’études effectuées chez les hommes et les femmes. La différence entre les deux sexes s’explique par le fait que les femmes présentent généralement un niveau de restriction plus élevé que les hommes, ce qui affecte la valeur médiane à la hausse (Polivy et al., 1988).

Le Three-Factor Eating Questionnaire (TFEQ), proposé en 1985, permet de mesurer la restriction mais également la désinhibition alimentaire et la susceptibilité à la faim selon trois scores distincts (Stunkard et Messick, 1985). Ce questionnaire, qui comporte 51 questions (21 items pour la restriction, 16 items pour la désinhibition et 14 items pour la susceptibilité à la faim), a par la suite été raffiné afin que chaque score puisse être décliné en sous-scores. Ainsi, la restriction peut être qualifiée de flexible ou rigide, la flexibilité permettant de consommer les aliments « interdits » de façon occasionnelle sans culpabilité, alors que la rigidité est associée à une approche de style « tout ou rien » et ne permet pas ces écarts (Westenhoefer, Stunkard, et Pudel, 1999). La désinhibition peut quant à elle être classifiée d’habituelle (liée à des circonstances entraînant une prédisposition), émotionnelle (associée à des émotions négatives) ou situationnelle (causée par des stimuli environnementaux) (Bond, McDowell, et Wilkinson, 2001). Finalement, la susceptibilité à la faim peut être catégorisée selon le fait qu’elle est déclenchée par des facteurs internes ou externes (Bond et al., 2001). Ces différentes catégories sont illustrées à la figure 10.

Le Dutch Eating Behavior Questionnaire (DEBQ) a été développé dans la même période que le TFEQ. Ce questionnaire, qui comporte 33 questions, permet de mesurer la restriction cognitive (10 items) ainsi que la prédisposition à surconsommer des aliments selon des stimuli externes (10 items) ou émotionnels (13 items). Le score associé à l‘alimentation émotionnelle peut également se diviser en deux sous-scores selon le fait que les émotions provoquant l’envie de manger soient d’origine claire ou diffuse (van Strien, Frijters, Bergers, et Defares, 1986).

Figure 10 : Sous-scores de la restriction, de la désinhibition alimentaire et de la susceptibilité à la faim selon

le TFEQ

La restriction cognitive peut donc se mesurer à l’aide de la Restraint Scale (RS), ou avec les sous-échelles de la restriction du TFEQ et du DEBQ. La principale différence entre ces outils réside dans le fait que même s’ils évaluent tous la préoccupation par rapport au contrôle du poids, seule la RS s’intéresse aux fluctuations du poids. Cette particularité pourrait entraîner une surestimation de la restriction chez les personnes obèses (Stunkard et Messick, 1985; van Strien, Herman, Engels, Larsen, et van Leeuwe, 2007). Il a aussi été proposé que la RS permettait en fait d’identifier les personnes chez qui la restriction est présente mais infructueuse, alors que le TFEQ et le DEBQ permettent d’inclure un plus vaste éventail de personnes restreintes en incluant celles qui arrivent à contrôler leurs apports alimentaires avec succès (Laessle, Tuschl, Kotthaus, et Pirke, 1989; van Strien et al., 2007). La validité des trois outils est tout de même généralement reconnue (Allison, Kalinsky, et Gorman, 1992; Bohrer, Forbush, et Hunt, 2015; Heatherton, Herman, Polivy, King, et McGree, 1988; Laessle et al., 1989; van Strien, Engels, van Staveren, et Herman, 2006; van Strien et al., 2007), et la sélection du questionnaire à utiliser dans un protocole de recherche peut se faire selon le design de l’étude et l’objet précis de la question de recherche (Heatherton et al., 1988).

c. Influence de la restriction cognitive

Plusieurs études se sont intéressées à l’effet de la restriction sur les sensations d’appétit. L’étude de Ogden et Wardle (1990) a démontré que les femmes restreintes ressentaient des niveaux de faim plus élevés que les femmes non restreintes lorsqu’elles croyaient que le contenu calorique d’un aliment était moins élevé. Cette étude suggère ainsi que la restriction pourrait augmenter la sensibilité aux influences externes psychologiques par rapport à la sensation de faim perçue. Dans un même ordre d’idées, l’étude d’Arguin et collaborateurs (2012) a démontré que le potentiel de satiété d’un repas présenté comme étant rassasiant était plus élevé chez les hommes restreints que chez les hommes non restreints. Une autre étude a démontré que la restriction chez les femmes était associée à une diminution de la faim et à une augmentation de la satiété, cet effet n’ayant pas été observé chez les hommes (Martins, Robertson, et Morgan, 2010). Ceci suggère que l’effet de la restriction pourrait agir en interaction avec le sexe. Finalement, d’autres études n’ont pas identifié d’effet de la restriction sur les sensations perçues d’appétit (Crum et al., 2011; Gregersen et al., 2011).

Un certain nombre d’études se sont également intéressées à l’effet de la restriction sur les hormones reliées au contrôle de l’appétit. Une étude effectuée chez des paires de jumelles monozygotes ayant un niveau de restriction différent (une jumelle étant restreinte et l’autre non restreinte) a démontré que les taux de ghréline étaient plus élevés chez les participantes restreintes au cours d’une journée complète où tous les repas et collations étaient fournis (Myhre et al., 2014). Les taux de ghréline n’ont toutefois pas eu d’effet sur l’apport alimentaire. Cette étude suggère que des taux plus élevés de ghréline résulteraient du comportement alimentaire et non d’une prédisposition génétique. Des fluctuations régulières importantes du poids (plus de 10 lb) pourraient également être reliées à des niveaux de ghréline plus élevés, sans avoir d’effet significatif sur la leptine (Hooper et al., 2010). Une autre étude a découvert une corrélation positive entre le niveau de restriction et la sécrétion de ghréline chez des hommes et des femmes adultes de poids normal ou en surpoids, indépendamment de l’IMC (Schur, Cummings, Callahan, et Foster-Schubert, 2008). Aucun effet n’a toutefois été observé sur la leptine, contrairement à l’étude d’Adami et collaborateurs (2002) qui a observé une association négative entre la restriction et la leptine chez des femmes adultes obèses ou en surpoids. Une relation similaire a été observée chez des jeunes filles obèses âgées de 8 à 12 ans, indépendamment de la masse adipeuse (Laessle, Wurmser, et Pirke, 2000). Finalement, une étude a démontré que la restriction pouvait être associée à une réponse amoindrie de la CCK (Burton-Freeman, 2005), alors qu’une autre étude n’a pas observé d’effet de la restriction sur le PYY (Martins et al., 2010).

En résumé, la littérature scientifique ne propose pas de consensus quant à l’effet de la restriction cognitive sur les sensations perçues d’appétit ou sur les hormones reliées au contrôle des apports alimentaires. La grande variabilité entre les populations étudiées, les méthodes de mesure, les questionnaires et les types de repas utilisés peut facilement expliquer la divergence des résultats observés. Il semble toutefois vraisemblable que la restriction cognitive puisse influencer les sensations d’appétit de façon orexigène, et il importe de poursuivre la recherche dans ce domaine afin de mieux comprendre les mécanismes en jeu et d’identifier dans quel(s) contexte(s) cet effet risque de se produire.

3.4.3 Poids corporel

Le poids corporel pourrait également influencer les sensations d’appétit, ce facteur ayant pour le moment surtout été étudié par le biais de la sécrétion des hormones reliées au contrôle des apports alimentaires. La littérature actuelle démontre que les taux de ghréline à jeun sont moins élevés chez les personnes obèses que chez les personnes de poids normal, et que la variation post-prandiale de cette hormone est moins affectée par l’apport calorique (English, Ghatei, Malik, Bloom, et Wilding, 2002; Kim et al., 2005; le Roux et al., 2005). Cette réponse amoindrie pourrait entraîner une plus grande difficulté à détecter les signaux de faim et de satiété chez les personnes obèses. Une étude récente a d’ailleurs comparé la sensibilité intéroceptive (sensibilité aux signaux internes) des personnes obèses ou en surpoids par rapport à celle des personnes de

poids normal, et est arrivée à la conclusion que cette sensibilité était moins élevée chez les personnes présentant un excès pondéral (Herbert et Pollatos, 2014). D’autres études n’ont toutefois noté aucun lien entre l’IMC et le PYY ou le GLP-1 (Kim et al., 2005), ou entre l’IMC et les sensations d’appétit perçues (Gregersen et al., 2011; Mattes et Considine, 2013). Carroll et collaborateurs (2007) proposent plutôt que l’IMC soit considéré en interaction avec le sexe. En effet, cette étude a démontré que la sécrétion de ghréline en réponse à un repas liquide dépendait d’une interaction du sexe et de l’IMC, la différence entre les personnes obèses ou de poids normal étant surtout présente chez les hommes. Finalement, la satiété sensorielle spécifique, qui correspond à la modification de la réponse hédonique au cours de la consommation d’un même aliment (Rolls, 1986), ne semble pas différer entre les personnes de poids normal ou en excès de poids (Brondel et al., 2007). Cette étude comporte toutefois un nombre très restreint de personnes obèses (n=8) ou en surpoids (n=22) par rapport au nombre de personnes de poids normal (n=90) ou de poids insuffisant (n=24), ce qui limite l’interprétation des résultats. En résumé, la littérature actuelle supporte le fait que le poids pourrait avoir une influence sur la sécrétion de certaines hormones reliées au contrôle de l’appétit. Le lien avec les sensations perçues d’appétit est toutefois moins évident, le poids devant possiblement être considéré en interaction avec d’autres variables telles que le sexe pour mieux comprendre son impact.

3.4.4 Hédonisme

L’acte de manger ne répond pas uniquement à un besoin physiologique, mais est également une source de plaisir. Une étude conduite en Allemagne révèle que le plaisir associé à l’acte alimentaire est déterminé en partie par les qualités organoleptiques des aliments, mais aussi par l’aspect social entourant l’alimentation (Westenhoefer et Pudel, 1993). La même étude indique que la notion de « manger » est associée au plaisir alors que la notion de « nutrition » est plutôt associée à la santé. Dans un même ordre d’idées, une étude conduite dans cinq pays (Brésil, Portugal, France, Espagne et Uruguay) a observé que plus de 19% des participants faisaient mention de mots relatifs à l’alimentation pour qualifier le bien-être (Ares et al., 2015). Ce résultat s’explique en partie par l’effet positif perçu de l’alimentation sur la santé physique. Toutefois, les aliments sucrés et la viande ont également été associés au bien-être même s’ils ne se situent généralement pas au premier plan d’une saine alimentation, ce qui souligne l’importance de l’aspect hédonique de l’acte alimentaire. Quelques études se sont intéressées au rôle du plaisir associé à l’acte alimentaire comme modérateur du lien entre la restriction cognitive et la santé psychologique (Appleton et McGowan, 2006; Remick, Pliner, et McLean, 2009). Afin de mesurer l’importance accordée au plaisir de manger, Remick et collaborateurs (2009) proposent l’échelle de plaisir alimentaire (Food Pleasure Scale) sous la forme d’un questionnaire de 10 items. Les résultats de l’étude associée démontrent que les personnes qui présentent un

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