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Facteurs liés aux professionnels de santé

Est-il possible de prédire les cas de non observance ? II.

B. Les facteurs de l’inobservance

2. Facteurs liés aux professionnels de santé

a) La qualité de la relation professionnels de santé-patient

Cette relation est très importante pour permettre une adhésion optimale. Informer et impliquer le patient sont 2 prérequis pour assurer cette relation de qualité, et faire naître une notion de confiance dans cette relation.

(1) Évolution de la relation patient-médecin

Dans les années 60, la relation patient-médecin est conçue sur le modèle paternel. Le médecin, en qualité d’expert détenant le savoir et le pouvoir, contrôle, dicte et fait respecter la décision thérapeutique. Ce modèle est mis à mal par le patient, exclu des décisions le concernant, et par la révolution technologique mettant à disposition les informations. En France, la loi de mars 2002 sur le droit des patients donne plus d’autonomie au patient. Il obtient le pouvoir de décision (libre choix) et participe à la décision thérapeutique. C’est sur ces fondements que repose le modèle dit « interprétatif » de la relation soignant-soigné. Les 2 autres modèles sont des modèles « informatifs » et « délibératifs » (tableau 10) (91).

Modèle de relation patient-soignant

Définition

Paternaliste Le médecin décide et fait imposer son autorité sur le patient qui n’a pas d’autre alternative que la soumission

Informatif Le médecin informe mais le patient décide seul

Délibératif Le médecin informe et annonce ses préférences sans pour autant aider le patient à préciser les siennes et décider

Interprétatif Le médecin informe, décrit les faits, et un consensus est évoqué avec le patient pour choisir le traitement. Il s’agit d’une relation d’égal à égal, entre bienveillance du rôle de médecin et autonomie du patient

Tableau 10 : Les 4 modèles de la relation soignant-soigné (92)

L’arrivée d’internet et des nouvelles technologies a bouleversé cette relation (93). Un nouveau modèle « collaboratif » est apparu, basé sur :

- l’évolution de la participation du patient au processus de soins, - l’intégration d’Internet dans la pratique clinique,

- les transformations des interactions et de la relation médecin-patient Cette relation est essentielle à l’adhérence du patient à son traitement.

Entred et Ecodia sont 2 études de modalités de prise en charge du patient diabétique en France, publiées dans les années 2000. 85% des patients se disent satisfaits de la relation avec leur médecin, pour la facilité à les contacter, les conseils reçus et la durée des consultations. Quand on écoute les médecins, ils sont 3 sur 4 à ne pas être satisfaits des soins qu’ils délivrent. Ils évoquaient à l’époque le manque de temps, le manque de matériel d’éducation adapté, la difficulté à fournir des conseils hygiéno-diététiques. Ils sont également une majorité à juger que les patients comprennent mal leur maladie.

(2) Le pharmacien et le patient

Le pharmacien est un acteur incontournable dans la prise en charge des maladies chroniques. Il est le dernier acteur de la chaîne visant à mettre en place le traitement, et l’acteur du suivi avec le renouvellement d’ordonnance (94). En qualité d’interlocuteur de proximité, c’est un acteur partenaire de l’alliance thérapeutique (95).

Les attitudes du pharmacien d’officine favorisant l’observance ont été publiées en 2005 :

- Niveau d’information - Respect des patients

- Capacité à motiver - Écoute

- Compétences professionnelles - Relation de confiance

Une réelle attente concernant la transition du parcours de soins entre la ville et l’hôpital a été formulée et c’est au pharmacien (d’officine et hospitalier) de créer du lien entre ces 2 entités pour permettre un bon usage du médicament et renforcer la sécurité du patient (96).

b) Attitude de partenariat

Il s’agit de constituer un partenariat entre le médecin et le patient, basé sur la confiance. Le patient a le droit d’être non observant, et il convient à l’équipe de trouver une solution. La valeur de liberté comme décrite en 1985 par P. Ricoeur est au cœur de cette vision de partenariat bienveillant éthique : « On entre véritablement en éthique, quand, à l’affirmation

par soi de la liberté, s’ajoute la volonté que la liberté de l’autre soit » (97).

La confiance sera également le fondement de la croyance que construira le patient

comme raison à l’observance (98).

Le degré avec lequel le patient et le médecin sont d’accord pour dire que le patient a du contrôle dans son traitement va influencer positivement l’observance (99).

Pour certains auteurs, la non observance pourrait être liée à la volonté indirecte du patient de s’opposer au médecin, détenteur de l’autorité, pour exprimer sa liberté. C’est la théorie de la réactance (100).

c) Facteur temps

Le temps, à l’heure des objectifs de rentabilité, est une problématique bien réelle. En

2004, Epstein mettait en lumière la maigre part du temps de consultation dédiée à la discussion du traitement : moins d’une minute en moyenne pour une consultation de 20 minutes. En plus du temps de consultation, la perception par les acteurs de la relation patient- soignant peut être différente. Le patient nouvellement confronté à une maladie a un besoin accru de temps pour accepter le diagnostic, accepter le nouveau traitement… Et ce temps est probablement plus long que le temps nécessaire au médecin pour passer à l’action de traitement (39).

Dans une série d’entretiens de médecins généralistes concernant leurs pratiques sur la thématique de l’observance, tous les répondants soulignent spontanément le manque de temps

comme obstacle à l’évaluation de l’observance (101). Le temps d’attente en dispensaire ou pour la délivrance des traitements est également un facteur d’inobservance (80).

d) La durée de la relation avec le médecin

La durée du suivi par un même médecin influence l’observance. Les patients étant suivis depuis 1 an par le même médecin sont plus observants. Cette observation émane du concept de confiance entre soigné et soignant, une relation qui prend du temps pour se construire (102).

e) Concordance des avis

Lorsque le patient a une perception de son état de santé qui ne trouve pas de résonnance dans la perception du praticien, il existe un risque de non observance (exemple du cas du patient en détresse psychologique, souvent inquiet qui se décrit comme « allant mal » alors que le médecin le décrit comme « allant bien ») (102).

La perception de la maladie par le patient n’est pas la même que celle du soignant. Plus leurs interprétations sont proches, plus l’interaction sera équilibrée et le besoin en négociation thérapeutique faible. Plus l’interprétation est éloignée, plus le besoin d’information du patient devra être adapté et personnalisé afin de pouvoir comprendre ses besoins et négocier l’attitude thérapeutique. Il peut paraître déroutant pour un patient de devoir traiter une maladie qu’il perçoit comme ni compliquée, ni invalidante, ni symptomatique.

f) Barrière linguistique

Utiliser un jargon trop médical peut décourager le patient dans sa motivation à comprendre et agir pour sa santé. Une vulgarisation des termes médicaux lors des échanges avec le patient permettra de l’impliquer plus durablement (103).

Si les termes utilisés sont trop vagues ou qu’il y a des non-dits, le patient ne sera pas en mesure de comprendre ce qu’on attend de lui. Par exemple, pour 36% des patients, la posologie de 1cp/jour ne nécessite pas forcement une prise à la même heure (17).

g) Diplôme du professionnel de santé

La formation et le diplôme du professionnel de santé vont impacter la confiance qu’a le patient envers lui, et ainsi soutenir la relation construite entre eux (63).