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Conséquences de l’inobservance : Conséquences individuelles, mais également sociétales, épidémiologiques et économiques

Facteurs associés à une moins bonne observance

3. Conséquences de l’inobservance : Conséquences individuelles, mais également sociétales, épidémiologiques et économiques

Les conséquences de la non observance des traitements de pathologies chroniques sont : - Médicales, avec une inefficacité de la prise en charge et une aggravation des

pathologies

- Économiques, avec l’augmentation des coups de traitement et des taux d’hospitalisation

a) Conséquences cliniques et perte de chance pour le patient

Les conséquences d’une mauvaise observance sur le bilan clinique sont largement référencées dans la littérature(41).

Ces conséquences sont dépendantes de la maladie, du traitement, du patient… et ont pour effet des altérations de la qualité de vie du sujet pas toujours perceptibles immédiatement.

Notamment dans les maladies cardio-vasculaires, où de nombreuses méta-analyses dont celle de 2009 ont démontré qu’une bonne observance réduisait la mortalité de moitié (43). Une étude à montré que les patients avec infarctus du myocarde non adhérents aux bétabloquants avaient 2,6 fois plus de risques de mortalité (44). Chez le patient traité par hypolipémiants, le risque principal de la non observance est l’inefficacité thérapeutique. Il a été démontré en prévention secondaire chez les patients souffrant d’hypercholestérolémie une réduction significative du risque de récidive et de la mortalité VS les groupes non-traités et les non observants (45).

En ce qui concerne les pathologies infectieuses chroniques, le taux d’observance souhaité est de 95%, car l’inobservance est drastiquement liée aux charges virales détectables et donc à l’aggravation de l’infection (46).

La non observance des traitements peut aussi mener à des conséquences létales et immédiates : un risque de coma acido-cétonique chez le patient diabétique, ou le risque suicidaire chez le patient traité par antidépresseur. Le seul facteur prédictif de la survenue d’une récurrence dépressive à 3 ans, chez les patients déprimés et traités par Imipramine, est l’observance médicamenteuse. (47)

L’étude de l’impact de l’inobservance s’effectue selon des modèles de prévision et génère des données différentes. Globalement, ce sont 1 million de journées d’hospitalisation et 8 000 décès directement liés à la mauvaise observance des patients chroniques. (21) Pour l’experte Catherine Tourette-Turgis, ce sont environ 25 000 décès tous les ans qui sont liés à un manque d’accompagnement thérapeutique ou de prévention des ruptures d’observance dans les traitements prescrits pour une durée d’au moins 6 mois (48).

Selon un autre avis émis par Jalma en 2015, ce sont 12 000 décès qui sont occasionnés chaque année à cause de l’inobservance (49).

b) Conséquences épidémiologiques

Une mauvaise observance aggrave l’incidence d’une pathologie au sein d’une population, surtout si elle est infectieuse. Bien que majoritairement non chronique, la non observance d’un traitement infectieux peut conduire à la naissance et à la dissémination de souches résistantes. Pour les antirétroviraux, une théorie non démontrée clairement suggère qu’un taux d’observance inférieur à 95% induit l’apparition de mutants résistants.

c) Conséquences économiques : coûts directs et indirects

L’efficacité d’une thérapie est documentée principalement sur son efficacité et sa sécurité. Des données d’essais randomisés, de méta-analyses ou d’études comparatives observationnelles apportent une plus-value en termes de pertinence. L’observance est considérée comme une « autre » dimension de l’évaluation et entre en jeu lors de l’évaluation pharmacoéconomique d’une thérapie.

Les médicaments innovants à fort service médical rendu se caractérisent par un prix très élevé. Les enjeux d’une bonne observance sont majeurs d’un point de vue efficience du traitement et répartition des ressources. Le remboursement de ces thérapies selon la performance est dans ces cas encore plus logique. Pour ces produits, il faut nécessairement rappeler au patient et au professionnel de santé la nécessité d’une bonne observance.

La pharmacoéconomie est une discipline qui vise à identifier, mesurer et évaluer la valeur économique d’une thérapie pharmaceutique. Une évaluation économique est rarement généralisable à un contexte différent de celui pour lequel elle a été réalisée, aussi faut-il prendre toutes les mesures des évaluations financières dans ce domaine.

L’évaluation pharmacoéconomique compare des stratégies thérapeutiques multiples en évaluant le coût et les conséquences. Cette même évaluation permet l’analyse des pratiques professionnelles et de rationaliser les dépenses de santé.

(1) Coûts directs

En France, les coûts directs couvrent toutes les ressources utilisées en raison d’une action de soins de santé et qui lui sont directement attribuables. En réalité, nous devrions parler de coûts directs médicaux pour définir les coûts médicaux résultants du traitement ou de la maladie. En France, ces coûts sont liés à l’hospitalisation, au transport et aux soins de ville (traitement et coût de la médecine de ville).

En 2008, une étude a estimé le coût du gaspillage lié à la délivrance de boîtes de médicaments non utilisées. Initialement faite sur une population de 100 EPHAD, il est apparu un coût journalier de 0,28 cts d’euro par patient. Rapporté au nombre de patients en ALD, le gaspillage serait de l’ordre de 3,4 milliards d’euros de pertes dues à l’inobservance (50). En ambulatoire, ce sont 25% des médicaments prescrits par les médecins qui ne sont jamais consommés par les patients (49).

(2) Coûts indirects

En France, les coûts non médicaux sont considérés comme des coûts indirects. On peut compter dans cette évaluation le coût du temps perdu, les pertes liées à la baisse de productivité, et les coûts futurs. Enfin, il existe les coûts intangibles, traduisant la perte de bien-être, difficilement évaluable.

Le mauvais contrôle des pathologies entraîne des complications et des hospitalisations, responsables d’un surcoût de traitement. En lien avec l’observance (51) :

- 10% des hospitalisations des sujets de plus de 70 ans seraient en rapport avec un défaut d’observance

- 21,1% des cas d’accidents médicamenteux seraient liés à un défaut d’observance en milieu ambulatoire

(3) Combien coûte l’inobservance ?

En 2014, une étude IMS Health révélait qu’à l’échelle mondiale (186 pays), ce sont 269 milliards de dollars par an qui pourraient être économisés si l’observance était respectée (52). En France, la sécurité sociale pourrait économiser selon IMS Health, 9 milliards d’euros par an en améliorant l’observance des patients suivis pour des maladies chroniques (35). Ce chiffre de 9 milliards rassemble les coûts directs et coûts indirects. Une autre estimation de la commission Santé de la Fondation Concorde, en partenariat avec Observia, suggère que la non observance des patients chroniques pèse 2 milliards d’euros par an (21). Le cabinet Jalma estime le surcoût annuel pour le système de santé à 1 milliard d’euros (49).

Illustration avec l’exemple de l’HTA

Population : 12 Millions de Français Taux d’observance : 40%

Surcroit d’AVC : +4% (53)

Coût moyen de prise en charge d’un AVC : 15 261€/patient

èSurcoût annuel de la non observance du traitement de l’HTA pour la seule complication de l’AVC : +4,4 milliards d’euros de coûts indirects liés à la seule complication AVC liée à la non observance des traitements anti-hypertensifs en France

L’augmentation de l’incidence des hospitalisations et des accidents génère un coût par patient et par an, de 600€ à plus de 7000€ (54). Ce coût par patient est présenté dans le tableau 6.

Tableau 6 : Coût de l'inobservance par patient dans les maladies chroniques (54)

Il est en réalité aujourd’hui impossible de définir précisément combien coûte l’inobservance dans les pathologies chroniques. Son caractère personnel, la multitude de facteurs d’influence associés et son impact dans la vie sont autant d’inconnues qui font la complexité de l’évaluation des conséquences de l’inobservance.

Est-il possible de prédire les cas de non observance ?