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PARTIE 1 La maladie

2. Physiopathologie de la goutte

3.3 Facteurs de risque

Le patient type de la goutte va être l'homme d'un âge avancé ou la femme ménopausée, hypertendu, diabétique, obèse avec hyperlipidémie, une alimentation riche en viande rouge, poissons et fruits de mer, une consommation d'alcool, un traitement par aspirine à faible dose ou par diurétiques. Moins fréquemment, on retrouve des patients traités par chimiothérapies et anti-rejets. (55)

3.3.1 Age

La prévalence de la goutte augmente avec l'âge. Cela peut s'expliquer par le fait que la goutte va dépendre du degré et de la durée de l'hyperuricémie. (109)

Par exemple, selon une étude de la NHIS de 1996, la prévalence variait selon la tranche d'âge : 0,18% de 18 à 44 ans

2,24% de 45 à 64 ans

et 3,08% au-delà de 65 ans (109)

Selon une autre source, elle touche près de 10% des hommes âgés de plus de 65 ans et 3% des femmes âgés de plus de 85 ans. (51)

D'après une étude basée sur la Framingham heart study, le risque relatif de goutte liée au vieillissement est de 1,24 pour un vieillissement de 5ans. (110)

3.3.2 Sexe

La goutte touche très majoritairement les hommes plutôt que les femmes, c'est l'arthrite la plus répandue chez les hommes de plus de 40 ans, et elle est très rare chez la femme non ménopausée. (55)

Dans toutes les tranches d'âges, l'homme est plus touché que la femme, cette prédominance masculine diminue après la ménopause du fait de la perte de l'effet uricosurique des estrogènes chez la femme. (109)

D'après une étude faite entre 2000 et 2005, les hommes représentaient 81% des patients goutteux en Grande-Bretagne et 80% en Allemagne. En Afrique du Sud en 1998, le sexe ratio pour la goutte était de 3,3/1, soit 76,7% d'hommes et 23,3% de femmes. (88)

3.3.3 Hyperuricémie

C'est le facteur de risque le plus important de la goutte. Une réduction de l'hyperuricémie de 15 à 20% permettrait de réduire les récidives de crise de 40 à 60%, ce qui n'est pas négligeable, en plus d'avoir un effet bénéfique sur les troubles métaboliques associés. (63)

Lors de la formulation de la classification CGD , 549 patients ont été étudiés pour trouver les critères les plus fréquents lors de la crise de goutte, et 93% d'entre eux étaient hyperuricémiques. La majorité des patients hyperuricémiques ne sont donc pas goutteux, mais la majorité des goutteux sont hyperuricémiques. (89)

L'étude Normative Age Study de 1970 démontre la corrélation entre uricémie et risque de goutte. Elle a sélectionné 2000 hommes non goutteux au début de l’étude et observé l'incidence annuelle de la goutte chez ces sujets. Les résultats sont :

Uricémie < 420 µmol/L, incidence annuelle de 0,01% 420 µmol/L < Uricémie < 480 µmol/L, incidence de 0,09% Uricémie > 540µmol/L, incidence de 4,9%. (109)

Une autre étude réalisée à partir de la Framingham Heart Study observe une corrélation entre uricémie et incidence croissante de la goutte.

Respectivement pour une uricémie <50, entre 50 et 59, entre 60 et 69, entre 70 et 79 et >80mg/L, on trouve une incidence annuelle de 0,08%, 0,25%, 0,42%, 1,31% et 2,73%. (108,110)

3.3.4 Alimentation

Il existe une corrélation entre le risque de goutte et la consommation importante de purines animales, la consommation de bière et de spiritueux, la consommation de fructose provenant des sodas et jus de fruits sucrés. A l'inverse, certains aliments semblent protéger de la goutte, comme les produits laitiers et le café. Les purines végétales et le vin ne semblent pas influencer la goutte. (109)

Une étude faite sur 47150 patients de 1986 à 1998, la Health professionals follow-up study donne les résultats suivants :

3.3.4.1 Alcool

Pour rappel, 10g d'alcool pur correspond à 25cl de bière à 5°C, et 3 cl de whisky à 40°C. (111) - Pour la consommation d'alcool, le risque relatif comparé à une non consommation d'alcool était de 1,32 (IC95% 0,99-1,75) pour une consommation de 10 à 14,9g/j, de 1,49 (IC95% 1,14-1,94) pour une consommation entre 15 à 29,9g/j, de 1,96 (IC95% 1,48-2,60) de 30 à 49,9g/j et de 2,53 (IC95% 1,73- 3,70) pour plus de 50g/j.

- Le risque varie selon le type d'alcool consommé : RR= 1,49 (IC95% 1,32-1,70) pour environ 360mL/j de bière, RR=1,15 (IC95% 1,04-1,28) pour les spiritueux à raison d'un shot par jour. Pour le vin, on trouve une différence non significative avec un RR=1,04 (IC=95% 0,88-1,22). (112)

L'étude basée sur la Framingham heart study trouve un risque relatif de 3,10 (IC95% 1,69-5,68) chez la femme pour une consommation hebdomadaire de 207ml d'alcool pur. Chez l'homme, ce RR est de 2,21 (IC95% 1,56-3,14). (108,110)

Une autre étude montre que l'alcool présente un risque de déclencher une crise de goutte, avec une relation dose dépendante. (108)

3.3.4.2 Viandes rouges, poissons et fruits de mer et produits

laitiers

- Pour la consommation de viandes rouges, poissons et fruits de mer, on retrouve un risque relatif chez les plus gros consommateurs par rapport aux plus faibles consommateurs respectivement de 1,41 (IC95% 1,07-1,86) et 1,51 (IC95% 1,17-1,95).

- Pour la consommation de produits laitiers de la même manière on trouve un RR=0,56 (IC95% 0,41- 0,74). (113)

3.3.4.3 Fructose

- Pour la consommation de sodas au fructose, on retrouve un risque relatif chez les sujets consommant 5 à 6 portions par semaine comparés à ceux qui en boivent moins d'une par semaine de 1,29 (IC95% 1,00-1,68). Pour les sujets consommant une portion par jour, RR=1,45 (IC95% 1,02-2,08) et pour ceux consommant minimum deux portions par jour RR=1,85 (IC95% 1,08-3,16).

- Les sodas diététiques ne sont pas associés à un risque augmenté de goutte.

- Les jus de fruits et autres jus avec du fructose sont associés à un risque augmenté de goutte. (114) Une autre étude affirme que la consommation de fructose augmente ce risque de goutte par augmentation de l'uricémie. (115)

3.3.4.4 Café

-Pour la consommation de café, elle est associée à un risque relatif diminué en fonction de la quantité de tasses de café consommés par jour. Respectivement pour 0,< à 1, entre 1 et 3, entre 4 et 5, 6 tasses par jour et plus, on trouve un risque relatif de 1,00 ; 0,97; 0,92; 0,60 (IC95% 0,41-0,87) et 0,41 (IC95% 0,19-0,88). Pour le café décaféiné, avec une consommation respective de 0, < à 1, 1 à 3, 4 tasses par jour et plus, on trouve un risque relatif de 1,00 ; 0,83 ; 0,67 (IC95% 0,54-0,82) et 0,73 (IC95% 0,46-1,17). (116)

3.3.4.5 Vitamine C

- La consommation de vitamine C semble diminuer le risque de goutte : RR=0,55 (IC95% 0,38-0,80) pour une consommation 1500mg et plus de vitamine par jour comparé à une consommation inférieure à 250mg/j. (108)

3.3.5 Génétique

40% des goutteux ont un parent goutteux, et 25 à 30% de leurs parents du premier degré est hyperuricémique. (53).

Des études montrent une forte hérédité de la clairance rénale de l'acide urique (60%) et du ratio acide urique/creatinine (87%) (108)

Des polymorphismes génétiques des gènes codant pour les transporteurs URAT-1, GLUT-9, SLC22A12 et SCL2A9, ainsi que les gènes ABCG2 et SLC17A3 ont tous montré une association avec une excrétion d'acide urique diminuée, une augmentation de l'uricémie ou de la goutte.

Le gène codant pour ADRB3 a été associé à l'hyperuricémie et pourrait induire une insulino- résistance, ce qui pourrait expliquer l'association entre syndrome métabolique et goutte.

Le gène codant pour la MTHFR pourrait augmenter la disponibilité du Formyl-THF pour la purinosynthèse de novo. (108)

3.3.6 Traitements médicamenteux

L'étude de la Health professionals follow-up study trouve un risque relatif de 1,77 (IC95% 1,42-220) associé à l'utilisation de diurétiques. (108)

D'après la Framingham heart study, ce risque relatif est de 2,39 (IC95% 1,53-3,74) chez les femmes et de 3,41 (IC95% 2,38-4,89) chez l'homme. (108,110)

3.3.6.2 Aspirine

Une étude réalisée sur 724 sujets trouve un odds ratio de 1,81 (IC95% 1,30-2,51) de déclencher une crise pour une prise d'aspirine ≤ 325mg deux jours de suite, comparé à une non-prise d'aspirine. Cet odds ratio est de 1,91 (IC95% 1,32-2,85) pour une prise de moins de 100mg. (118)

3.3.7 Pathologies associées

L'étude GOSPEL 1000 réalisée sur 1003 patients en France de 2008 à 2009 trouve que 53,8% des patients étaient hypertendus, 47,2% présentaient une dyslipidémie, 43% avaient une insuffisance rénale chronique et 15% un diabète sucré/une hyperglycémie. (119)

L'IRC rend le traitement difficile car il faut adapter les doses d'allopurinol en fonction de la clairance et cela empêcherait parfois d'atteindre la cible thérapeutique. Il ne faut pas oublier la toxicité accrue de la colchicine. (50)

Une autre étude estime qu'on retrouve une hypertriglycidémie chez 50 à 75% des goutteux, et que 20% des gouttes sont dues à une insuffisance rénale. (109)

3.3.7.1 Syndrome métabolique

On retrouverait un syndrome métabolique chez 62,8% des goutteux contre 25,8% chez les non goutteux (RR=3,05, IC95% 2,01-4,61). (120)

3.3.7.2 Obésité

D'après la HFPS, pour l'obésité, elle trouve un risque relatif de 1,95 (IC95% 1,44-2,65) pour un IMC entre 25 et 29,9.

Pour un IMC entre 30 et 34,9; RR=2,33 (IC95% 1,62-3,36). Pour un IMC supérieur à 35; RR=2,97 (IC95% 1,73-5,10).

L'étude trouve également un risque augmenté de goutte si les sujets ont gagné du poids par rapport à ceux qui ont maintenu leur poids, et un risque diminué si les sujets ont perdu du poids, respectivement RR=1,99 (IC95% 1,49-2,66) et RR= 0,61 (IC95% 0,40-0,92). (117)

D'après la Framingham study, le RR est de 2,74 (IC95% 1,65-4,58) pour un IMC >30 chez la femme et de 2,90 (IC95% 1,89-4,44) chez l'homme, comparé aux sujet avec un IMC <25. (110)

3.3.7.3 Hypertension

D'après la Framingham heart study, pour l'hypertension le risque relatif et de 1,82 (IC95% 1,06-3,14) chez la femme et de 1,59 (IC95% 1,12-2,24) chez l'homme.

D'après la HPFS, ce risque relatif pour l'hypertension est de 2,31 (IC95% 1,96-2,72). (108-110) D'après la UK-GPRD, ce RR est de 1,52 (IC95% 1,48-1,56).

3.3.7.4 Diabète

L'étude UK-GPRD a trouvé une légère association statistiquement significative entre le diabète sucré et la goutte.

L'étude Multiple risk factor intervention trial trouve un risque relatif de 1,34 (IC95% 1,09-1,64) pour le diabète de type 2.

3.3.7.5 IRC

D'après la HPFS, RR=3,61 (IC95% 1,60-8,14) chez les insuffisants rénaux.

En résumé, les pathologies suivantes sont statistiquement associées à un risque accru de goutte : L'insuffisance rénale chronique, le diabète, l'hypertension artérielle, l'obésité et donc le syndrome métabolique. De plus, la goutte semble être un facteur de risque indépendant pour la mortalité toute cause confondue et pour la mortalité liée aux maladies cardiovasculaires. (108)