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La filière InP est aujourd'hui bien maîtrisée dans l’industrie des composants télécoms qui a acquis une grande expérience dans la fabrication de composants à puits quantiques sur substrats d’InP(001) par MOVPE. L'expérience des industriels la fait apparaître comme la filière de choix pour l’intégration de différents composants sur un même substrat. De plus, rester dans la filière InP permet d’éviter toute rupture technologique dommageable pour l’industrie : en effet, l'éclatement de la bulle télécom en 2001 est en partie attribuée au foisonnement de nouvelles filières sans qu'une de ces filières n'émerge nettement.

Dans les années 90, tandis que la plus grande partie des travaux sur la fabrication de boîtes quantiques III/V est réalisée dans le système InAs/GaAs, quelques rares articles montrent la possibilité d'exploiter le faible désaccord de maille entre l'InAs et l'InP (3,2% au lieu de 7,2% entre l'InAs et le GaAs) pour fabriquer des îlots tridimensionnels dans le régime de croissance de Stranski-Krastanow. Ainsi, Carlin et al. [42] ont obtenu par épitaxie par jet chimique (CBE) des îlots tridimensionnels d'InAs/InP(001) présentant une large émission entre 1,0 et 1,5 µm. Toutefois, ces rares études de la fabrication d'îlots InAs/InP(001) ne susciteront pas de véritable intérêt avant les années 2000.

3.1. Fabrication de boîtes quantiques InAs/InP par MBE

Aux vues des succès obtenus dans la fabrication de composants à boîtes quantiques InAs/GaAs par MBE, de nombreuses équipes ont travaillé sur la fabrication de boîtes quantiques InAs/InP par cette technique d'épitaxie. La fabrication de boîtes quantiques par MBE est assez délicate, comme en atteste la variété des résultats publiés. L’épitaxie d’InAs sur une couche tampon d’InP ne donne pas toujours lieu à une transition de Stranski-Krastanow immédiate et un arrêt de croissance peut-être nécessaire. La transition 2D-3D est le plus souvent observée par RHEED pendant cet arrêt de croissance. Dès les premières études de croissance d'InAs/InP(001) par MBE [43], il apparaît que la transition de Stranski-Krastanow donne lieu à la formation de structures allongées dans la direction

cristallographique [110]. Selon le rapport d’aspect longueur sur largeur (et selon les équipes…), ces structures sont appelées fils quantiques (fort rapport d’aspect) ou bâtonnetsiv quantiques (faible rapport d’aspect). García et al. ont expliqué l’allongement des structures dans la direction [110] par l'anisotropie de contrainte due à la cohabitation de différents éléments V [44]. La formation de fils est également expliquée par l'anisotropie de la diffusion des adatomes sur le substrat ou encore par l'anisotropie des énergies de surface des semi-conducteurs III/V. Face à la formation par MBE de structures InAs/InP(001) unidimensionnelles (fils, bâtonnets…) plutôt que réellement "zero-dimensionnelles" (boîtes), différentes stratégies ont été déployées.

Certaines équipes ont choisi d'optimiser la croissance MBE et les propriétés optiques des bâtonnets quantiques sur substrat d’InP(001). Cette stratégie permet de conserver des conditions de croissance et une orientation de substrat standard. Il est alors possible de profiter du large gain (jusqu'à 300 nm) de ces structures pour la fabrication d'émetteurs ou d'amplificateurs larges bandes [45]. Un confinement quasi-tridimensionnel peut également être obtenu dans les bâtonnets. Le contrôle précis de leurs paramètres de croissance par l’équipe de M. Gendry a par exemple permis d’obtenir des plans de bâtonnets avec de faibles dispersions des hauteurs et présentant alors des propriétés optiques proches de celles des boîtes [46].

La plupart des équipes ont plutôt travaillé à l’obtention de véritables boîtes quantiques afin d’obtenir les propriétés d’émission attendues pour un confinement tridimensionnel des porteurs. L’influence de la composition et de la morphologie de la couche précédant celle d’InAs a été particulièrement étudiée. L'utilisation de sous couches en alliages quaternaires (InGaAlAs) ou de substrats légèrement désorientés peut par exemple favoriser la formation de boîtes. Récemment, le contrôle poussé des processus de maturation des bâtonnets sous flux d'éléments V ont permis à Dupuy et al. d'obtenir de véritables boîtes quantiques en très faibles densités [47].

Enfin, les problèmes rencontrés lors de la croissance d’InAs directement sur une surface d’InP(001) par MBE peuvent être contournés en utilisant des surfaces d’InP de haut indice. L’utilisation de substrats d’InP(113)B a notamment permis d’obtenir des plans de

boîtes quantiques avec de très fortes densités. L’utilisation de la procédure double-cap [48] sur ces boîtes a permis à l’équipe de l’INSA de Rennes d’obtenir des lasers à très faible seuil émettant à 1,55 µm [49]. Cependant, le coût des substrats désorientés et de la croissance MBE compromet l’utilisation de ces résultats à une échelle industrielle. De plus, ces composants ne pourraient pas être intégrés en optoélectronique classique sur substrat orienté (001).

Signalons enfin que quelques équipes ont fabriqué des boîtes quantiques InAs/InP(001) par CBE. Cette technique d'épitaxie sous ultravide se différencie de la MBE principalement par l'utilisation d'organométalliques comme précurseurs des éléments III. Bien que cette technique permette d'obtenir des boîtes quantiques par un dépôt direct d'InAs sur InP(001) [50], des arrêts de croissance sont souvent nécessaires pour bien contrôler la morphologie des boîtes [51]. Cependant, cette technique d'épitaxie sous ultravide, peu répandue dans les laboratoires et a fortiori dans l'industrie, semble peu porteuse pour des applications.

3.2. Fabrication de boîtes quantiques InAs/InP par MOVPE

L’étude de la fabrication de boîtes quantiques InAs/InP par MOVPE a démarré avec les travaux de Marchand et al. en 1997 [52]. Dans cet article fondateur, les auteurs présentent les premières boîtes quantiques InAs/InP(001) fabriquées par MOVPE. Cet article est rapidement suivi par la publication d'un article plus étendu par Carlsson et al. [53]. Ces travaux montrent clairement que la MOVPE permet de former des boîtes quantiques et non des fils quantiques comme observé par MBE. Ces deux articles présentent des spectres de photoluminescence des boîtes InAs/InP(001) à basse température. Il nous apparaît clairement que ces spectres sont coupés vers 0,77 eV par le détecteur germanium utilisé pour ces expériences. L'énergie d'émission de ces boîtes quantiques à température ambiante est donc vraisemblablement au maximum de 0,72 eV (c'est-à-dire au delà de 1,7 µm).

Quelques équipes ont commencé à étudier la croissance des boîtes quantiques InAs/InP(001) par MOVPE à la suite de ces premières publications. La plupart de ces premières études concernent essentiellement les propriétés structurales des boîtes quantiques et mettent en évidence l'importance des effets de l'échange arsenic/phosphore (As/P) sur la formation des boîtes. L'échange As/P peut en effet provoquer des effets singuliers : Yoon et al. ont par exemple observé que le dépôt direct de l’InAs sur l’InP pouvait donner lieu à la formation d’une couche de boîtes quantiques correspondant à une épaisseur nominale

supérieure à celle déposée [54]. Wang et al. observent même la formation de boîtes quantiques en se contentant d’exposer une surface d’InP à un flux d’arsine [55]. Des travaux sont également consacrés à l'étude de l'influence sur les boîtes de la morphologie, de la composition ou de la désorientation de la couche tampon sous les boîtes, ou encore d'arrêts de croissance après le dépôt d'InAs. Très peu d'études sont véritablement consacrées à l'influence des paramètres de croissance de l'InAs.

Il est marquant de constater que tous les spectres de photoluminescence de boîtes quantiques InAs/InP(001) fabriquées par MOVPE publiés jusqu'en 2005 (après le début de nos travaux) sont obtenus à basse température (77 K ou moins, à l'exception des références [56] et [57]). Au commencement de ce travail de thèse, les conditions de croissance MOVPE permettant d'obtenir des boîtes quantiques InAs/InP(001) présentant de bonnes propriétés optiques sont donc mal identifiées ; en particulier, l'influence des paramètres de croissance de l'InAs est peu étudiée. Seuls deux articles présentent un moyen de contrôler l'émission des boîtes, l'un par l'épaisseur nominale d'InAs [58], et l'autre par des arrêts de croissance [56]. Les boîtes InAs/InP(001) fabriquées par MOVPE sont alors loin des applications.