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3. Etude préliminaire : recherche des conditions de croissance pour la

3.2. a. Echantillons contenant un plan d'InAs 59

Nous avons vu qu'il est difficile en MOVPE de bien connaître la vitesse de croissance de l'InAs en raison de son désaccord de maille avec le substrat. Nous avons de plus vu que la vitesse de croissance pouvait dépendre de la température de croissance. Lors des premiers essais de croissance de boîtes quantiques, nous connaissions mal les vitesses de croissance de l'InAs, ce qui a rendu les premiers résultats difficiles à interpréter.

L'échantillon In 2665 est l'un des premiers échantillons réalisés pour cette étude. Il contient une couche d'InAs déposée à une température de 500°C. Le dépôt d'InAs d'une durée de 0,33 min a été réalisé avec une température de la source de TMI de 60°C et sous un flux d'arsine de 6 cc. La photoluminescence à basse température (77 K) et sous une forte puissance d'excitation de cet échantillon est présentée sur la figure 6. On distingue à 1,42 eV l'émission de l'InP (couche d'encapsulation et couche tampon). Nous attribuons le large pic autour de 0,93 eV à l'émission de la couche d'InAs. Nous observons sur ce pic une légère structuration

entre 0,88 et 0,92 eV. En faisant varier la température lors de la mesure de luminescence, le pic principal se déplace vers les basses énergies tandis que la structuration reste fixe en énergie, ce qui montre que celle-ci ne provient pas de l'échantillon. Cette structuration provient en fait de l'absorption des ions hydroxyles dans les lentilles en siliceii du montage de photoluminescence. Nous avons étudié la photoluminescence de cet échantillon à différentes températures et sous différentes puissances d'excitation. Nous n'observons rien d'autre que ce pic et celui de l'InP, ce qui laisse penser qu'il n'y a pas eu formation de boîtes mais plutôt d'une couche bidimensionnelle. D'autres échantillons préparés dans des conditions de croissance proches présentent également des spectres de photoluminescence laissant supposer une absence de transition 2D-3D.

Figure 6 : Photoluminescence à basse température de l'échantillon In 2665 (détecteur germanium). La puissance d'excitation est de 60 µW.

La photoluminescence de la plupart des premiers échantillons semble montrer la présence de couches bidimensionnelles n'ayant pas subi de transition 2D-3D. Dans un premier temps, nous avons essayé d'augmenter l'épaisseur nominale d'InAs déposée. Ceci est réalisé

(ii) Remarquons que cette absorption vers 1,4 µm dans la silice défini également les fenêtres télécom de 1,3 µm et 1,55 µm (voir chapitre 1).

en augmentant la durée du dépôt d'InAs ou en augmentant la température de la source de TMI (et donc la vitesse de croissance de l'InAs).

L'échantillon In 2663 contient une couche d'InAs déposée à une température de 500°C. Le dépôt d'InAs d'une durée de 0,5 min est réalisé avec une température de la source de TMI de 70°C et sous un flux d'arsine de 6 cc. La photoluminescence de cet échantillon laisse également supposer qu'il n'y a pas eu de transition de croissance 2D-3D. Une image de l'échantillon observé en coupe TEM en "champ sombre 002" est présentée sur la figure 7. Dans ces conditions d'imagerie, le contraste de l'image dépend directement du facteur de structure de la tache 002, lequel dépend des facteurs de diffusion atomique des matériaux diffractant. Le contraste de l'image est donc principalement d'origine chimique : le phosphore ayant un facteur de diffusion différent de celui de l'arsenic, l'InAs et l'InP apparaissent avec des contrastes différents [2]. Dans le cas d'inhomogénéités de composition dans l'épaisseur de la lame mince, le contraste de l'image correspond à la composition moyenne dans l'épaisseur de la lame mince. La contrainte participe pour une faible part au contraste dans ces conditions d'imagerie.

Figure 7 : Coupe TEM (tache 002) de l'échantillon In 2663.

L'échantillon In 2663 ne présente pas de boîtes quantiques mais une couche bidimensionnelle dont l'épaisseur fluctue entre 4 et 7 nm. On observe une forte rugosité de la couche sur les deux interfaces. La forte rugosité sur l'interface inférieure indique un mauvais démarrage de la croissance de la couche d'InAs. Les dislocations sont rares sur cet échantillon ; on en distingue une commençant dans la couche (c’est la seule dislocation que nous ayons pu observer sur cet échantillon). Bien que l'épaisseur nominale déposée soit

nettement supérieure aux épaisseurs critiques couramment observées en MBE [8,9] ou en CBE [10], nous n'observons pas de relaxation par formation de boîtes ou par formation de dislocations. Nous avons étudié la diffraction électronique de cette couche afin de déterminer sa composition. L'image de diffraction électronique correspondante est présentée sur la figure 8.

Figure 8 : Diffraction électronique de l'échantillon In 2663. La direction de croissance est orientée selon [001].

A coté de la tache associée au faisceau direct, on distingue successivement les taches de diffraction 002, 004, 006, et 008, correspondant à la diffraction par l'InP. On distingue également à coté de la tache 008 de l'InP une tache surnuméraire correspondant à la diffraction par les plans d'InAs(P) déformé quadratiquement. Le rapport des distances de ces taches à la tache 001 vaut ici 1,0636. Ce rapport est égal au rapport entre le paramètre de maille de l'alliage InAs1-xPx déformé quadratiquement dans la direction de croissance et le paramètre de maille de l'InP.

Le paramètre de maille massif aB de l'alliage InAs1-xPx suit une loi de Vegard :

( )

InAs InP B x a x a

a = 1− ⋅ + ⋅ , (éq. 3.1) avec aInP = 5,8687 Å et aInAs = 6,0583 Å les paramètres de maille de l'InAs et de l'InP. Lors de la déformation de l'alliage InAsP par mise à l'accord de maille avec le substrat (paramètre de maille aInP), le paramètre de maille de l'alliage dans la direction de croissance a devient :

(

B InP

)

InP a a a a 1 1+ − + = ν ν , (éq. 3.2)

ν

est le coefficient de Poisson de l'alliage InAsP. Dans le cas d'un alliage riche en arsenic et étant donné le faible écart entre les coefficients de Poisson de l'InAs et de l'InP, nous pouvons considérer que

ν

InAsP

ν

InAs = 0,36. Nous avons tracé sur la figure 9 le demi paramètre de maille (valeur de la monocouche) déformé quadratiquement dans la direction de croissance (a) de l'alliage InAs1-xPx. Nous le comparons à son demi paramètre de maille

Figure 9 : Demi paramètre de maille de l'alliage InAsxP1-x massif et

demi paramètre de l'alliage InAs1-xPx à l'accord de maille avec l'InP

dans la direction de croissance.

Nous avons déduit de la diffraction électronique le rapport entre le paramètre de maille de l'alliage InAs1-xPx déformé quadratiquement dans la direction de croissance (a) et le paramètre de maille de l'InP : a/ a0 = 1,0636. On en déduit a= 3,121 Å. D'après la courbe présentée plus haut, on en déduit un taux d'arsenic dans l'alliage 1-x ≈ 95 ± 1%. La couche est donc essentiellement formée d'InAs avec une faible incorporation de phosphore (5%).

Nous avons donc observé la formation de couches épaisses, et l'étude par diffraction électronique prouve qu'il s'agit d'InAs avec une faible incorporation de phosphore (5%) homogène dans toute la couche. Ce résultat est particulièrement surprenant : l’épaisseur critique semble largement dépassée sans qu’il n’y ait eu relaxation des contraintes par transition 2D-3D ou par formation de dislocations. Dans un premier temps, nous n’avons obtenu que ce type de couches bidimensionnelles épaisses.

3.2.b. Echantillons multiplans

Nous avons essayé d'augmenter les épaisseurs déposées jusqu'à observer une relaxation. L'échantillon In 2685 est composé de plusieurs couches d'InAs d'épaisseurs croissantes séparées par des espaceurs d’InP. La température de croissance est de 530°C. Les plans d'InAs sont obtenus avec une température de la source de TMI à 70°C et un flux d’arsine de 6 cc. Les temps de croissance des couches d'InAs sont de 0,15, 0,3, 0,6, 0,9, et 1,2 min. Le flux de phosphine pour la croissance des espaceurs d'environ 50 nm est de 50 cc. Une coupe TEM de cet échantillon est présentée sur la figure 10. Les deux premières couches sont des couches bidimensionnelles non relaxées avec de fortes fluctuations d'épaisseur. La première couche a une épaisseur variant entre 1,5 et 2 nm, la deuxième entre 2,5 et 4 nm. A partir de la troisième couche, on observe une relaxation par formation de dislocations. On observe parfois sur ces couches la présence de larges amas d'InAs relaxé (figure 11). Les zones relaxées par formation de dislocations constituent pour les couches suivantes des sites de nucléation préférentielle pour l'InAs sur lesquels il va à nouveau s'amasser. L'épaisseur des amas d'InAs, largement supérieure à l'épaisseur déposée, témoigne de la forte migration des espèces à la surface. L’augmentation de l’épaisseur déposée conduit donc ici à une forte relaxation par formation d'amas d'InAs et de dislocations.

Figure 11 : Détail d'une coupe TEM de l'échantillon In 2685 (couches N°3, 4, et 5). On observe sur les trois couches de larges amas d'InAs.

L'échantillon In 2688 est semblable à In 2685 pour les épaisseurs déposées et seul le flux de phosphine dans les espaceurs a été modifié : il est de 100 cc (au lieu de 50 cc sur l'échantillon In 2685). Une coupe TEM est présentée sur la figure 12. Tandis que sur In 2685 nous observions une relaxation par formation de dislocations à partir de la troisième couche (tCr = 0,6 min), sur In 2688, seule la cinquième couche (tCr = 1,2 min) présente quelques dislocations en plutôt faible nombre. De manière surprenante, les interfaces inférieures des couches d'InAs sont moins planes que les interfaces supérieures. Nous pouvons penser que la contrainte irrégulière engendrée par les couches d'InAs d'épaisseurs irrégulières favorise la croissance de l'InP dans certaines zones et moins dans d'autres. Le front de croissance de l'InP peut être alors assez ondulé (comme observé sur la coupe TEM). La croissance de l'InAs sur la surface d'InP ondulée permet peut-être de relaxer légèrement sa contrainte (une relaxation 3D "à l'envers"), ce qui lui permet d'avoir une interface supérieure plus lisse. Nous mesurons successivement sur les cinq couches des épaisseurs de 1,9, 3,8, 6,8, 9,7, et 11,8 nm. Les clichés de diffraction électronique montrent par ailleurs que la composition est semblable à celle de l'échantillon In 2663 (InAs avec 5% de phosphore). Ces couches quasi bidimensionnelles d'InAs sont les plus épaisses que nous ayons obtenues.

La comparaison des échantillons In 2685 et In 2688 dont les espaceurs en InP sont obtenus sous des flux de phosphine différents montre bien l'effet lissant du flux de phosphine sur les couches d'InP. Dans ces deux échantillons, la contrainte irrégulière engendrée par les couches d'InAs d'épaisseurs irrégulières peut favoriser une mauvaise planéité du front de croissance de l'InP. Sur l'échantillon In 2685 (FPH3 = 50 cc), les couches d'InP sont mal lissées. L'InAs déposé sur la surface fortement ondulée forme plus facilement de larges amas

qui relaxent la contrainte par formation de dislocations. Au contraire, dans le cas d'In 2688 (FPH3 = 100 cc), le fort flux de phosphine lisse mieux le front de croissance de l'InP. L'espaceur présente finalement une surface plus plane que sous faible flux de phosphine. La planéité de l'InP favorise alors une croissance bidimensionnelle sans relaxation.

Figure 12 : Vue en coupe TEM de l'échantillon In 2688.

3.2.c. Applications des couches épaisses d'InAs en électronique

L'étude des échantillons précédents a montré que l'on pouvait obtenir par MOVPE des couches épaisses d'InAs. L'étude de la diffraction électronique a montré qu'il s'agissait bien d'InAs avec une faible incorporation de phosphore. Nous avons ainsi obtenu une couche d'InAs bidimensionnelle non relaxée d'environ 10 nm d'épaisseur (quatrième plan d'InP 2688). L’InAs et l'InSb massif présentent les plus fortes mobilités de porteurs reportées pour les semi-conducteurs. Cependant, les forts désaccords de paramètres de mailles avec les substrats classiques (particulièrement pour l'InSb) qui ne permettent pas d'obtenir des couches d'une épaisseur suffisante freinent leur utilisation en microélectronique. Il est cependant possible de bénéficier des fortes mobilités de ces matériaux en épitaxiant soit des couches fines, soit des alliages de ces matériaux, ou encore en réalisant des croissances métamorphiques. L’équipe de X. Wallart [11] a par exemple obtenu de fortes mobilités dans

des couches d’In0,8Ga0,2As/InP de 12 nm d’épaisseur sur des couches tampons métamorphiques fabriquées par MBE.

Les couches d'InAs non relaxé que nous avons obtenues sont plus riches en indium et presque aussi épaisses que les couches permettant d'obtenir des mobilités à l'état de l'art. Les couches d'InAs épaisses que nous avons obtenues ouvrent donc des perspectives d’applications au-delà de l’optoélectronique, pour la réalisation de transistors III-V à canal de haute mobilité par exemple. Nous n'avons cependant pas essayé de développer ces couches épaisses d'InAs en raison de l'éloignement de leur domaine d'application à ceux visés par ce travail.

3.3. Calibration de la vitesse de croissance de l'InAs

Lors des premiers essais de croissance de boîtes quantiques, nous n'avions pas à notre disposition un étalonnage précis des vitesses de croissance de l'InAs. Ces premières croissances ont par ailleurs le plus souvent conduit à la formation de couches d'InAs bidimensionnelles épaisses. Nous avons utilisé l'une d'entre elle pour calibrer la vitesse de croissance de l'InAs à une température de croissance de 530°C pour la suite de l'étude. L'échantillon In 2754 contient un plan d'InAs obtenu à une température de croissance de 530°C avec la source de TMI à 70°C, 6 cc d'arsine, et un temps de croissance de 0,35 min. La couche d'InAs est encapsulée avec 80 nm d'InP. Une coupe TEM de cet échantillon est présentée sur la figure 13. L'échantillon ne contient pas de boîtes quantiques mais une couche bidimensionnelle dont les interfaces inférieure et supérieure, peu rugueuses, sont bien définies. On mesure une épaisseur de 5 nm ± 0,5 nm. On en déduit la vitesse de croissance lorsque la source de TMI est à 70°C : VInAs = 0,24 nm/s, soit 0,8 MC/s. Le flux de TMI en fonction de la température de la source TTMI est de la forme :

(

TMI

)

TMI

TMI C T b T

F = ⋅ ⋅ exp / , (éq. 3.3) où b = 4580 K est la température caractéristique de la pression de vapeur saturante du TMI et C une constante dépendant du diffuseur et du flux incident d'hydrogène [1]. La vitesse de croissance étant proportionnelle au flux de TMI (croissance limitée par les éléments III) et indépendante du flux d'arsine, cette formule associée à notre calcul de la vitesse de croissance pour le TMI à 70°C nous permet de calculer la vitesse de croissance à TCr = 530°C pour toute

température de la source de TMI. Les vitesses de croissance de l'InAs des échantillons du bâti D125 indiquées dans la suite sont calculées à partir de cette calibration.

Figure 13 : Vue en coupe TEM de l'échantillon In 2754.

3.4. Obtention des premières boîtes quantiques