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Quatrième partie : Conclusions

15.2 Extrait d’une séance d’observation

Observation d’une intervention de prévention SIDA au TTC (le 9 octobre 2010, de 16h30 à 17h30)

J’accompagne Tawina15

Tawina a oublié du matériel au bureau, elle repart. Les étudiants décident de commencer l’atelier sans elle. Ils se mettent en cercle et commencent à chanter et à danser. Ils jouent ensuite au ‘zip game’, un jeu qui m’était familier car souvent utilisé comme échauffement dans le domaine de l’improvisation, dont le but est de se passer des gestes accompagnés de sons, sachant que chaque geste/son se passe de manière différente, selon des règles précises. Un geste/son se passe par exemple uniquement vers la gauche, un autre change le sens, etc.

, elle va animer une intervention de prévention avec son groupe. Je suis assise dans son bureau (qu’elle partage avec les trois autres animateurs, qui sont aussi, chacun, responsable d’un ‘core group’), nous discutons pendant qu’elle prépare le matériel pour l’atelier. Elle a un carton avec, à l’intérieur, des grandes feuilles blanches enroulées, un gros rouleau de scotch, une balle de tennis, des gros stylos feutres, et une pile de cahiers (avec des couvertures rigides). Une fois que tout le matériel est dans le carton, nous nous dirigeons vers la classe où se déroule l’atelier. Nous sommes un peu en retard, pourtant la classe est presque vide, avec quelques étudiants qui préparent la salle en disposant les chaises contre les murs, pour faire de la place au milieu de la pièce. Nous profitons pour leur donner un coup de main. Ensuite ils s’asseyent et écrivent dans leurs cahiers (à couverture rigide), peut-être finissent-ils leurs leçons ? Pendant ce temps, d’autres étudiants arrivent et s’installent.

A la fin du jeu, Tawina est de retour et leur apprend une nouvelle chanson, les paroles sont en Chichewa, je ne comprends pas leur signification.

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Après les échauffements, tout le monde s’assoit et Tawina distribue les cahiers à couverture rigide aux étudiants, ce sont leur journal, dans lequel ils écrivent leurs réflexions à propos des ateliers, des connaissances et compétences acquises, à propos de leur comportement actuel, et de leur attitude face au VIH. Tawina donne un retour sur les journaux et sur le dernier atelier.

Les participants sont, de nouveau, invités à se lever, ils se mettent en cercle, Tawina dévoile le thème et l’objectif de la séance.

 Le thème de la séance est : ‘dire non au sexe’.

 Le but est : développer une capacité à dire non au sexe en ayant de l’assurance et en utilisant l’espace, le mouvement, la voix, le corps et le regard en tant que moyen pour réduire le risque d’infection au VIH.

Les participants ont pour consigne de lire le thème à haute voix, tous en chœur, et cela en bougeant dans l’espace.

Tawina explique ensuite l’activité qu’ils vont faire pour développer des compétences afin de refuser un rapport sexuel et ainsi se protéger de la contamination par le VIH. Chacun doit, à tour de rôle, se placer au milieu du cercle et dire qu’il ne veut pas de relation sexuelle sans avoir de l’assurance. Ensuite, une fois que tout le monde est passé, ils devront, à nouveau dire non au sexe, mais cette fois avec de l’assurance. Afin d’augmenter cette assurance, Tawina va poser cinq lignes de scotchs par terre, qui représentent cinq niveau différent d’assurance, le premier étant le niveau le plus faible, et le cinquième scotch représentant le niveau le plus élevé d’assurance. Le degré d’assurance est évalué à partir de la voix, de la posture du corps, et du regard.

Après l’exercice, tout le monde se remet en cercle et donne un feedback de l’exercice. Qu’est-ce qu’ils ont ressentis pendant l’exercice, qu’est-ce qu’ils ont remarqué ? Une discussion est lancée, chacun s’exprime à l’aide d’une balle de tennis qui

symbolise le tour de parole (on se lance la balle pour donner la parole).

Les discussions et les consignes sont en général en anglais même si certaines personnes préfèrent s’exprimer en Chichewa. Pendant la discussion, les membres du groupe en viennent à se demander si c’est plutôt les femmes ou bien les hommes qui manquent d’assurance pour dire non au sexe. Il semble aller de soi que ce sont les femmes qui ont le plus de difficulté. Tawina fait ensuite un lien entre la capacité de dire non au sexe et la transmission VIH, en quoi c’est un risque de manquer d’assurance pour refuser un rapport.

Je remarque à ce moment-là, que Tawina n’a jamais posé la question de savoir quand et pour quelles raisons il faudrait dire non au sexe. Aucun participant ne pose la question.

Une fois la discussion terminée, Tawina propose de faire une mise en situation à travers une petite improvisation. Elle propose la situation suivante, un couple se retrouve, l’homme souhaite avoir un rapport sexuel avec sa copine, alors que cette dernière ne veut pas. Deux volontaires se proposent pour jouer la scène. Ils se mettent au milieu du cercle et commencent à jouer. L’homme fait sa demande, la femme refuse, il insiste, elle baisse les yeux, refuse encore, il insiste plus fermement, la prend par les bras, devient violent, la secoue, la participante se met à rire et met un terme à l’improvisation, elle ne sait plus quoi faire pour se sortir de cette situation. Les autres participantes qui regardent la scénette peuvent, à ce moment-là, la remplacer afin de proposer d’autres alternatives afin de sortir notre protagoniste de cette situation. Plusieurs participantes se jettent à l’eau et essaient de résoudre le problème, sans grand succès. Tawina tente aussi sa chance et semble réussir à régler le problème.

A ce moment-là, je me suis mise dans le cercle, avec les autres spectateurs, afin de bien voir la scène. Si les comédiens ricanent pendant qu’ils jouent, ils se prennent au jeu, et essaient, tant bien que mal, de se mettre dans la peau des

personnages. L’homme semble un peu plus à l’aise, il en vient très vite aux mains, il attrape sa compagne par les bras. Les filles tendent en revanchent à reculer, lui demande d’arrêter, de ne pas faire ça, elles baissent les yeux. Tawina, au contraire, regarde son partenaire droit dans les yeux, elle ne recule pas, elle lui pose des questions, essaie d’engager une discussion, ce qui rompt le cercle de violence.

A la fin du jeu de rôle (ils l’appellent le « touch-tag » du fait que les participants, pour pouvoir remplacer les comédiens en train de jouer, peuvent les toucher, et se mettre, à leur tour, dans le rôle du personnage), tout le monde se remet dans le cercle, Tawina amorce une discussion-débat à propos de la situation et du jeu de rôle. Le débat repose sur la question : comment dire non de manière efficace ? Les participants se mettent alors par paires (un garçon, une fille, les paires ont été faites au début de l’année) et discutent, réfléchissent sur la meilleurs manière de dire non. De nouveau, après quelques minutes de discussion à deux, le groupe se remet en cercle et partage ses réflexions. La majorité des réflexions étaient dirigées vers la femme, chacun donnant son avis, sa solution pour qu’elle puisse dire non avec plus d’assurance. Il y a aussi eu beaucoup de critiques envers les stratégies utilisées par les comédiennes pendant l’improvisation. En général, elles manquaient d’autorité, elles étaient trop timides, ne parlaient pas assez fort, elles n’étaient pas assez convaincantes, elles ne regardaient pas l’homme dans les yeux, elles étaient trop passives, trop agressives, etc. En revanche, aucune critique n’a été formulée envers l’homme, personne n’a mentionné le fait qu’utiliser la violence pour avoir un rapport sexuel, même avec sa partenaire stable, peut être considéré comme un viol. Il m’a semblé que la position du groupe était qu’il soit normal, selon la réaction de la protagoniste, qu’elle n’arrive pas à ses fins, c’est-à-dire à éviter le rapport sexuel. D’où l’importance de donner aux femmes des compétences qui leur permettent de se sortir de situations qui les mettent à risque face au VIH.

A la fin de l’atelier, Tawina fait une annonce : la semaine suivante, il y aura la possibilité de faire un test VIH gratuitement sur le site de l’école ; une organisation se déplacera et proposera des tests gratuits pour les étudiants. Elle leur conseille vivement de profiter de cette opportunité. Elle finit ensuite par rappeler aux filles d’éviter d’être passive et agressive lorsque leur partenaire souhaite avoir un rapport sexuel avec elles alors qu’elles n’en ont pas envie. Elle donne encore quelques consignes pour la prochaine séance.

Déroulement de l’atelier

Résumé du déroulement de l’atelier, étape par étape : 1 Les échauffements (chants, danses, jeux)

2 Feedback sur la séance précédente et sur les leçons (réflexions dans leur journal intime)

3 Lecture du thème et de l’objectif de la séance (en bougeant, chantant, criant)

3.1 Discussion autour du thème et de l’objectif (questions de compréhension)

4 Petits exercices afin d’illustrer le thème

4.1 Comment dire non au sexe en ayant peu d’assurance

4.2 Comment dire non au sexe avec de l’assurance (par 5 étapes)

5 Jeu de rôle afin de mettre en scène une situation où un des partenaires (au sein d’un couple) souhaite avoir un rapport, et l’autre pas.

5.1 Les spectateurs et spectatrices peuvent intervenir et se mettre dans la peau d’un personnage afin de proposer une solution (théâtre forum, relais, ou touch-tag)

6.1 Discussions par paires 6.2 Discussions autour du cercle

7 Feedback et rappel des points importants de la séance, consignes pour la prochaine rencontre

8 Fin de l’atelier