• Aucun résultat trouvé

1) Verrous concernant l’extraction des phases minérales

Les extractions sélectives visent principalement à séparer certaines catégories de phases du sol : les cations échangeables, la fraction acido-soluble (carbonates), les oxydes réductibles (fer et/ou manganèse, bien et/ou mal cristallisés), la fraction oxydante (dont la matière organique) et enfin les phases résiduelles. De nombreuses techniques d’extractions sélectives ont été mises au point (revues par ex. dans Clark et al., 2000; Gleyzes et al., 2002), ainsi que des extractions séquentielles permettant d’extraire au fur et à mesure des phases spécifiques dans les sols et les sédiments (par ex. Hall et al., 1996b; Leleyter et Probst, 1999; Li et al., 1995; Quevauviller et al., 1994 ; Tessier et al., 1979; Ure et al., 1995). Toutefois, l’efficacité et la sélectivité des extractions de ces phases ont été très largement étudiées et les révèlent souvent incomplètes ou pas entièrement sélectives :

 La dissolution ou l’extraction des phases n’est pas complète et le taux d’extraction ou de dissolution peut varier suivant le temps de contact entre la solution extractante et le solide (par ex. Chao et Zhou, 1983; Dong et al., 2001; Sahuquillo et al., 1999; Tessier

et al., 1979),

 de nombreux extractants sont reconnus depuis longtemps comme pas complètement sélectifs, en attaquant d’autres phases comme les silicates (par ex. Chao et Zhou, 1983; Iyengar et al., 1981; McKeague et Day, 1966),

 les grains de solides fins peuvent réagir préférentiellement lors d’une dissolution comparativement à des grains de même minéralogie mais de taille supérieure (par ex. Clark et al., 2000; Larsen et Postma, 2001; Van Oorschot et al., 2002),

 le rapport entre la masse d’échantillon et le volume de réactif affecte la sélectivité et le rendement de l’extraction (per ex.Claff et al., 2010; Dong et al., 2001; Hall et al., 1996a; Kaasalainen et Yli-Halla, 2003; Lee et al., 2007; Leleyter et Probst, 1999; Miller

et al., 1986; Schultz et al., 1998; Van Oorschot et al., 2002; Xie et Dunlop, 1998).

Comme l'ont souligné Gleyzes et al. (2002), aucun extractant n'est idéal mais chacun doit être choisi suivant la minéralogie du sol et la phase à extraire.

148 2) Verrous concernant l’extraction des éléments U/Th/Ra

Dans le cas de nos travaux, une contrainte supplémentaire est à prendre en considération. En effet, une extraction incomplète de phase n’est pas forcément critique dans l’analyse des déséquilibres radioactifs, mais un fractionnement des éléments U/Th/Ra est particulièrement critique car il peut aboutir à des déséquilibres uniquement provoqués par l’extraction. Une extraction sans fractionnement est une condition sine qua non à l’étude des déséquilibres des séries de l’uranium ou du thorium dans ces phases. Au cours des extractions, le fractionnement peut intervenir principalement à cause de deux facteurs de risque : soit par la dissolution fortuite d’une autre phase, soit par des phénomènes de ré-adsorption et de précipitation des éléments U/Th et Ra mobilisés lors de l’extraction.

Ce premier facteur de risque est inhérent à la technique d’extraction mise en œuvre. Afin de tester différentes extractions sélectives, Bayon et al. (2002) ont utilisé les rapports isotopiques du strontium pour déterminer l’extractant le plus efficace et le plus sélectif dans le cas de leur étude (hydroxylamine 0,04M et 1M, ainsi qu’un mélange acide oxalique/oxalate d’ammonium). Tester directement un extractant sur des phases du sol à étudier est une méthode pour déterminer la sélectivité de l’extractant a posteriori.

Le deuxième facteur de risque consiste en une ré-adsorption des d’éléments traces. Ce phénomène a été observé lors des extractions par spikage, avec par ex. de 20 à 30 % du Cd et du Zn libérés de la fraction acido-soluble attaquée qui sont ré-adsorbés sur les oxydes (Ho et Evans, 2000). La ré-adsorption dépend à la fois de l’élément étudié et de l’extractant. Dans le cas de sédiments, Kheboian et Bauer (1987) ont montré que 90 % de Cu est re-adsorbé dans des sédiments quelle que soit l’extraction (MgCl2, acétate de sodium, hydroxylamine-acide acétique, oxydants forts), alors que le Zn et le Pb sont récupérés à environ 60 % dans le cas de l’extraction à l’hydroxylamine-acide acétique. Les oxydes de fer et de manganèse sont justement les phases qui sont les plus susceptibles de ré-adsorber les éléments fraîchement extraits. Tipping et al. (1985) ont montré que le plomb extrait d’oxydes de Mn au sein d’un mélange d’oxyde de Mn et de Fe était partiellement transféré par ré-adsorption sur les oxydes de Fe. Dominik et al. (1983) ont constaté que le 210Pb est extrait dans les quatre premières étapes de l’extraction séquentielle alors que son élément fils (210Po) n’est extrait que lors de la dernière extraction des phases résiduelles, mettant en avant la ré-adsorption du 210Po lors des différentes extractions sélectives. Les ré-adsorptions de métaux et d’éléments traces ont

149 donc été observées à de nombreuses reprises lors d’extractions, aussi bien sur des sédiments que sur des sols (Gruebel et al., 1988; Luoma et Bryan, 1978; Miller et al., 1986; Rendell et al., 1980; Samanidou et Fytianos, 1987). L’ajout d’EDTA (Schultz et al., 1998) ou de citrate de sodium (Lucey et al., 2007) a une capacité à réduire la ré-adsorption de l’uranium ou du plutonium. Cependant, l’utilisation de ces complexants peut entrainer d’autres freins : i) l’extraction d’oxydes d’aluminium avec du tricitrate de sodium (méthode Tamura) par exemple est effectuée à un pH de 7,3, un pH haut qui favorise généralement l’adsorption d’U et de Th (écartant l’extraction des oxydes d’aluminium pour notre étude), ii) ces complexants forts peuvent attaquer des phases non ciblées.

B. Protocole mis en œuvre pour sélectionner une méthode

d’extraction

Il est primordial de tester préalablement l’efficacité de la technique d’extraction avant de l’appliquer au sol étudié, que ce soit sur les phases d’oxydes ou argileuses.

Pour cela nous avons choisi de tester une sélection d’extractants sur une sélection d’oxydes dont les concentrations initiales en U, Th et Ba sont connues. Des oxydes de fer et de manganèse, bien et mal cristallisés, dopés en éléments U, Th, et Ba ont été synthétisés. Le Ba a été utilisé comme analogue au Ra, car il est plus aisé de s’en procurer et de l’analyser. La synthèse d’oxydes d’aluminium dopés a été tentée mais n’a pas aboutie. Ces tests permettront dans un premier temps d’étudier la sélectivité et l’efficacité des extractants afin de savoir à quel taux ils dissolvent les oxydes. Ils permettront aussi de savoir si ces extractions provoquent des fractionnements en U, Th et Ba.

Le but n’est pas forcément d’extraire la totalité d’une phase, mais de l’extraire exclusivement et sans fractionnement chimique.

Des tests d’extraction sur des biotites, minéraux contenant de fortes teneurs en U et Th, permettront de valider la sélectivité de certains extractants. La méthode optimale retenue pour l’extraction des phases d’oxy-hydroxydes de fer et oxydes de manganèse sera appliquée sur deux horizons d'un des profils de Breuil. L’ensemble des expériences menées dans ce chapitre est résumé dans le §IV, Tableau IV-2.

150 Des argiles seront traitées à l’eau oxygénée, préalable indispensable à leur extraction du sol, pour savoir si ce traitement provoque un fractionnement U/Th et donc si cette phase peut être extraite.

IV. Propriétés des matériaux étudiés

Documents relatifs