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On considère une population comprenant plusieurs classes. Typiquement, ici, ces subdivisions modélisent dans le premier cas les tranches d’âges d’humains et dans le deuxième des morphes, c’est à dire des variantes génétiques d’un caractère donné dans une espèce de plante à fleurs. Les deux approches probabilistes de l’extinction abordées ici sont en réalité deux façons très différentes

d’appréhender le problème, sous l’angle des taux de reproduction par classe (processus de branche- ment en temps discret), supposées homogènes en la taille des classes pour l’une, et sous la vision des processus de naissance et de mort en temps continu, les probabilités d’extinction dépendant de la taille initiale des classes (marche aléatoire). Avec les processus de branchement, on considère une population initiale composée d’une seule classe i, et on définit la probabilité qi d’extinction de la

population totale en temps fini. En ce qui concerne la marche aléatoire, on part d’une population initiale composée de manière quelconque, et on cherche à savoir si, en temps fini, une des classes peut s’éteindre, entraînant alors la disparition de l’autre, car il s’agit de reproduction sexuée. Dans les deux cas, on va étudier une fonction génératrice afin de caractériser la probabilité d’extinction.

5.4.1 Conditions extérieures pour des processus de branchement

On s’intéresse à des arbres markoviens binaires (MBT en anglais) pour n classes, qui modélisent le cas où les individus ne peuvent donner naissance qu’à un seul enfant à la fois, mais sous l’influence de conditions extérieures qui peuvent altérer la durée de vie ou la fécondité. On considère que l’environnement peut se trouver dans m configurations, la transition étant modélisée par une chaîne de Markov de distribution stationnaire π. Pour la distribution jointe de Z(t) ∈ Nnet de ξ(t), où Z

a pour composantes la taille de chaque classe et où ξ : R+→ {1, . . . , m} désigne l’état dans lequel

se trouve l’environnement, on définit la fonction génératrice F : (s, t) ∈ Rn×R+ 7→ F(s, t) ∈ Rn×m

par

Fij(s, t) =

X

k∈Nn

P [Z(t) = k|(ξ(t) = j, Z(0) = ei)] sk11. . . sknn,

où ei est le ième vecteur de la base canonique. On trouve les probabilités d’extinction de la po-

pulation totale en fonction de la classe de départ, composantes du vecteur q ∈ R1×n grâce à la

formule

q= lim

t→+∞F(0, t) · 1

où 1 ∈ Rm désigne le vecteur colonne dont toutes les composantes sont 1. Or on peut montrer que

la fonction F satisfait à l’équation aux dérivées partielles de transport

(

∂tF(s, t) − (∇sF(s, t)) · A(s) = F(s, t) · Q F(s, 0) = s · π,

où A : Rn Rmn×m contient les taux de mort et de reproduction des classes dans les différents

états de l’environnement extérieur et est polynomiale de degré 2 en la variable s, et Q, représentant l’environnement aléatoire extérieur, peut être non local en s. Le but était donc de construire des schémas numériques performants permettant d’approcher la limite en temps long de F. Nous avons traité le cas n = 1 avec succès, en considérant un splitting de la partie terme-source et de la partie transport, pour laquelle nous avons utilisé d’une part l’expression explicite des caractéristiques et d’autre part une discrétisation d’ordre 2 de type Lax-Wendroff. La difficulté majeure réside dans le fait que les vitesses de transport apparaissant dans le couplage ont deux racines, dont l’une est toujours s = 1 et l’autre peut varier suivant l’équation qu’on considère, d’où la complexité du système en temps grand. Ces travaux constituent deux chapitres de la thèse de Sophie Hautphenne [B72].

5.4.2 Reproduction de plantes distyles

On s’intéresse à la reproduction sexuée de fleurs distyles, c’est à dire possédant deux variantes génétiques d’un caractère, dites morphes. Certaines variétés de narcisses [B70] ont cette particu- larité. Bien que chaque fleur possède les deux organes reproducteurs côte-à-côte, chaque morphe est incompatible avec toutes les plantes du même morphe, y compris lui-même, et ne peut être fécondé que par du pollen provenant d’individus de l’autre morphe. On s’intéresse à la probabilité d’extinction d’une des deux classes, dont on note les tailles X et Y , de la population. Le modèle de naissances et de morts discret en temps de la reproduction des morphes est établi à partir de celui proposé par S. Billiard et V. C. Tran [B68] et repose sur une chaîne de Markov dont les transitions sont de la forme, pour i, j ∈ N,

P(X0,Y0)=(i,j)[(X1, Y1) = (i − 1, j)] = d i (r + d)(i + j), P(X0,Y0)=(i,j)[(X1, Y1) = (i + 1, j)] = r 2(r + d), P(X0,Y0)=(i,j)[(X1, Y1) = (i, j − 1)] = d j

(r + d)(i + j), P(X0,Y0)=(i,j)[(X1, Y1) = (i, j + 1)] =

r 2(r + d), où r est le taux de production des ovules et où la durée de vie d’un individu est supposée suivre une loi exponentielle de moyenne 1/d, d > 0. La difficulté nouvelle réside dans l’aspect non homogène des probabilités de transition de la marche aléatoire. On suppose r > d, l’extinction presque sûre ayant été prouvée dans le cas contraire [B68]. On appelle τ0 l’instant où une des deux populations

s’éteint, entraînant la disparition de l’autre. Pour i, j ∈ N, on introduit les probabilités d’extinction en temps fini

pi,j = P(X0,Y0)=(i,j)(τ0< ∞)

et la fonction génératrice qui leur est liée

P(x, y) = X

i,j≥1

pi,jxiyj.

Les deux populations ayant des caractéristiques identiques, on a symétrie : ∀i, j ≥0, pi,j = pj,i

et, l’extinction de l’une impliquant celle de l’autre

∀i ≥0, pi,0= 1.

Le but est d’étudier la fonction P et de comprendre le comportement de pi,j quand i, j tendent

vers l’infini, à i + j fixé et de vérifier si on a une probabilité de survie strictement positive quelle que soit la condition initiale.

En utilisant la propriété de Markov forte, on peut trouver une récurrence sur i, j qui permet de calculer en O(ij) opérations la probabilité pi,j :

pi,j = d i (r + d)(i + j)pi−1,j+ d j (r + d)(i + j)pi,j−1+ r 2(r + d)pi,j+1+ r 2(r + d)pi+1,j.

Ceci implique que la fonction génératrice P satisfait à une équation aux dérivées partielles de transport stationnaire

AP(x, y) = Q(x, y)∂P

∂x(x, y) + Q(y, x) ∂P

∂y(x, y) + R(x, y)P (x, y), Q(x, y) = (r + d)x − r 2 − r 2 x y − d x 2, R(x, y) = r 2x+ r 2y − dx − dy, et h(x, y, P ) = −r 2 X i≥1 pi,1ixi+ X j≥1 p1,jjyj ! + d X i≥1 xiy+X j≥1 yjx ! .

On peut calculer explicitement les caractéristiques s 7→ (x(s), y(s)) issues d’un point (x0, y0). Elles

atteignent toutes (0, 0), point singulier, en un temps fini s0(x0, y0), ce qui permet alors de donner

une formule explicite de P en fonction des pi,1 :

P(x0, y0) = r 2 X i≥1 pi,1 Z s0 0 i(x(u))i+ (y(u))ie Ru 0 R(x(α),y(α))dαdu − d Z s0 0 x(u)y(u)  1 1 − x(u)+ 1 1 − y(u)  e Ru 0 R(x(α),y(α))dαdu.

Nous travaillons actuellement à l’exploitation des propriétés de cette formule, afin de déterminer si elle peut fournir des informations sur le comportement des probabilités d’extinction quand les populations initiales sont de grande taille, notamment dans l’optique de savoir s’il existe un seuil critique en dessous duquel la survie ne serait pas assurée.

Biologie

[B68] S. Billiard and V. C. Tran. A stochastic sporophytic self-incompatibility model. En prépa- ration, 2010.

[B69] J. A. Carrillo, M. R. D’Orsogna, and V. Panferov. Double milling in self-propelled swarms from kinetic theory. Kinetic and Related Models, 2(2) :363–378, 2009.

[B70] A. Césaro. Le polymorphisme pour la longueur du style en tant qu’intermédiaire dans l’évo- lution de la distylie : études expérimentales et théoriques chez narcissus assoanus (amarylli- dacées). Thèse de doctorat, Université de Montpellier 2, 2004.

[B71] M. R. D’ Orsogna, Y. L. Chuang, A. L. Bertozzi, and L. S. Chayes. Self-propelled particles with soft-core interactions : patterns, stability, and collapse. Phys Rev Lett, 96(10) :104302, Mar 2006.

[B72] S. Hautphenne. An algorithmic look at phase-controlled branching processes. Thèse de doctorat, Université Libre de Bruxelles, 2009.

[B73] K. Iwata, K. Kawasaki, and N. Shigesada. A dynamical model for the growth and size distribution of multiple metastatic tumors. Journal of Theoretical Biology, 203 :177–186, 2000.

[B74] P. Michel. Principe d’entropie généralisée et dynamique de populations structurées. Thèse de doctorat, Université Paris IX-Dauphine, novembre 2005.

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