Le mod`ele a ´et´e g´en´eralis´e pour un angle quelconque β entre la direction d’anisotropie planaire et le bord du plot (β = 90◦ dans le mod`ele initial). Le champ ext´erieur h est toujours appliqu´e parall`element `
a la direction d’anisotropie (Fig. I.33). L’objectif de cette extension est de d´ecrire un ensemble plus large de situations exp´erimentales, tel que des bandes d’orientation quelconque, ou bien des plots non carr´es dont on assimile localement l’orientation du bord `a une bande semi-infinie. Notons que les configura-tions caract´eris´ees par +ω0 et −ω0 ne sont maintenant plus ´equivalentes (voir sch´ema de la Fig. I.33). N´eanmoins, comme pr´ec´edemment seul un signe de ω0 est `a consid´erer, celui qui m`ene au champ de renversement le plus faible en valeur absolue.
La difficult´e nouvelle est que le couple d´emagn´etisant d´efini par Γd(ω0, β) =R−∞0 m(u, β)×hd(u, β)du, au lieu de converger rapidement comme pr´ec´edemment, diverge logarithmiquement du fait de la d´ecroissance de hd en 1/u et de l’angle non nul π/2 − β entre m et hd. Il n’y a pas de contradiction physique ; c’est simplement du fait de l’hypoth`ese simplificatrice du couple de bord, et de la d´efinition utilis´ee pour Γdque cette divergence apparaˆıt. L’utilisation d’une longueur de coupure uc dans l’int´egrale ci-dessus permet de contourner ce probl`eme. Une premi`ere m´ethode pour estimer la valeur de uc physiquement pertinente `a retenir, est de calculer la valeur de hr en fonction de uc dans le cas β = 90◦ o`u aucune divergence n’est attendue, et de noter la valeur de uc qui permet effectivement la convergence. Une deuxi`eme m´ethode est de calculer la valeur de champ hren fonction de uc pour β quelconque, et de mettre en ´evidence un effet de saturation lente. Les deux m´ethodes s’accordent sur une valeur de uc= 5, soit environ deux fois la largeur totale d’une paroi de profil BlochI.23. En pratique, le d´epassement de cette valeur de longueur de coupure pour β 6= 90◦ est sans cons´equence, car la divergence est tr`es lente.
La Fig. I.33 montre les pr´edictions du champ de renversement en fonction de β, et pour plu-sieurs ´epaisseurs. La comparaison de ces courbes avec l’astro¨ıde de SW est d´elicate car la g´eom´etrie est diff´erente (ici h est toujours appliqu´e selon l’axe d’anisotropie). Un parall`ele est le maximum local de hr, observ´e pour un bord exactement perpendiculaire `a l’axe de facile aimantation (β = 90◦) aux plus faibles ´epaisseurs, et qui pr´esente un point de rebroussement. Une interpr´etation ’avec les mains’ est que pour β = 90◦ la somme des composantes du champ local (´echange, anisotropie, externe, dipolaire) est strictement parall`ele `a l’aimantation, alors que pour β 6= 90◦ elle s’en ´ecarte progressivement du fait du champ dipolaire. Qualitativement, le minimum de hr n’est cependant pas `a 45◦ comme pour SW, car seule une (faible) composante de champ (la composante dipolaire) fait un angle avec l’aimantation. Les r´esultats sont en excellent accord avec les simulations sur toute la gamme de β (centre de la Fig. I.33).
+ ++ + + +b + + Hd Hext
0
30
60
90
120
150
180
210
240
270
300
330
0 20 40 60 80
0.80
0.85
0.90
0.95
1.00
β(degrés)
Comparaison avec simulations
0.05 0.10 0.15 0.20 0.25 0.30 0.35 0.40
Épaisseur
Fig. I.33: (a) valeurs du champ de renversement pr´edites par le mod`ele micromagn´etique, repr´esent´e en coordonn´ees polaires en fonction de l’angle du bord par rapport `a la direction d’anisotropie (sch´ema en bas `a droite), et ceci pour plusieurs ´epaisseurs. Une comparaison avec une simulation (croix) est montr´ee au centre du disque, en coordonn´ees cart´esiennes.
L’existence d’un minimum de hrpour β 6= 90◦a des implications int´eressantes. Il est souvent consid´er´e que le renversement d’aimantation est d´eclench´e pr`es des bords perpendiculaires `a la direction d’aniso-tropie, que celle-ci soit d’origine magn´etocristalline ou de forme [26]. Les r´esultats du mod`ele rappellent que ce qui d´estabilise l’aimantation est le couple d´emagn´etisant, et non pas directement l’intensit´e de hd. Ainsi, ce couple m × hd sera le plus efficace pour un angle β qui offre le meilleur compromis entre hd fort (pour β = 90◦) et sin(< m, hd >) fort (pour β = 0◦). Le mod`ele prend en compte explicite-ment l’´echange et l’anisotropie pour d´eterminer cet angle optimum, et le compromis n’est pas trouv´e pour β = 90◦, sauf pour les fortes ´epaisseurs. L’implication de cette constatation est que l’extension du mod`ele permet de pr´edire le champ de renversement de toute nanostructure `a anisotropie uniaxiale planaire cycl´ee dans sa direction d’anisotropie, si sa taille est suffisamment grande (quelques dizaines en unit´es r´eduites, voir Fig. I.31a). hr sera alors le minimum des hr(β) calcul´es pour l’ensemble des orientations de bord existant pour un plot donn´e. Cet argument s’applique en particulier `a des disques de diam`etre suffisant. Il serait int´eressant de corr´eler l’angle de plus faible hr pr´edit par le mod`ele, au lieu d’entr´ee de vortex d´etermin´e par simulation num´erique.
En conclusion, le mod`ele micromagn´etique propos´e permet entre autre de pr´edire le champ de ren-versement pour des bandes et plots minces de forme quelconque et `a anisotropie uniaxiale planaire. Les conditions d’applicabilit´e du mod`ele sont que les bords ont une longueur significative devant la largeur de paroi λBl.= πpA/K et la longueur d’´echange λex.=p2A/µ0M2
s, typiquement une `a quelques centaines de nanom`etres, et que l’´epaisseur soit elle inf´erieure `a pA/K et λex.. Dans le cas de mat´eriaux tr`es doux, la derni`ere condition pourrait ne pas ˆetre assez restrictive.
Partie II
Annexes p´edagogiques
1 Superparamagn´etisme de nanoparticules : Brillouin 1/2 ou
Langevin ?
1.1 Introduction
Par analogie avec le paramagn´etisme, on qualifie de superparamagn´etique un syst`eme portant un moment magn´etique de norme M = Ms× V essentiellement fix´ee, mais dont la direction fluctue au cours du temps d’observation t et `a une temp´erature T donn´ee sous l’effet de l’agitation thermique. La moyenne temporelle de Mz = M.H/H, mˆeme dans une direction de facile aimantation, est nulle durant t. L’analyse de l’aimantation M (H) d’une assembl´ee de particules superparamagn´etiques nous informe sur leur moment M et ´eventuellement leur anisotropie. Nous discutons ici la loi qui doit ˆetre utilis´ee pour ajuster les courbes exp´erimentales.
Consid´erons une particule individuelle, classique, de moment M, superparamagn´etique `a la temp´ era-ture et dynamique de l’´etude, poss´edant une anisotropie uniaxiale K, et soumise `a un champ magn´etique appliqu´e selon sa direction de facile aimantation. On utilisera les notations suivantes : d = βK, h = βµ0MH, avec β = 1/(kBT ). L’enthalpie magn´etique du syst`eme est e = βE = −d cos2θ − h cos θ, o`u θ est l’angle entre M et H. Un argument parfois trouv´e dans la litt´erature est qu’une particule classique est caract´eris´ee par un continuum d’´etats, et donc qu’elle doit ˆetre d´ecrite par une fonction de Langevin : m(h) = L(h) = coth(h) − 1/h [90], o`u m est l’aimantation normalis´ee `a 1. L’examen attentif des articles en question montre que cette approche conduit `a une surestimation manifeste du moment magn´etique port´e par les entit´es superparamagn´etiques [37, 38].
En r´ealit´e si T n’est gu`ere sup´erieure `a la temp´erature de blocage TB, la plupart du temps la particule est soit quasiment dans un ´etat ’up’, soit quasiment dans un ´etat ’down’ (Fig. II.1a), puisque le poids statistique exp(−βE) des autres ´etats est n´egligeable. Seules de rares fluctuations permettent de franchir la barri`ere d’´energie s´eparant les deux puits. Le syst`eme se comporte donc comme s’il ´etait caract´eris´e par deux pseudo-´etats, +M et −M. On con¸coit intuitivement qu’une fonction de Brillouin 1/2 serait adapt´ee : m(h) = B(h) = tanh(h). Cet argument est-il valable, et si oui dans quelle gamme de temp´erature ? Les paragraphes suivants r´epondent `a cette question rigoureusement.