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Expression différentielle de gènes impliqués dans l’asthme et l’asthme allergique

CHAPITRE 2 – RÉSULTATS

3.3 Expression différentielle de gènes impliqués dans l’asthme et l’asthme allergique

Dans tous les gènes différemment exprimés dans les lymphocytes T CD4+ des asthmatiques comparativement aux témoins, 10 sur 57 (17,5%) ont une fonction pertinente dans un contexte d’asthme (tableau 8). De ceux-ci, on compte EGF, ATF6B, PPBP et CXCL5 dont il est question dans les sections précédentes de la discussion. Les autres sont les gènes codants pour : APOBEC3B (apolipoprotein B mRNA editing enzyme catalytic subunit 3B), GATA2 (GATA binding protein 2), GSTM1 (gluthatione S-transferase mu 1), HLX (homeobox H2.0 like), MKI67 (marker of proliferation Ki-67) et PDGFRA (platelet derived growth factor receptor alpha).

Les gènes APOBEC3B, GSTM1 et HLX ont tous trois déjà été identifiés dans l’asthme infantile, que ce soit avec les exacerbations d’asthme ou le risque de développer cette maladie [208-210]. Plus particulièrement, une région différemment méthylée en aval du TSS de HLX a été identifiée chez des enfants asthmatiques faisant partie d’un couple de jumeaux discordants pour le statut d’asthme [210]. Les résultats de la présente étude pour ce gène viennent donc renforcer l’implication probable de celui- ci dans l’asthme, même si aucune différence de méthylation n’a été observée. De par sa fonction de régulateur de la différenciation vers la voie Th1 des lymphocytes T, une modification de son expression dans un contexte d’asthme semble logique puisque cette voie de différenciation est influencée par

différents médiateurs dans l’asthme [209]. Pour ce qui est de GSTM1, les résultats dans la littérature semblent mitigés. Une première méta-analyse menée sur plus de 4 500 enfants a montré qu’un génotype nul correspondait à un risque accru d’asthme alors qu’une autre étude de 2018 ne montrait aucune association entre ce génotype et le risque d’asthme, même si ce génotype était plus présent chez les enfants asthmatiques [211, 212]. Les résultats obtenus dans la présente étude sur l’expression semblent montrer une implication de ce gène dans l’asthme, mais d’autres études seront nécessaires.

L’expression de GATA2, un facteur de transcription, a été démontrée comme légèrement plus élevée chez les individus asthmatiques allergiques comparativement aux témoins [213]. Dans la présente étude, c’est le contraire puisque GATA2 est moins exprimé dans l’asthme. Une autre étude dans un modèle murin d’asthme induit et traité avec des lipopolysaccharides bactériens a aussi démontré une augmentation de GATA2, mais cette fois au niveau des mastocytes [214]. Les résultats de la présente étude semblent en contradiction, mais démontrent tout de même que l’expression GATA2 est modifiée dans l’asthme. L’utilisation d’une population spécifique de cellules différentes pourrait expliquer cette discordance avec la littérature. Pour ce qui est de MKI67, l’expression de ce gène est utilisée comme marqueur de prolifération cellulaire [215]. Le niveau de la protéine encodée par ce gène, ki67, est plus élevé dans l’épithélium bronchique des personnes asthmatiques sévères ce qui suggère une prolifération cellulaire contribuant au remodelage des voies respiratoires [216]. Comme l’échantillon utilisé dans la présente étude comporte peu d’asthmatiques sévères, il est logique que les résultats divergent, en plus du tissu utilisé qui est différent. La protéine ki67 semble donc être en quantité plus faible chez les individus asthmatiques de notre échantillon.

PDGFRA est plus exprimé dans les cellules T CD4+ des asthmatiques dans la présente étude, mais également dans les cellules d’asthmatiques allergiques. En tout, 10 gènes sont plus exprimés dans les deux phénotypes étudiés (tableau 8 et 9). Toutefois, mis à part PDGFA dont il sera question ci-dessous, et EGF déjà discuté précédemment, aucun autre n’a de fonction pouvant se rattacher à l’asthme, l’allergie ou un trait connexe (ARMC3, AVPR1A, GNG11, GP1BA, GP9, MORC1, TMEM40 et VEPH1). PDGFRA est un gène impliqué dans la voie de signalisation MAPK. En effet, le complexe de fusion FIP1L1-PDGFRA a déjà été associé au syndrome d’hyperréosinophilie et est reconnu comme une molécule impliquée dans la croissance et la survie de cellules hématopoïétiques [217].

L’éosinophile est une cellule importante dans la pathophysiologie de l’asthme et l’implication de cette molécule pourrait contribuer à la présence de ces cellules dans l’asthme.

La majorité des gènes identifiés pour l’asthme allergique sont plus exprimés que pour les témoins (tableau 9). De ceux-ci, on en retrouve peu ayant un lien avec le phénotype étudié : EGF, IL17RB et PDGFRA dont il a été question dans les sections précédentes et CLEC10A (C-type lectin domain containing 10A). La molécule encodée par ce gène, la methionine gamma-lyase (MGL), a été démontré comme impliquée dans la maturation des cellules dendritiques qui agissent comme cellules présentatrices d’antigènes lors d’une première exposition à un allergène [218]. MGL a aussi été démontré comme augmentant l’expression d’IL-10 et de TNF- dans les cellules dendritiques par l’activation des signaux par les TLR. L’IL-10 agit comme agent répresseur de l’inflammation et est présent en quantité plus faible dans le sérum des asthmatiques où la composante inflammatoire est prépondérante [219]. Ceci semble donc contradictoire avec une expression accrue de CLEC10A dans l’asthme allergique observée dans la présente étude puisqu’une plus grande expression devrait mener à une plus grande libération d’IL-10. Toutefois, l’expression de l’IL-10 peut être modifiée par l’action d’autres gènes qui ne sont pas ici identifiés. De plus, l’action des miARN, un autre mécanisme épigénétique, pourrait mener à la dégradation d’une portion de l’ARNm d’IL-10 et limiter son effet dans l’asthme allergique. Toutefois, il ne s’agit que de spéculations qui devraient être vérifiées par des études fonctionnelles approfondies.