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A. La fièvre Q chez l’homme

2) Expression clinique

a) Fièvre Q aiguë

Lors d’une fièvre Q aiguë, la survenue des symptômes est généralement brutale. Le tableau clinique peut associer fièvre élevée (91% des cas), céphalées (51%), myalgies (37%), arthralgies (27%) et toux (34%). Moins fréquemment, une éruption (11%) ou un syndrome méningé (4%) peuvent être observés. Ces observations découlent de l’étude en France des cas survenus durant deux périodes (1982-1990 et 1985-1992). (242, 291)

La variabilité de l’expression clinique est grande et diffère selon le pays, voire la région. Ce phénomène reste mal expliqué, mais la variabilité des souches, la spécificité de l’hôte, la voie d’infection majoritaire et l’intérêt des cliniciens pour certains tableaux cliniques particuliers pourraient jouer un rôle. (257)

Typiquement, trois présentations majeures sont décrites : ¾ La forme fébrile isolée

Elle est habituellement accompagnée de céphalées sévères. Elle dure plus longtemps chez les patients les plus âgés et est plus fréquemment associée à une éruption (20% des cas) que les autres formes cliniques. Les patients atteints, qui ne présentent ni hépatite ni pneumopathie, sont plus fréquemment des femmes (61, 242). En Espagne, cette forme explique 21% des épisodes de fièvre de durée comprise entre 1 et 3 semaines (96).

¾ La pneumonie

Il s’agit du tableau le plus fréquemment observé en Nouvelle Ecosse (Canada) (185), au Pays Basque espagnol (8), en Suisse (81) et au Royaume-Uni (257). La plupart des cas sont bénins et les patients présentent une toux non productive, de la fièvre et des anomalies auscultatoires mineures, mais certains souffrent de détresse respiratoire. Un épanchement pleural peut également être observé. Les découvertes radiologiques sont non spécifiques (190). Les symptômes durent de 10 à 90 jours, et le taux de mortalité varie de 0.5 à 1.5% (72, 291). Les patients sont en moyenne plus âgés que ceux présentant la forme fébrile isolée, sont plus souvent immunodéprimés, moins fébriles, ont moins souvent des céphalées et myalgies et plus souvent des anomalies électro-cardiographiques (242).

¾ L’hépatite

C’est la forme clinique la plus répandue à travers le monde, notamment en France (40% des cas, contre 17% pour la pneumonie et 20% pour l’association des deux) et en Australie. Elle est le plus souvent caractérisée par une élévation des transaminases. Trois formes majeures peuvent être rencontrées : une hépatite de type hépatite infectieuse, avec hépatomégalie mais rarement jaunisse ; une hépatite asymptomatique ; ou une fièvre prolongée d’origine indéterminée avec des granulomes caractéristiques sur biopsie hépatique. Les patients sont en général plus jeunes, moins fréquemment immunodéprimés, plus fébriles, et ont plus souvent des céphalées et myalgies que dans les autres formes. (96, 242, 257)

¾ Autres manifestations

Ces formes sont plus rares mais restent régulièrement décrites. Il s’agit de manifestations cardiaques (2% des cas de fièvre Q aiguë : myocardites, péricardites) ou neurologiques (1% des cas de fièvre Q aiguë : méningites, méningo-encéphalites, neuropathies périphériques). (257)

Peuvent également être retrouvés de façon exceptionnelle des maux de têtes sévères, exanthème, hémophagocytose, anémie hémolytique, thyroïdite, gastroentérite, pancréatite, nécrose de la moelle épinière, sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique, rupture de rate… (96)

Certaines formes aiguës peuvent évoluer vers un syndrome de fatigue chronique comme cela a été décrit en Australie (19) et au Royaume-Uni (222). Les patients rapportaient alors des sueurs, un essoufflement, une vision trouble et une fatigue anormale, avec pour la plupart une récupération sans séquelle.

A noter que chez les femmes enceintes, après infection la bactérie se fixe au niveau de l’utérus et des glandes mammaires, ce qui a pour conséquences un risque immédiat pour la mère (qui présente plus fréquemment une forme grave de fièvre Q aiguë), un risque immédiat pour l’enfant (près de 100% d’avortements lorsque l’infection survient au premier trimestre de la grossesse, risque de prématurité et de petit poids à la naissance voire d’hypotrophie lorsque l’infection est contractée au deuxième ou troisième trimestre) et un risque à distance de chronicité. (244, 280)

b) Fièvre Q chronique

Toute fièvre Q aiguë, qu’elle soit symptomatique ou non, est susceptible d’évoluer vers une forme chronique, essentiellement chez les sujets prédisposés :

- Patients atteints de valvulopathies cardiaques ou anomalies vasculaires sous- jacentes (90, 243) ;

- Patients immunodéprimés (par un traitement ou une pathologie chronique telle

qu’un cancer, le virus de l’immunodéficience humaine, une splénectomie…) (243) ; - Femmes enceintes (244).

Ainsi lorsqu’un diagnostic de fièvre Q aiguë est posé, la recherche de circonstances prédisposantes est systématiquement effectuée : test de grossesse, échographie cardiaque, recherche d’une cause d’immunodépression. (246)

Dans les formes chroniques, on observe une bactériémie permanente entraînant un taux élevé et persistant d’anticorps (IgG et IgA dirigés contre les antigènes phase I de C. burnetii) (96) sans possibilité d’élimination spontanée (90).

Le tableau clinique le plus fréquent en fièvre Q chronique est l’endocardite (60 à 70% des cas) (95). Elle peut survenir jusqu’à 20 ans après une fièvre Q aiguë, et l’échographie cardiaque est souvent peu diagnostique, montrant rarement les végétations. Une hypersécrétion d’IL-10 est retrouvée chez ces patients, et peut être considérée comme un marqueur de rechute ou de l’efficacité du traitement (49, 192). En France, C. burnetii est l’agent étiologique de 5% des endocardites, avec une prévalence estimée de un cas par million d’habitants par an (40). Les sujets infectés par le virus de l’immunodéficience humaine et les patients atteints de lymphome semblent être les seuls capables de développer une endocardite à fièvre Q en l’absence de lésion valvulaire préexistante (242).

Le deuxième tableau clinique de fièvre Q chronique est l’infection vasculaire. Un anévrisme de l’aorte peut s’infecter et se compliquer d’une fistule intestinale ou d’une spondylite. De même, une prothèse vasculaire peut être infectée par la bactérie. Le pronostic est réservé en l’absence de traitement chirurgical et médical. (242)

D’autres manifestations plus rares ont déjà été décrites, telles que des ostéomyélites, hépatites chroniques chez des alcooliques, pseudo-tumeurs spléniques ou pulmonaires, infection de drain ventriculo-péritonéal. (95, 192)