Pour pallier aux limitations de l’approche top-down, une approche totalement oppos´ee a
´egalement ´emerg´e depuis une dizaine d’ann´ees. Il s’agit de l’approche bottom-up, fond´ee
sur des collisions `a basse ´energie sur des briques constitutives de l’ADN (figure 1.22)
isol´ees en phase gazeuse et dont le but est d’avoir acc`es aux m´ecanismes des d´egˆats
d’irradiation au niveau mol´eculaire [26, 27]. En effet, les syst`emes irradi´es sont largement
simplifi´es puisque l’interaction se fait uniquement entre le rayonnement ionisant et
une ”petite” mol´ecule (telle que la thymine) qui de surcroit est en phase gazeuse. On
s’affranchit donc des effets du milieu environnant contrairement `a l’approchetop down et
on peut comparer ais´ement les r´esultats exp´erimentaux aux calculs de chimie quantique.
Avec cette approche, on peut obtenir des informations sur les m´ecanismes physiques
responsables des d´egˆats sur l’ADN.
Dans le cas de l’irradiation par des ´electrons de basse ´energie les travaux de L.
Sanche [28] et T. Mark [29] ont montr´e qu’il existe un processus d’attachement
´electronique dissociatif sur des bases nucl´eiques isol´ees en phase gazeuse lorsqu’elles
d’endommagement.
Figure1.23 –Les diff´erentes briques constitutives de la mol´ecule d’ADN [30]
D’autres ´etudes ont ´et´e r´ealis´ees sur les voies de fragmentation des briques constitutives
des mol´ecules d’ADN et d’ARN. Ces ´etudes ont montr´e des diff´erences sur la distribution
des fragments concernant l’uracile et la thymine suite `a une irradiation par des ions
carbone simplement charg´es de 24 keV [31]. En effet, pour l’uracile, on observe l’absence
de grands fragments, li´es `a la perte d’au moins 1 ou 2 atomes lourds tel que l’oxyg`ene
(figure 1.24). Donc, la dynamique de dissociation d´epend fortement des propri´et´es
structurelles de la mol´ecule cible. Ces spectres de fragmentation permettent de ce rendre
compte de l’int´erˆet d’une telle approche puisqu’on a acc`es facilement `a la dynamique de
dissociation. Les m´ecanismes physiques responsables des d´egˆats sur le vivant sont mis
en ´evidence grˆace `a cette approche. L’approche bottom-up a donc permis d’extraire des
informations `a l’´echelle mol´eculaire.
Toutefois, on peut se demander si ces donn´ees sont transposables aux cons´equences
biologiques. En effet, ces syst`emes de petite taille par rapport aux syst`emes ´etudi´es
dans l’approche top-down ne sont pas tr`es pertinents d’un point de vue biologique mais
int´eressant pour les comparer `a des calculs de chimie quantique. De plus, les difficult´es
de mise en phase gazeuse de mol´ecules complexes ont fortement limit´e cette approche.
La quasi-globalit´e des ´etudes men´ees jusqu’`a pr´esent s’est limit´ee `a de petites mol´ecules
(bases nucl´eiques) repr´esentant les briques constitutives des biomol´ecules pr´esentes dans
le milieu cellulaire car la mise en phase gazeuse de mol´ecules isol´ees se fait habituellement
par ´evaporation d’une poudre pour en former un jet mol´eculaire effusif.
Figure1.24 – Spectre de fragmentation de l’uracile (en haut) et de la thymine (en bas)
irradi´e par un faisceaux d’ions carbones simplement charg´es de 24 keV. J’ai entour´e en
rouge les fragments manquants [31].
La pertinence de cette approche repose ´egalement sur l’hypoth`ese que les dynamiques
d’ionisation et de dissociation sont similaires pour des mol´ecules isol´ees et des mol´ecules
incorpor´ees dans un environnement biologique. Or, ceci n’est pas n´ecessairement le cas.
En effet, des ´etudes en solution aqueuse ont montr´e que les ´energies verticales pour
les briques constitutives de l’ADN sont alt´er´ees [32, 33]. De plus, le transfert d’´energie
d’excitation au milieu environnant la mol´ecule n’est pas pris en compte dans cette
approche.
Pour r´epondre `a la probl´ematique de l’absence d’environnement de l’approchebottom-up,
quelques ´etudes ont ´et´e men´ees en tentant de simuler un environnement aqueux. C’est
notamment le cas pour l’´etude de l’adenosine 5’-monophosphate (AMP) hydrat´e,
en-dommag´e suite `a une collision sur un jet d’atomes neutres (Ne, Na) `a 50 keV [34]. Les
collisions de l’ordre du keV avec des constituants de l’ADN permettent l’´etude de la fin
du pic de Bragg. On peut voir sur la figure 1.25, le spectre obtenu apr`es irradiation en
fonction du nombre de mol´ecules d’eau entourant AMP
−. On constate que le spectre
AMP (ࡴሻ