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données existantes

2. Forces évolutives

2.1.2. Expérimentation : étude de la dispersion des ascospores de L.

maculans

2.1.2.1. Introduction

Les ascospores de Leptosphaeria maculans sont dispersées par le vent sur des distances élevées, qui peuvent atteindre plusieurs kilomètres (West et al., 2001). La concentration en ascospores décroît très rapidement sur les 500 premiers mètres par rapport à la source, puis se maintient à des niveaux faibles mais non nuls. Sur de telles distances, il est assez difficile d’établir une fonction de dispersion, puisque le piégeage des spores à l’aide de capteurs dynamiques devient impossible, les spores étant en concentration trop faible dans l’air. L’utilisation de plantes pièges est alors la plus fréquente. Salam et al. (2001), par exemple, placent autour d’une source de résidus infectés (3×2 m²) des plantes pièges en demi cercles concentriques jusqu’à 400 m de la source. Les résultats montrent une décroissance très rapide du nombre de spores interceptées sur les 50 premiers mètres, avec une absence de spores interceptées à partir de 200 m. En revanche, Marcroft et al. (2004a) ont observé une décroissance très progressive du nombre d’infections en plaçant des plantes pièges jusqu'à une distance de 1000 m à la source. Le nombre d’infections reste très élevé même à 1000 m de la

Figure 2.18. Parcelle source, relevés climatiques et piégeage de spores (Burkard et bac contenant les plantes pièges).

est une distance très inférieure aux autres résultats publiés. Les trois références citées montrent que l’établissement d’une courbe de dispersion précise est difficile. L’objectif de l’expérimentation était donc de tenter d’établir une fonction de dispersion des spores de L. maculans/L. biglobosa dans des conditions climatiques françaises et de comparer la fonction de dispersion obtenue à celle utilisée dans le modèle.

2.1.2.2. Matériels et méthodes

Sur le site expérimental de l’INRA du Rheu (48.1°N, 1.8°E, altitude 30 m) une expérimentation a été mise en place à l’automne 2006 afin d’établir un jeu de données sur la dispersion des ascospores de L. maculans/L. biglobosa en conditions françaises (topographie, dynamique de libération des spores) à partir d'une parcelle source (S). La parcelle source (S) semée à l'automne 2005 avec la variété de colza sensible Saturnin a présenté des symptômes de phoma (nécroses du collet) mi-mai 2006. Cette parcelle n'a reçu aucune inoculation artificielle, mais sur la parcelle adjacente, du blé avait été implanté en semis direct après une culture de colza en 2004-2005. Un seul déchaumage après récolte a été réalisé sur la parcelle source (S) au cours de l’été 2006 et les résidus de colza sont restés en place jusqu'à l'implantation de blé après labour le 10 novembre. On note sur le site la présence de deux autres parcelles de colza : un essai sur le site expérimental INRA, avec un apport de quelques résidus infectés (essai) et un champ de colza au lieu dit la Noë Huet (Figure 2.17). L'objectif de notre expérimentation en début d'automne 2006 était de quantifier la dispersion des ascospores de phoma à partir des résidus de la parcelle source d'une part, à l'aide de pièges à spores et d'autre part, à l'aide de plantes pièges (Figure 2.18).

Trois capteurs dynamiques (Burkards) ont été disposés à 0, 50 et 200 m de la parcelle source et les spores ont été piégées entre le 19 septembre et le 5 novembre. Début septembre, cinquante bacs (80 cm * 40 cm, profondeur 20 cm) remplis de terre ont été disposés sur l’ensemble du site expérimental jusqu’à 500 mètres de la parcelle source (Figure 2.17, 2.18). La variété de colza Drakkar sans gènes de résistance au phoma a été semée dans ces bacs le 18 septembre (0,2 g par bac soit 94 graines). Un repiquage de graines pré germées a été réalisé le 6 octobre pour ajouter des plantules dans les bacs où la levée était faible. Le 16 novembre, les plantes ont été récoltées et les macules comptées. Etant donné que la levée des plantes avait été irrégulière en fonction des bacs et que certains bacs avaient été fortement attaqués par des limaces malgré l'apport de molluscicide, les feuilles en âge de porter des macules ont été pesées en fin d’expérimentation afin de ramener la quantité de macules à une biomasse fraîche. Les feuilles en âge de porter des macules ont été sélectionnées en éliminant d’une part les feuilles trop âgées et abîmées sur lesquelles le dénombrement n’était plus possible et d’autre part les feuilles trop jeunes. L’identification des feuilles trop jeunes a été faite en comparaison avec les feuilles ne portant pas de macules sur les plantes fortement contaminées. Les données climatiques horaires (température, pluie, vitesse et direction du

Figure 2.19. Nombre total de spores piégées avec les Burkards entre le 19 septembre et le 5 novembre 2006 en fonction de la distance à la source.

Figure 2.20. Nombre de macules par gramme de plantes de colza dans chaque bac de plantes pièges en fonction de la distance au plus proche bord de la parcelle source (chaque point représente un bac)

Figure 2.21. Nombre moyen de macules par gramme de plantes et par classe de distance à la source (chaque point représente la moyenne du nombre de macules pour les bacs situés dans la classe de distance considérée).

résolution de 10°) a été relevé pendant les deux périodes de projection d'ascospores. Les deux directions principales du vent pendant ces deux périodes étaient 110 et 160° (Figure 2.17). 2.1.2.3. Résultats et discussion

Piégeages des ascospores. La majorité des ascospores a été piégée au cours de deux périodes : 8-11 octobre et 25-29 octobre. Le nombre total de spores piégées pendant la période de 48 jours considérée décroît avec la distance à la source (Figure 2.19).

Infection de plantes pièges. Le nombre de macules comptées le 16 novembre ramené à la masse des plantes ne présente pas de décroissance nette avec la distance à la source même quand on considère seulement les bacs situés dans les directions du vent les jours de libération de spores (Figure 2.20). Ceci est en contradiction avec les données de piégeages à l’aide des Burkards, et deux hypothèses peuvent être proposées. D'une part, les sources secondaires de spores ont pu contaminer les bacs situés à des distances élevées de la source principale. D'autre part, le site expérimental choisi comporte des haies qui ont pu influencer la dispersion des spores aux distances élevées. Pour ces deux raisons, nous avons restreint l'échantillonnage aux seuls bacs situés à moins de 200 m de la parcelle source dans la direction du vent. Pour ce sous-échantillon, le nombre moyen de macules ramené à la masse des plantes en fonction de la classe de distance à la source décroît avec la distance à la source (Figure 2.21).

Dans nos conditions expérimentales (climat, topographie et quantité d’ascospores émises par la source), le nombre de spores piégées décroît jusqu’à 200 m de la source, mais ce nombre reste assez élevé. Contrairement aux résultats de Salam et al. (2001) ou Guo et Fernando (2005) mais similairement à Marcroft et al. (2004a), le nombre de macules ne décroît plus avec la distance pour les bacs situés entre 200 et 500 m. Etant donné le site de l’expérimentation, on peut supposer que des spores issues des deux autres parcelles de colza ont pu contribuer à infecter les plantes pièges des bacs qui en sont proches. Par ailleurs, la présence de haies entre la parcelle source et les bacs les plus distants a pu perturber la dispersion des ascospores. Ces résultats nous renseignent sur les risques d’infection à des courtes distances à la source mais illustrent les difficultés expérimentales auxquelles on est confronté quand on souhaite réaliser ce type d’étude à des distances supérieures.

Enfin, ces observations au même titre que celles des publications précédentes correspondent à l’observation d’un unique gradient de dispersion dans des conditions données (climat, topographie et quantité d’ascospores émises par la source). Or, en vue de la mise au point de stratégies de gestion des résistances, il est important d’identifier non seulement la dispersion moyenne des spores à partir d’une source, mais également d’analyser la variabilité existant en fonction du climat (par exemple intensité du vent), de la variété (qui jouerait par exemple sur la quantité de spores émise) ou du paysage (par exemple haies). Il sera important à l’avenir d’évaluer la variabilité des dispersions à partir de sources différentes ou dans des conditions

Figure 2.22. Comparaison entre les données expérimentales et la courbe de dispersion utilisée dans SIPPOM. La vitesse 1,4 m.s-1 correspond à la vitesse moyenne relevée dans les directions principales du vent pendant les périodes de libération d’ascospores (8-11 octobre et 25-29 octobre).

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