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Dans cette expérience, le but est d’évaluer dans une tâche de production motrice s’il existe égale-ment un prototype moteur de l’ellipse, et si tel est le cas, s’il a la même excentricité que celui mis en évidence dans le cas visuel statique.

3.3.1 Méthodes

Participants

20 sujets (5 femmes) d’un âge moyen de 39.7 ans (SD “ 11.52) ont pris part volontairement à ce test. Tous les sujets étaient naïfs au sujet de l’expérience et avaient une vision normale ou corrigée. Tous les sujets ont donné leur consentement écrit avant de prendre part au test. Aucun des sujets n’a participé à l’expérience 4.

Appareillage

Les sujets étaient assis devant un écran d’ordinateur DELL 1907fp dont la résolution était de 1280 x 1024 pixels et devant une tablette graphique Wacom Intuos5 permettant d’enregistrer les don-nées à une fréquence de 129 Hz et avec une résolution spatiale de 5.10´3mm. L’interface d’enregis-trement a été programmée avec le logiciel Max/MSP.

Tâche

Dans cette expérience, il était demandé aux sujets de dessiner en continu une ellipse sur une tablette graphique pendant 50 secondes. Les sujets pouvaient voir leurs mains pendant qu’ils des-sinaient. L’expérience était composée de trois sessions de 50 secondes au cours desquelles les sujets devaient dessiner soit une petite ellipse, soit une ellipse de taille moyenne, soit une grande ellipse. L’ordre dans lequel les sujets dessinaient ces trois types d’ellipse a été contrebalancé entre les sujets. Aucun patron des différentes tailles n’était fourni aux sujet et ils avaient la possibilité de s’entraî-ner avant le début du test afin de choisir les trois tailles d’ellipses. Il leur était explicitement précisé comme dans les autres expériences que l’ellipse qu’ils allaient dessiner devait être la plus représen-tative de cette catégorie de forme géométrique. De plus, afin de minimiser la variabilité de leurs trajectoires, il était demandé aux sujets d’être le plus précis possible spatialement au cours de leurs mouvements.

3.3 Expérience 5 - Prototype moteur 81

Analyse des données

Pour chaque sujet, trois enregistrements ont été réalisés (un par taille). Chacun correspond aux coordonnées du stylet sur la tablette graphique échantillonnées au cours du temps pxn, ynq. Les don-nées brutes ont été lissées afin d’éliminer le bruit numérique lié au taux d’échantillonnage élevé en appliquant un filtre de Savitsky-Golay (Savitzky et Golay, 1964) avec une fenêtre de 43 échantillons et une interpolation du troisième ordre, ce qui est équivalent à un filtrage passe-bas avec une fréquence de coupure de 8 Hz. De plus, un filtrage passe-haut (Butterworth) avec une fréquence de coupure de 0.2 Hz a été appliqué afin d’éliminer la dérive spatiale des sujets au cours du mouvement. Afin de déterminer les caractéristiques géométriques des mouvements, et en particulier l’excentricité de l’el-lipse dessinée, nous avons utilisé le modèle de geste présenté précédemment en considérant que le mouvement était le résultat de l’oscillation de deux oscillateurs harmoniques déphasés d’une phase relative φ. La figure 3.4 présente un exemple d’enregistrement et la phase relative associée.

0 1 2 3 5 6 7 8 9 1 0 0 0.1 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 1 0 0 30 60 90 -0.1 Temps (s) Temps (s) (degrés) Position (m) x(t) y(t) moy (A) (B)

FIGURE3.4 – Exemple d’enregistrement et de phase relative associée pour une production motrice

typique d’un sujet. Le panel A présente les coordonnées au cours du temps et on voit clairement le déphasage quasiment constant entre xptq et yptq, le panel B présente la phase relative associée au cours temps.

Pour chaque enregistrement, deux séries xptq et yptq ont été collectées et l’objectif était donc d’es-timer la valeur de φ au cours du temps. Une méthode facile pour esd’es-timer le déphasage au cours du temps entre deux oscillateurs est d’utiliser la transformée de Hilbert (Panter, 1965; Smith et Merse-reau, 1991). En pratique pour calculer φptq, on calcule la différence entre les phases déroulées des transformées de Hilbert rx et ry de x et y, soit φptq “ |rxptq ´ ryptq|. Une fois la phase relative calcu-lée, elle a été moyennée (φmoy) pour les analyses. Enfin, l’excentricité a été déterminée à partir de la formule emoy c 1 ´ tan2´φ moy 2 ¯ .

Comme pour l’expérience 4, des régressions logistiques sont réalisées pour chaque sujet et pour la population globale dans le but d’évaluer l’existence et la variabilité des productions et du prototype (s’il en est un) pour chacun des sujets. Des ANOVA à mesures répétées sont réalisées sur ces deux descripteurs avec pour unique facteur la taille (A1, A2 et A3). La normalité des échantillons a été systématiquement vérifiée avec un test de Lilliefors.

82 Chapitre 3 : Ecouter les sons produits par des mouvements biologiques

3.3.2 Résultats

La figure 3.5 présente les fonctions de répartitions ajustées par sujet et la fonction de répartition ajustée sur l’ensemble des résultats de toute la population pour chaque taille. La table 3.3 présente les valeurs moyennes des médianes et JND par taille, et également les valeurs de la régression à l’échelle de la population globale. Les résultats détaillés sujet par sujet sont présentés dans la table 7.4 en annexe 7.3. Les coefficients des régressions sont significatifs pour chaque sujet et pour la population globale, de plus les corrélations entre les modèles ajustés et les données sont très élevées et toutes significatives (r2 ą .9, p ă .001 pour tous les sujets).

Les ANOVA à mesures répétées sur les médianes ne mettent en évidence aucun effet de la taille (Fp2, 38q “ 1.3, p “ 0.285). Ce résultat met donc en évidence l’existence d’un prototype commun à travers les sujets avec une excentricité proche de .91 (i.e. 45 degrés). Le JND est par contre significati-vement modifié en fonction de la taille (Fp2, 38q “ 9.13, p ă .001), en particulier, les JND ont été plus importants pour la grande ellipse que pour la petite et la moyenne (Newman-Keuls : p ă .01 pour la petite et p ă .001 pour la moyenne). Ce prototype a une valeur médiane moyenne proche de .91 (i.e. 45 degrés). Cela révèle que la variabilité intra-sujet a été plus grande pour cette ellipse qui a donc été dessinée de façon moins précise. L’analyse à l’échelle de la population met en évidence que la médiane est bien cohérente avec la moyenne des médianes intra-sujet, et qu’à l’inverse, la variabilité à l’échelle de la population est à peu près doublée par rapport à la variabilité intra-sujet (9 degrés à l’échelle de la population contre 4 degrés pour la variabilité intra-sujet). Cela est clairement visible sur la figure 3.5. 0 1 0 2 0 3 0 4 0 5 0 6 0 7 0 8 0 9 0 0 0 .5 1 0 1 0 2 0 3 0 4 0 5 0 6 0 7 0 8 0 9 0 0 0 .5 1 0 1 0 2 0 3 0 4 0 5 0 6 0 7 0 8 0 9 0 0 0 .5 1 A1 A2 A3 Phase relative Pr o ba b il ité

FIGURE3.5 – Fonctions de répartitions ajustées pour chaque sujet (courbes noires) et à travers

l’en-semble des résultats (courbe rouge) pour l’expérience 5

3.3.3 Discussion intermédiaire

Dans cette expérience, les sujets devaient dessiner trois ellipses continûment pendant 50 se-condes, une petite, une moyenne, et une grande, et ces ellipses devaient être les plus représentatives de la catégorie de forme géométrique ellipse. Les résultats ont mis en évidence l’existence d’un pro-totype caractérisé par l’excentricité de l’ellipse dessinée indépendamment de la taille de l’ellipse. La médiane moyennée à travers les sujets est de .91 et le prototype semble donc cohérent avec celui mis en évidence dans l’expérience 4 (une comparaison détaillée sera effectuée après la présentation des