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Expérience complémentaire d’amendement à l’aide de sulfate de fer 144

Les résultats du premier article (paragraphe 2) (article : Effect of biochar and amendments on Pb and As phytotoxicity and phytoavailability in a technosol) ont montré que la combinaison d’amendements la plus favorable pour la croissance de Phaseolus vulgaris était l’association biochar-compost. Toutefois ce mélange bien que diminuant fortement les concentrations en Pb dans les eaux porales, mobilisait l’arsenic de façon non négligeable, phénomène probablement dû à l’augmentation de pH. Il était donc nécessaire de réaliser une seconde expérience similaire à la première pour déterminer une combinaison d’amendements capable à la fois de promouvoir la croissance des végétaux tout en limitant à la fois la mobilité du plomb et de l’arsenic. Le premier amendement testé pour stabiliser l’arsenic était la grenaille de fer, mais les résultats présentés dans l’article 2 (Potential use of biochar, compost and iron grit associated with Trifolium repens to stabilize Pb and As on a multi-contaminated technosol) ont montré que ce matériau n’était pas adapté car il induisait une inhibition de la germination du trèfle. Le choix d’un nouvel amendement susceptible de stabiliser l’arsenic s’est alors porté sur le sulfate de fer (Fresno et al., 2016).

5.1. Matériels et méthodes

Pour cette expérience, le protocole expérimental adopté était identique à celui du test présenté dans l’article « Effect of biochar and amendments on Pb and As phytotoxicity and phytoavailability in a technosol, CLEAN, Soil, Air, Water » avec la même durée d’expérience,

Thèse Romain Nandillon – 2019

la même variété de haricots nains, mais également avec le même biochar et le même compost, seul le sulfate de fer a été ajouté, à raison de 0,15% (m/m) (concentration déterminée par des tests préliminaires, permettant d’éviter une acidification du sol). Ce dernier était un produit commercial (E-Leclerc).

La préparation des différents traitements a été identique à celle du premier phytotest. Les échantillons ont été mélangés au technosol de Pontgibaud selon les combinaisons suivantes : (P) : Sol de Pontgibaud, (PB) : P + Biochar (B) 2%, (PC) : P + Compost (C) 5%, (PBC) : P + B 2 % + C 5%, (PBCS) : P + B 2% + C 5% + Sulfate de fer 0,15 %. Chaque traitement a ensuite été réparti dans 5 pots de 300 ml, et enfin 2 graines de haricots ont été placées dans chaque pot.

5.2. Résultats et discussion

Les résultats des mesures du pH et des concentrations de plomb et d’arsenic des eaux porales, pour chaque modalité, sont rassemblés dans le tableau 3.1.

Tableau 3.1 : Caractéristiques physico-chimiques de l’eau porale : pH, concentrations en plomb et arsenic (mg.L-1) dans les différents traitements

Traitements pH [Pb] (mg.L-1) [As] (mg.L-1) P 4.43±0.08 c 14.21±1.02 a 0.08±0.01 b PB 6.86±0.03 b 0.24±0.02 d 0.03±0.00 c PC 6.76±0.07 b 0.16±0.01 d 0.22±0.08 a PBC 7.51±0.03 a 0.48±0.02 c 0.31±0.09 a PBCS 7.49±0.02 a 0.74±0.05 b 0.04±0.01 c

(P) : Sol de Pontgibaud, (PB) : P + Biochar (B) 2%, (PC) : P + Compost (C) 5%, (PBC) : P + B 2 % + C 5%, (PBCS) : P + B 2% + C 5% + Sulfate de fer 0,15 %. Les lettres indiquent une différence significative (p < 0,05) (n = 5)

La concentration du plomb dans l’eau porale a diminué de 97 % en moyenne dans tous les traitements, comme cela a été observé précédemment. Le sulfate n’a pas eu d’effet supplémentaire ; la concentration de plomb a même légèrement augmenté lorsqu’il est présent. Cette diminution a déjà été expliquée précédemment : l’immobilisation exercée par les amendements est basée sur leurs propriétés alcalines, via des phénomènes comme la sorption à des sites accessibles à la surface des amendements ou du sol, la co-précipitation avec les oxydes de Fe, Al, Mn, ou la formation de minéraux (Boisson et al. 1999 ; Mench et al. 2000).

L'observation des concentrations d'arsenic dans l’eau porale (Tableau 3.1) à T0 a montré une diminution de 62,5 % pour PB et de 50 % pour PBCS par rapport au sol de Pontgibaud. Une diminution de la concentration d'arsenic dans l’eau porale avec l'addition de sulfate de fer

dans un sol contaminé par l'arsenic et le cuivre a également été observée dans Fresno et al. (2018). Comme observé et expliqué précédemment, la concentration en arsenic dans l’eau porale a augmenté avec l’ajout de compost seul ou associé avec le biochar, de 175 % et de 288 %, respectivement. Cette mobilisation de l'arsenic lors de l'ajout d'amendements organiques, comme le compost ou le biochar, a déjà été signalée (Beesley et al., 2013 ; Clemente et al., 2010 ; Yin et al., 2016).

Dans cette expérience, nous avons pu observer pour PBCS que l'augmentation du pH du sol provoquée par l'ajout d'amendements n'a pas conduit à une augmentation de la concentration d'arsenic dans l’eau porale. Ceci suggère que l'ajout de sulfate de fer à la combinaison biochar / compost a augmenté la capacité de sorption de l'As dans le sol, limitant ainsi les effets du pH et surtout du carbone organique dissous. En effet, l’application de sulfate de fer aux sols entraîne la formation rapide d'oxydes de fer qui adsorbent et stabilisent l’arsenic à long terme (Cutler et al., 2014 ; Miretzky et Fernandez-Cirelli, 2010 ; Fresno et al, 2018).

La biomasse végétale des organes des haricots a été mesurée à la fin de l'expérience (Figure 3.10).

Figure 3.10 : Biomasses sèches (mg) des organes des haricots nains (parties aériennes (colonne blanche), racines (colonne noire)) à la fin de la période expérimentale (13 jours). (P) : Sol de Pontgibaud, (PB) : P + Biochar (B) 2%, (PC) : P + Compost (C) 5%, (PBC) : P + B 2 % + C 5%, (PBCS) : P + B 2% + C 5% + Sulfate de fer 0,15%. Les résultats sont exprimés sous forme de valeur moyenne et d'erreur type (n=10), les lettres sur les histogrammes indiquent une différence significative (p<0,05).

Les biomasses racinaire et aérienne les plus faibles de haricot ont été mesurées sur P seul et étaient de 39,9 mg et 126,3 mg respectivement. Tous les traitements ont amélioré la biomasse racinaire. Ainsi, les traitements PB et PBCS ont pu être regroupés, ces plantes ne présentaient aucune différence statistique significative en termes de biomasses racinaires. Ces

200 100 0 100 200 300 400 P PB PC PBC PBCS b io m ass e g a a c b bc b c a d d

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dernières, sèches, se situaient entre 138 et 156 mg. Venait ensuite le traitement PBC avec une biomasse intermédiaire de 95 mg, et enfin le traitement PC avec la biomasse racinaire la plus faible (63 mg). La biomasse aérienne a également augmenté pour toutes les modalités comparées à P. Cette fois, ce sont les traitements PC et PBC qui ont pu être regroupés avec une biomasse sèche d’environ 215 mg. La plus faible biomasse (176 mg) a été mesurée sur PB, la plus forte étant mesurée sur PBCS (341 mg).

Dans cette étude, l'ajout d’amendements a été bénéfique pour la croissance des plantes. En ce qui concerne le sulfate de fer (PBCS), la biomasse du PBCS était identique à celle du traitement PB, mais supérieure à celle du traitement PBC, montrant ainsi l'intérêt du sulfate de fer. En effet, les paramètres physico-chimiques de l'eau porale entre les traitements PBC et PBCS sont très proches, sauf pour la concentration en As. Ces résultats montrent donc que la diminution de la mobilité de l’arsenic, très facilement mobilisable, permet de réduire la toxicité du technosol et donc d'améliorer la croissance du haricot.

5.3. Conclusion

Au vu des résultats de cette expérience avec sulfate de fer, il apparaît que la combinaison biochar + compost + sulfate de fer est la combinaison adéquate pour une application sur le terrain dans un contexte de phytostabilisation assistée du technosol de Pontgibaud. Avec cette combinaison d'amendements, nous avons pu observer la meilleure croissance des végétaux, et une diminution des concentrations en As et Pb dans l'eau interstitielle du sol.

Conclusion du chapitre III

Ce chapitre portait à la fois sur le choix des amendements à incorporer in situ au technosol de Pontgibaud et sur le comportement des végétaux vis-à-vis de ces technosols amendés. Nous avons ainsi montré que les différents amendements utilisés ont permis d’améliorer les propriétés agronomiques par élévation du pH, de la teneur en matière organique et des capacités de rétention en eau. De plus, la mesure des concentrations en As et Pb dans les eaux porales a montré des comportements différents en fonction des amendements utilisés. En effet, les amendements organiques comme le biochar notamment ont permis d’abaisser de plus de 90 % la concentration en plomb dans l’eau porale mais ils ont dans le même temps augmenté la concentration en arsenic. Ces résultats ont montré qu’il était nécessaire, dans notre cas, d’associer aux amendements organiques, essentiels à

l’amélioration agronomique du technosol, un amendement inorganique à base d’oxyde de fer pour limiter la mobilité de l’arsenic. Le choix des amendements à incorporer au technosol de la parcelle expérimentale (chapitre IV) s’est donc porté sur une combinaison associant biochar, compost et sulfate de fer.

Les résultats ont mis en évidence la capacité du trèfle à contribuer à la phytostabilisation de l’As et du Pb, au niveau des racines. De plus, nous montrons que le trèfle ou le saule, qu’ils soient associés on non, impactaient les caractéristiques du technosol. La combinaison saule et trèfle améliore l'immobilisation du plomb, réduisant sa concentration en solution, sans augmenter la mobilité de l'As. Cette combinaison d'espèces a également réduit le transport des particules en suspension et le transport du plomb particulaire. De plus, l’association du saule et du trèfle a permis le développement d'un couvert végétal persistant, et pourrait permettre la fixation de l'azote atmosphérique.

Finalement, ces différentes expériences ont permis de définir pour le contexte particulier du technosol minier de Pontgibaud, une combinaison optimale d’amendements (biochar + compost + sulfate de fer), ainsi qu’une association d’espèces végétales adéquates (saules et trèfle) pour un procédé de phytostabilisation assistée.

Ces résultats ont été exploités afin de mettre au point un programme expérimental visant à transposer in situ (chapitre IV) le procédé de phytomanagement et vérifier son efficacité en recherchant individuellement ou en association l’effet des trois amendements.

Thèse Romain Nandillon – 2019

4. Chapitre IV : Suivi du procédé de