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Bioaccessibilité du plomb et de l’arsenic pour les différents blocs

2. Caractérisation géochimique de la parcelle expérimentale lors de la

2.2. Comportement géochimique des métaux et métalloïdes dans le sol

2.2.4. Bioaccessibilité du plomb et de l’arsenic pour les différents blocs

L’étude de la bioaccessibilité permet de déterminer la fraction potentiellement accessible lors d’ingestion accidentelle par un être humain. Les résultats des tests réalisés sur les échantillons de sol de la parcelle sont listés dans les figures 4.11 et 4.12 et le tableau 7 annexe 1.

Pour le plomb, lors de la phase gastrique, nous avons pu observer que le bloc PBC a vu sa fraction de plomb bioaccessible augmenter de 1,1 fois. Six mois après l’incorporation des amendements, seule la fraction bioaccessible de plomb du bloc PC a diminué de 1,2 fois par rapport à T0 (Figure 4.11 et Tableau 7 annexe 1). Enfin, en comparant les sous-blocs non végétalisés et végétalisés, nous avons pu constater que la végétation implantée n’a eu aucun effet sur les différents blocs de la parcelle expérimentale.

Figure 4.11 : Fraction bioaccessible (%) du plomb, après ajout d'amendements (T0) et 6,5 mois après l’apport d’amendements (T6) pour les différents blocs. (P) : Sol de Pontgibaud, (PB) : P + Biochar 2%, (PC) : P + Compost 5%, (PBC) : P + Biochar 2% + Compost 5%, (PBCS) : P + Biochar 2% + Compost 5% + Sulfate de fer 0,15%. NV : non végétalisé, Tr : végétalisé avec Trifolium repens STr : végétalisé avec Salix et Trifolium repens.

Globalement, même si des différences significatives existent, la proportion de plomb bioaccessible sur les différents blocs reste relativement proche de celle du technosol non amendé. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que la phase gastrique représente déjà une très forte proportion du plomb total sur le technosol. Ainsi, bien que les amendements apportés modifient certains paramètres du technosol, ils n’affecteraient que très peu voire pas du tout la fraction de plomb qui n’était pas bioaccessible. Finalement, les résultats obtenus sur la bioaccessibilité du plomb pour les blocs de la parcelle expérimentale restaient légèrement supérieurs à la bioaccessibilité du plomb généralement observée dans les sols miniers qui est de l’ordre de 60 % pour la phase gastrique (Pascaud et al., 2014).

Dans la phase gastro-intestinale, la fraction bioaccessible de plomb chute drastiquement de 11,2 fois comparativement à la phase gastrique sur tous les blocs. A T6, la fraction bioaccessible augmente avec le temps sur le bloc PC de 1,8 fois pour retrouver une proportion identique à celle du technosol non amendé. Pour les blocs PBC et PBCS, elle diminue avec le temps, de 34,7 et 5,7 fois, respectivement entre T0 et T6. Enfin, pour tous les blocs, la présence de végétaux impacte la fraction de plomb bioaccessible par rapport aux sous-blocs non végétalisés. En effet, la présence de végétaux fait diminuer cette dernière sur le sous-bloc PC STr de 5,6 fois, alors qu’elle le fait augmenter de 27,7 fois sur le sous-bloc PBCS, lui donnant un niveau supérieur à celle du technosol non amendé. Globalement, pour la phase

gastro-intestinale, les résultats sont plus contrastés que ceux de la phase gastrique. En effet, la fraction bioaccessible de la phase gastro-intestinale varie de 0,2 % à 33 %. Cependant la plupart des résultats se retrouve dans une gamme de de 2 à 10 % retrouvée dans la littérature (Juhasz et al. 2011 ; Pascaud et al., 2014), certains mêmes sont inférieurs, ce qui est notamment le cas du bloc PBC à T6.

Comme vu dans le chapitre précédent (cf Chapitre I), l’arsenic va avoir un comportement différent de celui du plomb (Figure 4.12 et Tableau 7 annexe 1). En effet, sa quantité bioaccessible va généralement avoir tendance à augmenter entre la phase gastrique et la phase gastro-intestinale.

Figure 4.12 : Fraction bioaccessible (%) de l’arsenic, après ajout d'amendements (T0) et 6,5 mois après l’apport d’amendements (T6) pour les différents blocs. (P) : Sol de Pontgibaud, (PB) : P + Biochar 2%, (PC) : P + Compost 5%, (PBC) : P + Biochar 2% + Compost 5%, (PBCS) : P + Biochar 2% + Compost 5% + Sulfate de fer 0,15%. NV : non végétalisé, Tr : végétalisé avec Trifolium repens STr : végétalisé avec Salix et Trifolium repens.

L’apport d’amendements a causé l’augmentation de l’arsenic bioaccessible sur tous les blocs à T0. Le bloc PBC a connu la plus forte augmentation, de 2,8 fois. L’arsenic bioaccessible a augmenté en moyenne de 1,3 fois pour les trois autres blocs à T0. En ce qui concerne l’effet temporel, la fraction bioaccessible d’arsenic a diminué au bout de six mois sur les blocs PB et PBC, de 1,3 fois et 2,4 fois, respectivement, la mettant au même niveau que les 2 autres blocs. Enfin la végétation a eu un impact varié sur la bioaccessibilité de l’arsenic ; elle a ainsi permis de diminuer la part d’arsenic bioaccessible sur le bloc PC de 1,2 fois. Elle n’a eu aucun effet sur les sous-blocs végétalisés du bloc PBCS, de même que sur le

sous-bloc végétalisé au trèfle du bloc PB (PB Tr), ou sur le sous-bloc végétalisé au trèfle et saule du bloc PBC. Enfin, elle a provoqué une augmentation sur le sous-bloc végétalisé au trèfle du bloc PBC (PBC Tr) et sur le sous-bloc végétalisé au saule associé au trèfle du bloc PB (PB STr) de 1,4 fois et 1.3 fois, respectivement. Globalement, l’ajout d’amendements a entraîné l’augmentation de l’arsenic bioaccessible, même si les proportions obtenues restaient relativement proches du technosol non amendé. Cette augmentation pourrait être due au fait que d'autres anions dans la solution du sol (bicarbonate, phosphate, silicate, acides organiques) suite à l'ajout d'amendements organiques, pourraient entrer en compétition pour les sites de chimisorption des particules du sol. Elle pourrait être aussi liée à des modifications des phases porteuses de l’arsenic, comme précédemment montré avec les extractions séquentielles.

Enfin, dans la phase gastro-intestinale la fraction bioaccessible de l’arsenic n’a pas été affectée par les amendements, que ce soit à T0 ou T6. Seul le sous-bloc PBCS STr a vu sa fraction bioaccessible diminuée de 1,5 fois et être inférieure à la fraction bioaccessible du technosol non amendé. Le pourcentage d’As bioaccessible reste relativement faible et montre que les solutions digestives n’attaquent pas la fraction résiduelle, comme expliqué dans le chapitre II. En effet, une des phases porteuses de l’arsenic dans le système étudié est la beudantite, qui est très stable (Joussein et al., 2013). Les variations entre les phases gastriques et les phases gastro-intestinales peuvent s’expliquer par un effet pH, comme nous avons pu l’expliquer dans le chapitre 1. En effet, Xia et al. (2016) ont montré une relation positive entre la bioaccessibilité de l'As et le pH. Ceci peut s’expliquer par le fait que l'oxyde de Fe est principalement chargé positivement à pH acide et forme des complexes de sphère externe. Ainsi, si le pH augmente, la charge positive de l’oxyde de fer diminuera, ce qui engendrera une augmentation de la bioaccessibilité de l’arsenic (Yang et al, 2002 ; Juhasz et al, 2007 ; Das et al., 2013). Cependant, dans le cas présent, le bloc PBCS ou du sulfate de fer a été rajouté, présentait la fraction d’arsenic bioaccessible la plus faible. Ceci pourrait être dû à la formation de complexes de sphère interne beaucoup plus stables que des complexes de sphère externe dans des conditions mimant le tractus gastro-intestinal (Goldberg 2002).

L'analyse par ACP de tous les résultats d'extractions séquentielles et de bioaccessibilité permet d’avoir une vision globale de l’évolution de ces paramètres en fonction des conditions sur la parcelle (Figure 4.13).

Figure 4.13 : Représentation sous forme d’ACP des données d’extractions séquentielles et de bioaccessibilité après ajout d'amendements (T0) et 6,5 mois après l’apport d’amendements (T6) pour les différents blocs. (P) : Sol de Pontgibaud, (PB) : P + Biochar 2%, (PC) : P + Compost 5%, (PBC) : P + Biochar 2% + Compost 5%, (PBCS) : P + Biochar 2% + Compost 5% + Sulfate de fer 0,15%. NV : non végétalisé, Tr : végétalisé avec Trifolium repens STr : végétalisé avec Salix et Trifolium repens. PGAs : concentration de l’As dans la Phase Gastrique, PIAs : concentration de l’As dans la Phase gastro-Intestinale, PGPb : concentration de Pb dans la Phase Gastrique, PIPb : concentration de Pb dans la Phase gastro-Intestinale.

Les deux axes F1 et F2 permettent de représenter 64,82% de la variabilité. Suivant cette représentation, les fractions les plus réfractaires (F4) sont spatialement distribuées dans le cadrant de corrélation positive F1 (en haut à droite). Les observations du sol P non traité, et de blocs à T0 et non végétalisés avec compost sont associées à ce cadrant. Cette représentation permet principalement de visualiser le déplacement de la majeure partie des conditions plantées à 6 mois vers la zone opposée au cadrant porté par la fraction F4 (en bas à gauche). Ce cadrant est encadré par les valeurs de AsF3 et PbF3 et comprend également les valeurs de PbF2 et Pb dans la fraction bioaccessible intestinale. Ces résultats suggèrent que la végétalisation aurait induit une augmentation des quantités de plomb et d’arsenic associées aux fractions oxydables de type matière organique dans le sol, et de plomb associé aux fractions réductibles de type oxydes de fer. Cette représentation met également en évidence les corrélations positives entre F4 et fraction gastrique pour le plomb, ainsi que F2 et fraction intestinale pour ce même élément. Pour l’arsenic, les corrélations entre extractions séquentielles et bioaccessibilité sont moins évidentes, mais il semble que la fraction gastrique de cet élément soit associée à l’arsenic facilement mobilisable (F1).

L’ensemble des résultats confirme que l’apport d’amendements a permis d’améliorer les qualités agronomiques de technosol de la parcelle, mais également de diminuer la part potentiellement phytodisponible de plomb pour les plantes. Cependant, bien qu’ils aient diminué la part phytodisponible de plomb et permis la croissance des végétaux, l’apport d’amendements quels qu‘ils soient a modifié la répartition chimique des deux éléments étudiés en diminuant la part de polluants dans la fraction résiduelle, et en augmentant par la même le risque de remobilisation et leur bioaccessibilité. De plus, la caractérisation géochimique du sol a permis de mettre en évidence l’impact des végétaux sur la mobilité du plomb et de l’arsenic. Le suivi de la mobilité de ces polluants sur site est donc indispensable.