On consid`ere un pendule en mouvement, soumis `a une force de friction. Soit une corde de longueur `, `a laquelle est attach´ee une masse soumise `a une force gravitationnelle m−→g di-rig´ee vers le bas. On note θ l’angle de la corde avec la verticale. La vitesse angulaire est θ0, la vitesse tangentielle `θ0T o`u T = (cos(θ),sin(θ)). On suppose qu’il y a une force de fric-tion oppos´ee au mouvement et proportionnelle `a la vitesse tangentielle, soit −klθ0T. En notant c(t) =`(sin(θ(t),−cos(θ(t))) la position de la masse, on a
c0(t) = `θ0T
c00(t) = `θ00T+`θ02(−c)
Faisons le bilan des acc´elarations et forces dans la direction tangentielle : Acc´el´eration tangen-cielle : θ00`,
Friction :−kθ0` Gravit´e :−mgsin(θ).
L’´equation de NewtonP
F =m~a se traduit, pour sa composante tangentielle, en
−kθ0`−mgsin(θ) =m`θ00 soit l’´equation d’ordre 2 non lin´eaire
θ00= −k
m θ0−gsin(θ)
`
Notes du cours K1MA6021, 2013-2014 67 Laurent Bessi`eres
Chapitre 6 : stabilit´e dans les syst`emes non lin´eaires 3. Th´eor`eme de Hartman-Grobman
On se ram`ene `a un syst`eme diff´erentiel en posantω =θ0 : θ0 =ω
ω0 =θ00= −kmω−gsin(θ)` soit
θ ω
0
=
ω
−k
mθ0−gsin(θ)`
=f(θ, ω). La matrice jacobienne en (θ, ω) est
J(θ,ω)f =
0 1
−gcos(θ)` −mk
. Au point d’´equilibre (0,0) on obtient le lin´earis´e
A=J(0,0)f =
0 1
−g` −mk
. Les racines de l’´equation caract´eristique sont
λ=
−mk ± q
(mk)2−4g` 2
de partie r´eelles−2mk <0 : (0,0) est bien un point d’´equilibre asymptotiquement stable.
3 Th´ eor` eme de Hartman-Grobman
Le th´eor`eme 6.5 montre qu’au voisinage d’un puits, le comportement des solutions d’un syst`eme non lin´eaire ressemble `a celui des solutions du lin´earis´e. Cette propri´et´e est en fait valable en tout point d’´equilibre hyperbolique, ce que d´emontre le tr`es important th´eor`eme suivant. Avant de l’´enoncer, pr´ecisons ce qu’on entend par ”ressemblance” des solutions
D´efinition 6.6. Soit X0 =f(X) et g0 =g(X) deux syst`emes diff´erentiels o`u f, g:U→Rn sont de classeC1,U ⊂Rn un ouvert contenant l’origine. NotonsΦi le flot associ´e `af et Ψt le flot associ´e `a g. On dit que les deux syst`emes sont topologiquement conjugu´ess’il existe un hom´eomorphismeH d´efini d’un voisinage de0sur un voisinage de 0tel que pourtvoisin de 0.
Ψt(H(X)) =H(Φt(X))
Th´eor`eme 6.7 (Hartman-Grobman). Soit f :U→Rn de classe C1, U ouvert de Rn conte-nant 0,Φt le flot du syst`eme non lin´eaire X0 =f(X). Supposons que 0soit un point d’´equilibre hyperbolique du syst`eme X0 = f(X) et notons A = J0f. Alors il existe hom´eomorphisme H d´efini d’un voisinage de0sur un voisinage de0 tel que pour toutX voisin de 0, pour tvoisin de 0
H(Φt(X)) =eAtH(X)
Chapitre 6 : stabilit´e dans les syst`emes non lin´eaires 4. Fonctions de Lyapounov
Autrement dit le syst`eme non lin´eaire est topologiquement conjugu´e `a son lin´earis´e, au voisinage du point d’´equilibre. Ce th´eor`eme implique 6.5. Nous n’aborderons pas sa preuve, plus d´elicate.
On a les corollaires suivants :
Corollaire 6.8. Supposons queX∗soit un point d’´equilibre stable de(6.1). Alors aucune valeur propre de la partie lin´eaire A = JX∗ n’a de partie r´eelle > 0. En particulier, un point-selle est instable.
Corollaire 6.9. Un point d’´equilibre hyperbolique est asymptotiquement stable ou instable.
Exercice6.10. Montrer que le point d’´equilibreθ=πdu pendule est instable.
Il reste `a ´etudier la stabilit´e ´eventuelle en des points non hyperboliques, i.e. lorsqu’une valeur propre au moins de la partie lin´eaire est de partie r´eelle nulle. Un crit`ere tr`es utile pour ´etablir la stabilit´e est l’existence de fonctions de Lyapounov.
4 Fonctions de Lyapounov
SoitV :U→Rdiff´erentiable surU\ {X∗}. Etant donn´ee une ´equation (6.1), on note ˙V :U→R, la fonction
V˙(X) =dXV.f(X) =h∇XV, f(X)i Si Φt(X) est une trajectoire de X0 =f(X), on alors
d
dt|t=0V(Φt(X)) = dXV.d dtΦt(X)
= V˙
Th´eor`eme 6.11. Soit X∗ un point d’´equilibre de (6.1). Soit V : U→R, continue sur U, diff´erentiable surU \ {X∗}. On suppose que
(1) V(X∗) = 0,V(X)>0 siX 6=X∗. (2) V˙ ≤0sur U \ {X∗}.
Alors X∗ est stable. Si de plus on a (3) V <˙ 0sur U \ {X∗},
alors X∗ est asymptotiquement stable.
Notes du cours K1MA6021, 2013-2014 69 Laurent Bessi`eres
Chapitre 6 : stabilit´e dans les syst`emes non lin´eaires 4. Fonctions de Lyapounov
D´efinition 6.12. On appelle fonction de Lyapounov une telle fonction V :U→R sa-tisfaisant (1)-(2). On appelle fonction de Lyapounov stricte une fonction qui saisfait de plus (3)
Remarquons que dans le th´eor`eme, on ne fait pas du tout r´ef´erence aux valeurs propres du lin´earis´e. On a en fait d´ej`a rencontr´e une fonction de Lyapounov stricte : la fonction X 7→
kXk dont on a montr´e, lorsqueX∗ ´etait un puits, qu’elle satisfaisait dtdkX(t)k <0 le long des trajectoires. C’est exactement la condition (3) ci-dessus. D´emontrons le th´eor`eme :
Preuve: Consid´erons une boule ferm´eeB(X∗, δ)⊂U. Puisque V >0 sur U\ {X∗}, par
Supposons maintenant que V soit une fonction de Lyapounov stricte. Alors ˙V < 0 implique que V d´ecroit strictement le long des trajectoires de U\ {X∗}. Soit Φt(X) une trajectoire telle que X ∈ W \ {X∗}. Par compacit´e de B(X∗, δ) il existe X∞ tel que Φtn(X)→X∞ pour une par (6.5), ce qui contredit (6.4).
Il s’ensuit que X∗ est la seule limite possible de{Φt(X)|t≥0}, d’o`u Φt(X)→X∗.
Exemple6.13. Soit le syst`eme x
, la partie lin´eaire est
J f =
Chapitre 6 : stabilit´e dans les syst`emes non lin´eaires 4. Fonctions de Lyapounov
doncX∗ n’est pas hyperbolique. Consid´eronsV(x, y) =x4+y4>0 surR2\ {X∗}. De plus V˙ = (4x3,4y3).
−y3 x3
= 0
Le th´eor`eme 6.11 permet d’affirmer que X∗ est stable. L’´etude des lignes de niveau de la fonction V permet d’en dire plus. Les courbes de niveau deV,
{(x, y)|V(x, y) =c}
forment une famille de courbes ferm´ees entourant l’origine. PuisqueV˙ = 0,V est constante le long des trajectoires, ce qui signifie qu’une trajectoire X(t) reste contenue dans le niveau {(x, y) | V(x, y) = V(X(0))}. En cons´equence,X∗ n’est pas asymptotiquement stable.
Dans une situation o`u ˙V <0 hors deX∗, les trajectoires doivent traverser les lignes de niveau.
Obsevons que les lignes de niveau d’une fonction sont orthogonales en chaque point au gradient
∇V de la fonction. Le champ de vecteur∇V donne en chaque point la direction dans laquelle la croissance deV est maximale (penser `a la ligne de plus grande pente d’une colline). L’hypoth`ese
V˙ =h∇XV, f(X)i<0
signifie que le champ de vecteurf(X) est orient´ee dans une direction oppos´ee (faisant un angle
> π/2) `a celle du gradient deV : la valeur deV d´ecroit si on se d´eplace dans la directionf(X), i.e. le long des trajectoires. Si les courbes de niveau forment une famille de courbes ferm´ees entourant un centre X∗, il est intuitivement clair (et c’est ce que montre le th´eor`eme) que les trajectoires n’ont pas d’autre choix que de converger vers le centre.