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Evolution de la microstructure

Au cours de l’hydratation la microstructure de la pâte de ciment subit de grandes transformations. Le système passe d’un état de suspension de particules solides dans une phase liquide à un solide rigide poreux. Le solide final est composé de phases solides et poreuses (contenant ou non de l’eau). De cette microstructure va dépendre les propriétés mécaniques et les caractéristiques de durabilité du matériau.

1.4.1 Les différentes phases solides et le réseau poreux

Les phases de structuration des matériaux cimentaires peuvent être décrites briève-ment en trois étapes :

– état liquide : les grains de ciment sont entourés par la phase liquide. Des phéno-mènes de ressuage ou de sédimentation peuvent apparaître si la formulation n’est pas optimisée (rapport E/C très élevé, mauvais choix des adjuvants,...). Des agrégats de ciment se forment par coagulation [23] sous l’action des forces de surface.

– état liquide-solide : le processus de coagulation s’accentue par augmentation des contacts entre les grains. Des amas se développent et sont de plus en plus liés par des liens mécaniques atteignant un seuil critique. Il se crée un chemin continu et connecté dans tout le volume de l’échantillon ; c’est le seuil de percolation. Le matériau devient progressivement rigide.

– durcissement : la phase solide est hyperconnectée. La structure granulaire est figée.

L’hydratation se poursuit par une croissance de la phase solide avec une évolution de la porosité et par une diminution de la phase liquide dans les pores.

Le système poreux des matériaux cimentaires s’avère complexe. La microstructure pré-sente des pores de l’échelle millimétrique jusqu’à l’échelle nanométrique. Différentes techniques d’investigation (les principales ont été présentées au paragraphe 1.3) ont per-mis de déterminer différentes classes de pores (ces résultats sont montrés en détail dans [1]). Outre les imperfections comme les bulles d’air, on distingue trois gammes princi-pales de pores (cf. Tableau 1.4.1) :

– les pores capillaires qui représentent l’espace initial entre les grains de ciment. Leur volume augmente avec le rapport eau sur ciment du matériau. Cette porosité dimi-nue au cours du temps par remplissage d’une partie des espaces initiaux par les produits d’hydratation du ciment

– les pores des C-S-H ouverts ou open-gel qui représentent la porosité intrinsèque aux hydrates formés

– les pores des C-S-H denses ou dense-gelqui représente la porosité dans la partie dense des C-S-H

Les deux derniers types de pores correspondent aux pores caractéristiques des C-S-H.

diamètre description

air entraîné 0.1-1 mm bulles quasi

sphériques pores capillaires 0.05µm - 10µm grands capillaires pores entre amas d’hydrates 10 nm- 50 nm petits capillaires

pores du gel ouvert 5Å- 10 nm

en dehors des lamelles de

C-S-H pores du gel dense moins de 5 Å intralamellaire

des C-S-H TAB. 1.4.1 – Nature et classification de la porosité d’une pâte de ciment

Les C-S-H étant les produits d’hydratation les plus importants en volume, ce para-graphe présente seulement la structure de ces hydrates qui jouent un rôle très important

Chapitre 1 - Caractéristiques des matériaux cimentaires

vis-à-vis des performances mécaniques du matériau durci.

Les C-S-H sont parfois assimilés à un gel compte tenu de leur faible degré de cristalli-nité et d’une importante présence d’eau. A l’aide du MEB Diamond [6] classe les C-S-H en quatre types morphologiques :

– type I : en forme de fibres allongées (0,5 - 2µm de long) – type II : sous forme alvéolaire

– type III : sous forme de disques ou de sphères (2µm) assemblés – type IV : sous forme très dense et amorphe

Les deux premiers se développent lors de l’hydratation, se sont les C-S-H externes ou outer C-S-H .Les types III et IV qui se développent plus tardivement et occupent la place de grains anhydres sont les C-S-H internes ouinner C-S-H. Jennings [24] par un modèle basé sur les mesures de surface spécifique les identifie respectivement parLD C-S-H(low density)et HD C-S-H(high density).

Les C-S-H sont composés de divers silicates de calcium hydratés. Ce qui différencie ces espèces est le rapport molaire entre le calcium et le silicium noté C/S. De nombreux modèles ont été proposés pour caractériser la structure des C-S-H (l’analyse bibliogra-phique de ces modèles est développée en détail par Baroguel-Bouny [1]) en différenciant chaque phase par le rapport C/S : par exemple Nonat [25] présente des C-S-H (α) , C-S-H (β) et C-S-H (γ) qui se différencient par leur teneur en calcium.

A l’heure actuelle il n’existe pas de conclusions définitives sur la structure des C-S-H et des recherches sont toujours en cours sur ce sujet. Par exemple récemment [26], des résultats d’adsorption d’eau sur des pâtes de ciment montrent une double porosité au niveau des C-S-H outer dépendante de la formulation (i.e. rapport eau sur ciment noté E/C), et une porosité plus fine dans les pores des C-S-H inner indépendante du E/C (cf.

Figure 1.4.3).

FIG. 1.4.3 – Mesure d’adsorption d’eau pour des échantillons de pâtes de ciment âgées [26] : CH=>E/C=0,2 ; CO=> E/C=0,35 ; CN=> E/C=0,45 ; CP=> E/C=0,6

1.4.2 L’eau dans les matériaux cimentaires

L’eau est un des paramètres majeurs dans les matériaux cimentaires. Elle intervient dès le processus d’hydratation comme nous l’avons vu, mais aussi à toutes les étapes de la vie du matériau. Notamment après la prise, l’eau devient un constituant à part entière et son évaluation constitue un indicateur pour les propriétés mécaniques et de durabilité (gel-dégel, mouvement des ions...).

Différentes classifications existent pour répartir les types d’eau rencontrés. Une ap-proche [27] consiste à diviser l’eau en deux parties : l’eau évaporable et l’eau non-évaporable.

L’eau non-évaporable (déterminée par perte au feu entre 80°C et 105°C) comprend : – l’eau adsorbée la plus liée : c’est l’eau inter-feuillet des C-S-H

– l’eau chimiquement liée : elle correspond à l’eau qui a été consommée au cours des réactions d’hydratation du ciment et qui est combinée à d’autres composants au sein des hydrates (eau hydroxylique)

L’eau évaporable comprend donc :

– l’eau adsorbée la moins liée : eau adsorbée sur la surface externe des hydrates – l’eau libre : eau située hors de la portée des forces superficielles. Elle peut se trouver

dans les gros pores, elle est aussi appelée eau capillaire

Chapitre 1 - Caractéristiques des matériaux cimentaires

La Figure 1.4.4 montre un modèle de répartitions de l’eau dans la structure des C-S-H où l’on peut différencier d’après Feldman et Sereda [28][29] l’eau interfeuillet et l’eau adsorbée.

Modèle de Feldman et Serreda revu par Sierra [28][29]

FIG. 1.4.4 – Schéma illustratif de la répartion de l’eau dans les C-S-H

La phase liquide dans le matériau, loin d’être pure, contient des ions libérés au cours de l’hydratation du ciment et en équilibre avec les hydrates formés. Les ions suivants sont principalement relevés : calcium Ca2+, potassium K+, sodium Na+, hydroxyle OH, sul-fate SO2−4 , silicate SiO4−4 et aluminate Al(OH)4. Pour déterminer la composition de cette solution dans le cas de l’hydratation du ciment Portland, Longuetet al[30] ont extrait la phase aqueuse par compression mécanique du béton. La figure 1.4.5 donne un exemple des quantités d’ions libérés par le ciment et leur évolution dans la solution interstitielle au cours de l’hydratation. Les résultats montrent une forte basicité du milieu due aux bases alcalines.