• Aucun résultat trouvé

A. Bactéries des surfaces

3. Evaluation de la viabilité cellulaire

La plupart des méthodologies de dénombrement des populations viables sont basées sur l’utilisation de fluorochromes caractérisant différentes cibles physiologiques telles la capacité des cellules à s’allonger, l’activité respiratoire, l’intégrité membranaire des cellules et l’activité estérase. Il est à noter aussi que dans des études visant à comparer différentes méthodologies, le résultat n’est pas le même selon la méthode utilisée pour des populations bactériennes soumises à un stress (pH, température, action d’un désinfectant) (Roszak et al., 1987; Yu et al., 1994).

3.1. Les méthodes utilisant la microscopie ou la cytométrie en flux

La méthode Direct Viable Count (DVC), développée par Kogure et al. (1978), cible les bactéries capables de s’allonger. Cette technique consiste à incuber des cellules bactériennes en présence d’extrait de levure qui permet aux bactéries de se développer et d’un antibiotique (exemple l’acide nalidixique pour les bactéries Gram négatif) empêchant la division bactérienne. Les cellules bactériennes ne se divisent pas mais acquièrent une forme allongée détectable par microscopie ou cytométrie en flux. La méthode DVC a été utilisée pour mettre en évidence des flores VNC dans les eaux potables (Byrd et al., 1991) et dans des biofilms (Trachoo et al., 2002).

Le dénombrement des populations viables peut être également réalisé grâce à la mise en évidence d’une activité respiratoire. Les colorants d’oxydoréduction, qui ciblent les bactéries dont la chaîne respiratoire est active, ont la propriété de changer de couleur en fonction de leur état d’oxydation. Le CTC est un colorant d’oxydoréduction qui produit un formazan rouge fluorescent quand il est réduit. Ce colorant cible l’activité respiratoire des bactéries actives et permet de visualiser les cellules par épifluorescence. Des doubles marquages CTC-4',6'-diamidino-2-phénylindole, DAPI ont été utilisés pour dénombrer à la fois la population totale et la population viable (Boulos et al., 1999).

Une autre méthode mettant en évidence l’intégrité membranaire des cellules viables est le kit Live/Dead® BacLight™ Bacterial Viability (Invitrogen,Cergy Pontoise, France). Ce kit comprend

24 2 marqueurs d’acides nucléiques, le Syto-9 et l’iodure de propidium (IP). Ces deux marqueurs diffèrent dans leur capacité à pénétrer dans les bactéries. Quand il est utilisé seul, le Syto-9, de faible masse moléculaire, peut pénétrer dans toutes les bactéries (mortes et vivantes) et émet une fluorescence verte (spectre d’excitation/émission respectivement de 480/500 nm). En revanche, l’IP ne peut pénétrer que dans les bactéries dont la membrane est suffisamment endommagée, émet une fluorescence rouge (spectre d’excitation/émission respectivement de 490/635 nm) et réduit ainsi la fluorescence émise par le Syto-9 quand les deux marqueurs sont présents (Boulos et al., 1999). En microscopie à épifluorescence, les bactéries viables dont la membrane est intacte apparaissent en vert alors que les bactéries mortes, ayant perdue leur intégrité membranaire, apparaissent en rouge (Figure 1). Boulos et al. (1999) comparent cette méthode à celle du marquage au CTC pour la mise en évidence de cellules viables dans des eaux de distribution. Ils concluent qu’en absence de stress, les évaluations des populations viables sont comparables. Par contre après un stress (chloration, changement de température), la population CTC+ est plus faible que celle mise en évidence par le kit Live/Dead ® Baclight™. Selon ces auteurs, les résidus de chlore retrouvés dans les eaux de distribution pourraient influencer l’accumulation des cristaux de formazan et par conséquent diminuer la réduction du CTC. Une autre méthode pour évaluer la viabilité cellulaire consiste à cibler une activité enzymatique estérase non-spécifique au niveau membranaire grâce aux dérivés de la fluoresceïne diacétate (FDA). Les bactéries mortes ne sont pas marquées car les composés ne s’accumulent pas du fait de la dégradation de la membrane (Ritz et al., 2001). Cependant, l’utilisation des dérivés de FDA pour le marquage de communautés microbiennes complexes est peu répandue du fait de la moindre sensibilité des bactéries Gram négatif (Alliot, 1999).

Figure 1 : Pseudomonas fluorescens marqués avec le kit Live/dead® BacLight™ Bacterial Viability (Source : http://www.bucher.ch/en/products/fluxion/bioflux_applications/microbiology.html).

25

3.2. Les méthodes moléculaires

Parmi les méthodes moléculaires utilisées pour mettre en évidence l’intégrité membranaire des cellules, on cite le monoazoture d’éthidium (EMA) (Rudi et al., 2005) et le monoazoture de Propidium (PMA) (Nocker et al., 2006). L’EMA et le PMA sont des intercalants de l’ADN qui, incorporés à des cellules préalablement à une PCR en temps réel, permettent de quantifier les cellules viables. L’EMA et le PMA vont pénétrer uniquement à l’intérieur des cellules dont la membrane cytoplasmique est endommagée. Une forte exposition à une source lumineuse permet une liaison covalente à l’ADN des cellules mortes. Seul l’ADN appartenant à la population de cellules vivantes sera alors amplifié par PCR en temps réel (Figure 2). Martinon et al. (2011) utilisent le PMA couplé à la PCR en temps réel pour quantifier des pathogènes viables (E. coli, S. aureus et L. monocytogenes) sur des surfaces d’équipements à partir d’une droite standard de quantification. Une étude menée par Lee et al. (2009) sur la flore bactérienne du cabillaud a montré que l’EMA permettait une meilleure évaluation de la viabilité cellulaire comparé au PMA. Agustí et al. (2010) utilisent l’EMA-PCR pour évaluer la viabilité d’Helicobacter pylori dans des échantillons environnementaux. Ces auteurs observent une diminution des cellules viables avec un passage d’une forme bacille à une forme cocoïde dans des conditions de croissance défavorables. Chen et al. (2010) étudient la viabilité de Legionella pneumophilia par EMA-PCR dans les réseaux de distribution d’eau chaude. Ils en concluent que cette méthode s’avère particulièrement intéressante pour un suivi rapide de la contamination des eaux environnementales, mais aussi des eaux chaudes sanitaires et des systèmes de climatisation des tours aéro-réfrigérantes.

Outre l’intégrité membranaire, la détection du processus de transcription dans les cellules peut- être effectuée par une reverse transcriptase-PCR (RT-PCR). La demi-vie d’un acide ribonucléique messager (ARNm) étant très courte, ils sont considérés comme étant de bons marqueurs de viabilité et ont été utilisés dans de nombreuses études (Bleve et al., 2003; Sheridan et al., 1998; Yaron et al., 2002).

Figure 2 : Principe d’une PMA-qPCR : le PMA va pénétrer uniquement à l’intérieur des cellules dont la membrane cytoplasmique est endommagée. Une forte exposition à une source lumineuse permet une liaison covalente à l’ADN des cellules mortes. Seul l’ADN des cellules vivantes sera alors amplifié par PCR en temps réel (qPCR) (Nocker et al., 2006).

26