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Evaluation du risque de survenue d’une hémorragie intra cérébrale aigue et différée chez des patients sous anticoagulant lors d’un traumatisme crânien léger :

faut-il les surveiller pendant 24 heures en secteur de soins ?

C.Cochet1, B.Bourgeais1, N. Lepage1, E. Auge1, D. Douillet1-2 , P-M.Roy 1 ;2

1 Département de Médecine d’Urgence, CHU Angers

2 UFR Santé, Département de Médecine, faculté d’Angers

Résumé

Introduction : Les anticoagulants constituent un facteur de risque de saignement intracrânien aigu et différé non négligeable après un traumatisme crânien léger (TCL). La surveillance hospitalière préconisée après ces TCL reste un sujet de controverse. Cette étude évalue l’incidence de ces hémorragies aiguës (HIA) et retardées (HID) et l’intérêt de la surveillance pendant les 24h suivant le traumatisme. Méthodes : Etude rétrospective, dans le service des urgences adultes du CHU d’Angers de 2016 à 2018. Les patients inclus présentaient un TCL sous anticoagulants, étaient âgés de plus de 18 ans, avec réalisation d’une TDM systématique. Le suivi du patient était analysé sur le mois suivant le traumatisme. Résultat : Un total de 1098 patients a été inclus, 63 présentaient une HIA (5,74%, IC à 95% 4.51 à 7.27)).Une chirurgie a été nécessaire pour 6,3% de ces patients et 7,9%

sont décédés. Soixante et un pourcents de ces patients sous anticoagulants oraux directs n’étaient pas antagonisés. Certains signes cliniques tels que les convulsions, l’amnésie des faits et les stigmates de TC ont été significativement associés à une HIA.

Deux patients (0,18 %, IC à 95% 0.05 à 0.66)) ont présenté une HID, aux 8ème et 11ème jours suivant le TCL. Aucune ne s’est compliquée. Près de trois quart des patients ont bénéficié d’une surveillance pendant 24h, 11 (1,06%) patients ont eu un nouvel évènement en lien avec le TCL, sans conséquence. La mortalité globale était plus importante chez les patients ayant une HIA (P<0,01). Conclusion : L’incidence des HIA sous anticoagulant est importante et justifie une prise en charge initiale adaptée. De par le faible taux d’hémorragie différée et le délai de survenue tardif, l’intérêt de la surveillance intra-hospitalière de ces patients pendant 24h est remise en question.

Mots-clés : hémorragie intracrânienne aigue - hémorragie intracrânienne différée - Traumatisme crânien – Anticoagulants – Mortalité – surveillance

Abstract

Background/Aim Anticoagulants are a risk factor of acute and delayed intracranial hemmorhage after a mild brain injury (MBI). The medical monitoring requested is controversal. This study assess the impact of acute intracranial hemmorhage (HIA) and delayed intracranial hemmorhage (HID) and the benefit of a 24 hours supervision after a MBI.

Matérials and Methods : Retrospective study, in the adult emergency department of the university affiliated hospital in Angers from 2016 to 2018. The inclusion criteria were every adult patient (age18 years), with anticoagulation therapy with a systematic CT scan. Patient follow-up was analyzed over the month following the trauma. Résults : A total of 1098 patients were included, 63 had HIA (5.74%, 95% CI 4.51 to 7.27). 6.3% of these patients required surgery and 7.9% died. Sixty-one percent of these patients on direct oral anticoagulants were not antagonized. Some clinical signs such as convulsions, amnesia and head injury signs are significantly associated with HIA. Two patients (0.18%, 95% CI 0.05 to 0.66) had HID at days 8 and 11 following MBI. None of them got complicated. Almost three quarters of patients were monitored for 24 hours, 11 (1.06%) patients had a new event related to MBI, with no consequences.

Overall mortality was higher in patients with HIA (P<0.01). Some clinical criteria such as convulsion, amnesia, sign of head trauma have been signicantly associated with the presence of HIA.

Conclusion : The incidence of HIA under anticoagulant is high and warrants appropriate initial management. Due to the low rate of delayed bleeding and the delay in onset, the value of intra-hospital surveillance of these patients for 24 hours is questioned.

Keywords: immediate intracranial hemorrhage- delayed intracranial hemorrhage- mild brain injury- anticoagulants- mortality- monitoring

INTRODUCTION

Le traumatisme crânien léger est un motif de consultation fréquent dans les services d’urgences. En Europe, l’incidence annuelle des traumatismes crâniens (TC) est estimée à 262 prévalence la plus importante de ces TC se situe dans les âges extrêmes et notamment après 75 ans : une population âgée, en constante progression, plus à risque de chute et donc de traumatisme (2). Les patients âgés sont également fréquemment traités par anticoagulant du fait de pathologies cardiovasculaires augmentant le risque de saignement intra crânien.

L’utilisation de ces traitements ne cesse d’augmenter dans le monde de par le vieillissement croissant de la population(3–6).

En France en 2013, selon l’ANSM, le nombre de patients ayant pris des anticoagulants oraux au moins une fois dans l’année est estimé à 3,12 millions (7). La prise en charge de ces TCL sous anticoagulant constitue de ce fait, un véritable en enjeu de santé publique.

Les sociétés savantes (Société Francaise de Médecine d’Urgence SFMU, Scandinavian guidelines, NICE) ont défini des recommandations quant à leurs prises en charge (8–11). Elles préconisent notamment la réalisation d’une tomodensitométrie (TDM) de façon systématique et ce quel que soit la clinique présentée par le patient. En effet, le risque de saignement intracrânien accru dans les suites immédiates du traumatisme et la possibilité d’une antagonisation précoce renforcent l’intérêt de réaliser le scanner sans délai(12–14).

L’hémorragie intracrânienne différée reste une complication potentielle des TCL sous anticoagulant, chez un patient indemne de tout évènement initial(15–18). Ainsi devant ce risque non nul, les recommandations des différentes sociétés savantes préconisent une

surveillance hospitalière de 24h suivant le traumatisme.

Cependant, les données concernant sa prévalence et son délai de survenue divergent dans la littérature allant parfois jusqu’à un risque accru à 1 mois du traumatisme initial. Ce risque est faible (0.1 à 0,6% selon les études), et sa sanction chirurgicale est d’autant plus rare (<0,5%)(15–18).

Cette étude a pour but d’analyser le risque d’hémorragie aigue et différée chez les patients victimes d’un TCL sous anticoagulant. L’intérêt d’une surveillance hospitalière dans les suites du traumatisme actuellement justifiée par la possibilité d’un saignement secondaire, sera évalué devant le manque de certitude des études actuelles.

MATERIELS ET METHODES

Design de l’étude

Il s’agissait d’une étude épidémiologique, mono centrique et rétrospective, chez les patients admis aux urgences du CHU d’Angers. La période de recrutement s’est étendue de décembre 2016 à décembre 2018. L’étude a été déclarée à la CNIL et le comité d’éthique du CHU d’Angers a été consulté (N°2018/105).

Sélection des patients

Ont été inclus les patients adultes ( 18 ans), admis durant la période d’inclusion déterminée au service des urgences adultes du CHU d’Angers, ayant subis un traumatisme crânien léger, définit par un score de Glasgow 13, et ayant un traitement au long cours par anticoagulant. Durant leur passage aux urgences, chaque patient devait avoir passé un scanner cérébral attestant ou non d’une éventuelle complication hémorragique. Le scanner était lu par un radiologue du CHU de

Recueil de données

Pour chaque patient, des données épidémiologiques ont été recueillies telles que l’âge, le sexe, le mode de vie, le type d’anticoagulation (annexe 1), le mécanisme du traumatisme, les antécédents pertinents : la présence ou non d’un trouble cognitif, d’une cirrhose, d’une néoplasie ou d’une coagulopathie sous-jacente ; la présence d’une alcoolisation concomitante et l’hémostase lorsqu’elle était disponible. surveillance hospitalière, et une dernière phase évaluant la possibilité d’une nouvelle consultation dans le mois, en lien avec le traumatisme crânien.

Pour chaque phase les mêmes données ont été relevées : les signes cliniques, la survenue d’un événement (le moment de dégradation neurologique, son délai de survenue, et la clinique correspondante), la réalisation d’une TDM de contrôle. Nous avons également pris en compte le devenir du patient concernant la prise charge neurochirurgicale (surveillance, acte chirurgical, abstention) ; la poursuite du traitement anticoagulant et le décès survenant dans le mois qu’il soit lié ou non au TCL.

Pour les patients n’étant pas gardés en surveillance, l’absence de nouvelle consultation dans les 24h ou dans le mois (en lien avec le traumatisme initial), équivalait à l’absence d’événement secondaire (considérant que le CHU d’Angers est le centre de référence neurochirurgical).

Le critère de jugement principal était le diagnostic d’une hémorragie intracrânienne sur la TDM. Une TDM était considérée comme positive si présence d’un saignement intracrânien quel que soit son importance (hématome sous dural, hématome extra dural, hémorragie sous arachnoïdienne, contusion, pétéchies, hémorragie intracérébrale). Si le saignement était présent sur la première imagerie, il était défini comme aigu, sinon il était considéré comme différé. Nous avons accepté un délai de survenue allant jusqu'à un mois.

Les critères de jugement secondaires étaient l’analyse de la réalisation d’une surveillance hospitalière suivant le TCL, l’association des signes cliniques avec un évènement étaient sélectionnés à partir du motif de recours et/ou du diagnostic de sortie (Annexe 2).

Analyse statistique

Les données ont été recueillies grâce au logiciel Excel Microsoft, version 14.7.7. L’analyse statistique contenant les comparaisons et l’analyse multivariée ont été réalisées sur logiciel SPSS® 15.0. Une analyse uni variée des différents critères a été effectuée en comparant les sous-groupes grâce au test du chi2 et de Student.

Le nombre de sujets théorique a été estimé en considérant une prévalence supposée de l’hémorragie intracérébrale aiguë à 10%, avec une incertitude à 3%. La borne supérieure de l’intervalle de confiance (IC) était de 13% et le seuil alpha de significativité fixé à 5%.

Concernant le saignement différé, la prévalence était située entre 0,6% et 1%. Nous avons fixé le taux de survenue à 1% et accepté une borne supérieure de l'intervalle de confiance à 95% à 2%.

Ainsi afin d’évaluer le critère de jugement principal, le nombre de sujets nécessaires était de 986 patients.

RESULTATS

Hémorragie intracrânienne aiguë et différée

Entre 2016 et 2018, 11 223 patients ont consulté pour un possible traumatisme crânien aux urgences adultes du CHU d’Angers. Parmi ces patients, 1665 patients étaient sous anticoagulants. Cinq cent soixante-sept ont été exclus car ne répondaient pas aux critères

d’inclusions (données manquantes, absence de intracrânienne aigue (HIA) sur la première TDM (Annexe.3), 2 patients (soit 0.18 %, IC à 95% processus lésionnel hémorragique (n=1033). La médiane d’âge de la population était de 87 ans.

Il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes concernant l’âge, (84.6 ± 9.9 versus 82.9± 10.8, p < 0.34) et le sexe (p<0.49).

Concernant les mécanismes lésionnels, la chute mécanique de sa hauteur était de façon significative plus en cause chez les patients indemnes de lésion hémorragique (36/63 (57.2%) versus 743/1033 (71.9 %), p value<0,01). Elle est le plus souvent la cause du TCL dans les deux populations.

Certains signes de présentation clinique étaient significativement plus souvent retrouvés chez

les patients atteints d’une hémorragie intracrânienne notamment l’amnésie des faits (25.3 % versus 9.6 %, p<0.01), l’amnésie rétrograde (7.9% versus 1.1%, p<0.01), les troubles de comportement (15.8% versus 5.8%, p<0.01) et les convulsions (tableau 1).

Le tableau 2 décrit en analyse multivariée les facteurs associés à un risque accru d'HIA. Ainsi on observe que certains signes clinique, déjà significatifs en analyse univariée, sont associés à un plus haut risque de saignement : les convulsions (OR : 8.7, IC 95 (1.4-55.5), p=0,02), l'amnésie des faits (OR :3 , IC 95 (1.4-6.5), p=0.04), les signes neurologiques focaux (OR : 3.3, IC 95 (0.9-12.5), p=0.03) et initiée pour 11/63 patients (17.3%). Enfin, une surveillance simple a été instaurée pour 52,3 % (n=33) des patients. Quinze n’ont pas eu de suivi spécifique.

La mortalité globale des patients dans le mois présentant une HIA était significativement plus élevée (12.6% versus 1.8%, p<0.01).

Figure 1. Diagramme de flux des patients inclus dans l’étude

11 223 patients victimes d’un TC de 2016 à 2018

Exclusion initiale 1665 patients victimes d’un TC de 2016 à 2018

1098 patients inclus ayant eu un TC sous AC

• 1033 patients sans HIA

• 63 HIA

• 2 HID

Tableau 1. Comparaison des caractéristiques initiales de la population

Perte d’autonomie Grille GIR <3 (GIR connu) 6 (9.5) 148(14.3) 0.28

Trouble des fonctions supérieures 23 (36.5) 312 (30.2) 0.29

Alcoolisation aigue 3 (4.7) 60 (5.8) 1

Signe neurologique focal persistant 3 (4.7) 16 (1.5) 0.09

Signe neurologique focal transitoire 1 (1.6) 7 (0.6) 0.37

Devenir (%)

Pas de surveillance 9(14.2) 270 (26.1) 0.03

Surveillance foyer logement 0 11 (1.1) -

Surveillance domicile 3(4.7) 134 (12.9) 0.07

Surveillance autre structure de santé 0 19 (1.9) -

Surveillance EHPAD 6(9.5) 125 (12.1) 0.54

Surveillance UHCD 24 (38.1) 513 (49.6) 0.07

Hospitalisation conventionnelle 24 (38.1) 228 (22) <0,01

Hospitalisation en USC/réanimation 6 (9.5) 3 (0.3) <0,01

Décès dans les 24h 0 2 (0.19) -

Décès dans le mois 8 (12.6) 19 (1.8) <0.01

Décès liés au TC 5 (7.9) 0 -

Deux patients ont présenté un saignement intra crânien différé une semaine après leur consultation aux urgences. Les caractéristiques de ces patients sont présentées dans le tableau 3. Aucune prise en charge chirurgicale n’a été effectuée, aucun n’a eu son pronostic fonctionnel engagé.

Le taux de mortalité dans le mois, toutes causes confondues (n=27/1098) était de 2.45%

(IC à 95% de 1.69% à 3.55%). Cinq patients sont décédés de complications liées à une hémorragie intracrânienne aigue (soit 0.45%

(IC à 95% 0.02-1.06), un seul de ces patients a bénéficié d’une prise en charge chirurgicale urgente. Les autres ont été limités sur le plan thérapeutique.

Tableau 2. Analyse multivariée des facteurs associés à un risque accru d’HIC Aigue

OR IC à 95 % P

value Comorbidités

Perte d’autonomie Grille GIR <3 1.7 0.8-3.5 0.16

Trouble des fonctions supérieures 0.9 0.5-1.8 0.97

Alcoolisation aigue 0.5 0.1-2.2 0.37

Antécédent de cirrhose 0.7 0.1-7 0.79

Antécédent de cancer 1.6 0.9-2.9 0.15

Antécédent de coagulopathie 2.9 0.9-9.3 0.07

Signes cliniques à l’arrivée aux urgences

Nausées 1.9 0.3-11.4 0.49

Trouble du comportement 2.3 1.1-5.1 0.04

Stigmates de TC 1.9 1.1-3.4 0.03

Vertiges 1.9 0.4-10.1 0.41

Signe neurologique focal persistant 1.8 0.2-16.2 0.59

Signe neurologique focal transitoire 3.3 0.9-12.5 0.08

Tableau 3. Description des cas ayant présentés une hémorragie différée.

Antécédent du patient Présentat

secondaire Lésion au scanner, prise en charge Délai

famille A 5 jours, aggravation de céphalées présentent

Traumatisme par choc direct

céphalée Hématome sous dural surveillance seule 8 jours

Le tableau 4 décrit l’analyse des patients en sous-groupe en fonction du traitement anticoagulant. Trente-deux des 63 patients ayant une HIA étaient traités par antagoniste de la vitamine K (AVK). L’INR médian était de 2.16 (écart interquartile IQR 1.53-2.6) dans le groupe HIA et de 2.24 (IQR 1.7-2.9) dans le groupe indemne de lésion hémorragique (p=0.51).

Trois quarts des patients sous AVK ont été antagonisés contre 39% pour les patients sous AOD (p<0,004). Aucun des patients non antagonisés sous AOD (61%) n’a bénéficié d’un dosage spécifique. La nature des lésions hémorragiques chez les patients n’ayant pas eu d’antagonisation était diverse (hémorragie sous arachnoïdienne, hématome sous dural, hémorragie intra ventriculaire, pétéchies et contusion).

Tableau 4. Analyse en sous-groupe des HiA en fonction du type de traitement reçu.

HIC aigue

393/1033 (38) 418/1096 (38.1)

Apixaban (%)

219/1033 (21.2) 228/1096 (20.8)

Rivaroxaban

156/1033 (15.1) 170/1096 (15.5)

Warfarine sodique (%)

135/1033 (13.1) 142/1096 (12,9)

Dabigatran (%)

Pas d’antagonisation 1/63 (1.6)

1/1 (100) 19/1033 (1.8) 20/1096 (1.8)

Le délai moyen de réalisation du scanner cérébral à l’arrivée du patient aux urgences était de 2 heures et 55 min. Les TDM étaient le plus souvent réalisées dans les six premières heures suivant le traumatisme crânien léger, quel que soit le groupe (figure 2).

La surveillance

Huit cent dix-huit patients (74.5%) ont été surveillés dans une structure de santé dans les 24 premières heures. Onze patients (1.06%) ont présenté un évènement durant cette surveillance. Aucun ne présentait de complication hémorragique sur le contrôle scanographique (Tableau 5). Au total, 989 patients (95.5%) indemnes de saignement initial n’ont aucun évènement en lien avec leur

traumatisme crânien initial ni dans les 24 heures, ni dans le mois suivant.

DISCUSSION

Hémorragie intra crânienne aiguë

Cette étude a montré des résultats similaires aux données de la littérature avec une incidence des hémorragies intracrâniennes aiguës après un TCL évaluée à environ 5.1-5.9% (12,19).

Parmi les patients lésés, 6.3% ont bénéficié d’une prise en charge neurochirurgicale urgente, ceci est concordant avec les dernières études réalisées (12,19).

La mortalité était significativement plus élevée chez les patients présentant une hémorragie post traumatique, confirmant la gravité

Figure 2. Délai entre la survenue du TC et le diagnostic d’HIA au scanner.

Tableau 5. Comparaison des modes de surveillance dans les premières 24h

Lieu de surveillance Total

(n=1098) HIA (%)

(n=63) Pas d’HIA (%)

(n=1035) Nouveaux éléments lors du suivi (%)

Hospitalisation conventionnelle 252 (22.9) 24 (38.1) 228 (22) 1 (0,09) Hospitalisation en USC/réanimation 9 (0.9) 6 (9.5) 3 (0.3)

potentielle de ces lésions et la nécessité d’une stratégie standardisée.

Nous avons pu mettre en évidence des facteurs indépendants associés à la présence d’un saignement intracrânien aigu tel que l’amnésie des faits, la confusion, les troubles du comportement et les convulsions. L’analyse multivariée confirme ces résultats en faisant ressortir les stigmates de traumatisme crânien comme facteur prédictif d’HIA. De même, les convulsions chez le traumatisé sont associés à un risque huit fois plus élevé de saignement. La perte de connaissance initiale, elle, n’a pas été associée à un risque plus important de saignement intracrânien dans notre cohorte contrairement aux données de la littérature (20-22). La chute était l’étiologie la plus souvent décrite ce qui est conforme aux résultats des autres études (15,23). Toutefois, il est apparu que la chute de sa hauteur était significativement plus importante chez les patients indemnes de lésion. On peut imaginer que les chutes brutales telles la syncope, de par l’absence de prodrome et donc d’anticipation du traumatisme crânien, pourraient être prédictives d’HIC. Aucun patient ne présentait de mécanisme à haute cinétique. Ce biais provenant probablement du fait qu’Angers est un « trauma center » et que les traumatismes violents sont directement adressés au déchocage.

Des études ont été conduites sur la réalisation de score prédictif de saignement intracrânien non traumatique. En 2016, Covino et al ont présenté un nouveau score de stratification du risque hémorragique en fonction des signes cliniques chez le patient tout venant aux urgences : le Emergency CT head Score (ECHS). Il comprend 4 items : déficit neurologique transitoire, déficit neurologique focal, réapparition de céphalée et nouvelle crise épileptique/altération de la conscience. Un score à 0 permettait en théorie de se passer de l’imagerie avec une AUC de 0.787 ( IC 95%

0.748-0.822)(24). En 2015, Bent et al ont proposé un score prédictif dans lequel on retrouvait : déficit neurologique focal, altération de conscience, antécédent de néoplasie, coagulopathie et âge (25).

Des algorithmes décisionnels pour la prescription et la réalisation ou non d’une imagerie cérébrale chez les patients présentant un TCL existent déjà et ont été mise en place par certaines recommandations (New Orleans

Criteria, Canadian CT head Injury rules)(26,27).

Leur utilisation est répandue et validée par la communauté scientifique (28,29). Par ailleurs, les recommandations scandinaves incluent la protéine S100b dans leur algorithme de prise en charge (11). L’utilisation de ce marqueur fait l’objet de nombreuses études, notamment sur l’intérêt de son dosage précoce et de sa valeur prédictive négative quant à la présence de lésion hémorragique intracrânienne lors d’un TCL. Ainsi, il apparait pertinent de considérer l’utilisation d’autres outils tels la protéine S100b dans la réalisation d’un dépistage précoce des HIC (30-34).

Le traitement anticoagulant

Nous avons identifié que 41.2% de ces hémorragies intracrâniennes étaient anticoagulées par AOD. Ces patients étaient moins antagonisés que ceux sous AVK. Il n’existe à ce jour pas de recommandation claire concernant l’antagonisation des AOD dans le TCL (8,35). Pourtant, certaines études avancent le bénéfice de celle-ci dans la limitation du saignement et parfois dans la diminution de la mortalité (36,37). L’INR quant à lui ne s’est pas révélé prédictif d’un éventuel évènement hémorragique comme cela a pu être décrit dans de nombreuses autres études (4,38).

Hémorragie différée

Cette étude a également mis en évidence que la survenue d’un saignement intracrânien différé était très rare (0.18%, IC à 95% 0.05-0.066).

Ce résultat est en adéquation avec la littérature actuelle qui révèle un taux de saignement entre 0.6% et 1.5% (15,16,17). Une seule étude a mis en évidence un taux de saignement important de 6% mais le mécanisme lésionnel impliquait majoritairement des traumatismes de haute cinétique (79%) pouvant induire un biais dans la survenue d’un évènement hémorragique (39).

La surveillance

Par ailleurs, le délai d’apparition de ces évènements était dans notre étude bien supérieur aux premières vingt quatre heures suivant le traumatisme initial. Ceci est concordant avec la littérature selon laquelle l’incidence des saignements différés n’est pas limité aux premières heures (16,18). En effet,

comme le soulevait le travail de Schoonman et al, ce délai pouvait aller jusqu’à un mois. Cette même constatation a été réalisée en 2012 lors de l’étude de Nishijima et al (12). Il est intéressant de noter que l’un des deux patients ayant présenté une hémorragie différée a bénéficié d’une surveillance hospitalière de 24 heures. La clinique présentée par ce patient ne s’étant pas modifiée, il a pu regagner son domicile pour la poursuite de la surveillance.

Malgré tout, les études restent discordantes quant à la nécessité de cette surveillance. Elles la justifient par le risque d’une dégradation neurologique rapide si survenue d’un saignement. Cependant, comme l’évoque la méta analyse de Verschoof et al, l’apparition rapide de signes d’altération neurologique dans les 24h serait plutôt liée à un diagnostic retardé d’une hémorragie aiguë qu’à une réelle hémorragie différée (16). Cette constatation a également été relevée dans d’autres études

Malgré tout, les études restent discordantes quant à la nécessité de cette surveillance. Elles la justifient par le risque d’une dégradation neurologique rapide si survenue d’un saignement. Cependant, comme l’évoque la méta analyse de Verschoof et al, l’apparition rapide de signes d’altération neurologique dans les 24h serait plutôt liée à un diagnostic retardé d’une hémorragie aiguë qu’à une réelle hémorragie différée (16). Cette constatation a également été relevée dans d’autres études

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