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Evaluation de l’endommagement au cours des cycles de gel‑dégel par des essais non

C. Organisation du rapport

5 DURABILITE DES BETONS BIOFIBRES ET AMELIORATION DU COMPORTEMENT SUR LE

5.3 Comportement des bétons biofibrés en conditions extrêmes

5.3.2 Comportement des bétons biofibrés soumis aux cycles de gel‑dégel

5.3.2.2 Evaluation de l’endommagement au cours des cycles de gel‑dégel par des essais non

5.3.2.2.1 Suivi massique

Le suivi de la perte de masse est davantage utilisé pour les essais au gel sur les bétons poreux, sur les revêtement drainants (Nguyen, 2014), ou les granulats pour bétons (NF EN 1367‑1). Cette méthode d’évaluation est simple et objective mais elle qualifie l’étape ultime de détérioration du matériau (décohésion totale d’un fragment de matériau). Elle ne permet pas de qualifier la genèse des microfissurations dans le béton.

Nous avons toutefois choisi de retenir cette méthode de suivi de détérioration du matériau comme significative dans notre étude. En effet, les bétons étudiés dans le cadre de notre travail étant destinés à être utilisés en façade des bâtiments, il est important de qualifier l’écaillage subit au cours de cycles de gel‑dégel, et la dégradation associée (ici quantifiée en perte de masse relative). La Figure 5‑15 présente la perte de masse des éprouvettes de béton au cours des cycles de gel‑ dégel. Jusqu’à 90 cycles, on observe des pertes de masse relativement faibles pour les quatre bétons, inférieures à 1%. Cette dégradation est associée à un écaillage en surface des matériaux. Toutefois, après 90 cycles, les matériaux se rangent en deux groupes : le premier comprend les bétons BT et BFV (non biofibrés) et le second les bétons BFLB et BFLH (biofibrés). Le premier groupe se caractérise par une perte de masse continuelle au cours du cyclage entre 90 et 300 cycles, avec un gradient de 4,05 10‑2 % par cycle jusqu’à atteindre 9,5%. Le second groupe avec BT et BFV présente une dégradation bien plus lente après 90 cycles. En première approximation elle croît quasi‑linéairement au cours des cycles de gel‑dégel ; le gradient de perte de masse est d’environ 4,05 10‑3 % par cycle soit dix fois moins que la valeur associée à la première phase de la dégradation (entre 0 et 90 cycles de gel‑dégel).

Dans le souci d’une analyse plus simple des données expérimentales, les pertes de masse pour les deux groupes de bétons peuvent être décrites par des lois paraboliques dans tout le domaine de cyclage exploré.

‑ Pour le premier groupe (BT et BFV) :

Perte de masse (%) = A.x2+B.x avec A = 2,13.10‑6 et B = 2,70.10‑3 ‑ Pour le second groupe (BFLB et BFLH) :

Perte de masse (%) = C.x2+D.x avec C = 7,30.10‑6 et D = 1,22.10‑2

Au vu de ces premiers résultats, il semblerait que les bétons biofibrés résistent mieux aux cycles de gel‑dégel que les bétons classiques (non biofibrés). Remarquons que le paramètre dénommé ici « perte de masse » est en fait un taux de perte de masse, puisque la diminution de la masse est rapportée à la masse initiale avant le cycle gel‑dégel.

5.3.2.2.2 Suivi dimensionnel

Les mesures de variation dimensionnelle ont été effectuées à l’aide de l’appareil de mesure du retrait/gonflement sur éprouvettes bétons, tel que décrit dans la norme NF P15‑433. Les éprouvettes étaient sorties de l'enceinte climatique une heure avant la mesure (après une phase de dégel) et les mesures ont été effectuées dans une pièce à température ambiante. Pour chaque formulation, les mesures ont été effectuées sur trois éprouvettes et les résultats présentés proviennent de la moyenne des valeurs obtenues.

La Figure 5‑15 présente les valeurs du taux de gonflement mesurées sur les éprouvettes de béton au cours des cycles de gel‑dégel. On remarque une forte poussée dimensionnelle dans les tout premiers cycles (< 50 cycles) pour les bétons biofibrés (BFB et BFH), alors que le taux de gonflement est bien plus réduit en début de cyclage pour les bétons BFB et BFV. Au‑delà de 60 cycles, le taux de gonflement augmente régulièrement pour les matériaux biofibrés (450 et 520 µm.m‑1 respectivement pour BFB et BFH au 300ème cycle), et de façon moins régulière pour les bétons BFB et BFV (315 et 250 µm.m‑1 respectivement pour BFB et BFV au 300ème cycle). Ce dernier comportement a été reporté dans le cas d’un béton autoplaçant (Mohamed, 2011). Le gonflement de ces bétons après 60 cycles correspondrait à l’amorce de la microfissuration interne. Cet auteur avait d’ailleurs constaté que la perméabilité des bétons avait également augmenté après 60 cycles. On notera que l’augmentation volumique après 60 cycles coïncide bien avec l’augmentation importante de la perte de masse dans la Figure 5‑13, reflet d’un écaillage et d’une détérioration plus avancée du matériau. Nous constatons également un ralentissement du gonflement après 160 cycles. La stabilisation des déformations après un certain nombre de cycles peut s’expliquer par le fait que, sans apport d’eau externe, la répétition des cycles de gel‑dégel n’a plus d’effet significatif sur la fissuration induite par la formation de glace (Bejaoui, 2001).

Le gonflement important observé sur les bétons biofibrés est probablement dû au caractère hydrophile des fibres. La saturation complète des fibres de lin demande un temps long comme l’indiquent les essais d’absorption dans le paragraphe 4.2.4.2 (environ 24 heures). Selon plusieurs

phénomènes de sorption/désorption, ces essais de gel‑dégel vont s’accompagner de phénomènes de retrait/gonflement des fibres de lin. Or il a été démontré que de l’eau résiduelle restait dans la fibre, suite aux cycles de sorption/désorption (Rouch, 2017). Ces cyclages vont donc engendrer un gonflement plus important du béton. On notera par ailleurs que le béton BFLH ne répond plus au critère de gonflement fixé à 500 µm.m‑1 par la norme NF P18‑424.

Figure 5-14 : Gonflement des éprouvettes au cours des cycles de gel-dégel

5.3.2.2.3 Suivi de la fréquence fondamentale de résonance

La mesure de la fréquence de résonnance est généralement utilisée en génie civil pour déterminer le module d’élasticité dynamique (Edyn) des bétons. La fréquence de résonnance est renseigne sur la cohésion du matériau : une fréquence de résonance élevée est reliée aux contacts entre des phases rigides et à une faible porosité (Neville, 2000).

La Figure 5‑15 présente les endommagements, proportionnels au carré des fréquences de résonance, au cours de cycles de gel‑dégel pour les différents bétons. Là encore, on constate deux groupes de matériaux avec un comportement bien différent : les bétons non biofibrés (BT et BFV) et les bétons biofibrés (BFLB et BFLH). La fréquence de résonance de BFLB et BFLH augmente légèrement au cours des cycles de gel‑dégel pour atteindre un facteur d’endommagement de 112 % après 300 cycles. Ce résultat signifie que la rigidité du béton a augmenté au cours des cycles de gel‑dégel. Les bétons n’étant âgés que de 28 jours au début des essais menés en immersion complète dans l’eau, l’hydratation du béton a pu se poursuivre, ce qui expliquerait cette légère augmentation. En revanche, l’endommagement des bétons BT et BFV diminue de manière importante tout au long des cycles. La diminution du facteur d’endommagement semble être plus importante après 90 cycles, ce qui est en accord avec les résultats précédents. La perte de masse constatée pour ces bétons dans la Figure 5‑13 supposait déjà une détérioration avancée du matériau. Les mesures de fréquence de résonance semblent montrer des résultats similaires. Cela

traduit une diminution importante du module d’élasticité dynamique. Par ailleurs, la résistance à la compression est directement reliée au module d’élasticité des bétons. Il est donc probable que la résistance à la compression des bétons BT et BFV soit plus faible qu’initialement, avant les essais de gel‑dégel.

Figure 5-15 : Fréquences de résonance des bétons au cours des cycles de gel-dégel

5.3.2.2.4 Synthèse des essais non destructifs

Les mécanismes de dégradation du béton sont liés à l’alternance de cycles répétés de phases de gel et de dégel. Le risque de désordres est d’autant plus élevé que le degré de saturation en eau du béton est important. L’accroissement des pressions hydrauliques dans les capillaires, engendré par des mouvements de l’eau interne sont considérés aujourd’hui comme la cause principale des dégradations du béton exposé au gel. Pour empêcher l’apparition de ces pressions dans le béton, il est possible de créer, grâce à un agent entraîneur d’air, un réseau de bulles qui doivent être nombreuses, de petites dimensions, bien réparties et suffisamment rapprochées (CIMbéton, 2008).

Les résultats reportés ci‑dessus indiquent que les bétons biofibrés présentent une meilleure résistance aux cycles gel‑dégel. En effet, les bétons BT et BFV ont des pertes de masse beaucoup plus importantes et une baisse notable de la fréquence de résonance au cours des cycles. Ce résultat peut paraître étonnant puisque nous aurions pu nous attendre à une moins bonne résistance aux cycles de gel‑dégel pour les bétons biofibrés, étant donné la mauvaise durabilité connue pour ces matériaux (Savastano et al., 2001; Tonoli et al., 2011). Ces résultats pourraient être expliqués par la plus forte teneur en air et la plus forte porosité des bétons biofibrés. En effet, tandis que les bétons BT et BFV ont des teneurs en air de l’ordre de 1‑1,5 %, les bétons BFLB et BFLH ont des teneurs en air d’environ 3‑4 %. Comme nous l’avions vu précédemment, les fibres de lin, même en faible proportion, augmentent significativement la quantité d’air occlus dans les composites

remontée de l’air entraîné durant le malaxage, et donc augmenter la teneur en air des bétons. De plus les fibres possèdent elles‑mêmes une structure poreuse. L’enchevêtrement des fibres de lin au sein du matériau peut créer un réseau capillaire qui permet de limiter les pressions hydrauliques lors du gel ‑dégel qui conduisent à la détérioration du béton.