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CHAPITRE 1 – INTRODUCTION

II. EXEMPLE DE MALADIE COMPLEXE : LA POLYARTHRITE

6.1 Etudes de profils d’expression à large échelle

Malgré des études intensives, les mécanismes physiopathologiques et pathogéniques à l’origine de plusieurs maladies dont la PR sont encore mal compris. Chez les patients atteints de PR, plusieurs études de profil d'expression génique ont été faites dans les cellules du tissu synovial ou encore dans les cellules mononucléées du sang périphérique appelés aussi PBMCs (Peripheral blood mononuclear cells) à l'aide de la technologie des puces à ADN, dont la référence pour nous dans cette thèse reste celle réalisée par Teixeira et al. en 2009 (177). Dans le cas de la polyarthrite rhumatoïde, les différences dans les profils d'expression offrent des possibilités de stratifier les patients atteints de PR en fonction de critères moléculaires qui peuvent nécessiter différentes stratégies de traitement.

Les grands objectifs de l’étude du profil d'expression génique dans la PR se résument à (i) améliorer notre compréhension des mécanismes pathogéniques sous-jacents de la maladie, (ii) identifier de nouvelles cibles de médicaments, (iii) d'évaluer l'activité de la maladie, (iv) prévoir les résultats futurs, tels que la réactivité à un traitement, la gravité globale de la maladie, et le risque spécifique d'organes et finalement (v) développer de nouveaux tests de diagnostic (211), afin de permettre une meilleure prise en charge de la maladie.

L’approche synoviale est soulignée dans la mesure où la PR n’est pas une maladie systémique. Par exemple, les mécanismes inflammatoires ciblés par les anti-TNFα sont localisés dans le synovium et le profil d’expression génique du sang circulant de patients atteints de PR peut ne pas être représentatif de ces voies spécifiques du tissu synovial. Cette approche est généralement justifiée par son habilité à discriminer la PR des autres troubles articulaires (212), ainsi que par la capacité à identifier des variations du nombre de macrophages au cours du traitement.

84 L’étude du profil d'expression génique en utilisant les PBMC, permet d'identifier les processus à la fois pathogéniques et physiopathologiques comme cela a été démontré dans plusieurs types de maladies: cancer (213), asthme (214), LED (215), les maladies cardio-vasculaires (216) et des troubles psychiatriques (217). Les PBMCs, et plus exactement les lymphocytes, sont particulièrement pratiques pour la recherche médicale et autres applications diagnostiques car ils peuvent facilement et à plusieurs reprises être collectées en quantités suffisantes au cours de la maladie. La fonction altérée des lymphocytes dans les maladies, essentiellement auto- immunes, est le résultat d'une anomalie d’expression des gènes codant pour des cytokines, des composants de récepteurs, des voies de transduction du signal, et des modulateurs de la transcription et de la traduction. En outre, certains polymorphismes de gènes peuvent affecter leurs propriétés fonctionnelles ; c’est ce que l’on appelle un polymorphisme fonctionnel.

L’intérêt de l'expression des gènes à partir de PBMCs consiste à identifier, à la fois, les deux processus pathogénique et physiopathologique. Les processus pathogéniques sont principalement associés à la cause d'une

maladie. Dans ce cas, l’étude du profil d’expression génique pourrait

conduire à l'identification de gènes anormaux (de par leurs activités) qui peuvent ne pas être seulement limités aux PBMCs, mais dont la régulation pourrait être aussi affectée dans les cellules de l’organe pathologique. En revanche, les changements physiopathologiques de l'expression génique lymphocytaire sont considérés comme une réaction essentiellement normale du système immunitaire à un stimulus pathologique (infection bactérienne ou virale, inflammation, ...).

Par conséquent, et dans un contexte physiopathologique, les profils de gènes peuvent être partagés par une variété de maladies, alors que l'expression du gène pathogénique devrait être spécifique à la maladie (218).

Les études de profil d'expression dans la polyarthrite rhumatoïde peuvent être classées de manière globale en deux catégories:

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 celles qui sont axées sur la recherche de « nouvelles pistes » des gènes candidats pour comprendre l'étiologie de la maladie et sa pathogénie,

 celles qui sont axées sur l'identification de profils d'expression

typiques d'un état de la PR : en rapport avec la forme « érosive vs bénigne » ou par rapport à une réponse à un médicament « bonne réponse au traitement vs mauvaise réponse » ; c’est le cas des études de pharmacogénomique.

Dans la première catégorie, l'analyse de l'expression est souvent la première étape dans l'élucidation de la fonction des gènes, alors que dans la seconde, elle vise à réduire l'hétérogénéité phénotypique ou à identifier des profils d'expression qui peuvent servir d'outils de diagnostic de prédiction,

issue de la maladie ou de la réponse à l’un des médicaments

antirhumatismaux (tel que les anti-TNFα) (219-221).

Des études de profils d'expression génique chez les patients atteints de PR ont non seulement révélé des gènes associés à la maladie elle-même (177), mais également identifié des sous-groupes distincts de patients

atteints de PR que l’on peut désormais distinguer grâce à des profils

d’expression génique différents (219, 220, 222-224).

6.2 Etudes Pharmacogénomiques : Signatures de réponse aux traitements

L'expression des gènes avec une méthodologie haut débit peut contribuer à l’analyse et à l’identification de gènes qui sont impliqués dans la réponse au traitement ou dans les effets indésirables associés à la thérapie (225-229). Plusieurs études ont utilisé l'analyse de l'expression des gènes pour identifier les gènes « signatures » d'expression afin de prédire la réponse à un traitement par biothérapie chez des patients atteints de PR,

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plus particulièrement l’infliximab et l’étanercept.(220, 221, 230). Cependant,

leurs résultats sont hétérogènes.

Plus récemment, Mesko et al ont réalisé la première étude pharmacogénomique de réponse au tocilizumab chez 13 patients atteints de PR et traités par cette molécule. Les niveaux d'expression de 59 gènes au total ont montré des changements significatifs entre la ligne de base (avant début du traitement) et après 4 semaines de traitement. Quatre gènes (DHFR, CCDC32, EPHA, TRAV8) ont été identifiés comme étant associés avec une bonne réponse, et ce après correction pour tests multiples. Encore une fois, nous en savons très peu sur la fonction de ces gènes dans la PR. Les seules informations disponibles sur ces gènes dans la PR sont que la dihydrofolate reductase (DHFR) a été identifié comme facteur prédictif putatif de réponse MTX ; le T cell receptor variable d'alpha 8 (TRAV8) est impliqué dans les réponses des cellules T-CD8+ ; le récepteur de l'éphrine A4 (EPHA) joue un rôle dans le système nerveux, tandis que la fonction de CCDC32 reste inconnue dans la PR (231).

Les études décrites ci-dessus, menées dans des conditions extrêmement variables (type de tissu / cellule, type de puces, nombre de gènes et taille des échantillons), n’ont donc pas permis de définir un profil d’expression univoque, spécifique de la PR. Néanmoins, une dérégulation de la réponse immune semble ressortir clairement de ces travaux. La combinaison de ces différentes données dans des études globales de type méta-analyse permettrait potentiellement d’atteindre une puissance plus importante pour identifier une signature d’activité des gènes impliqués dans la PR. D’autre part, étudier le profil d’expression de cellules jouant directement un rôle dans la maladie, comme les cellules dendritiques (DCs)

ou les LT CD4+, permettra de refléter davantage les changements d’activité

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