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Chapitre V Synthèse, caractérisation et étude magnétique des complexes

V. 1. 2. Etude des propriétés magnétiques

Afin d'avoir une première idée de la nature du couplage et de l'anisotropie magnétique du composé 12, nous avons mesuré la dépendance thermique du produit χMT et la dépendance en champ de l'aimantation à des basses températures (Fig. V-3).

0 1 2 3 4 5 0 50 100 150 200 250 300 350 T (c m 3 mol -1 K) T (K) J 1 = -7.13 cm-1 J 2 = -2.43 cm-1 g = 2.26 impureté = 3.74E-02 R X = 5.4E-5 R XT = 4.1E-5 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0 1 2 3 4 5 6 M (N ) 0H (T) J 1 = -7.13 cm-1 J 2 = -2.43 cm-1 g = 2.26 impureté = 3.74E-02 2 K 4 K 6 K 8 K

Figure V-3: Evolution du produit χMT du composé Ni4 12 en fonction de la température (gauche), et les courbes d’aimantation M=f(µ0H) à basses températures (droite). ((o) : les données expérimentales et (˗) : les données calculées)

L’allure de la courbe χMT montre un couplage antiferromagnétique entre les ions de nickel(II). La valeur de χMT à température ambiante vaut 4.7 cm3 mol-1 K correspondant environ à la somme des valeurs de χMT de quatre ions Ni(II) indépendants avec S = 1 et g = 2.17. Cette valeur diminue légèrement quand la température diminue jusqu’à 100 K, puis

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elle diminue rapidement pour atteindre 0.05 cm3 mol-1 K à 2 K. Cette diminution peut être due à une anisotropie magnétique et/ou à un couplage d’échange antiferromagnétique. Mais, puisque le produit χMT atteint une valeur proche de zéro à basse température, l’anisotropie ne peut pas être la seule cause de la décroissance de χMT. On peut raisonnablement supposer que l’on a aussi un couplage antiferromagnétique entre les ions Ni(II) aboutissant à un état fondamental de spin S = 0. Nous avons donc effectué un ajustement de la courbe χMT = f(T) en supposant le modèle d’interaction présenté dans le schéma V-1.

Schéma V-1: Modèle de l’interaction entre les quatre ions Ni(II), avec J1 le paramètre d’interaction au sein de l’entité binucléaire et J2 entre ces entités

L’ajustement des données a été réalisé en supposant que l’anisotropie locale des ions Ni(II) est nulle. Cette supposition est raisonnable car l’anisotropie locale des ions Ni(II) en géométrie octaédrique est faible, en général, et a peu d’influence sur l’allure des courbes χMT = f(T) en présence d’une interaction antiferromagnétique et donc un spin fondamental S = 0. Un excellent ajustement des données (Figure V-3, gauche) conduit aux valeurs suivantes : J1 = -7.1 cm-1, J2 = -2.4 cm-1, g = 2.26 et 3.7 % d’une impureté monomérique de Ni(II).

L’aimantation en fonction du champ a été mesurée à T= 2, 4, 6, et 8K pour des valeurs de champ allant de 0 à 5.5 T sur une pastille des cristaux broyés. Les courbes de l’aimantation calculées (Fig. V-3, droite) en utilisant les paramètres extraits de l’ajustement de la courbe χMT = f(T) sont en excellent accord avec les données expérimentales, ce qui valide les paramètres trouvés.

Pour valider l’absence du paramètre d’anisotropie locale des ions Ni(II) dans la procédure d’ajustement, nous avons effectué un calcul de l’aimantation en fonction du champ à T = 2 et 8 K en introduisant une valeur de DNi = - 4 cm-1. Les résultats présentés à la Figure V-4 montrent clairement que les courbes avec et sans le paramètre D sont superposables.

118 0 0.02 0.04 0.06 0.08 0.1 0.12 0.14 0.16 0 1 2 3 4 5 6 7 D= 0 cm-1 (2K) D= -4 cm-1 (2K) M (N ) 0H (T) 0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 0 1 2 3 4 5 6 7 D= 0 cm-1 (8K) D= -4 cm-1 (8K) M (N ) 0H (T)

Figure V-4: Courbes théoriques M=f(µ0H) pour le composé Ni4 12 à T=2 K(gauche) et 8K (droite) avec D=

0 et -4 cm-1

L’ajustement des données a, donc, montré que les paramètres d’échanges sont plutôt faibles. Cela est raisonnable à cause de la grande taille du pont NO3-. On observe une différence d’amplitude entre les deux paramètres d’échange : au sein de l’entité binucléaire le couplage antiferromagnétique est trois fois plus grand (en valeur absolue) que celui entre les entités binucléaires. L’origine de cette différence peut être analysée en considérant les interactions entre les orbitales magnétiques de ions de Ni(II) à travers le pont NO3- dans les deux cas. On rappelle que l’environnement octaédrique des ions de Ni(II) est compressé suivant les liaisons Nax-Ni-ONO3 où Nax est l’amine tertiaire du ligand et ONO3 est un atome d’oxygène du pont NO3-. En effet, la longueur des liaisons Ni-Nax et Ni-ONO3 sont entre 2.05 et 2.07 Å, tandis que la longueur de liaisons dans le plan perpendiculaire à cet axe est entre 2.13 et 2.6 Å. Cela permet, donc, de définir l’axe z comme étant celui le long de l’axe Nax-Ni-ONO3comme présenté à la Figure V-5.

Figure V-5: Vue schématique de la structure du complexe Ni4 et l’orientation des liaisons M-L ; on prend l’axe z selon les liaisons Ni-L les plus courtes qui correspondent à la direction Nax-Ni-ONO3

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Dans ce système d’axe, les orbitales magnétiques (décrivant les électrons célibataires des ions Ni(II)) seront donc les orbitales dz2 et dx2-y2 (en supposant que les axes x et y sont le long des liaisons M-L dans le plan équatorial). L’interaction orbitalaire au sein de l’entité binucléaire a lieu entre les orbitales de type dz2 (Fig. V-6, gauche), le long des liaisons Ni-ONO3 les plus courtes où les atomes de Ni sont coplanaires avec le pont NO3-, assurant donc le maximum de recouvrement entre les orbitales magnétiques. L’interaction orbitalaire entre les entités binucléaires a lieu grâce aux orbitales de type dx2-y2 (Fig. V-6, droite). Dans ce cas, les distances Ni2-ONO3 sont plus longues (2.30 au lieu de 2.05 Å) conduisant à délocalisation plus faible de la densité électronique du métal vers le ligand. De plus les atomes de Ni ne sont pas dans le même plan que le pont NO3 (Fig. V-5) comme c’est le cas au sein de l’entité binucléaire. Enfin la distance entre les ions Ni(II) entre les entités binucléaires est plus longue que celle au sein de ces entités. Ces trois facteurs contribuent pour conduire à une intégrale de recouvrement entre les orbitales magnétiques des Ni(II) entre les entités binucléaires plus faible qu’au sein d’une entité, et donc une interaction antiferromagnétique de plus faible amplitude.

On note que l’interaction d’échange à travers le nitrate au sein des entités binucléaires de Ni(II) (-7.3 cm-1) est bien plus grande que celle entre les ions Co(II) (-0.34 cm-1, voir chapitre 3). Puisque les orbitales magnétiques impliquées dans cette interaction sont les mêmes dans les deux composés (de type dz2) et puisque l’orientation des ces orbitales au sein des complexes par rapport au pont NO3 sont pratiquement les mêmes ; si l’on néglige la différence d’énergie entre les orbitales d du Ni(II) et du Co(II), on devrait s’attendre à ce JCoCo soit égale à 4JCoCo/9, où 4 et 9 sont les produits du nombre d’électrons des deux ions Ni(II) et Co(II) respectivement.[4] La valeur trouvée dans le cas du complexe binucléaire du Co(II) est un ordre de grandeur plus faible que celle attendue (-0.34 au lieu de -32 cm-1). La seule explication possible est que la valeur du paramètre du couplage d’échange trouvée pour le complexe binucléaire de Co(II) à travers le ligand NO3 ne soit pas juste, probablement parce que le composé n’est pas suffisamment pur.

Si maintenant, on compare la valeur de J trouvée dans le cas du pont carbonate pour le complexe binucléaire de Co(II) (-2 cm-1) avec celle du complexe binucléaire de Ni(II) dans le cas du pont NO3 (-7.3 cm-1), on trouve un rapport raisonnable. La faible différence avec

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la valeur attendue (le rapport de 4/9) est essentiellement due à la différence de la nature du pont et des énergies des orbitales des ions métalliques.

Figure V-6: Vue schématique des interactions orbitalaires au sein de l’entité binucléaire (gauche) entre les orbitales de type dz2des ions Ni1 et Ni2 et entre les orbitales de type dx2-y2des ions Ni2 appartenant aux différentes entités binucléaires (droite).

V. 2. Le composé binucléaire [Ni

2

(µ-Im)L

2

](ClO

4

)

3