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Le problème de la quantification des particules mobilisables (et leur disponibilité) nous conduit logiquement à la problématique du « pool » (ou stock) de particules mobilisables et de sa possible régénération/épuisement pendant l’événement pluvieux lui-même ou pendant la période de pause qui sépare deux événements pluvieux consécutifs.

Très peu d’études portent sur l’épuisement et la régénération du « pool » (stock) de particules mobilisables durant et entre les évènements pluvieux (Worrall et al., 1993 ; Grant et al., 1996 ; Worrall et al., 1999 ; Schelde et al., 2002). D’après les études de terrain, la régénération du « pool » de particules mobilisables pourrait être due à l’effet des cycles gel/dégel et à la dessiccation.

Grant et al. (1996) ont étudié les corrélations entre la concentration en matière particulaire drainée et plusieurs paramètres météorologiques. Leur étude a été menée sur quatre bassins versants ayant une taille entre 2.2 et 13.3 ha constitués principalement de dépôts sable argileux. D’après leurs résultats, la concentration en particules est corrélée significativement seulement à la quantité de précipitation accumulée.

Travaillant sur des mini-lysimètres (20 cm hauteur, 15 cm diamètre) contenant un sol sable argileux, Worrall et al. (1993) ont suggéré à partir de leurs observations que la concentration en colloïdes déclinait exponentiellement avec le temps durant les évènements pluvieux. Ils ont émis l’hypothèse que l’épuisement du « pool » de colloïdes pouvait s’expliquer i) par le colmatage de la surface du sol dû à la formation d’une croûte, ii) par l’obstruction de macropores par lesquels les colloïdes sont transportés, et iii) par un épuisement des agrégats potentiellement altérables en surface.

Schelde et al. (2002) ont étudié la mobilisation de colloïdes dans des colonnes (20 cm hauteur, 20 cm diamètre) de sol sable argileux. Ils ont montré qu’il existait in situ une source apparemment illimitée de colloïdes mobilisables même après un lessivage prolongé. Ils ont également observé que le pic de concentration en particules dans les effluents survenant après l’interruption de la pluie augmentait en intensité avec l’allongement de l’intervalle de pause entre deux événements pluvieux successifs.

6. Objectifs et organisation de la thèse

Le but général de cette thèse est l’étude de la mobilisation in-situ et du transport préférentiel des colloïdes naturellement présents dans des colonnes de sol non remaniées sous des conditions non saturées. Particulièrement, le paramètre central de notre étude est l’évolution temporelle du « pool » de particules mobilisables pendant l’événement pluvieux lui-même et pendant la période d’interruption de la pluie (la pause) qui sépare deux événements pluvieux consécutifs.

En premier lieu, cette thèse s’inscrit dans le même cadre d’étude que celui de Rousseau (2003) qui a mis en évidence l’existence d’écoulements préférentiels de l’eau conduisant à un transport préférentiel de particules colloïdales. Travaillant sur des colonnes de sol de Versailles (Luvisol), Rousseau (2003) a observé une dynamique de mobilisation assez particulière et qui diffère du comportement classique souligné dans la littérature. En effet, dans la littérature on observe un pic initial de concentration suivi d’une diminution jusqu’à un niveau bas et constant. Dans les expériences de Rousseau (2003), le pic initial était suivi soit d’une augmentation, soit d’une diminution, soit d’une augmentation puis d’une diminution de la concentration en particules.

La différence du comportement des expériences de Rousseau (2003) nous a suggéré d’envisager l’étude de variabilité temporelle du stock de particules durant l’événement pluvieux. En se fondant sur les données expérimentales de Rousseau (2003), nous avons donc élaboré un modèle numérique à base physique qui prend en compte l’évolution temporelle du stock de particules pendant l’événement pluvieux lui-même. Ceci est fait en considérant que le détachement physico-chimique des particules à partir de la paroi du macropore suit une cinétique de premier ordre ayant un coefficient de détachement variable avec le temps (i.e. avec la quantité de particules déjà détachées). C’est l’objet de la deuxième partie de la thèse dans laquelle nous développons le modèle de mobilisation et de transport de particules. Ce modèle a été publié sous : Majdalani, S., E. Michel, L. Di Pietro, R. Angulo-Jaramillo, and M. Rousseau. 2007a. Mobilization and preferential transport of soil particles during infiltration:

A core-scale modeling approach. Water Resour. Res., 43, W05401, doi: 10.1029/2006WR005057.

L’histoire de la mobilisation n’est pas restreinte uniquement à l’événement pluvieux. Aussi nous nous sommes intéressés à l’étude du stock de particules pendant la pause entre deux événements. Dans la troisième partie, nous étudions alors l’effet de la durée de la pause sur la mobilisation ultérieure de particules, c'est-à-dire la mobilisation qui a lieu pendant l’événement pluvieux qui suit la pause étudiée. Les essais de pauses testées s’étalent sur un large intervalle allant d’une heure jusqu’à un mois et demi. L’étude de l’effet de la pause prend en compte les paramètres suivants :

- L’ordre des pauses (croissantes, régulières, et irrégulières), - La force ionique de la solution infiltrante,

- L’intensité de la pluie imposée, - Le lessivage intensif de la colonne, - La nature du sol.

Dans cette troisième partie, nous adoptons une vision du « pool » de particules intermédiaire entre les deux approches actuelles : celle qui considère un « pool » illimité de particules et celle qui le considère de taille finie. En effet, comme sera présenté en troisième partie, nos résultats montrent que selon les conditions de pause le « pool » varie en augmentant ou en diminuant. Enfin, le modèle de transfert de particules élaboré dans la deuxième partie est appliqué aux données expérimentales de la troisième partie pour tester la capacité du modèle à reproduire la mobilisation de particules sur un nouveau sol (Calcisol d’Avignon) et de lier ses paramètres aux conditions expérimentales.

En analysant nos résultats, nous aboutissons à des conclusions portant sur les principaux mécanismes de mobilisation, et nous dégageons des perspectives de recherche pour une meilleure compréhension de l’histoire de mobilisation de particules.