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4.2 Etude des cratères d’ablation

4.2.3 Etude de la condensation

L’étude de la profondeur ablatée par impulsion a montré que, lorsque plusieurs im- pulsions sont appliquées sur le cratère, un dépôt parfaitement circulaire se forme autour du cratère. Ce dépôt est observé sur la figure 4.19 qui est un cliché MEB d’un cratère ablaté dans l’argon.

Fig. 4.19 -Cliché MEB d’un cratère avec présence du dépôt (grand cercle blanc)

Le dépôt est parfaitement circulaire et son diamètre est estimé à 5.5 mm, soit 4 fois le diamètre du cratère. En premier lieu, nous pouvons exclure le dépôt de matière par gravité. En effet, la cible est placée à la verticale et le dépôt n’aurait pas été de forme parfaitement circulaire, mais orienté préférentiellement vers le bas. On remarque, sur la figure 4.1 à 2 µs, que le diamètre du plasma est pratiquement 3 à 4 fois plus grand que celui du spot laser en surface de cible, donc du même ordre de grandeur que le diamètre du dépôt. D’autres études dans le xénon ou l’hélium ont également montré que le diamètre du plasma, aux temps de l’ordre de la mi- croseconde, correspond à celui du dépôt observé. L’explication est la suivante : le plasma en expansion exerce une pression de recul sur la cible (loi d’action-réaction). Celle-ci contraint la matière dans la phase gazeuse à venir se plaquer sur la surface de l’échantillon. En périphérie du cratère, la surface est, en première approximation, à la température ambiante (en réalité, le plasma chauffe la surface par convection thermique et radiation - mais ce chauffage n’est pas suffisant pour qu’il y ait équi- libre thermique) et la pression de la matière plaquée est généralement supérieure à la pression de saturation définie à partir de la température de surface. Il y a donc condensation de cette matière autour du cratère.

Les clichés MEB présentés sur la figure 4.20 montrent la différence entre la surface d’un échantillon vierge de tout impact et la zone de dépôt. Le cliché (b) met en

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Fig.4.20 - Etat de surface de l’échantillon (a) et dans la zone de dépôt (b)

évidence une granulométrie particulière dans la zone de dépôt. Celui-ci est constitué de particules de tailles variables, dont la taille s’échelonne de quelques centaines de nanomètres à plusieurs micromètres.

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Une analyse XPS (X-Ray Photoelectron Spectrometry3) a été réalisée pour

étudier la composition de ces particules. Les résultats de cette analyse, présentés en figure 4.21, montrent les spectres des niveaux Cu-2p, Auger LMN du cuivre et du niveau 1s de l’oxygène pour la zone avec le dépôt noir (a) et la zone sans le dépôt (b) (surface fraîche). Les pics à 932.6 eV (énergie de liaison du Cu-2p(3/2)) sont similaires pour le dépôt et la surface sans dépôt. Cette valeur d’énergie de liaison peut être attribuée soit à du cuivre métallique, soit à du cuivre ionique Cu+,

constituant par exemple la molécule Cu2O. En revanche, l’absence d’un second pic

à 933.8 eV prouve qu’il n’y a pas d’oxyde de cuivre CuO présent dans le dépôt noir. Pour différencier le Cu métal et Cu2O, il faut s’intéresser aux pics Auger du

cuivre. Le pic Auger principal se situe à des valeurs d’énergie cinétique différentes (918.8 eV pour la zone sans dépôt et 916.8 eV pour la zone avec dépôt). Ces valeurs indiquent donc la présence de cuivre métal pour la zone sans dépôt et la présence de Cu2O dans la zone avec dépôt noir.

Cette observation est confirmée par les pics de niveau O-1s. La mesure d’un large pic sur la surface vierge et de deux pics distincts sur le dépôt montre qu’il y avait une forte présence d’oxygène de pollution (C=O, OH, . . .). Cet oxygène provient de l’air ambiant, contaminant par oxydation et adsorption l’échantillon pendant le trans- port jusqu’à l’analyseur XPS, par exemple. Une légère érosion ionique a été réalisée pour éliminer une partie de la contamination en surface. Après élimination, un pic sur le niveau 1s de l’oxygène à plus faible énergie de liaison (530.6 eV) a été me- suré. Ce pic traduit la présence de l’espèce O2-lié à la présence de la molécule Cu

2O.

Les particules observées par MEB sont donc des particules d’oxyde de cuivre Cu2O ou des particules de cuivre Cux. L’observation des différentes tailles de parti-

cules sur la photo (b) de la figure 4.20 peut être liée à deux mécanismes :

1. les particules ont donc été ablatées pendant la durée de l’impulsion laser. Nous avons supposé dans le modèle que l’ablation du cuivre se réalise par évapo- ration thermique, c’est-à-dire un enlèvement de la matière atome par atome. Mais il a été expérimentalement prouvé que les mécanismes d’ablation sont beaucoup plus complexes et que des particules de tailles diverses peuvent éga- lement être arrachées de la cible [2,3]. Ces particules sont éjectées de la surface puis redéposées dans le cratère ou sur le pourtour.

2. au sein du plasma peuvent se produire des processus de croissance de parti- cules (agglomération, condensation. . .). Ces processus peuvent concerner plu- sieurs types d’agrégation : atome-atome, atome-particule (de cuivre Cux ou

bien d’oxyde de cuivre Cu2O) et particule-particule (on peut envisager les

mêmes collisions avec des ions). Les particules formées sont venues se égale- ment se déposer dans ou autour du cratère.

Ces deux mécanismes peuvent naturellement se combiner, les particules éjectées de la cible peuvent croître par condensation dans le plasma.

L’atmosphère ambiante, dans laquelle ont été formés les plasmas de cuivre, n’est donc pas seulement constituée d’argon pur (ou plus généralement de gaz rare pur)

3La Spectroscopie photoélectronique-X est une technique d’analyse chimique des matériaux par

bombardement de rayons X qui expulsent les électrons de coeur dans la matière. La mesure de l’énergie cinétique de ces électrons permet de remonter à leur énergie de liaison dans le matériau, et donc d’identifier une liaison chimique particulière

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mais contient également des traces d’oxygène. Cet oxygène peut provenir de l’air ambiant résiduel dans la cellule après le pompage primaire, de la désorption des parois de la cellule ou bien de l’oxyde de cuivre présent initialement sur l’échantillon. Dans le plasma de cuivre et d’argon, cet oxygène va être dissocié (pour O2), excité et

ionisé. L’affinité électronique de l’oxygène conduit certainement à la formation d’ions O2-qui vont interagir avec le cuivre environnant. L’oxygène O2-met en commun ses deux électrons soit avec deux atomes de cuivre qui possèdent un électron unique sur leur couche de conduction (Z = 29, configuration 4s1), soit avec deux ions Cu+.

Les analyses XPS ne permettent pas de mesurer une concentration en oxygène dans le dépôt. Avant les analyses XPS, nous avons réalisé des observations MEB- EDS qui n’ont pas mis en évidence d’oxygène dans ce dépôt. Cette absence est due à la sensibilité du détecteur qui ne peut pas mesurer une concentration en oxygène inférieure à quelques %. Cette limite donne une information précieuse : elle indique que le gaz ambiant est composée de très peu d’oxygène. Nous avons raisonnablement supposé que l’oxygène a très peu d’influence sur la dynamique du plasma sur les 100 premières nanosecondes d’expansion, et participent simplement aux réactions chimiques dans le plasma aux temps plus longs. Ainsi, nous n’en n’avons pas tenu compte dans le modèle.