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Essais progressifs résolutifs hiérarchiques basés sur les acides nucléiques (PHRANA)

Chapitre 2 : Détection et typage de Bacillus anthracis

2. Typage moléculaire

2.5. Essais progressifs résolutifs hiérarchiques basés sur les acides nucléiques (PHRANA)

successive de 3 types de marqueurs moléculaires : les canSNP, les VNTR avec la méthode MLVA et les SNR. Cette méthode est appelée PHRANA (Progressive Hierarchical Resolving Assays using Nucleic Acids).

Les marqueurs moléculaires tels que les VNTR, les SNR ou les SNP présentent des taux de mutations différents. Si le taux de mutation d’un marqueur est très faible, les polymorphismes au sein de ce marqueur ne sont identifiés que parmi des populations hautement diverses alors que les populations moins diverses apparaitront de manière monomorphe (Keim et al., 2004). A l’inverse, si les taux de mutation sont élevés, la diversité augmente rapidement sur les loci concernés, permettant de différencier les souches les plus proches : c’est le cas des SNR (Keim et al., 2004). Cependant, un taux élevé de mutation est corrélé à une augmentation des similitudes de type homoplasie, qui sont retrouvées généralement dans des populations à diversité génétique importante. Ainsi, si des marqueurs hautement polymorphes sont utilisés pour l’analyse de populations diverses, de mauvais assignements de groupes sont inévitables.

Dans un premier temps, la collection de souches doit être testée via les canSNP. Les souches présentant le même profil sont ensuite typées via la MLVA. Enfin, les souches possédant le même génotype sont typées via les SNR, obtenant ainsi le plus haut niveau de discrimination possible avec ces 3 méthodes (Figure 23). Cette approche permet de distinguer beaucoup plus de génotypes qu’avec les méthodes précédemment décrites et prises séparément.

Figure 23 : Méthode PHRANA utilisée par Paul Keim et ses collaborateurs et permettant d’obtenir un très bon pouvoir discriminant en combinant 3 approches : les canSNP, la MLVA-15 et les SNR-4 (Keim

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3. Phylogénie des souches de B. anthracis à travers le monde

L’utilisation du typage par canSNP ainsi que les comparaisons sur génomes complets de plusieurs souches d’origines variées ont permis la reconstruction de la phylogénie de B. anthracis de manière extrêmement précise (Pearson et al., 2004; Van Ert et al., 2007a). Trois lignées majeures (A, B et C) ainsi que 13 sous-lignées ou groupes ont été définis (Figure 24).

La lignée A comprend la majorité des cas de fièvre charbonneuse recensés à travers le monde (Keim et al., 2000). Les 8 groupes de cette lignée sont répartis de manière globale dans le monde et il arrive qu’une coexistence dans une même région soit observée, bien que très souvent, un groupe reste majoritaire.

La sous-lignée TEA (A.Br.008/011-A.Br.011/009) est la plus représentée dans le monde, concernant la majorité des sous-lignées relevées en Europe, en Chine, en Russie, au Kazakhstan et en Afrique de l’Ouest (Derzelle et Thierry, 2013; Garofolo et al., 2011; Price et al., 2012; Van Ert et al., 2007a). La plupart des isolats retrouvés en Chine et en Asie correspondent au groupe A.Br.001/002. La sous- lignée A.Br.Ames, introduite au Texas (USA), a émergé de ce groupe issu de Mongolie (Simonson et al., 2009).

L’Amérique abrite les groupes A.Br.WNA et A.Br.003/004 (Nord et Sud respectivement), alors que la sous-lignée A.Br.005/006 est retrouvée majoritairement en Afrique.

Le sud de l’Afrique ainsi que certains pays d’Asie (notamment le Pakistan et l’Afghanistan) comprennent majoritairement la sous-lignée A.Br.Vollum, alors que les collections de pays tels que la Turquie, l’Inde, la Namibie, la Géorgie ou l’Australie sont dominées par le groupe A.Br.Aust94 (Beyer et al., 2012; Durmaz et al., 2012; Kenefic et al., 2009; Khmaladze et al., 2014; Simonson et al., 2009; Van Ert et al., 2007a).

La lignée B est séparée en 2 clades distincts, et géographiquement implantés dans des régions spécifiques. Le clade B1 (incluant les groupes B.Br.001/002 et B.Br.Kruger) est retrouvé en Afrique du Sud, plus particulièrement dans le Parc National Kruger, où il coexiste avec certaines souches A.Br.Vollum (Smith et al., 2000; Van Ert et al., 2007a). La sous-lignée B.Br.001/002 a récemment été identifiée en Corée et au Bhutan (Thapa et al., 2014).

Le clade B2 (B.Br.CNEVA) est exclusivement retrouvé en Europe (Antwerpen et al., 2012; Derzelle et al., 2011a; Garofolo et al., 2011; Gierczyński et al., 2004; Pilo et al., 2008; Steiner et al., 2013; Van Ert et al., 2007a), à l’exception d’un cas recensé en Californie (Van Ert et al., 2007a).

La lignée C (C.Br.A1055) est quant à elle beaucoup plus anecdotique puisqu’elle ne comporte à l’heure actuelle que 3 isolats d’origine inconnue (Sue et al., 2007; Van Ert et al., 2007a).

En Europe, la population de B. anthracis est très diversifiée, pouvant aller jusqu’à la coexistence de 6 groupes phylogénétiques au sein d’un même pays (Figure 24). Trois sous-lignées sont plus représentées que les autres : la TEA (A.Br.008/011-A.Br.011/009), A.Br.001/002 et B.Br.CNEVA. Cette dernière est implantée en Europe centrale, allant des Pyrénées (Sud de la France) à la Pologne (nord- est) en passant par les Alpes italiennes, la Suisse, l’Allemagne, la Croatie et la Slovaquie. Dans ces pays, une coexistence avec la sous-lignée TEA est généralement observée, même si, au sein d’un même pays, elles peuvent être localisées dans plusieurs régions différentes. La sous-lignée TEA a été isolée dans la plupart des pays européens, notamment dans le sud et l’est de l’Europe. Elle représente le groupe majoritaire en Italie, Bulgarie, Hongrie et Albanie (Antwerpen et al., 2011; Fasanella et al., 2005; Garofolo et al., 2011; Van Ert et al., 2007a). Le groupe A.Br.001/002 est retrouvé en Europe du Nord (Allemagne, Danemark, Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni) mais également en France (nord-est) (Calavas et al., 2008).

Les autres groupes retrouvés en Europe incluent A.Br.005/006, A.Br.Aust94, A.Br.Vollum, B.Br.001/002, A.Br.Ames et A.Br.003/004 mais sont beaucoup plus minoritaires. Cette diversité

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observée est due à l’activité des hommes telle que le commerce international ou les anciennes colonies.

Figure 24: Répartition de B. anthracis dans le monde en fonction des génotypes identifiés par canSNP A. Phylogénie des groupes majeurs de B. anthracis (Marston et al., 2011; Van Ert et al., 2007a) B. Distribution mondiale des sous-lignées et groupes de B. anthracis

C. Distribution européenne des sous-lignées et groupes de B. anthracis (Figure extraite de (Derzelle et Thierry, 2013))

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L’utilisation des méthodes de typage combinées à la phylogénie d’une espèce bactérienne peut s’avérer critique lorsqu’il s’agit de déterminer avec certitude qu’une souche particulière est à l’origine d’un foyer de FC ou d’un cas humain. Un des exemples les plus récents de cette utilisation concerne les cas de charbon observés chez les consommateurs d’héroïne (plusieurs cas recensés en Europe depuis le début des années 2000), où les souches impliquées appartiennent au groupe A.Br.008/011 (Price et al., 2012). La principale préoccupation des enquêteurs était de définir l’origine de la contamination de l’héroïne. Cette dernière provenant d’Afghanistan, la première hypothèse fut de penser à une contamination lors de la production. Or, les souches afghanes appartiennent majoritairement à la sous-lignée A.Br.Vollum. Après différents tests sur une collection de la sous- lignée TEA (groupe A.Br.008/011), il s’est avéré que les souches les plus proches de celle ayant causé la mort d’un héroïnomane en Ecosse provenaient de Turquie. L’hypothèse a donc été que la contamination de l’héroïne aurait eu lieu lors du transport de la drogue à travers les pays, plutôt que lors de sa production ou de sa consommation (Price et al., 2012). De plus, 2 SNP spécifiques de la souche isolée en Ecosse (Ba4599) furent utilisés pour typer 92 souches de la sous-lignée TEA et 2 souches non-TEA, ainsi que 35 échantillons positifs à B. anthracis associés à l’épidémie chez les héroïnomanes : tous les échantillons de l’épidémie possédaient l’allèle identifié chez Ba4599, alors que les autres portaient l’autre allèle. Par ailleurs, un allemand a contracté la maladie après injection de drogue, mais n’avait pas voyagé au Royaume-Uni : ceci a permis de penser qu’un seul pool originel d’héroïne a été disséminé en Europe (Price et al., 2012).

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ANALYSE BIBLIOGRAPHIQUE

Chapitre 3 :

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