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T HÉORIQUES U TILISÉES

III. S PECTROMÉTRIE DE M ASSE 1 G ÉNÉRALITÉS

2. S OURCES D ’I ONISATION

2.1. ESI – Ionisation par électronébullisation

a. Généralités

Le premier couplage entre une source ESI (ElectroSpray Ionization) et un spectromètre de masse, un quadripôle, est décrit par Yamashita et Fenn en 1984. Avec cet appareil, ils démontrent qu’il est possible d’obtenir des ions non fragmentés à partir de molécules non volatiles.11-12 Il faut attendre 1989 pour que soit commercialisé le premier

spectromètre de masse équipé d’une source ESI. En 2002, Fenn est récompensé par le Prix Nobel de Chimie pour ses travaux sur le développement de méthodes de d’ionisation douce pour l’analyse par spectrométrie de masse des macromolécules biologiques. Les récents développements relatifs à l’ESI concernent principalement la création de sources NSI (NanoSpray Ionization), plus adaptées à l’étude des protéines en raison de la faible quantité d’échantillon généralement disponible.13-16

L’ionisation par électronébullisation ou ESI est une méthode d’ionisation douce qui produit des ions en phase gazeuse à partir d’ions préformés en solution.17-19 Les ions

préformés peuvent également être des adduits avec des ions, Na+ ou NH

4+ par exemple.

Cette méthode d’ionisation a rendu possible l’analyse par spectrométrie de masse d’un grand nombre d’échantillons, en particulier les composés thermosensibles et les macromolécules. Elle est particulièrement adaptée à l’analyse des molécules polaires comme les médicaments et leurs métabolites, les peptides, les protéines ou encore certains polymères industriels.

b. Description de la source

La Figure III-3 représente la source ESI qui a été majoritairement utilisée au cours de cette thèse. Cette source est composée de la sonde ESI à pression atmosphérique (décrite dans le paragraphe relatif à la formation des ions) et de l’interface API (Atmospheric

Pressure Ionization) sous vide.

La source ESI permet la formation des ions par un processus de désolvatation- ionisation sous l’action d’un champ électrique intense à pression atmosphérique. Les ions formés sont ensuite dirigés vers l’entrée de l’analyseur via l’interface par un potentiel électrique et un gradient de vide croissant.

c. Formation des ions

Le processus de formation des ions désolvatés se déroule à pression atmosphérique en trois étapes : (i) production de gouttelettes chargées, (ii) fission des gouttelettes chargées en gouttelettes filles et (iii) émission d’ions désolvatés en phase gazeuse.20-22

(i) – Production de gouttelettes chargées

L’application d’un potentiel électrique entre la pointe d’un capillaire métallique (B) par lequel l’échantillon en solution est introduit (A) et le cône d’échantillonnage (G) qui sert de contre électrode permet la formation de fines gouttelettes chargées (D). Le potentiel appliqué, de l’ordre de 3 à 5 kV, peut être positif ou négatif selon la polarité des ions d’intérêt. Comme le montre la Figure III-4, il se forme un cône de Taylor à l’extrémité du capillaire : il s’agit d’un cône allongé de liquide qui éclate en un spray de fines gouttelettes chargées en surface.17,23-27 Lorsque le débit de liquide est trop important, ce qui est le cas en

couplage avec la chromatographie liquide, la formation des gouttelettes est assistée par un courant d’azote coaxial appelé gaz gaine (C). La source ESI utilisée peut désolvater des débits allant de 3 µL/min en infusion à 1,5 mL/min en couplage.

(A) (B) (B) (C) (D) (E) (F) (G) (H) (I)

Figure III-3. Source Ion Max™ équipée de la sonde ESI et mécanisme d’ionisation-désolvatation.9

A. Capillaire de silice fondue par lequel l’échantillon est introduit B. Capillaire métallique sur lequel est appliquée la haute tension

C. Gaz de nébulisation (azote) ou Sheath gas qui assiste la formation des gouttelettes D. Fines gouttelettes produites par la source ESI

E. Gaz auxiliaire (azote) ou Auxiliary gas qui aide à la désolvatation des gouttelettes F. Liquide gaine ou Sheath liquid permettant de faire de la dérivation post-colonne

G. Cône échantillonneur protégeant l’entrée du capillaire de transfert H. Capillaire de transfert conduisant les ions formés jusqu’à l’interface I. Élément chauffant contribuant à la désolvatation des ions

(ii) – Fission des gouttelettes chargées en gouttelettes filles

L’évaporation du solvant des gouttelettes mères formées à la pointe du cône de Taylor, liée à l’utilisation d’un gaz de séchage (E) ou à une augmentation de la température

(I), induit une augmentation de la densité de charge à la surface du liquide. A la limite de stabilité de Rayleigh,28 définie par l’équation (1), la répulsion coulombienne est plus forte que

la tension de surface du liquide et la gouttelette mère explose en une multitude de

(1) 3 0 2 2 64 R R Q = π εγ

Q est la charge de la gouttelette ε0 est la permittivité du vide

γ est la tension de surface du liquide

RR est la valeur critique du rayon de Rayleigh

Les gouttelettes filles ainsi formées, de tailles hétérogènes, possèdent toutes une densité de charge plus élevée que la gouttelette mère. De ce fait, le phénomène d’explosion coulombienne se poursuit sur plusieurs générations de gouttelettes filles.29-34

Figure III-4. Formation de gouttelettes chargées par ESI en mode positif.22

(iii) – Émission d’ions désolvatés en phase gazeuse

Il existe principalement deux théories, aujourd’hui encore assez controversées, pour décrire le processus d’ionisation-désolvatation par électronébullisation : le modèle de Dole et le modèle d’Iribarne et Thomson.

Le modèle de Dole : modèle de la charge résiduelle35

Dans le modèle de la charge résiduelle, proposé en 1968, Dole considère que l’évaporation du solvant et le processus d’explosions coulombiennes se répète jusqu’à ce qu’il n’y ait plus qu’un seul ion par gouttelette et que des ions nus, individuellement chargés, soient formés, comme le montre la Figure III-5.

Figure III-5. Émission des ions en phase gazeuse lors du processus d’ionisation-désolvatation

Modèle de Dole.29,36

Le modèle d’Iribarne et Thomson : modèle de l’évaporation ionique37-38

Selon ce modèle, proposé en 1976, les gouttelettes ayant un rayon inférieur à 10 nm peuvent, comme le montre la Figure III-6, directement émettre des ions à l’état gazeux. L’état de charge de l’ion dépend du nombre de charges qui ont été transférées depuis la surface de la gouttelette jusqu’à l’ion pendant la désolvatation.

Figure III-6. Émission des ions en phase gazeuse lors du processus d’ionisation-désolvatation

Modèle d’Iribarne et Thomson.29,36

Le processus de formation des ions en phase gazeuse est toujours en cours de débat, et bien que le modèle de l’évaporation ionique semble être le plus reconnu pour les petites molécules,33,39-41 un mécanisme faisant intervenir le modèle de la charge résiduelle

pourrait intervenir dans le processus d’ionisation-désolvatation des macromolécules.22,27,42

(iv) – Transfert des ions vers l’interface

Les ions formés sont dirigés vers l’interface API qui est composée du cône échantillonneur (G), du capillaire de transfert (H) et de son élément chauffant (I). Le cône échantillonneur agit comme une barrière physique et augmente la robustesse du spectromètre de masse en protégeant l’ouverture du capillaire de transfert. Cela implique une légère perte en sensibilité qui est compensée par une meilleure stabilité de l’appareil. Le capillaire de transfert peut être chauffé entre 250 et 450 °C. Son rôle est de permettre une bonne désolvatation des ions et de conduire ces derniers à l’entrée de l’interface. Le vide

présent à ce niveau de la source (environ 1 mbar) a également pour rôle de pomper les molécules neutres pour éviter les interférences.

d. Avantages et inconvénients de la source ESI

La source ESI offre les avantages énumérés ci-dessous :

- analytes introduits en solution, ce qui favorise le couplage avec la chromatographie liquide ou l’électrophorèse capillaire

- ionisation très douce, ce qui permet d’observer des molécules intactes, et permet d’étudier des interactions non covalentes

- bonne sensibilité

- possibilité de former des ions multichargés, ce qui permet l’analyse de molécules de très haute masse moléculaire

- meilleure technique d’ionisation pour les molécules qui contiennent des groupements polaires

Le principal inconvénient d’une source ESI réside dans les phénomènes de suppression ionique liés à la présence d’autres composés (et plus particulièrement de sels) en solution. Ces phénomènes se traduisent par une diminution notable de la réponse chromatographique de l'analyte considéré.

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