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4. DISCUSSION ET CONCLUSION

4.1 PROJET 1 : ERp ET INFLAMMATION INTESTINALE

4.1.1 ERp et l'inflammation intestinale chez la souris

Dans le cadre de cette étude, nous avons investigué le rôle d'ERp dans l’inflammation intestinale. Premièrement, nous avons vérifié la susceptibilité des souris ERp+/ + (WT) et ERp /- (KO) à une colite induite chimiquement par l’ajout du détergent DSS à l'eau de boisson des animaux. Une augmentation des signes cliniques et histologiques d'inflammation intestinale ainsi qu'une augmentation du raccourcissement du côlon ont été observées dans les souris déficientes pour ERP comparativement aux souris contrôles suggérant qu’ERp protège contre la colite. Ces résultats concordent exactement avec les fonctions anti-inflammatoires qui avaient été associées à l’œstrogène dans le modèle DSS mais également dans d’autres modèles animaux de colite (Gunal et al., 2003; Houdeau et al., 2007; Verdu et al., 2002). Les

études documentant la participation d’ERp dans le rôle protecteur d'œstrogène contre la colite sont moins nombreuses. Néanmoins, l'équipe de Gustafsson, lors de l'investigation du phénotype intestinal de la souris déficiente pour ERp, avait rapporté une in filtra tio n sous-épithéliale du tissu lymphoïde dans le côlon proximal des souris ERp /- âgées de 4 mois qui s'estompait par contre en vieillissant Également, certaines jonctions cellulaires telles que les jonctions serrées et les desmosomes étaient altérées dans l'épithélium colique des souris ERp KO, ce qui pourrait donner naissance à un défaut de perméabilité de la barrière intestinale et donc de la réponse inflammatoire innée contre la m icroflore intestinale (Wada-Hiraike et al., 2006). Bien que seulement de légères anomalies ne soient observées dans leur côlon, les souris déficientes pour ERp sont plus sensibles à un modèle de cancer colorectal associé à la colite (AOM-DSS). En effet, les souris ERp /- développent une colite plus sévère; les auteurs rapportent entre autres une hausse de l’activité de la maladie, un raccourcissement plus im portant du côlon et une in filtra tio n accrue de cellules inflammatoires à l'analyse histologique du côlon (Saleiro et al., 2012). Nos résultats concordent entièrement avec ceux présentés par cette équipe bien que dans le cas de leurs travaux, les souris ne sont pas soumises seulement à un traitem ent DSS mais également à un traitem ent avec un puissant carcinogène, l’AOM. Nos résultats confirment de façon plus spécifique que les souris ERp /- sont plus susceptibles à l'induction d’une colite aigüe et non seulement à la majoration de la carcinogenèse induite par l'AOM conjointement à une colite chronique. L’utilisation de modèles murins déficients pour un gène d'intérêt soulève toujours la possibilité qu'un gène sim ilaire puisse compenser pour la perte du gène d'in té rê t Dans le cas de cette étude, une augmentation de l’expression d'ERa pourrait compenser pour la perte d’ERp. Cependant, des études immunohistochimiques réalisées par Armstrong et collaborateurs ont démontré que dans le côlon des souris ERp /-, la protéine ERp n’est pas exprimée et celle d'ERa n’est pas induite (Armstrong et al., 2013). Ces résultats supportent donc les résultats présentés dans cette thèse comme quoi la déficience d'ERp augmente la sévérité d’une colite induite par le DSS. Par conséquent, ERP pourrait protéger contre le développement d'inflammation intestinale et cibler

pharmacologiquement ce récepteur pourrait être une avenue thérapeutique pour les patients atteints de M il.

Nous avons donc activé ERp de façon pharmacologique avec un agoniste sélectif pour ERp, le diarylpropionitrile (DPN) dans des souris WT préalablement à l'induction d'une colite à l’aide du DSS. Un traitem ent préventif avec le DPN diminue la susceptibilité à la colite induite par le DSS comme en témoigne la réduction des signes cliniques et histologiques d’inflammation intestinale ainsi qu’un raccourcissement moindre du côlon. Nous avons choisi cet agoniste puisque nous l’avions déjà utilisé lors de mes travaux de maîtrise pour démontrer son potentiel thérapeutique dans un modèle m urin du cancer du côlon (Giroux et al., 2011). De plus, nous avons noté dans les travaux présentés ici que le traitem ent au DPN augmente de 2.76 fois l'expression du transcrit d'ERp témoignant de l'efficacité du DPN. En effet, l'activation d’ERp est connue pour conduire à la régulation de la transcription de son propre prom oteur (Li et al., 2000; Vladusic et al., 2000). Également, nos travaux antérieurs suggéraient qu’un traitem ent au DPN dans un modèle m urin du cancer de côlon n'activait pas ERa supportant que l’utilisation du DPN comme agoniste d'ERp était adéquate pour l’étude présentée ici (Giroux et al., 2011). Bien que cet agoniste soit un des plus utilisés dans la littérature, une autre molécule, ERB-041, a déjà fa it ses preuves comme agent thérapeutique dans un modèle animal de M il. En effet, cet agoniste sélectif pour ERp diminue de façon dose-dépendante la diarrhée dans le modèle transgénique de colite HLA-B27 ainsi que les signes histologiques d'inflammation (Harris et al., 2003). Nos résultats obtenus avec le DPN dans le modèle DSS concordent avec les résultats obtenus avec le ERB-041 dans le modèle HLA-B27 et suggèrent que le potentiel thérapeutique d’un agoniste ERp contre l'inflam m ation intestinale ne semble pas drogue- ou modèle-spécifique. Dans le cadre de notre étude, nous avons privilégié un traitem ent avec le DPN préalable à l'induction de la colite afin de s'assurer d’une activation suffisante d'ERp dès le début de l’inflammation. Par contre, ces résultats ne nous inform ent que du potentiel préventif et non du potentiel thérapeutique de cette drogue. À cette fin, on devrait plutôt refaire des études animales pour lesquelles le traitem ent avec le DPN débuterait pendant ou après l'induction de la colite avec le

DSS. De façon intéressante, l'ERB-041 ou prinaberel (Pfizer) est présentement en essai clinique pour la maladie de Crohn mais également pour l'a rth rite rhumatoïde et l’endométriose. Actuellement, cette drogue est considérée sécuritaire et bien tolérée lorsqu'administrée oralement mais malheureusement elle semble inefficace jusqu’à présent pour le traitem ent de l’arthrite rhumatoïde (Roman-Blas et a l, 2010). Cependant, les résultats de l’essai clinique évaluant l’efficacité du ligand ERB-041 contre la CD ne sont toujours pas publiés. En résumé, nos résultats portent à croire qu’un agoniste pour ERp tel que le DPN ou l'ERB-041 pourrait être utilisé chez les patients atteints de M il afin de prévenir de nouvelles épisodes actives de la maladie.

Les patients atteints de M il ont un risque plus élevé de développer un cancer colorectal et le traitem ent de ces pathologies est donc nécessaire non seulement pour am éliorer la qualité de vie des patients mais également pour prolonger leur espérance de vie. Cibler ERp est donc d'un grand intérêt puisqu'il a déjà été rapporté que ce récepteur protège contre le développement de cancer colorectal dans des modèles murins. Par exemple, mes travaux de maîtrise avaient démontré que l’utilisation du DPN dans le modèle m urin de carcinogenèse colorectale APCMin/+ réduisait la m ultiplicité tumorale (Giroux et al., 2011).

Finalement, il est im portant de noter que l’effet du DPN sur le modèle de colite induite au DSS présenté ici est plus im portant chez le mâle que chez la femelle. La même observation avait été faite dans le modèle APCWin/+ dans mes travaux antérieurs. Chez la femelle, la signalisation d'ERp est déjà partiellem ent activée par les ligands endogènes réduisant donc l’impact d'une activation additionnelle. Par contre, chez le mâle, le niveau endogène d’œstrogène est plus faible augmentant ainsi l’impact d’une activation d’ERp à l'aide du DPN. Nos résultats suggèrent donc que le DPN pourrait être une meilleure cible thérapeutique chez l'homme ou les femmes post- ménopausées que chez les femmes produisant encore un niveau élevé d’œstrogène. Cette hypothèse concorde d'ailleurs avec des résultats obtenus chez le rat qui suggère que la perméabilité colique est variable au cours du cycle menstruel laissant présager que l’activité de la colite pourrait également changer selon les niveaux circulant d’œstrogène et de progestérone (Braniste et al., 2009).