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G´en´eralit´es sur l’´epitaxie en phase vapeur aux organo-m´etalliques . 62

3.2 Croissance s´elective aux organo-m´etalliques : principe et applications

3.2.1 G´en´eralit´es sur l’´epitaxie en phase vapeur aux organo-m´etalliques . 62

La MOVPE est une technique de croissance adapt´ee ausi bien en recherche qu’en production permettant d’obtenir des couches et des interfaces de grande qualit´e. Dans le cadre de notre ´etude, c’est ´egalement la seule technique envisageable pour l’int´egration photonique par croissance s´elective. Ce mode de croissance n´ecessite une pression de r´eacteur assez ´elev´ee, typique de la MOVPE, o`u les ph´enom`enes de diffusion en phase vapeur sont possibles. Dans les techniques d’´epitaxie sous vide (MBE, GS-MBE, MO-MBE), la diffusion est en pratique inexistante. Les conditions op´eratoires dans le r´egime de la croissance s´elective seront d´evelopp´ees plus loin.

Pour les semiconducteurs III-V, deux types de gaz pr´ecurseurs sont g´en´eralement employ´es. Les pr´ecurseurs d’´el´ements III sont des mol´ecules organo-m´etalliques compos´es d’un atome m´etallique li´e `a un ou plusieurs radicaux organiques alkyls (CnH2n+1)x. Ces m´etaux-organiques sont liquides ou solides `a temp´erature ambiante et leur pression de vapeur `a l’´equilibre et `a temp´erature ambiante varie entre 0.1 et 100 torr. Les sources trim´ethyl (CH3)3 sont plus couramment employ´ees du fait de leur grande pression de vapeur et de leur grande stabilit´e [79]. L’utilisation des pr´ecurseurs tri´ethyl (C2H5)3 comme TEGa ou TEAl r´esulte en revanche d’une incorporation de carbone plus faible [80]. Ceci est dˆu au fait qu’ils pyrolisent sans produire de radicaux CH3 bien connus comme sources principales d’incorporation de carbone dans les couches ´epitaxi´ees [79]. Les organom´etalliques sont stock´es dans des bulleurs immerg´es dans des bains thermostat´es (-10˚C< T <30˚C). Un gaz vecteur (hydrog`ene ou azote) passe par ces bulleurs, et vient “pousser” les vapeurs d’organom´etalliques jusqu’au r´eacteur. La concentration du pr´ecurseur d´ependra de la temp´erature du bain liquide et de la pression du gaz vecteur. Les sources d’´el´ements V sont en g´en´eral des hydrures (AsH3, PH3) stock´es sous pression hors du bˆati d’´epitaxie, dans des cylindres moyenne pression. La technique MOVPE repose sur le transport de ces pr´ecurseurs dilu´es dans le gaz vecteur sous forme gazeuse jusqu’au substrat qui est port´e `a haute temp´erature (550 `a 1000˚C) et au-dessus duquel ils se

Element Nom Formule Symbole Ga Trim´ethylgallium (CH3)3Ga TMGa Al Trim´ethylaluminium (CH3)3Al TMAl In Trim´ethylindium (CH3)3In TMIn Zn Di´ethylzinc (C2H5)Zn DEZn As Arsine AsH3 P Phosphine PH3 Si Disilane Si2H6

Tab. 3.1 – Pr´ecurseurs des ´el´ements II, III, IV et V utilis´es pour cette ´etude.

d´ecomposent par pyrolyse. Les ´el´ements V sont introduits en exc`es par rapport aux ´el´ements III (V /III >> 1) du fait de leur grande instabilit´e dans la phase solide aux temp´eratures usuelles de croissance. La cin´etique chimique est ainsi control´ee par les ´el´ements III. Le tableau 3.1 pr´esente la liste des diff´erentes sources d’´el´ements III et V utilis´es dans le cadre de cette ´etude.

La g´eom´etrie des r´eacteurs MOVPE peut ˆetre tr`es vari´ee. Les plus r´epandues sont les g´eom´etries verticales et horizontales. Tous les ´echantillons ´etudi´es dans ce m´emoire ont ´et´e fabriqu´es dans un r´eacteur commercial Aixtron (AIX200/4) horizontal. La figure 3.2 montre sch´ematiquement la g´eom´etrie et les ´el´ements principaux du r´eacteur. Les ´echantillons sont maintenus sur un suscepteur (porte-substrat) en graphite, con¸cu pour accueillir trois substrats 2” et chauff´e par des lampes IR (Fig. 3.2). Des flux de gaz (H2) assurent la rotation du suscepteur et des trois coupelles de mani`ere ind´ependante (rotation plan´etaire). Ce syst`eme de rotation permet d’obtenir de tr`es bonnes homog´en´eit´es de croissance.

3.2.2 Principe de la croissance s´elective

L’´epitaxie s´elective (selective area growth, SAG en anglais) est une croissance par MOVPE sur un substrat partiellement masqu´e par des bandes di´electriques. Le masque di´electrique induit une perturbation locale de la croissance car les esp`eces actives ne peuvent cristalliser dessus. Elles migrent ainsi au proche voisinage de ce dernier et contribuent `a renforcer localement les vitesses de croissance. La figure 3.3 sch´ematise tr`es simplement ce processus.

Fig. 3.3 – Sch´ema du processus SAG : — gauche, vue en coupe ; — droite, vue de dessus. Le substrat est masqu´e par un mat´eriau di´electrique qui empˆeche la croissance et contribue `a renforcer localement le flux de mati`ere (fl`eches pointill´ees) au proche voisinage du masque.

Au final, les ´epaisseurs d´epos´ees pr`es du masque sont plus grandes que loin du masque. Les ph´enom`enes de migration des esp`eces actives sont donn´es par des courants de diffusion qui lissent les gradients de concentration li´es `a la pr´esence du masque. Les trois processus de diffusion en jeu sont : la diffusion en phase vapeur, la diffusion `a la surface du masque et la diffusion `a la surface du cristal.1 En ´ecrivant formellement des lois de conservation de la masse et en consid´erant un ´echange entre la surface et la phase vapeur, on peut d´eterminer le profil de concentration perturb´e et d´eduire par une exp´erience des longueurs de diffusion effectives des pr´ecurseurs actifs dans la phase vapeur et `a la surface.2 La longueur de diffusion en phase vapeur est un ordre de grandeur plus grande que la longueur de diffusion en surface [81]. En r´ealit´e, les deux processus de diffusion interviennent mais `a des ´echelles dimensionnelles diff´erentes. Les longueurs de diffusion dans la phase vapeur s’´etendent en g´en´eral de 10 `a 200 µm. Les longueurs de diffusion surfaciques ont une extension beaucoup plus faible et sont inf´erieures `a 5 µm. Autrement dit, au proche voisinage du masque, c’est la vapeur qui domine et au tr`es proche voisinage du masque, les deux processus de diffusion vapeur et surface sont `a consid´erer. Les dimensions g´eom´etriques du masque ont alors une influence tr`es importante. Cependant, pour les petits masques, la diffusion en phase vapeur comme apport suppl´ementaire de mati`ere est tr`es n´egligeable par rapport `a la diffusion de surface. La figure 3.4 pr´esente deux cas de croissance s´elective. Le substrat

1Ces courants de diffusion vapeur et surfaciques sont ´egalement pr´esents lors de la croissance MOVPE “standard”. La pr´esence du masque induit uniquement une augmentation locale de ces ph´enom`enes.

2De plus amples d´etails seront donn´es dans la partie mod´elisation dans laquelle nous ´ecrirons proprement les lois de conservation et d´etaillerons pr´ecis´ement les conditions aux limites du probl`eme `a r´esoudre.

[001] [111]

O Diffusion en phase vapeur prédomine

Diffusion surfacique prédomine

0000 0000 1111 1111 000000 000000 000000 000000 111111 111111 111111 111111 000000 000000 000000 111111 111111 111111 0000 0000 1111 1111 00000 00000 11111 11111 00000 00000 11111 11111 masque x z y z x e2 W m e1 e1 e2

W m, W o > Longueurs de diffusion surfaciques

W m, W o ≈ Longueurs de diffusion surfaciques W y W o Le W x z x

Fig. 3.4 – Processus de diffusion dans l’´epitaxie s´elective et profils d’´epaisseur r´esultants : — dessus, diffusion phase vapeur dominante ; — milieu, vue de dessus du masque et d´efinition des param`etres g´eom´etriques ; — dessous, diffusion surfacique dominante.

est cette fois masqu´e par deux bandes di´electriques parall`eles que l’on peut consid´erer comme tr`es longues. Cette disposition de masques est la plus courante car comme nous le verrons dans la suite, les composants sont en g´en´eral fabriqu´es entre ces deux bandes. Les param`etres g´eom´etriques du masque sont les suivants. Les deux bandes di´electriques ont une largeur W m et l’´ecart entre ces bandes est W o. La longueur du masque est Le. Le rep`ere xy est choisi afin de prendre l’axe z comme direction de croissance du mat´eriau. Les deux g´eom´etries de masques envisag´ees dans cet exemple nous permettent de s´eparer l’influence de la diffusion en phase vapeur et l’influence de la diffusion surfacique.

Dans le premier cas (figure au dessus), W m et W o sont grands par rapport aux longueurs de diffusion surfaciques. Au proche voisinage du masque, la phase vapeur est donc dominante. Le profil d’´epaisseur obtenu pr´esente des surcroissances pr`es du masque. La forme de ces surcroissances est d´etermin´ee par la longueur de diffusion des pr´ecurseurs dans la phase vapeur. Pour les grandes longueurs de diffusion, le profil d’´epaisseur s’´etend sur une large surface et pr´esente des faibles surcroissances. Au contraire, pour les courtes longueurs, le profil est tr`es abrupt et les surcroissances au bord du masque sont tr`es importantes. La figure nous permet ´egalement de d´efinir une notion importante pour la suite qui est le taux de surcroissance entre les bandes di´electriques. Ce taux est donn´e par

un ratio R entre l’´epaisseur e2 mesur´ee au centre entre les bandes et l’´epaisseur e1 loin de toute influence du masque. e1 est aussi appel´ee ´epaisseur nominale. Elle correspond `a l’´epaisseur loin de toute influence du masque di´electrique et est localis´ee `a quelques longueurs de diffusion (dans la vapeur) du masque. Cette zone loin du masque est appel´ee r´ef´erence. Le ratio R (GRE, growth rate enhancement en anglais) s’´ecrit donc simplement :

R = e2

e1. (3.1)

Dans le deuxi`eme cas (figure en dessous), W m et W o sont du mˆeme ordre de grandeur que les longueurs de diffusion surfaciques (i.e. typiquement inf´erieurs `a 5 µm). Le profil d’´epaisseur est tr`es diff´erent. La diffusion en surface fait notamment apparaˆıtre une croissance anisotrope en bordure de masque (“facettage”). La croissance se fait dans les deux directions cristallographiques [111] et [001]. Comme dans le premier cas, la diffusion surfacique entraˆıne une augmentation des ´epaisseurs d´epos´ees. Nous pouvons donc ´egalement utiliser notre ratio R d´efini exactement de la mˆeme mani`ere que pr´ec´edemment.

Chacun de trois param`etres W m, W o, Le a son importance sur l’amplitude des variations d’´epaisseur. Avant de rentrer dans le d´etail de l’´etude exp´erimentale et des simulations, nous pouvons d´ej`a anticiper l’effet attendu de chacun des param`etres. Entre les bandes, un ´elargissement du masque aura pour effet de renforcer la quantit´e de mati`ere disponible et donc d’augmenter la vitesse. De mˆeme, diminuer l’ouverture entre les bandes conduira ´egalement `a un renforcement de la vitesse. Les deux param`etres W x et W y repr´esentent la taille de la cellule. Cela signifie implicitement que cette cellule se reproduit de proche en proche p´eriodiquement. Si W x et W y sont grands, les deux bandes di´electriques sont consid´er´ees seules, hors de l’influence potentielle des bandes voisines. En g´en´eral, dans la fabrication de dispositifs opto-´electroniques, la densit´e de composants ´etant un facteur ´economique non n´egligeable, on cherchera `a int´egrer un maximum de dispositifs sur une mˆeme plaque et ainsi diminuer W x et W y. Cette diminution entraˆıne le rapprochement des masques voisins, qui `a une certaine distance critique, joueront un rˆole essentiel. Ainsi, comme pr´ec´edemment, rapprocher les voisins renforce la quantit´e de mati`ere disponible et augmente la vitesse entre les deux bandes. A la diff´erence de vitesse vient ´egalement s’ajouter une variation de composition dans le cas des alliages ternaires et quaternaires. Cette variation est li´ee `a la diff´erence entre les taux de d´ecomposition et les coefficients de diffusion des pr´ecurseurs dans la phase vapeur et `a la surface du semiconducteur. Autrement dit, elle est li´ee `a des longueurs de diffusion diff´erentes selon les pr´ecurseurs actifs consid´er´es. Elle induit une variation spatiale de contrainte et donc de gap dans le mat´eriau. Dans le cas de structures `a base de puits quantiques, les deux effets (´epaisseurs et compositions) se cumulent et modifient tr`es fortement les ´energies de transition.

Fig. 3.5 – Ruban laser entre les deux bandes SAG, (—haut) ; profil d’´epaisseur selon l’axe de propagation y du guide, (—bas).