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Un enseignement explicite et planifié

COMPREHENSION DE TEXTE

2. Comprendre des récits longs

1.1. Un enseignement explicite et planifié

Comme pour l’enseignement du décodage, le premier facteur de différenciation dans ma pratique réside dans une meilleure appropriation des enjeux de la compréhension. Les ouvrages scientifiques me permettent de cerner avec beaucoup plus de précision les difficultés des textes proposés. Sur cette base, je définis des objectifs et j’élabore une progression entre la période 3 et 4 :

Période 3 : A l’issue de la lecture de Qui a tué Minou-Bonbon ? de Joseph Périgot, les élèves doivent savoir :

- identifier les personnages et les qualifier

- identifier la chronologie des évènements - comprendre les reprises anaphoriques

- connaître les caractéristiques du genre policier

Période 4 : A l’issue de la lecture de Le mot interdit de Nicolas de Hirsching, les élèves doivent savoir :

- Identifier le discours direct et l’attribuer au bon personnage sans le confondre : o avec le narrateur (récit à la première personne)

o avec les pensées du narrateur (introduites par des guillemets) - Comprendre les émotions et les motivations des personnages

- Faire des inférences

- Relever des informations précises

Les compétences listées ci-dessous sont les référents permanents pour la construction de mes séances.

Elles me permettent de renforcer le retour au texte chez les élèves. Je prépare chacune des tâches proposées en listant systématiquement les éléments du texte qui prouvent les réponses. Pour un terme complexe que je prévois de faire expliquer par les élèves, je cherche dans les phrases ce qui pourrait permettre d’en déduire le sens. Pour interpréter les intentions d’un personnage, je note toutes expressions ou actions qui dévoilent ses sentiments. Je prends soin de relever tous les éléments précisant le contexte spatio-temporel. Je fais des schémas résumant le fil des actions. L’objectif est de conscientiser toutes les informations qu’en tant que lectrice experte je retiens et infère sans même m’en apercevoir. Lors des temps de travail collectif, je suis beaucoup plus assurée pour « cadrer les projections hors texte 50». Je peux aussi plus facilement guider les faibles compreneurs vers la réponse plutôt que de recourir aux élèves très performants. Quand un élève mentionne une preuve à son propos, je peux demander aux autres de retrouver les indices complémentaires et sais si nous avons été exhaustifs. En APC, un élève prétend que les caramels ont tué Minou-bonbon : la connaissance du texte me permet de réagir immédiatement à cette erreur majeure en encadrant le paragraphe dans lequel l’élève doit en trouver la preuve. La plongée dans le texte n’exclue pas la prise de distance pour s’interroger plus généralement sur l’acte d’écriture ou l’inscription dans un genre. En période 3, ma binôme avait préparé la séquence via de courts extraits permettant de définir les caractéristiques du roman policier. Après la lecture de Qui a

50 JOOLE Patrick, Lire des récits longs, p36

tué Minou-bonbon ? , les élèves ont pu faire le lien entre les protagonistes de l’histoire et les

personnages-types (le criminel, l’enquêteur, la victime,…). En période 4, une question sur la durée de l’histoire donne lieu à des échanges très intéressants permettant de distinguer le temps du récit, le temps de l’écriture, le temps de la lecture (doc 23).

Cela me permet également d’élaborer des supports collectifs qui font concrètement apparaître les stratégies mobilisées. Une affiche attire l’attention des élèves sur les risques d’erreurs dans l’identification du discours direct (doc 24). Pour formaliser l’analyse des sentiments des personnages, j’utilise un simple code de smiley. Il met en valeur le sens porté par les expressions relevées et leur importance dans la compréhension des motivations des personnages (doc 25). Les supports de correction engagent davantage les élèves à repérer les indices du discours direct puisque nous les entourons au fil de la lecture (doc 26).

La clarification des objectifs a conduit à diversifier les supports de travail pour les élèves et à recourir à plus d’écrit. Mes priorités identifiées, je suis à même de sélectionner les exercices pertinents dans les manuels. Il devient logique d’exclure un exercice tel que celui en annexes car il ne vise pas la compréhension (doc 27). Ces évolutions produisent des séances plus rythmées où l’alternance des configurations de travail maintient les élèves actifs.

Enfin, définir des objectifs plus détaillés que celui d’« avoir compris le texte » permet une véritable évaluation. Même si l’élève C décode plus rapidement que sa camarade B, il ne parvient pas à distinguer narration et discours direct ainsi qu’à identifier les personnages qui s’expriment (doc 28). J’observe aussi qu’un élève très performant pour repérer la chronologie du récit et le discours direct peine à répondre aux questions plus ouvertes sur les sentiments des personnages. La production écrite référencée en annexes fait apparaître l’attention plus fine portée par le second élève aux ressorts du discours de l’homme (doc 29).

Cette clarté cognitive, infusant toutes les dimensions de l’enseignement, est un premier instrument de différenciation. Parmi les 7 familles d’aides de Goigoux, figure la « compensation » : « donner à certains l’occasion d’apprendre ce que d’autres réalisent en dehors de l’école »51. Joole rappelle l’importance des compétences acquises par les élèves en dehors de la classe en matière de compréhension et de rapport à l’écrit52. Et met en garde : il faut éviter « les dérives élitistes » prenant comme uniques référents de l’enseignement des élèves dont les familles transmettent déjà une partie des attendus de l’école. L’introduction de Lectorino-Lectorinette rappelle par ailleurs que les nombreuses digressions occasionnées par

51

MARTIN Delphine, La différenciation dans une classe de CE1 : quels outils permettent la mise en place

efficace d'une différenciation pédagogique ?, p5

un travail uniquement oral sur les textes rendent très difficiles la « construction de la cohérence textuelle »53. Cette dispersion dessert surtout les élèves les plus faibles qui peinent à réaliser les deux opérations mentales simultanément (se faire un film cohérent et se pencher sur les détails). En période 3 et 4, la précision de mes fiches de préparation me permet de conduire plus franchement les séances vers les points de compréhension les plus essentiels.

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