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CHAPITRE I : DE LA NOTION ET DES ENJEUX DES INDUSTRIES CULTURELLES

2. Les enjeux des industries culturelles

2.1 Nouveaux enjeux de développement des pays africains La reconnaissance tardive des industries culturelles sur le continent africain ou dans les politiques nationales africaines démontre comment, de façon générale et depuis longtemps, la Culture y a été reléguée au second plan. Après le vent des Indépendances dans les années 1960, les pays africains se sont, certes, regroupés pour des chantiers communs, « au nom du rapprochement culturel », mais non pas en considérant la Culture en tant que secteur à même de sortir les pays contre la pauvreté que dans les discours. La reconnaissance récente des enjeux de la Culture ou des industries culturelles l’a surtout été au nom des liens entre Culture et Développement.

140 OUA-UNESCO, « Les industries culturelles pour le Développement de l’Afrique : le Plan d’action de

Dakar »,

65 2.1.1 Culture et Développement

2.1.1.1 Des penseurs africains en avaient donné le ton

Avant les débats internationaux sur le rôle de la Culture141 pour le développement, au nom de fondements idéologiques de l’expression, certains auteurs africains ont mis en exergue les liens entre « Culture et Développement ». Parmi ces auteurs, nous retiendrons tout particulièrement Léopold Sédar Senghor et Joseph Ki Zerbo, deux militants qui ont œuvré à la promotion du développement de l’Afrique. Le premier, Léopold Sédar Senghor, même s’il est reconnu dans ses fondements de l’Universalisme, a activement défendu la culture africaine. À travers sa poésie, il a exalté l’affirmation de la « culture noire » à travers le concept de Négritude. L’une de ses pensées « la culture, était au commencement et à la fin du développement »142 est devenue une citation populaire pour mettre en exergue le rôle de la Culture pour le Développement. Pour les tenants de cette pensée, aucun développement ne peut se faire ou être viable sans la culture et Léopold Sédar Senghor est considéré aujourd’hui comme un défenseur de la Culture pour le Développement. Le second, Joseph Ki Zerbo, est le père du « développement endogène »143. Il a beaucoup défendu dans sa vision l’éducation, la recherche-action, l’union et l’intégration. Il a œuvré pour le progrès de l’Afrique par la responsabilisation de ses hommes et femmes. Pour lui, « On ne développe pas, on se développe ». Le penseur et défenseur de l’autonomie africaine se démarque des conceptions internationales du développement, en misant sur les choix et les responsabilités de l’Afrique

141 Nous avons préféré, dans cette partie, ne pas nous limiter à la notion d’industries culturelles. Le choix de lier

la Culture au Développement permettra de situer les interactions entre la Culture dans sa conception plus large avec le concept de Développement. L’arrivée des industries culturelles en Afrique a été tardive, et même si celles-ci ont renforcé les liens du secteur culturel au développement, de par les nouvelles dynamiques de consommation des produits issus des technologies de l’information et de la communication, le lien entre Culture et Développement avait été revendiqué plus tôt.

142 Éthiopiques, un recueil de poèmes de Léopold Sédar Senghor paru en 1956, est considéré comme le document

dans lequel la citation est extraite. Ethiopiques est aussi considéré comme une revue culturelle créée par l’auteur lui-même en 1975. La citation en intégralité est : «La culture reste le problème essentiel de la Francophonie. J'ai

l'habitude de dire que, comme chef d'État, j'ai toujours pensé que l'Homme, c'est-à-dire la culture, était au commencement et à la fin du développement » La citation est reprise et publiée dans plusieurs documents comme Notre Librairie, n° 81, Oct. Nov 1985. Numéro spécial consacré à : « La littérature Sénégalaise » ou les Actes du

colloque « Léopold Sédar Senghor : la pensée et l’action politique », Paris, 26 juin 2006.

143 Kouma Youssouf, de l’Université de Bouaké en Côte d’Ivoire a écrit Essai sur l'histoire de la philosophie

africaine. Il attribue la paternité du « développement endogène » à Joseph Ki Zerbo et celle de « savoirs

endogènes » à Paulin J. Hountondji. Hountondji, philosophe et homme politique béninois, a eu plusieurs écrits dont Les Savoirs endogènes : pistes pour une recherche et La philosophie africaine. Joseph Ki Zerbo est historien et homme politique burkinabè. Considéré comme un des auteurs contemporains de l’Afrique, Joseph Ki Zerbo a été prolifique en écrits sur l’Afrique dont À quand l’Afrique?, Histoire de l’Afrique noire, Le Monde

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pour se développer. Plusieurs citations lui sont attribuées sur le sujet : « Se développer, c’est multiplier ses possibilités de choix libérateurs.» ; « Se développer, c’est être, être toujours plus, se reproduire et pas seulement produire. Participer par co-responsabilité ». L’auteur pense qu’il n’y a pas un développement modèle ou modèle de développement, c’est-à-dire de « développement clés en mains ». Pour lui, « Le développement endogène et les savoirs endogènes considérés comme un gisement culturel doivent prévaloir dans les stratégies de développement de l’Afrique et le salut ne peut que provenir de la refondation de centres d’excellence pour refonder « nos cultures » « sur des bases matérielles et logistiques solides dans le cadre d’une économie industrielle leur permettant de se reproduire.» 144 Pour ce penseur en même temps visionnaire, l’Homme et la Culture doivent être au centre du Développement à l’instar de ce que prônent inlassablement les critiques de l’homo œconomicus, tel qu’enfermé dans les conceptions des théoriciens de l’École de la modernisation145, dont Bertrand Cabedoche146 a rappelé tout récemment les enjeux pour les sciences de l’information et de la communication. Nous nous référons ici à une approche de Marie-Louis Ropivia, lorsqu’elle parle « Problématique culturelle du changement des mentalités »147.

Nous ne chercherons pas ici à définir le concept Développement dont les perceptions sont diverses d’un courant à un autre, certains auteurs, dont Missè Missè, estimant même qu’il était scientifiquement plus juste de parler de changement social et d’autres, comme en réfutant même l’appellation148. Nous voulons juste mettre en exergue les liens entre Culture et

144 Ces citations sont reprises par Davy Soma lors d’un entretien accordé au journal en ligne Burkina 24, in

https://burkina24.com/2017/03/11/on-ne-developpe-pas-on-se-developpe-12/ L’auteur pense que contrairement aux concepts internationaux du développement, pour le développement endogène, « Il faut un autre

développement, hors du carcan des modèles qui ne tiennent pas compte de nos capacités, et de nos ambitions de développement».

145 François Perroux, L’économie du XXe siècle, Paris, PUF, 1964 ; Daniel Cohen, Homo œconomicus, prophète (égaré) des temps nouveaux, Paris, Albin Michel, 2012 ; Jean-Marie Harribey, 2007, « Homo inhumanus, ou la

négation du Développement comme construit social », pp. 103-11, in Patrick Matagne (dir.), Le développement

durable en question, Paris L’Harmattan.

146 Bertrand Cabedoche, 2016, « "Communication internationale" et enjeux scientifiques : un état de la recherche

à la naissance des sciences de l’information - communication en France », Les Enjeux de l’information et de la

communication, n° 17/2, 2016, pp. 55-82, [en ligne] URL : http//lesenjeux.u-grenoble3.fr/2016.dossier/04-

Cabedoche.

147 Ropivia, Marie-Louis, "Problématique culturelle et développement en Afrique noire : esquisse d’un renouveau

théorique." Cahiers de géographie du Québec 39108, 1995.

148 Serge Latouche, « Les mirages de l’occidentalisation du monde. En finir, une fois pour toutes, avec le

développement », Le Monde diplomatique, mai 2011, pp. 6-7. URL : http://www.monde- diplomatique.fr/2001/05/LATOUCHE/15204.

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Développement, très tôt perçus par des penseurs africains. Il s’agit pour nous de montrer qu’avant les débats internationaux sur le concept de développement de la culture ou des industries culturelles, le ton avait déjà été donné.

2.1.1.2 Les enjeux : loin des clichés, mais des réalités vivantes

Il ne s’agit pas pour nous de lier Culture et Développement comme le font certains auteurs dans un sens trompeur, quelle que soit l’approche, psychique ou intellectuelle.149 Il ne s’agit

pas non plus de nous focaliser sur les obstacles du Développement, en reconnaissant ces liens entre Culture et Développement. Même si nous partageons la distinction établie par Marie- Louis Ropivia « entre l’état de sous-développement et celui de développement », décrite dans « Problématique culturelle et développement en Afrique noire : esquisse d’un renouveau théorique », nous ne partageons pas pour autant la résonance critique, à nos yeux non fondée, pour qualifier certains aspects culturels considérés comme des pesanteurs socio-culturelles, et qui renvoie implicitement à la thèse du retard de l’Ecole de la modernisation des années 60. Pour cet auteur, « la différence entre l'état de sous-développement et celui de développement d'une communauté réside dans le juste ou le mauvais usage par ses membres de son propre génie de la mise en valeur. »150 L’hypothèse peut être envisagée et elle l’a été, à partir de ce que Joseph Ki Zerbo rappelait de manière critique comme constitutif de la thèse dite du « barrage des mythes »151 ou de ce qu’analyse Serge Théophile Balima, renvoyant au bouleversement de l’ordre politique et économique à l’intérieur des États du continent, engendré par le phénomène de colonisation : celui-ci « a modifié la structure mentale du colonisateur à travers une logique interprétative du retard africain, décrit comme la résultante d’un désordre souvent inhumain »152. Cependant, penser que l’Afrique noire peine à

se développer parce que les activités culturelles et sociales qui y sont pratiquées engendrent des pertes de temps et rendent inefficaces plutôt que productifs, « d'où retards, absences quotidiennes et faible rendement dans les lieux de travail », c’est méconnaître la valeur sociale, culturelle et même économique de ces activités. Les raisons du sous-développement de l’Afrique noire sont à rechercher ailleurs, peut-être dans les relations de déséquilibre ou d’exploitation de ressources de ce continent. De ce fait, une telle perception de la Culture ne

149 Ropivia, Marie-Louis, "Problématique culturelle et développement en Afrique noire…, ibid. 150 Ropivia, Marie-Louis. « Problématique culturelle et développement en Afrique noire…, ibid., p.403. 151 Joseph Ki Zerbo, Histoire de l’Afrique noire, d’hier à demain, Paris, Hatier, 1972, introduction.

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valorise pas celle-ci, ne lui permet pas d’atteindre la productivité, le développement, ce que sa définition Ropivia même reconnaît comme « le produit d'un ensemble de performances nationales individuelles ou collectives résultant de l'augmentation de la productivité. »153 Marie-Louis Ropivia parle plutôt de la Culture comme « une culture du temps, de la productivité, de la haute performance et de la compétitivité. »154 L’organisation du temps pour une meilleure productivité est une bonne chose en soit. C’est la perception de cette organisation, comme au temps des clichés jetés paresseusement ou idéologiquement sur le continent, qui est discutable.155 Malgré les critiques contenues dans le rapport McBride de 1980 contre les stéréotypes en usage, notamment dans les médias, la naturalisation est encore fréquente de penser que les populations d’Afrique noire ne vivent que de loisirs, au lieu de s’occuper de leur développement. Les liens entre Culture et Développement que nous voulons prouver ne renvoient évidemment pas à une telle perception. Mais comme les premiers penseurs africains l’ont relevé, nous voulons que l’on prenne pleinement en compte que dans la Culture, se glissent des enjeux fondamentaux pour le développement des pays. « Ne parlez pas de culture » comme le disait le journaliste Hegel Goutier, ne veut pas dire que la Culture ne recèle pas d’enjeux. L’auteur pense plutôt qu’il faut valoriser la Culture par des connotations qui frappent, qui la lient à l’économie. Il pense qu’il faut utiliser des mots tels que industries créatives ou industries culturelles, comme l’ont fait auparavant des pays développés, pour voir les produits de la créativité positionnés parmi les premiers qui rapportent à l’économie. Ce que réclame l’auteur, c’est que l’on ne parle pas de Culture sans support de l’industrie, car c’est seulement en passant par l’industrie que la Culture peut être rentable. Ainsi, le secteur culturel ou plus largement le secteur de la créativité n’est-il pas aux États-Unis l’un des secteurs les plus rentables d’un point de vue économique ? Dans ce pays, comme dans beaucoup d’autres pays développés, le développement technologique a permis la protection de la propriété intellectuelle, renvoyant les produits de la créativité à des enjeux énormes de développement. Si l’industrie états-unienne du cinéma peut fournir autant d’emplois que participer à la promotion de secteurs clés à l’instar de celui de la défense, c’est parce que la Culture a été valorisée autrement, par une image beaucoup plus positive, souvent

153 Ropivia, Marie-Louis, ibid. p.402. 154 Ropivia, Marie-Louis, ibid. p.403.

155 Voir la critique qu’émet en ce sens Bertrand Cabedoche, contre les catégorisations douteuses, pourtant

largement utilisées par les consultants internationaux, développées par le chercheur néerlandais Geert Hosfstede. Cf. Bertrand Cabedoche, 2016, « "Communication internationale" et enjeux scientifiques… ».

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même au détriment de l’utilisation du concept Culture par ceux qui créent de la valeur ajoutée. Comme le rédacteur en chef du magazine Le Courrier d’Haïti Hegel Goutier l’affirmait, « ne parlons pas uniquement de culture », car comme aux États Unis, « l’on se méfie du caractère compassé du mot culture dans les rapports sociaux et surtout de sa connotation répulsive dans le champ du business».156 Des expressions comme Industries du cinéma, des médias, du spectacle, du disque, de la mode devraient être d’usage courant dans le milieu des affaires, que ce soit en Afrique ou ailleurs, pour démontrer les enjeux économiques de ce secteur. Hegel Goutier n’est d’ailleurs pas le seul chercheur du groupe ACP de l’époque à avoir une telle pensée. Son collègue Riccardo Gambini157 lui emboite le pas, pour reconnaître la Culture comme moteur potentiel de développement. Par des référencements chiffrés, le journaliste souligne le potentiel économique de la Culture dans les pays ACP, à travers la création de revenus et d’emplois. « L’industrie du disque a rapporté 2,5 milliards de dollars à l’Amérique latine en 1997 »158. Le potentiel de richesse du secteur est aussi reconnu par les bailleurs de fonds, à l’instar de la Commission européenne, qui, à travers le FED, a mis en place 114 programmes culturels phares, d’une valeur de 84 millions d’euros, destinés aux pays ACP : « Conservation du Patrimoine » (24,2 millions), « Soutien aux Initiatives Culturelles Décentralisées » (PSICD, 16,2 millions), « Cinéma » (15,5 millions), « Projets régionaux de coordination » (12,2 millions), « Manifestations en Europe » (PAMCE, 6 millions), « Manifestations en pays ACP » (5,4 millions), « Projets nationaux divers » (4,5 millions). »159

À travers leur étude sur les Enjeux du projet de convention sur la diversité culturelle dans les pays du sud, Francisco d’Almeida et Marie Lise Alleman et all. avaient aussi souligné le poids économique des industries culturelles, aussi bien dans les pays développés comme dans les pays sous-développés.160

Le tableau suivant résume, de façon illustrative, le poids économique des industries culturelles dans certains pays.

156 Hegel Goutier, Ne me parlez pas de culture… op. cit. p.49.

157 Riccardo Gambini, Les Industries culturelles et les pays ACP : problèmes, opportunités et coopération,

Dossier, le Courrier ACP-UE n° 194 septembre-octobre 2002, consultable sur

http://ec.europa.eu/development/body/publications/courier/courier194/fr/fr_044.pdf , consulté le 24 février 2017.

158 Riccardo Gambini, Les Industries culturelles et les pays ACP… ibid. p.44. 159 Riccardo Gambini, ibid. p.45.

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Tableau 1 : Poids économique des industries culturelles dans les économies nationales

Pays Secteur Contribution au

PIB

Nombre d’emplois (rapporté à la population active de 2002)

États-Unis Industries basées sur le

droit d’auteur 5,2 %

4,7 millions (3,2 %) Union Européenne Industries culturelles Non communiqué 7,2 millions (4 %)

Canada Industries culturelles 2,4 % 670 000 (4 %)

Brésil Industries de la création 3 % 350 000 (0,4 %)

Afrique du Sud Industries de la création 1,75 % 100 000 (0,5 %)

Source : Francisco D’almeida…, 2004, Rapport d’étude des industries culturelles des pays du sud…

Les liens entre Culture et Développement sont donc réels, et pas seulement dans les pays développés, mais aussi dans les pays dits du sud, dans les pays africains en particulier. Nous convenons par conséquent avec Bouquillion, lorsqu’il parle des activités culturelles, que : « Dans les pays émergents, ou sous-développés, ces activités sont décrites comme la clef d’un développement, à moindre frais, sans investissements initiaux lourds. »161 Ce n’est pas seulement dans ces pays que les enjeux de la Culture pour le développement économique et social des pays sont reconnus. L’on peut regretter que la Culture ne soit pas prise en compte dans les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) ou dans les Objectifs pour le Développement durable (ODD). Pourtant, comme l’a confirmé la Directrice Générale de l’Unesco en 2009, « Il est désormais acquis que le développement est un processus holistique dont la culture est une composante majeure. »162 .

2.1.1.3 Les débats internationaux sur la Culture

La Culture, en général et les industries culturelles, en particulier, n’ont toujours pas été identifiés comme des secteurs de développement. Rappelons que la notion de Culture est ancienne et a connu une évolution au fil du temps. D’un point de vue sémantique, le terme est décomposé par Philippe Bénéton comme renvoyant à l’état d’une « terre cultivée », puis à l’action de « cultiver la terre », et, enfin, de façon métaphorique, à « la culture de l’esprit ».163

La prise de conscience réelle de la Culture comme facteur de développement, notamment de développement économique, a été favorisée par les débats internationaux, à partir des années

161 Philippe Bouquillion, Les industries et l’économie créative : un nouveau grand… op. cit. p.6.

162 Unesco, « Allocution prononcée par Mme Irina Bokova à l’occasion de son installation dans les fonctions de

directrice générale de l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture ; Conférence

générale 35e session, Paris, 18e séance plénière, 23 octobre 2009, Document d’information, p.5.

163 Philippe Bénéton, Histoire de mots : culture et civilisation, Paris, Presses de la Fondation Nationale des

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1980. Déjà en 1982, la Conférence de l’Unesco donne naissance à la Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles. À travers cette Déclaration, non seulement les liens entre Culture et Développement sont clairement perçus, mais aussi une définition de la Culture, qui semble largement utilisée, a été ensuite proposée. Selon l’Unesco, « La culture, dans son sens le plus large, est considérée comme l'ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l'être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances.»164 Cette période est marquée par le leadership de l’Unesco, qui entend faire accepter la Culture dans les stratégies de développement. Elle déclare en 1988 la Décennie mondiale du développement culturel, une invite à la prise en compte de la Culture dans les politiques nationales et internationales. Cette Déclaration a-t- elle été entendue par le monde entier ? Toujours est-il que plusieurs autres réflexions émanant de structures du système des Nations Unies ont permis d’adopter des documents importants pour que tout développement n’omette pas la Culture. En 1999, à travers une conférence intitulée La culture compte : financement, ressources et économie de la culture pour un développement durable, la Banque mondiale reconnait et partage désormais cette prise en considération. Organisée avec et sous l’égide de l’Unesco, ladite Conférence vient poser les bases d’une posture économique de la Culture. Elle reconnait que « la culture est un capital d’une importance primordiale pour un développement et une croissance économiques durables. »165 L’organisation symbolique d’une telle rencontre par une institution financière

internationale est un signe qui peut rassurer les réticents quant aux liens entre Culture et Développement. La reconnaissance de ces liens est renforcée par le rôle de l’Unesco dans les années 2000, marquée par une nouvelle conception du développement avec une prise en compte de la Culture. En 2001, la Déclaration universelle sur la diversité culturelle est