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Partie II : Etude de l’efficacité de l’ablation

Chapitre 5 : Influence du nombre de tirs, de la fluence, et de la durée d’impulsion

2. Expansion de la matière et régime de haute fluence

2.5 Energie cinétique de l’éjection

Une partie de l’énergie déposée par le laser est donc transférée sous forme d’énergie cinétique. A partir des imageries rapides, la vitesse d’expansion de la matière a été calculée. L’annexe 5.1 présente en détail les mesures. Deux modèles d’expansion sont utilisés pour décrire l’éjection. Les vitesses d’expansion ont été mesurées comme étant proche de 890 m s-1 pour la fluence F = 4 J cm-2 et 630 m s-1 pour la fluence F = 2 J cm-2.

Il est difficile de calculer précisément cette énergie cinétique

E

c, car on ne connaît

plume. L’hypothèse majorante est donc de supposer que la matière éjectée est intégralement comprise dans cette plume. L’énergie cinétique pour la fluence F = 4 J cm-2

est alors

E

c = 1,4 mJ. Pour la fluence de 2 J cm-2, l’énergie cinétique est

E

c = 1,1 mJ. On

rappelle que l’énergie d’une impulsion est de 6,5 mJ.

3. Discussion sur les mécanismes d’ablation. Modèles décrivant l’ablation et

prévision de la profondeur ablatée

La dégradation et l’éjection d’un matériau à la suite d’une élévation rapide de température (quelques nanosecondes), sont des phénomènes physico-chimiques complexes, et il semble a priori très difficile de pouvoir modéliser cette interaction. Pourtant, une estimation de la profondeur ablatée par tir, en fonction des paramètres du laser et du matériau, est une donnée intéressante à appréhender, car elle permettrait prédire l’efficacité de l’ablation d’un matériau.

Nous avons souligné auparavant que le milieu étudié était composé d’un ensemble de différents éléments physico-chimiques. Il existe, pour simplifier, trois catégories d’éléments dans la peinture : le polymère, les charges et les pigments. Ces trois éléments ne vont pas réagir de la même façon face à l’absorption et au chauffage rapide du milieu.

L’influence des pigments sur l’absorption et la diffusion du faisceau laser dans le milieu a été mise en évidence au chapitre précédent. Il est ainsi probable que l’absorption se fasse localement sur certains pigments. Cette notion d’absorption localisée sera discutée dans cette partie, et nous essayerons de mettre en évidence son influence. Les charges n’ont a priori, et par définition, aucune influence significative sur les propriétés optiques de la peinture.

Ainsi, si on considère l’ablation du matériau sous la forme d’une évaporation complète, l’évaporation des pigments et des charges se fait à des températures avoisinant les 2000 - 3000 °C. Le polymère, par contre, va se dégrader à des températures plus faibles, mesurées par pyrolyse aux alentours de 420 °C.

La teneur en particules (charges et pigments), plus importante au fond des cratères qu’à la surface, laisse ainsi supposer que ces éléments ne sont pas évaporés lors de l’interaction. On peut alors supposer que c’est le polymère qui va changer de phase, et éjecter mécaniquement les charges et les pigments.

De plus, les études paramétriques portant sur la durée de l’impulsion et la fluence ont montré des comportements singuliers. Les photographies et les imageries MEB ont dévoilé la différence de topographie des cratères selon les régimes d’interaction : dans le cas des impulsions courtes, des micro-cratères sont visibles, qui sont moins prononcés pour les impulsions longues. Les différences de fluence seuil d’ablation, de profondeur ablatée maximale et de pente décrivant l’évolution de la profondeur ablatée avec la fluence, entre les

deux durées d’impulsion, ne permettent pas de décrire l’interaction sous la forme d’un simple régime de confinement thermique.

Ces différents aspects démontrent que le régime d’interaction est relativement complexe. Nous allons tenter dans cette partie d’exposer différents points de vue afin de quantifier l’efficacité de l’ablation.

3.1 Ordre de grandeur de la profondeur ablatée par tir

Une estimation de la profondeur des cratères obtenus par tir est donnée par le maximum entre la longueur de diffusion thermique et la profondeur d’absorption [1]. La diffusion thermique pendant la durée de l’impulsion étant plus faible que la profondeur d’absorption, c’est ce dernier paramètre qui permettra d’estimer les efficacités. Ainsi, on relève, sur le tableau suivant (Tableau 2), les paramètres optiques des peintures : la profondeur d’absorption effective 1 /

α

, en supposant une absorption qui suit une loi de Beer - Lambert, et la position du maximum du dépôt d’énergie (cf. tableau 7, chapitre 4), qui a été calculée avec le modèle de diffusion multiple. Ces données sont comparées avec les mesures des profondeurs ablatées par tir caractéristiques, qui ont été obtenues sur les différentes peintures, avec une durée d’impulsion τL = 5 ns (mesurées pour F = 5 J cm-2).

Tableau 2 : Comparaison entre les propriétés optiques et les profondeurs ablatées caractéristiques pour 3

peintures (τL = 5 ns)

Peintures Position du maximum du

dépôt d’énergie (µm) 1/α (µm) Profondeur ablatée caractéristique (µm) - τL= 5 ns Grise Jaune Verte 4,1 1,8 1,2 20 13 10 3,5 0,60 0,65

Cette première donnée permet d’estimer l’ordre de grandeur de la profondeur ablatée par tir que l’on peut obtenir. On conserve un ordre logique entre les propriétés optiques des peintures et les profondeurs ablatées : les peintures vertes et jaunes, qui sont ablatées moins efficacement, possèdent une profondeur d’absorption plus faible que la peinture grise, qui est ablatée plus efficacement.

Certains auteurs ont tenté de faire correspondre ces paramètres optiques avec l’efficacité d’ablation du milieu. Récemment, Huber et al [9] ont mesuré les propriétés optiques de polytetrafluoroethylene agglomérées (milieu absorbant et diffusant), et tenté de faire correspondre ces données avec la profondeur ablatée par tir. Dans leur étude, les profondeurs d’absorption étaient un ordre de grandeur plus important que le maximum de profondeur ablatée par tir. La température à la surface, obtenue avec ces données optiques, était ainsi près de 10 fois plus faible que la température nécessaire pour obtenir une dégradation du polymère. Les auteurs expliquent cette différence par la possibilité d’inhomogénéité dans le milieu, créant des points chauds qui permettraient de créer des tensions localisées. Les effets de focalisation induits par l’aspect granuleux sont aussi

évoqués. On retrouve dans notre étude un comportement similaire : la profondeur d’absorption 1 /

α

est beaucoup plus importante que la profondeur ablatée caractéristique par tir. Par contre, on peut observer que la position du maximum de dépôt d’énergie est relativement proche de la profondeur ablatée caractéristique (pour

τ

L = 5 ns).