Source : Illustration personnelle, 16/05/2019
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HYPOTHÈSE 2 : Réduire les dépenses
Immobiliser un terrain représente un coût certain pour le propriétaire, d’autant plus sur un site dont la reconversion se fera sur de nombreuses années.
Encourager un projet culturel par le biais d’une convention d’occupation précaire permet au propriétaire du site de réduire conséquemment les frais de gardiennage dans l’attente que le futur projet d’aménagement se construise. Ce sont des frais relatifs à l’entretien, à la surveillance et à la sécurisation du site. Ainsi, le propriétaire évite les dépenses liées aux risques de dégradation du site par le fait du temps ou du squat.
Dans une optique à long terme, celle de la mise en place d’une opération foncière de l’ampleur de la ZAC Pirmil-Les Isles, ce sont des coûts qui ne se répercuteront pas sur les finances du futur aménagement. Pour le propriétaire et les aménageurs, l’occupation pour cinq ans du site des anciens abattoirs est une alternative avantageuse pour rentabiliser l’attente de sa reconversion.
« C’est une opération neutre qui nous permet de maintenir les
friches industrielles dans un état correct et d’éviter les squats»
1Alors que certaines conventions d’occupation précaire induisent le paiement d’une redevance de l’occupant envers le propriétaire, à Transfert nous sommes dans le cas d’une
« location à titre gratuit »2puisque le projet concourt à la
satisfaction d’un intérêt général.
1. LE BARS Lénaïc responsable communication et concertation à la Samoa, dans l’article de presse écrit par VAN EECKHOUT Laetitia, Quand les friches se transforment en laboratoires de la ville, Le Monde, 09/06/2017
La Samoa est la Société d’Aménagement de la Métropole Ouest Atlantique. Elle conduit deux grandes missions : le pilotage du projet urbain de l’Île de Nantes et l’animation de la Creative Factory. 2. REVERDITO NICOLAS, mail du 17/05/2019 à 11h17
HYPOTHÈSE 3 : S’inscrire dans la politique de Nantes : La culture comme levier d’attractivité
« Qui finance Transfert ? C’est la culture, pas le développement urbain.
Donc c’est une proposition culturelle qui a été faite. C’est toujours la
métropole mais c’est une proposition culturelle artistique qui a été faite
à la métro. »
1Le projet s’inscrit dans la volonté de la métropole de soutenir la culture locale et les initiatives artistiques émergentes. La métropole voit à travers ces démarches culturelles un moyen de favoriser le développement d’une dynamique culturelle en cohésion avec son territoire. Ce processus est issu d’une logique politique ayant pour point d’orgue d’apporter un soutien aux projets culturels locaux leur apparaissant comme d’intérêt général.
« Dans les années 2000, les élus, conscients du potentiel économique
de la culture, ont cherché des moyens pour accompagner et soutenir ce
foisonnement créatif. Progressivement, les projets artistiques éphémères
soutenus ont évolué – autour d’une volonté de fabrique de lien social – et
se sont inscrits dans des temporalités plus longues. »
2Le temps du projet, le terrain d’expression culturelle propose de nouveaux usages faisant de lui un attracteur urbain. Dessinant un nouveau dynamisme à ces territoires vides d’activité, ces projets les transforment en lieux d’animation attirant des personnes à plusieurs échelles : celle du quartier, de la métropole, ou venant d’autres villes pour expérimenter cet événement urbain inédit.
1. TROUILLAUD Matthias, extrait d’entretien du 11/04/2019
2. GANGLOFF Emmanuelle, Quand la scénographie devient urbaine : Nantes comme observatoire des fonctions du scénographe dans la fabrique de la ville, 2018, p. 213
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L’inscription territoriale et le jeu des acteurs dans les événements culturels et festifs : des villes, des festivals, des pouvoirs est un travail de recherche collectif réalisé entre 1999 et 2002 sur six villes françaises : Nantes, Lorient, Saint- Malo, Rennes, Aurillac et Angoulême. Dans toutes ces villes a été remarqué qu’un lien fort existait entre les événements festifs culturels et le pouvoir politique. Dans ces exemples précis, il s’est avéré que les soutiens politiques tenait autant de la « nécessité de diversifier des économies locales fragilisées que d’innover en termes d’offre culturelle et événementielle »1.
Rarement initiés par les pouvoirs publics, les événements culturels temporaires contribuent néanmoins au (re) positionnement ou à l’émergence des lieux, et sont utilisés par les acteurs locaux en tant que marqueurs de territoires et outils d’aménagement. Dans cet ouvrage, les auteurs s’intéressent au phénomène de concurrence entre villes s’accélérant depuis le 20ème siècle. Cette concurrence est
motivée par une quête de différenciation. Elle se formalise à travers des événements marquant spatialement le territoire, comme des festivals, ou autres événements culturels insufflant un caractère singulier à ces villes. La valorisation de ces initiatives entraîne une plus-value en termes de notoriété.
« Il ne s’agit plus simplement de relayer le propos artistique,
mais de l’instrumentaliser pour servir un discours. »
2Servant de démultiplicateur d’attractivité, Transfert est aussi un catalyseur créatif autour des questionnements sur la participation citoyenne dans la fabrique de la ville.
1. GRAVARI-BARBAS Maria, JACQUOT Sébastien, L’événement, outil de légitimation de projets urbains : l’instrumentalisation des espaces et des temporalités événementiels à Lille et Gênes, Géocarrefour Vol. 82, n°3, 01/07/2007, p. 1
2. GANGLOFF Emmanuelle, Quand la scénographie devient urbaine: Nantes comme observatoire des fonctions du scénographe dans la fabrique de la ville, 2018, p. 286
« D’abord animateur - élément perturbateur en quelque
sorte - de l’espace public, l’artiste devient un des acteurs
de la fabrique urbaine. Il participe à l’élaboration du
projet urbain très en amont de sa réalisation, à son
animation au présent ou encore après la livraison pour
amorcer de nouveaux usages. Son action est légitimée
par les politiques, qui y voient un moyen d’impliquer
la population. »
33. GANGLOFF Emmanuelle, Quand la scénographie devient urbaine : Nantes comme observatoire des fonctions du scénographe dans la fabrique de la ville, 2018, p. 435
Source : Illustration personnelle, 17/05/2019
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HYPOTHÈSE 4 : Faire le lien entre la vie antérieure du site et son aménagement futur
Au-delà de créer une animation dans ce tissu urbain délaissé, il s’agit aussi de réconcilier la ville avec ce lieu laissé de côté durant des années. Le site est marqué par un dur passé, celui des abattoirs de la ville, et par les souvenirs qu’ils invoquent.
« Ne pas se laisser abattre par l’histoire des abattoirs, oublier avec
mélancolie les odeurs qui se propageaient sur les quartiers avoisinants
quand l’odeur sucrée de LU avait elle aussi quitté le centre-ville, faire que
la destinée de ce terrain déconstruit puisse jouer avec les mutations de la
ville. »
1L’un des intérêts collatéraux d’encourager l’occupation d’un site en voie de transformation est aussi de permettre une appréhension des temps de la vie urbaine en tissant un lien entre passé, présent et futur. Transfert permet la transition entre les différentes vies du site. Dans le chapitre A la recherche
de centralités spécifiques du livre Faire battre le cœur des villes
dirigé par Frédéric Lenne, Fabienne Bulle parle de la relation qu’entretient l’humain avec son environnement.
On peut en venir à penser que l’occupation du terrain avant l’aménagement de la ZAC est une alternative visant à une transformation progressive qui vient « aider à ce que les lieux ne soient pas vidés de leur sens »2. Le projet culturel permet de
« cautériser les blessures du tissu urbain »3. Transfert contribue
à faire évoluer l’image du lieu et met de la vie dans le quartier avant même que les habitants n’arrivent.
1. BEILLEVAIRE CARRON Marie-Pierre, Dans le sillon de Transfert, 2018, p. 2
2. BULLE Fabienne, sous la direction de LENNE Frédéric, Faire battre le coeur des villes, 2018, p. 48
3. JEANGIRAD Romain; THURIOT Fabrice, directeur d’études, La Friche artistique de Reims ou un laboratoire culturel au service du développement territorial, Université de Reims Champagne-Ardenne, 2011, p. 62
HYPOTHÈSE 5 : Pour une mise en récit vectrice d’une nouvelle identité de quartier
La présence artistique éphémère est utilisée par Nantes Métropole afin d’insuffler de nouveaux usages à un espace délaissé. Cette démarche témoigne d’une volonté de s’affranchir de ce qu’étaient les abattoirs de Rezé et des lourds souvenirs qui en découlent.