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CHAPITRE 1 : Généralités

1.3 Les aérosols désertiques

1.3.2 Emission

Les aérosols désertiques sont produits dans les zones arides et semi arides, localisées de part et d’autre de l’équateur dans la ceinture d’anticyclones subtropicaux. Les processus d’émissions sont essentiellement contrôlées par les paramètres météorologiques (Brooks et Legrand, 2000 ; Prospero, 1999) et les caractéristiques de la surface (Marticorena et Bergametti, 1996). Des analyses récentes et détaillées ont montré que les lacs ou les rivières asséchés sont des zones dont le potentiel d’émission de poussières est très élevé (Israelevich et al., 2002 ; Prospero et al., 2002 ; Tegen et al., 2002 ; Zender et al., 2003). Selon des estimations réalisées à l’échelle globale (d’Almeida, 1986 ; Tegen et Fung, 1994 ; Duce, 1995 ; Mahowald et al., 1999 ; Tegen et al., 2004), la quantité d’aérosols désertiques émis dans l’atmosphère serait comprise entre 1000 et 3000 Mt.an-1. Il existe une très grande variabilité spatiale et temporelle des émissions d’aérosols désertiques, celle-ci dépend principalement de la vitesse du vent et des états de surface des sols exposés. Ces émissions sont, de plus, un phénomène à seuil (elles se produisent seulement quand la vitesse du vent dépasse une certaine valeur) et, donc complexes à représenter. Tout ceci conduit à ce que les émissions d’aérosols désertiques présentent souvent un cycle saisonnier et des variations inter-annuelles très marquées.

Les méthodes d’identification des sources sahariennes d’aérosol sont nombreuses (observations des poussières en surface, télédétection, rétro-trajectoires, utilisation de traceurs minéraux,..) (Caquineau et al., 2002). Basé sur différentes études antérieures, Goudie et Middleton, 2001, font une synthèse localisant les différentes sources d’émission en Afrique

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du Nord (Figure 1.18). Sans regarder l’intensité et la fréquence, cette synthèse montre que tout le Sahara est une zone source d’émission à l’exception des régions montagneuses.

Fig. 1.18 : Synthèse d’études localisant les sources d’émissions d’aérosols désertiques, (a)

d’après Kalu (1979), (b) d’après d’Almeida (1986), (c) d’après Dubief (1953), (d) d’après Middleton (1986), (e) d’après Brooks et Legrand (2000), (f) carte composite de (a)-(e,) (Middleton et Goudie, 2001).

De nos jours, des progrès ont été faits pour identifier et classifier les zones sources selon l’intensité et la fréquence en utilisant des mesures par radiance infrarouge, comme celles utilisées par METEOSAT ou la détection de l’absorption-UV des aérosols dans l’atmosphère à partir de longueurs d’ondes variant entre 340 et 380 nm, par le spectromètre TOMS (Total

Amélioration de la prise en compte des aérosols terrigènes dans les modèles atmosphériques à moyenne échelle 27 Ozone Mapping Spectrometer) (Torres et al., 1998). Ces méthodes ont permis de mettre en évidence la dépression de Bodélé, entre le lac Tchad et le massif du Tibesti, comme étant la source la plus importante au monde de poussières minérales (AAI > 30 (Absobing Aerosol Index), Goudie et Middleton, 2001). L’importance de la région de Bodélé avait déjà été montrée par Kalu (1979) et Hermann et al., (1999). Cette région correspond à une ancienne zone de lacs alimentée par les cours d’eau du Tibesti. Aujourd’hui asséchée, la région du Bodélé possède de grande quantité de sédiments qui peuvent être facilement mis en suspension (voir thèse Bou Karam 2008). En conséquence, elle a été alimentée continûment d’alluvions par les cours d’eau du massif du Tibesti (Goudie et Middleton, 2001). Ce qui fait que la quantité de fines particules dans cette région est plus importante. En plus, cette région est fréquemment exposée au vent d’Harmattan qui s’amplifie lors de son passage entre le mont Tibesti et l’Ennedi. En plus de la région de Bodélé (Erg de Bilma) (A), Brooks et Legrand, (2000) ont localisé trois autres zones sources en Afrique du nord à partir de l’Infrared Difference Dust Index (IDDI) issu de l’imageur infrarouge de METEOSAT (Legrand et al., 2001) : (B) Ergs Iguidi et Chech qui se situent au nord de la Mauritanie et du Mali et au sud de l’Algérie, (C) dans une zone située dans le nord du Soudan et le sud de l’Egypte et (D) dans le nord du Niger et le sud de la Libye (Figure 1.19). Basé sur les Aérosols Index de TOMS, Engelstaedter et al., (2006) retrace la carte des zones d’émissions de poussières en quatre zone qui est en accord avec celle donnée par Brooks et Legrand, (2000) (Figure 1.20). Récemment, Schepanski et al., (2007) ont rajouté la zone source couvrant l’ouest du Niger, le nord du Mali et le sud de l’Algérie, qui sont potentiellement plus actives en été (Figure 1.21).

Fig. 1.19 : Moyenne annuelle de l’IDDI de METEOSAT-IR sur la période 1984-1993

indiquant la localisation des principales zones sources d’aérosols désertiques en Afrique du Nord (Brooks et Legrand, 2000)

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Fig. 1.20 : Moyenne annuelle sur la période 1980-1992 de l’AI de TOMS (x10) illustrant les

principales zones sources de l’Afrique du Nord : (A) Bodélé ; (B) Afrique de l’Ouest ; (C) désert Nubien et (D) désert Libyen d’après Engelstaedter et al., (2006).

Fig. 1.21 : La fréquence mensuelle d’activation des zones sources d’aérosols en Afrique de

Amélioration de la prise en compte des aérosols terrigènes dans les modèles atmosphériques à moyenne échelle 29 Les émissions de poussières sont variables à toutes les échelles de temps. Cette variabilité est liée autant à la diversité du couvert végétal et de l’humidité des sols qu’aux changements des paramètres climatiques comme la vitesse du vent et les précipitations (Mahowald et al., 2002; Tegen et al., 2002; Werner et al., 2002; Luo et al., 2003). Ainsi les travaux de N’Tchayi et al.(1994) ont montré que lorsque le taux de précipitations diminue, le nombre d’événements de brumes sèches augmente (Figure 1.22). L’humidité du sol, conséquence directe des pluies, accentue la cohésion des particules et augmente les seuils d’érosion (Fécan et al., 1999). De même, Leenders et al., (2007) observent une population différente d’aérosols désertiques, en concentration et en diamètre, en fonction du type de végétation à proximité de la zone source. La végétation, par un effet de couverture de la surface, absorbe l’énergie éolienne, modifie la rugosité de surface et augmente également les seuils d’érosion.

Fig. 1.22: Nombre de jours de brumes sèches et précipitations annuelles (mm) mesurées à la

station météorologique de Gao, Mali, de 1952 à 1984, d’après N’Tchayi et al., (1994).

1.3.3 Processus météorologiques responsables du soulèvement des