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CHAPITRE 1 : Généralités

1.2 Les aérosols atmosphériques

Les aérosols atmosphériques sont des particules en suspension dans l’air. Ils sont constitués de substances solides et/ou liquides, présentant une vitesse de chute faible. Minérales ou organiques, grosses ou fines, les particules en suspension constituent un ensemble extrêmement hétérogène de polluants dont la taille varie de quelques dixièmes de nanomètres à une centaine de micromètres (Figure 1.16).

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Fig. 1.16: Processus de formation et distribution en taille des différents types d’aérosols,

d’après Whitby (1978).

Les particules en suspension interviennent dans le cycle de l’eau, en particulier lors de la formation des nuages, des brouillards et des précipitations. Ces polluants peuvent influencer le climat en absorbant ou en diffusant le rayonnement solaire.

1.2.1 Classification

La classification des aérosols atmosphériques est basée sur certains critères tels que leur taille, leur temps de résidence dans l'atmosphère, leur processus de formation et leur source de production.

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Selon l'ordre de grandeur du rayon r de la particule (supposée sphérique), on distingue trois classes (Junge, 1958 ; Whitby, 1976): les particules d'Aitken: (0,001 < r < 0,1 μm), les particules fines (mode d’accumulation) : (0,1 < r < 1 μm) et les grosses particules (mode grossier): (1 < r < 100 μm). Les particules les plus petites, d'environ 10-3 μm de rayon proviennent de la nucléation homogène de gaz dont la tension de vapeur saturante est très faible, comme l'acide sulfurique, sont généralement chargés et jouent un rôle important en électricité et en chimie atmosphérique. Les particules issues du mode d'accumulation constituent l'essentiel des noyaux de condensation dans le processus de formation des nuages et des brouillards. Les aérosols atmosphériques sub-microniques (modes Aitken et accumulation) représentent l'essentiel du nombre des particules atmosphériques (Junge, 1958). Par contre, les particules supermicroniques du mode grossier, moins nombreuses du fait d'une vitesse de sédimentation plus élevée, représentent l'essentiel de la masse des aérosols atmosphériques et sont observés essentiellement près des sources. Dans l’atmosphère, on distingue aussi les aérosols stratosphériques et les aérosols troposphériques. Les aérosols stratosphériques sont des particules de petites dimensions localisés entre 12 et 30 km d'altitude. Ils sont produits principalement par le processus de conversion gaz-particule et par les injections issues des grandes éruptions volcaniques. Leur concentration maximale se situe vers l'altitude de 18 - 20 km, dans une région appelée couche d'aérosol de Junge. Ils présentent une distribution zonale presque uniforme et leur durée de vie est de quelques mois à quelques années.

Les aérosols troposphériques sont des aérosols de courte durée de vie, concentrés surtout dans la partie basse de la troposphère. Leur concentration et leur composition physico-chimique présente une grande variabilité temporelle et spatiale. Parmi ces aérosols, les aérosols minéraux (ou poussière désertique) soulevés par les vents dans les régions arides jouent un rôle très important à l'échelle régionale. Ils forment des couches de grande épaisseur optique (voir la définition dans la section (1.4.4) qui restent plusieurs jours dans l'atmosphère, et dont l’impact radiatif est donc élevé.

Selon leurs processus de formation, on distingue deux catégories : les aérosols primaires et les aérosols secondaires. Les aérosols primaires sont émis directement sous forme de particules. Leur taille dépend largement de leur mode de production. Les aérosols secondaires, généralement submicroniques (taille inférieure à 1μm), sont issus de la transformation en particules de substances émises dans l’atmosphère sous forme gazeuse, par exemple par conversion gaz-particule.

En fonction de leur origine, les aérosols atmosphériques proviennent de sources naturelles ou anthropogéniques (Seinfeld et Pandis, 1998). Les aérosols naturels, dont l’essentiel est

Amélioration de la prise en compte des aérosols terrigènes dans les modèles atmosphériques à moyenne échelle 21 composé de particules d'origines minérale et marine (sels marins, organiques marins), représentent la fraction majoritaire de la masse totale d’aérosol émis (1500 Mt.an-1 d’aérosol désertique et 1300 Mt.an-1 d’aérosol marin, pour un flux total de 3450 Mt.an-1, Andreae, 1995). Ces particules sont les produits, pour une grande part, de l'action mécanique exercée par le vent sur les surfaces terrestres marines et continentales. Les caractéristiques physico- chimiques de ces aérosols sont très proche de celle du matériau d'origine. Les aérosols minéraux sont constitués d'argiles, quartz, feldspath, calcite et parfois de sels en provenance de lacs asséchés, et présentent des concentrations élevées en silicium, aluminium, calcium et fer. Les aérosols marins, formés par l'évaporation des gouttelettes d'eau de mer près de la surface océanique, ont une composition voisine de celle du mélange d'éléments dissous dans l’eau de mer (sodium, chlore, soufre et organiques issus du plancton). Notons aussi que dans les précurseurs des aérosols secondaires d'origine naturelle, on considère aussi aujourd'hui de plus en plus la transformation par voie aqueuse de composés gazeux biogéniques comme l'isoprène ou les terpènes.

Les aérosols anthropogéniques sont généralement concentrés autour des régions industrielles. Ils sont produits soit par combustion, soit par émission directe à l’état liquide ou solide, soit par l’intermédiaire des processus de conversion gaz – particule faisant intervenir des produits gazeux de combustion. Cette dernière catégorie est constituée de particules de taille submicronique (Whitby, 1978). Les évaluations récentes pour l'émission de ces aérosols vont environ de 100 Mt.an-1 (Andreae, 1995) à 200 Mt.an-1 (Wolf et Hidy, 1997). Ces chiffres ne tiennent pas compte des particules primaires d'aérosol produites par les industries et techniques telles que la fabrication du ciment, la métallurgie, les transports, les combustions industrielles et domestique (Tegen et Fung, 1995).

Les évaluations de la production annuelle d’aérosols, de leur durée de résidence dans l’atmosphère et de leur épaisseur optique (présentées dans le Tableau 1.1) sont indicatives. On peut cependant noter les valeurs relativement proches des épaisseurs optiques moyennes totales provenant des sources naturelles et des sources anthropogéniques, alors que les productions annuelles de ces deux catégories d’aérosols sont très différentes. Ainsi, les aérosols désertiques et marins, qui représentent l’essentiel de la production en masse, contribuent à l’épaisseur optique totale de façon équivalente aux sulfates anthropiques.

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Tableau 1.1: Les estimations récentes des émissions annuelles globales, du contenu

atmosphérique et de l’extinction optique des principaux aérosols (pendant les années 1990), d'après Andreae (1995) et actualisé par Ramanathan et al., (2001).

1.2.2 L’impact des aérosols sur le climat

Les aérosols atmosphériques affectent le climat de la planète de manière directe et indirecte. Leur effet radiatif direct se manifeste par des processus de diffusion et d’absorption des rayonnements solaire et tellurique. L’intensité de la diffusion et de l'absorption dépend des caractéristiques physiques et chimiques des aérosols et de la longueur d’onde du rayonnement. La diffusion est l’effet majeur pour le rayonnement solaire, en particulier dans le cas des aérosols liés à la pollution; elle joue un rôle moins important pour le rayonnement tellurique (c'est-à-dire le

Amélioration de la prise en compte des aérosols terrigènes dans les modèles atmosphériques à moyenne échelle 23 rayonnement infrarouge). La diffusion du rayonnement solaire par les aérosols vers l’espace induit une diminution du flux net d’énergie solaire au sommet de l’atmosphère, et donc un forçage radiatif négatif. Mais ce forçage est variable et peut même changer de signe en fonction des propriétés d’absorption de l’aérosol et de l’albédo de la surface. Le rayonnement tellurique est absorbé (et émis) par les diverses espèces d’aérosol, contribuant ainsi avec l’absorption du rayonnement solaire au réchauffement de l’atmosphère (effet de serre).

Le bilan énergétique global est sensible à la couverture nuageuse, en particulier des nuages marins bas (stratus) qui couvrent environ 25% de la planète. L'albédo d’un nuage est sensible aux changements de concentration du nombre de gouttelettes. Cette concentration dépend, d'une façon complexe, de la concentration en noyaux de condensation qui est fonction de la concentration en particules d’aérosol. Les aérosols affectent donc de manière indirecte le climat par leur effet sur les propriétés microphysiques des nuages. Les particules submicroniques solubles servent de noyaux de condensation nuageuse, permettant ainsi la formation des gouttelettes d’eau. Lorsqu’on augmente le nombre de noyaux de condensation, pour un contenu en eau liquide donnée, on provoque une augmentation du nombre de gouttelettes et une diminution de leur taille moyenne (Twomey, 1974). Le premier effet indirect qui en résulte est une augmentation de l’albédo du nuage. Il existe un deuxième effet indirect, dû au fait que cette diminution de taille des gouttelettes d’eau retarde ou supprime leur précipitation et augmente ainsi leur durée de vie (Albrecht, 1989) et l'épaisseur du nuage (Pincus et Baker, 1994). Aujourd'hui de nombreuses études montrent que les rétro-actions entre aérosol, eau nuageuse et thermodynamique atmosphérique sont souvent beaucoup plus complexes et peuvent être contradictoires avec les études précédentes (Sandu et al., 2007). Les particules de poussière sont d’efficaces noyaux glaçogènes (Chen et al., 1998 ; Pruppacher et Klett, 1997), affectant la formation et les propriétés des nuages de glace dans la partie haute de la troposphère. L’interaction entre un cirrus et les particules de carbone suie émises par les avions (ou les particules minérales insolubles lorsqu’elles sont disponibles aux hautes altitudes) a comme conséquence une augmentation de l’albédo du nuage (Jensen et Toon, 1997).

En conséquence, à travers un certain nombre de processus, les aérosols modifient le bilan radiatif de la planète. Ils provoquent en outre des réchauffements ou des refroidissements en fonction des propriétés de l'aérosol (nature, taille et caractère hygroscopique et glaçogène des particules), et de sa répartition verticale et géographique.