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I. Fibres singulières de systèmes Hamiltoniens intégrables 41

3.2. Interprétation géométrique des fibres

3.2.2. Ellipsoides complexes

d et les points de la variétéF

¯d. On notera plus simplement F la variété des drapeaux complets. Notons queF = U(n)/Tn, oùTn = U(1)× · · · ×U(1) est le tore maximal de U(n) formé des matrices unitaires diagonales.

Remarque 3.2.3. En particulier, d’après la proposition 3.1.1, les orbites coadjointes deH(n) sont difféomorphes à des variétés de drapeaux dansCn dont la signature est déterminée par la multiplicité des valeurs de

¯λ. Notamment les orbites géné-riques sont difféomorphe à la variété des drapeaux complets de Cn.

3.2.2. Ellipsoides complexes

Soit V un espace hermitien, c’est-à-dire un espace vectoriel complexe de dimen-sion finie muni d’un produit scalaire hermitien h· | ·i 1. Rappelons ici quelques définitions.

Définition 3.2.4. Si V1, V2 sont deux espaces hermitiens et α : V1V2 une application linéaire, alors

— on appelle adjoint de α l’unique application linéaire α :V2V1 vérifiant ∀v1V1,v2V2, hα(v1)|v2iV2 =hv1 |α(v2)iV1,

— on dit que α est unitaire si elle préserve les produit hermitiens :

v1, v10V1, hα(v1)|α(v10)iV2 =hv1 |v01iV1,

ou de manière équivalente, si αα= idV1.

— lorsque V1 =V2 =V, on dit que l’endomorphismeα esthermitien (ou auto-adjoint) si

v, v0V, hα(v)|v0i=hv |α(v0)i,

c’est-à-dire siα =α.

Ellipsoïde complexe

Un opérateur α :VV hermitien est toujours diagonalisable en base orthonor-mée, c’est-à-dire qu’il existe une base orthonormée (u1, . . . , uk) deV telle que pour

1On prend ici la convention qu’un produit hermitien est linéaire en la première variable et conjugue la seconde variable, c’est-à-dire que pour tousv1, v2V etλ, µC,hλv1|µv2i=

λµ¯hv1|v2i. 80

3.2. Interprétation géométrique des fibres

tout 1 ≤ ik, α(ui) = γiui. De plus, ses valeurs propres γ1, . . . , γk sont réelles. Ainsi, pour tout v =x1v1+· · ·+xkvk, on a

hα(v)|vi= 1 ⇐⇒ γ1|x1|2+· · ·+γk|xk|2 = 1.

Par analogie avec le cas euclidien (réel), on pose la définition suivante.

Définition 3.2.5. On appelleellipsoïde complexe (de dimensionk−1) dansV un sous-ensemble de la forme

Eα ={vV | hα(v)|vi= 1}

avec α : VV un opérateur hermitien défini positif (c’est-à-dire dont toutes les valeurs propres sont strictement positives, ou de manière équivalente, tel que hα(v)|vi>0 pour tout vV \ {0}).

Si (v1, . . . , vk) est une base de vecteurs propres de α et γ1, . . . , γk les valeurs propres associées, on dira que les droites vectoriellesCv1, . . . ,Cvk sont des axes de l’ellipsoïde Eα, et les valeurs 1/

γ1, . . . ,1/

γk sesrayons.

Lorsque V = Ck et A ∈ H(k) est une matrice hermitienne définie positive, on notera

EA ={xCk | hAx|xi= 1}

l’ellipsoïde complexe associé à l’opérateur hermitien dont la matrice dans la base canonique est A.

Donnons quelques propriétés élémentaires des ellipsoïdes complexes.

Proposition 3.2.6. Soient α, β deux opérateurs hermitiens définis positifs sur V, et φ :VW un opérateur unitaire. Alors :

(3.2.6.a) pour tout vV \ {0}, il existe t >0 tel que tvEα, (3.2.6.b) Eα =Eβ si et seulement si α=β,

(3.2.6.c) φ(Eα) = Eφαφ,

(3.2.6.d) lorsque V =W, φ préserve Eα si et seulement si φ commute avec α.

Démonstration. Soit vV \ {0}. Comme α est défini positif, t = 1/qhα(v)|vi est bien défini et on a

hα(tv)|tvi=t2hα(v)|vi= 1,

d’où la propriété (3.2.6.a). Si de plus Eα = Eβ, alors tv satisfait aussi hβ(tv) |

tvi= 1, d’où

3. Le système de Gelfand–Cetlin sur les orbites coadjointes de U(n)

Ainsi h(βα)(v) | vi = 0 pour tout vV. Or βα est encore hermitien, donc diagonalisable, mais la condition précédente implique que toutes ses valeurs propres sont nulles. On trouve donc βα = 0, d’où la propriété (3.2.6.b). La propriété (3.2.6.c) découle de la relation

hφαφ(φ(v))|φ(v)i=hφ(α(v))|φ(v)i=hα(v)|vi

satisfaite pour tout vV, utilisant que φ est unitaire. La propriété (3.2.6.d) est une conséquence de (3.2.6.b) et (3.2.6.c).

Intéressons-nous maintenant à l’intersection d’un ellipsoïde complexe de V et un sous-espace vectoriel de V.

Proposition 3.2.7. Soient Eα un ellipsoïde complexe dans V, et W1, W2 deux sous-espaces vectoriels de V. Alors :

(3.2.7.a) EαW1 est un ellipsoïde complexe dans W1 : il existe un opérateur hermitien β :W1W1 défini positif tel que

EαW1 =Eβ,

(3.2.7.b) en particulier, si V =Cn, W1 =Ck∩ {0}nk et A ∈ H(n) est définie positive, alors

EAW1 =EAk

Ak est la sous-matrice supérieure gauche de taille k de A, (3.2.7.c) EαW1 =EαW2 si et seulement si W1 =W2.

Démonstration. Commençons par démontrer (3.2.7.b). Pour cela, il suffit de re-marquer qu’en notanti:CkCn l’inclusion canonique, d’image Ck× {0}nk, on a pour tout xCk,

hAi(x)|i(x)iCn =hAkx|xiCk.

Ensuite, pour démontrer (3.2.7.a) on se ramène au cas précédent en choisissant une application unitaire φ : CnV telle que φ(Ck× {0}nk) = W. Soit A ∈ H(n) la matrice de φαφ dans la base canonique. D’après la propriété (3.2.6.c),

Eα = φ(EA). De même si on pose β : WW par β(x) = φ(Akφ(x)), on a

Eβ =φ(EAk). Ainsi,

EαW =φ(EA∩(Ck× {0}nk)) =φ(EAk) = Eβ.

Reste à montrer (3.2.7.c). Soit wW1. D’après (3.2.6.a), il existe t > 0 tel que

twEα. Si EαW1 =EαW2, alors tw, et donc w, appartiennent aussi à W2. AinsiW1W2, et par argument de symétrie, W1 =W2.

3.2. Interprétation géométrique des fibres

Drapeau d’ellipsoïdes

Les propriétés que l’on vient d’énoncer motivent les définitions suivantes.

Définition 3.2.8. On appelledrapeau d’ellipsoïdes dansCnun triplet (E, V, A) où :

V :V1 ⊂ · · · ⊂Vk est un drapeau (d’espaces vectoriels) dans Cn, — A∈ H(n) est une matrice hermitienne définie positive de taille n,

E :E1 ⊂ · · · ⊂Ekest la suite strictement croissante d’ellipsoïdes complexes définie par Ei =EAVi pour tout 1≤ik.

On appelle signature de (E, V, A) la signature du drapeau V, et on dit que (E, V, A) est complet lorsque V est complet.

Par la suite, on noteraE =EAV, ou même parfois plus simplement E, au lieu de (E, V, A).

Définition 3.2.9. Soit (E, V, A) un drapeau d’ellipsoïdes complet dans Cn. D’après la propriété (3.2.7.a), pour tout 1≤kn on aEk =Eαkαk :Vk

Vk est un opérateur hermitien défini positif. On dira que le drapeau d’ellipsoïdes

E est défini par la famille α = (α1, . . . , αn).

On appelle valeurs propres de (E, V, α) la famille (ordonnée)

Γ(E) ={Γi,j(E)|1≤ijn}

où pour tout 1 ≤ jn, Γ1,j(E) ≥ · · · ≥ Γj,j(E) sont les valeurs propres de

αj :VjVj.

Lien avec les fibres du système de Gelfand–Cetlin

En particulier, soit Vstd ledrapeau complet standard dans Cn, défini par ∀1≤kn, Vstdk =Ck× {0}nk.

Soit A ∈ H(n) définie positive, et ¯

λ son spectre. Considérons le drapeau d’ellip-soïdes EA =EAVstd . D’après (3.2.7.b), pour tout 1≤kn on a Ek

A =EAk

Ak est la sous-matrice supérieure gauche deA de taille k×k. Ainsi, Γ(EA) = Γ(EAVstd ) = {γi,j(A)|1≤ijn}=F

¯

λ(A)

γi,j sont les fonctions valeurs propres définies précédemment. On en déduit que les fibres du système de Gelfand–Cetlin Fλ :O(λ)→RN peuvent s’écrire

F1

¯

3. Le système de Gelfand–Cetlin sur les orbites coadjointes de U(n)

Fixons maintenant C ∈U(n) telle que A=p(C) = CD

¯

λC. Soit ϕC :CnCn

l’application unitaire définie parϕC(x) = Cx. D’après (3.2.6.c), ϕC envoie l’ellip-soïdeEA sur l’ellipsoïdeED

¯λ

. Plus précisément,ϕC envoie le drapeau d’ellipsoïdes

EA sur le drapeau d’ellipsoïdes ˆEC = ED

¯

λVC, où VC est le drapeau (d’espaces vectoriels) défini par

∀1≤kn, VCk =ϕC(Vstdk ).

On vérifie aisément que VC peut être défini par la base orthonormale formée des colonnes de C. Autrement dit, si on note q : U(n)→ F = U(n)/Tn la projection naturelle, on aVC =q(C). De plus, les drapeaux d’ellipsoïdesEA et ˆEC =ϕC(EA) ont évidemment mêmes valeurs propres. Ainsi, si on définit l’application

Γ ¯ λ : F −→ RN V 7−→ Γ(ED ¯ λV) alors on a Γ ¯ λ(VC) = Γ( ˆEC) = Γ(EA) = F

¯λ(A). On est alors tenté d’identifier la fibre F1 ¯ λ (c) avec la fibre Γ1 ¯ λ (c) ={V ∈ F |Γ(ED ¯ λV) = c},

via une identification plus générale entreH(n) et F induite par le procédé précé-dent : à une matrice A ∈ H(n) on associe le drapeau ϕC(Vstd ) =q(C), où C est une matrice unitaire telle que A = CD

¯λC. Toutefois, cette dernière correspon-dance n’est pas bien définie, comme illustré sur la figure 3.2 :

1. d’une part, si C1, C2 ∈U(n) sont deux diagonalisations d’une même matrice

A, c’est-à-dire siA=C1D

¯

λC1 =C2D

¯

λC2, alors les drapeauxq(C1) etq(C2) ne sont pas nécessairement égaux,

2. d’autre part, deux matrices diagonalisées A = C1D

¯

λC1 et A0 = C3D

¯λC3

différentes peuvent donner un même drapeauV =q(C1) = q(C3).

Plus précisément, cette obstruction peut être lue sur le diagramme donné en figure 3.3. Bien que ce diagramme soit commutatif, l’involution t : U(n)→ U(n) définie par t(C) = C ne préserve pas les fibres des fibrés principaux p : U(n) → O(

¯

λ) et q : U(n) → F, et ne peut donc pas induire une application bien définie ¯

t:O(

¯λ)→ F.

Toutefois, l’involutiont préserve les fibres des applicationsF

¯λpet Γ ¯ λq, et on aura l’identification F1 ¯ λ (c) =pt¯ λq)1(c)

(voir corollaire 3.3.21). Une première étape est donc de déterminer (Γ

¯

λq)1(c) pour toute valeurcRN vérifiant les inégalités du diagramme de Gelfand–Cetlin,

3.2. Interprétation géométrique des fibres

A=C1DC1 =C2DC2 V = [C1] = [C3]

A0=C3DC3 =C4DC4 V = [C2] = [C4]

Figure 3.2. : Obstruction à une correspondance naturelle entre les fibres

F1 ¯λ (c)⊂ H(n) et Γ1 ¯ λ (c)⊂ F. U(n) U(n) O(λ) F RN p t q Fλ Γλ

Figure 3.3. : Lien entre le système de Gelfand–Cetlin F

3. Le système de Gelfand–Cetlin sur les orbites coadjointes de U(n)

c’est l’objectif de la prochaine section.

3.3. Géométrie des drapeaux d’ellipsoïdes de valeurs