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3.1. Genèse et régulation de l’EEG

Le tracé électroencéphalographique (EEG) est produit par la diffusion en surface de courants générés par l’activation synaptique des dendrites des neurones pyramidaux du cortex cérébral, sous l’impulsion des messages venant du thalamus. L’activité simultanée de plusieurs milliers de neurones génère un signal d’EEG assez fort pour être perçu. L’amplitude du signal EEG dépend du degré de synchronisation de l’activité des neurones thalamocorticaux. Les neurones corticaux entretiennent des échanges réciproques avec le thalamus, grâce à la boucle thalamo-corticale : les stimuli provenant des différents organes sensoriels sont transmis au thalamus qui transmet ensuite cette information vers le cortex. À la réception de l’information, le cortex envoie une réponse excitatrice directement vers le thalamus de même que vers le noyau réticulaire du thalamus, lequel a la propriété d’inhiber les cellules thalamocorticales. Il y a donc une boucle courte et directe qui est excitatrice et une boucle plus longue, via le noyau réticulaire du thalamus, qui a comme priorité d’interrompre la rétroaction positive de la boucle courte (Stériade, 1993).

Figure 1. Genèse de l’EEG

Les neurones thalamocorticaux ont le pouvoir de basculer dans l’un de deux états physiologiquement stables : un état d’activité tonique lorsque les neurones sont dépolarisés (état de vigile), et un état oscillatoire intrinsèque, lorsqu’ils sont hyperpolarisés (en sommeil). L’état oscillatoire intrinsèque est la conséquence d’une stimulation des neurones GABAergiques du noyau réticulaire du thalamus. Les

cellules thalamocorticales sont alors hyperpolarisées, réalisant une déconnexion du cortex par rapport au monde extérieur. Cette déconnexion est maximale durant le sommeil lent profond (SLP), pendant lequel l’EEG observé présente la fréquence la plus basse et l’amplitude la plus élevée, par rapport aux autres stades de sommeil et à l’éveil. En sommeil paradoxal, les cellules thalamocorticales demeurent hyperpolarisées, mais la plus faible amplitude et la plus grande fréquence du tracé EEG est le résultat combiné d’une inhibition des afférences sérotoninergiques et noradrénergiques, normalement impliquées dans le traitement cortical diurne de l’information, et d’une libération d’acétylcholine.

Ainsi, à l’apparition du sommeil, l’oscillation intrinsèque devient plus lente, et l’activité sigma, soit la fréquence des fuseaux de sommeil, fait son apparition (12-14 Hz). Plus l’hyperpolarisation s’accentue, plus le sommeil devient profond, et l’on observe alors de l’activité dans la gamme delta (1 à 4Hz) et les oscillations lentes (< 1Hz).

Les états d’éveil et de SP sont tous deux similaires en terme de l’activation des cellules du cerveau. Ces deux états, bien qu’aux antipodes du cycle éveil-sommeil, sont deux états de vigilance dont l’activité est caractérisée par la présence de rythmes rapides et de basse amplitude. Par ailleurs, les mécanismes qui sous-tendent l’activation de ces deux états ne sont pas les mêmes.

L’activité EEG d’éveil est modulée principalement par les neurones sérotonergiques du noyau de raphé dorsal, les neurones noradrénergiques et histaminergiques du locus

coeruleus et les neurones cholinergiques du tronc cérébral. Cette activité assure le fonctionnement des processus attentionnel permettant, par exemple, de traiter les différents stimuli selon leur pertinence. Ces systèmes neurochimiques sont inhibés au cours du sommeil lent par les neurones gabargiques, le principal neurotransmetteur inhibiteur du cerveau. Ces neurones se situent principalement dans les noyaux préoptiques ventrolatéraux. En SP, la discrimination entre l’information pertinente et non pertinente ne se fait plus. La modulation de l’activité EEG est assurée par des neurones cholinergiques du tronc cérébral, activés seulement au cours du SP (SP- ON).

Tel que mentionné plus haut, le niveau de synchronie des neurones thalamocorticaux varie selon l’état d’éveil ou de sommeil. De plus, la neurochimie associée à l’apparition des différents stades de sommeil ou de l’éveil diffère. Ainsi, en procédant à l’analyse de l’activité EEG au cours des différents stades de sommeil, il est possible de mesurer le niveau de synchronie des neurones à plusieurs moments et sous différentes conditions. En effet, une augmentation de la synchronie se présente sous la forme d’un EEG dont l’activité est d’amplitude plus grande et de basse fréquence, tel que rencontré au cours du SL. Au contraire, une désynchronisation entraine une baisse de l’amplitude et la présence d’activité à haute fréquence à l’EEG, tel que rencontrée à l’éveil, mais aussi au cours du SP. De plus, une différence d’activité EEG au cours des différents stades de sommeil pourrait être un signe d’une neurochimie irrégulière.

L’analyse quantifiée de l’EEG permet de chiffrer l’activité corticale en estimant l’aire sous la courbe des ondes cérébrales enregistrées, présentée en microvolt carré (µV2). Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour analyser l’EEG quantifié, dont l’analyse spectrale, à l’aide de la transformation rapide de Fourier. Cette méthode nous permet de connaître le spectre de puissance du signal enregistré, qui est ensuite divisé en bandes de fréquences. Généralement, les bandes de fréquences suivantes sont utilisées : Delta (0,75 à 3,75 Hertz), Thêta (4 à 7,75 Hz), Alpha (8 à 12,75 Hz) et Bêta (13 à 30 Hz). De plus, les bandes de fréquences peuvent être traitées selon leur valeur absolue ou relative. La valeur absolue représente la capacité absolue du cerveau à générer du voltage pour une bande de fréquence donnée. Quant à la valeur relative, elle représente la proportion du spectre total qu’occupe chacune des bandes de fréquences, et elle s’exprime en pourcentage.